14 décembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-80.140

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:CR01590

Texte de la décision

N° P 22-80.140 F-D

N° 01590


RB5
14 DÉCEMBRE 2022


CASSATION


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 DÉCEMBRE 2022



M. [L] [Y] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Dijon, en date du 3 décembre 2020, qui a prononcé sur un aménagement de peine.

Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de Mme Guerrini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [L] [Y], et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 16 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Guerrini, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par arrêt du 11 janvier 2006, la cour d'appel de Dijon a condamné M. [L] [Y] à la peine de deux ans d'emprisonnement en répression de faits d'infractions à la législation sur les stupéfiants commis courant 2002 et 2003. Relativement à cette peine, M. [Y] a saisi le juge de l'application des peines d'une demande de libération conditionnelle parentale.

3. Par ailleurs, par jugement du 7 décembre 2012 rendu par défaut, le tribunal correctionnel a condamné M. [Y] à la peine de quatre ans d'emprisonnement, pour des faits d'arrestation, enlèvement, séquestration, et violences aggravées, et a décerné mandat d'arrêt. Cette décision a été signifiée à parquet le 8 juillet 2013, et un mandat d'arrêt européen a été délivré le 10 juillet 2019.

4. M. [Y] a formé opposition à cette décision le 17 novembre 2020.

5. Par jugement du 8 octobre 2020, le juge de l'application des peines de Dijon a déclaré la demande de libération conditionnelle parentale de M. [Y] recevable, et l'a admis au bénéfice de celle-ci, en écartant la prise en compte de la condamnation du 7 décembre 2012, considérant que cette dernière n'était pas définitive, M. [Y] disposant encore d'une voie de recours.

6. Le ministère public a relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a infirmé la décision du 8 octobre 2020 ayant fait droit à la demande de libération conditionnelle parentale de M. [Y], alors :

« 1°/ qu'en vertu de l'article 723-15 du Code de procédure pénale dans sa rédaction applicable à l'espèce, peuvent prétendre à une libération conditionnelle parentale les personnes condamnées à une peine de deux ans d'emprisonnement ou pour lesquelles la durée de la détention restant à subir est inférieure ou égale à deux ans ; que pour l'appréciation de cette condition, peuvent seules être prises en compte les peines présentant un caractère définitif ; qu'en se fondant, pour juger que Monsieur [Y] n'était pas éligible à une libération conditionnelle parentale « compte tenu du quantum de peine restant à exécuter ce jour », sur le fait que la peine de quatre ans d'emprisonnement prononcée par jugement du Tribunal correctionnel de Châlons-en-Champagne le 7 novembre 2012 n'était pas prescrite, motif inopérant s'agissant de la détermination du reliquat de peine pour l'appréciation de l'éligibilité à une libération conditionnelle, la Chambre de l'application des peines s'est déterminée par un motif inopérant en violation des articles 723-15, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

2°/ qu'en statuant ainsi, après avoir elle-même constaté que « la situation du condamné n'est pas définitive » – puisque le jugement du Tribunal correctionnel de Châlons en Champagne du 7 novembre 2012 ayant prononcé une peine de quatre ans d'emprisonnement était susceptible d'opposition et devait, de fait, après exercice de cette voie de recours, être mis à néant et Monsieur [Y] relaxé – la Chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, d'où il ressortait que la seule peine définitive prononcée à l'encontre de Monsieur [Y] était le peine de deux ans prononcée par arrêt de la Cour d'appel de Dijon du 11 janvier 2006, dont le reliquat était de 17 mois et 16 jours, et violé les articles 723-15, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 708 du code de procédure pénale :

8. Il résulte de ce texte que, pour apprécier les conditions de recevabilité d'une demande de libération conditionnelle au regard de la durée de l'emprisonnement restant à accomplir, la juridiction de l'application des peines doit prendre en considération toutes les peines exécutoires au jour où elle statue, même si elles ne sont pas définitives.

9. Pour infirmer le jugement du juge de l'application des peines ayant admis M. [Y] au bénéfice de la libération conditionnelle parentale, l'arrêt attaqué retient que la peine de quatre ans d'emprisonnement prononcée par le tribunal correctionnel le 7 novembre 2012 n'était pas prescrite, mais que compte-tenu de la durée de la peine restant à exécuter et de la circonstance que la situation du condamné n'est pas définitive, la cour fait droit à l'appel suspensif du ministère public.

10. En se déterminant ainsi, alors que la peine de quatre ans d'emprisonnement, prononcée par jugement par défaut le 7 décembre 2012, contre lequel M. [Y] avait formé opposition le 17 novembre 2020, ne pouvait être ramenée à exécution au jour où elle a statué, le 3 décembre 2020, la chambre de l'application des peines a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

11. La cassation est par conséquent encourue.



PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Dijon, en date du 3 décembre 2020, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Lyon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Dijon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze décembre deux mille vingt-deux.

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