7 décembre 2022
Cour d'appel de Nîmes
RG n° 22/01236

4ème chambre commerciale

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS















ARRÊT N°



N° RG 22/01236 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IMVI



CC



TRIBUNAL DE COMMERCE D'AVIGNON

25 mars 2022

RG:20/09557



S.A.R.L. MAISON RIPERT



C/



S.A. AXA FRANCE IARD





























Grosses envoyées le 07 décembre 2022 à :



- Me Perrine CORU

- Me Elodie RIGAUD















COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale





ARRÊT DU 07 DECEMBRE 2022





Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce d'AVIGNON en date du 25 Mars 2022, N°20/09557



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre,

Madame Claire OUGIER, Conseillère,

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère.





GREFFIER :



Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 4ème chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision





DÉBATS :



A l'audience publique du 17 Novembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 Décembre 2022.



Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.





APPELANTE :



S.A.R.L. MAISON RIPERT, Société à responsabilité Limitée immatriculée au

Registre du Commerce et des Sociétés d'AVIGNON sous le n° 802 133 173, agissant poursuites et diligences de son gérant, Monsieur [Y] [H], domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 5]



Représentée par Me Perrine CORU de la SARL PERRINE CORU, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d'AVIGNON







INTIMÉE :



S.A. AXA FRANCE IARD

[Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée par Me Elodie RIGAUD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES





ARRÊT :



Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 07 Décembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour.




EXPOSÉ



Vu l'appel interjeté le 4 avril 2022, enregistré le 6 avril 2022 par la SARL Maison Ripert à l'encontre du jugement prononcé le 25 mars 2022 par le tribunal de commerce d'Avignon dans l'instance n°20/09557.



Vu l'avis du 2 mai 2022 de fixation de l'affaire à bref délai à l'audience du 20 octobre 2022.



Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 4 mai 2022 par l'appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé.



Vu l'ordonnance du 12 octobre 2022 prononcée par le magistrat de la mise en état aux termes desquelles les conclusions déposées le 31 août 2022 par la société Axa France Iard ont été déclarées irrecevables.



Vu l'ordonnance du 2 mai 2022 de clôture de la procédure à effet différé au 13 octobre 2022.



* * *



Le 3 juillet 2014, la SARL Maison Ripert a souscrit un contrat d'assurance multirisque professionnelle auprès de la compagnie d'assurance Axa France iard afin de couvrir son activité de restaurateur traditionnel, à effet au 28 mai 2014.



Au titre de ce contrat sont couvertes les pertes d'exploitation suite à fermeture administrative.



Pour être acquise, cette garantie nécessite que deux conditions soient réunies :

« 1. La décision de fermeture a été prise par une autorité administrative

compétente, et extérieure à vous-même

2. La décision de fermeture est la conséquence d'une maladie contagieuse,

d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication. »



Le contrat comporte une clause d'exclusion de garantie aux termes de laquelle sont exclues les pertes d'exploitation « lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature ou son activité, fait l'objet, sur le même territoire départemental que celui de l'établissement assuré, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».



L'activité de l'assurée a été suspendue à la suite d'un arrêté pris le 14 mars 2020 par le Ministre des solidarités et de la santé, applicable à l'ensemble des commerces « non indispensables à la vie de la Nation », tels que les restaurants, prévoyant une mesure d'interdiction d'accueillir du public pour lutter contre la propagation du virus Covid-19.



Une nouvelle interdiction d'accueil du public a été décidée à la suite du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 compte tenu de l'évolution de la situation sanitaire à compter du 29 octobre 2020 jusqu'au 31 décembre 2020.



Le restaurant a été fermé du 15 mars 2020 au mois de juin 2020, puis du 30 octobre au 31 décembre 2020.



L'assurée a présenté une demande d'indemnisation à la compagnie d'assurance au titre de la garantie perte d'exploitation qui lui a été refusée le 28 mai 2020.



Par courrier du 17 septembre 2020, l'assurance informe son assuré d'une évolution du contrat avec la modification de certaines garanties, notamment relatives à la perte d'exploitation avec prise d'effet au 1er janvier 2021.



L'assurée ayant opposé un refus, le contrat était résilié par l'assureur à compter du 1er janvier 2021.



Par exploit d'huissier délivré le 13 octobre 2020, l'assurée a fait assigner son assureur devant le tribunal de commerce d'Avignon en paiement de la somme de 78 809,00 euros au titre de la garantie perte d'exploitation consentie dans le contrat souscrit auprès de la compagnie d'assurance pour la période de mars à juin 2020, celle de 65 863 euros pour la période de novembre à décembre 2020, la somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts, celle de 3000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les dépens de l'instance, en sollicitant également l'exécution provisoire de la décision à intervenir.



Par jugement du 4 avril 2022, le tribunal de commerce d'Avignon a :

-jugé que la clause de garantie pour pertes d'exploitation et la clause d'exclusion y attachée sont valables eu égard aux dispositions de l'article L.112-4 du code des assurances,

-jugé que la clause d'exclusion répond au caractère formel et limité de l'article L.113-1 du code des assurances,

-jugé que la clause d'exclusion ne vide pas de sa substance l'obligation essentielle d'Axa France Iard au sens de l'article 1170 du code civil,

-débouté la société Maison Ripert de l'ensemble de ses demandes,

-laissé à la société Maison Ripert la charge des dépens.

La société Maison Ripert a relevé appel de ce jugement et demande à la cour de :



« Vu les articles 6, 1103 et 1104, 1189 et 1190 du code civil,

Vu les articles L.112-4 et L.113-1 du code des assurances,

Vu l'article L.131-1 du code des procédures civiles d'exécution,

Vu l'arrêté ministériel du 14 mars 2020,



Infirmer le jugement déféré,



A TITRE PRINCIPAL



-Juger que la garantie perte d'exploitation de la société AXA FRANCE IARD du fait de la fermeture administrative en raison d'une épidémie est due à la SARL MAISON RIPERT.

-Condamner la société AXA FRANCE IARD à payer à la SARL MAISON RIPERT

la somme de 78.809 € au titre de la perte d'exploitation avec intérêts de droit à compter du 1er avril 2020 pour la période de mars à juin 2020.

-Condamner la société AXA FRANCE IARD à payer à la SARL MAISON RIPERT

la somme de 65.863 € au titre de la perte d'exploitation avec intérêts de droit à compter du 1er janvier 2021 pour la période de novembre à décembre 2020.





A TITRE SUBSIDIAIRE,



-Désigner tel expert qu'il plaira à la Cour aux fins de chiffrer, en application des conditions particulières et générales d'AXA, la perte d'exploitation subie par la SARL MAISON RIPERT du fait de la fermeture administrative liée à l'épidémie du Covid pendant la période d'application du contrat AXA.





EN TOUT ETAT DE CAUSE



-Condamner la société AXA FRANCE IARD à payer à la SARL MAISON RIPERT la somme de 10.000 € de dommages et intérêts.

-Condamner AXA FRANCE IARD au versement de la somme de 3.000,00 € au profit de la SARL MAISON RIPERT au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. »



CONDAMNER la société AXA FRANCE IARD aux entiers dépens. »



A l'appui de ses prétentions, la société Maison Ripert expose que la décision de fermeture administrative prise par arrêté ministériel du 14 mars 2020 est la conséquence d'une épidémie, que le risque est assurable en ce qu'il n'est pas confronté à l'ordre public, ni à un aléa de la part de l'assuré. Par conséquent, les conditions d'application de la garantie sont réunies. Elle soutient que la clause d'exclusion n'est ni formelle ni limitée et qu'elle est sujette à interprétation. Or, l'interprétation de l'assureur vide la garantie de sa substance et il ne peut de bonne foi opposer la clause d'exclusion.

L'assurée fait aussi valoir que l'assureur a reconnu implicitement que la garantie perte d'exploitation était acquise en proposant un avenant excluant la garantie perte d'exploitation à compter de 2021 puis en résiliant le contrat faute d'acceptation de l'avenant par l'assurée. Elle produit des pièces relatives à sa perte de marge brute durant les périodes de fermeture, dont le calcul lui semble compatible avec les stipulations contractuelles et demande subsidiairement à la cour d'ordonner une mesure d'expertise.

Enfin, la société Maison Ripert invoque la déloyauté de l'assureur qui l'a menacé de résilier le contrat en cas de refus de signature de l'avenant et sa résistance abusive pour justifier sa demande de dommages intérêts.





Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.






DISCUSSION



Sur la demande de mise en 'uvre de la garantie :



Sur la garantie :



En l'espèce, les parties sont liées par un contrat d'assurance multirisque professionnelle n°6256193604 constitué des conditions générales n°690200 L et de conditions particulières incluant notamment les pertes d'exploitation.



Le jugement a relevé, et ce n'est pas discuté, que l'assuré a signé les documents, après avoir attesté pris connaissance des clauses.



Par décret 2020-1262 du 16 octobre 2020, les gérants des établissements de type N : Restaurants et débits de boissons devaient organiser l'accueil du public dans les conditions suivantes :Les personnes accueillies ont une place assise ;
Une même table ne peut regrouper que des personnes venant ensemble ou ayant réservé ensemble, dans la limite de six personnes ; Une distance minimale de deux mètres est garantie entre les chaises occupées par chaque personne, sauf si une paroi fixe ou amovible assure une séparation physique. Cette règle de distance ne s'applique pas aux groupes, dans la limite de six personnes, venant ensemble ou ayant réservé ensemble ;
4° La capacité maximale d'accueil de l'établissement est affichée et visible depuis la voie publique.



Par la suite, selon décret n°2020-1294 du 23 octobre 2020, il a été institué un couvre-feu de 21 heures à 6 heures du matin.



Enfin, l'article 40 du décret n°2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à 1'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, a imposé la fermeture totale des restaurants, puis une dérogation pour les rooms services (entre autres) et enfin, le 19 mai 2021 une période d'ouverture limitée entre 6:00 et 21:00, et ce jusqu'au 2 juin 2021.



Les conditions de la mobilisation de la garantie à savoir :

« 1. La décision de fermeture a été prise par une autorité administrative

compétente, et extérieure à vous-même

2. La décision de fermeture est la conséquence d'une maladie contagieuse,

d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication. »



sont réunies au cas d'espèce et la garantie pour perte d'exploitation est en conséquence mobilisable.



Sur la clause d'exclusion de garantie :



La garantie susvisée est complétée par une clause d'exclusion ainsi formulée :

« Sont exclues :

les pertes d'exploitation, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, fait l'objet, sur le même territoire départemental que celui de l'établissement assuré, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».



Sur l'opposabilité de la clause d'exclusion de garantie:



En vertu de l'article L.112-3 du code des assurances, le contrat d'assurance est signé par les parties. Il s'agit d'une exigence à valeur probatoire car le contrat d'assurance est de nature consensuelle.



Il est également prévu que le contrat d'assurances doit être rédigé en caractères très apparents afin d'attirer spécialement l'attention du souscripteur, l'article L 112-4 prévoyant en effet que les exclusions de garantie doivent figurer en caractère « très apparents », c'est-à-dire dans une typographie différente du corps du texte, ce degré supérieur d'apparence relevant de l'appréciation souveraine des juges du fond.



L'assurée ne critique pas la typographie de la clause d'exclusion dans le cas d'espèce.



Sur la validité de la clause :



En application de l'article L 113-1 du code des assurances, « les pertes et dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police ».



Une clause d'exclusion ne peut être tenue pour formelle et limitée dès lors qu'elle doit être interprétée.



En application de l'article L.113-1 du code des assurances, une clause est non limitée est donc nulle lorsqu'elle est générale au point de supprimer toute hypothèse de garantie du risque ; à l'inverse, sont valables les clauses d'exclusion qui viennent seulement limiter le risque.



En l'occurrence, si l'assuré justifie d'une fermeture administrative en lien avec la covid-19, pour autant il s'avère que l'épidémie a donné lieu à de multiples fermetures au sein du même département pour une cause identique, situation qui serait de nature à exclure la garantie.



Le jugement déféré a fait droit à la demande d'exclusion de la garantie de l'assureur en considérant la clause claire et explicite au motif que le débat sur la définition du mot « épidémie » est sans pertinence dans la mesure où ce n'est pas l'épidémie qui est prise en considération pour l'application de la clause d'exclusion, sa nature, sa localisation ou son importance, mais le périmètre de la fermeture administrative, la garantie étant acquise dans l'hypothèse de la fermeture administrative d'un unique établissement ' quelle que soit sa nature ou son activité - sur le même territoire départemental pour une même cause. Il en déduit qu' « une épidémie n'est pas obligatoirement étendue sur tout un pays, pas davantage sur toute une région, un département ou encore une ville mais qu'elle peut être la cause de la fermeture administrative individuelle d'un seul établissement, que le risque épidémique soit probable ou improbable. Ainsi, la clause d'exclusion revêt un caractère formel et limité imposé par l'article L.113-1 du code des assurances et ne nécessite en l'espèce aucune interprétation en ce qu'elle exclut clairement la garantie dès qu'un autre établissement fait l'objet d'une fermeture administrative dans le même département et pour la même cause, excluant de cette manière le caractère collectif de la garantie qui ne peut couvrir le risque de fermetures généralisées d'établissement sur un plan national. »



Le contrat d'assurance en cause admet en effet la garantie des pertes d'exploitation dès lors que l'assuré est victime d'une décision de fermeture émanant d'une autorité administrative en conséquence d'une « maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication » tout en comportant une clause d'exclusion qui fait échec à cette garantie dès lors qu'à «  la date de la décision de fermeture, au moins d'un autre établissement quelle que soit sa nature et son activité, fait l'objet, sur le même territoire départemental que celui de l'établissement assuré, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».



En l'absence de définition donnée dans le contrat s'agissant des termes « épidémie » et « maladie contagieuse », et de précisions quant à la distinction de l'épidémie des autres cas sanitaires, il est difficile de déterminer ce qui ressort d'une épidémie de ce qui caractérise une contagion.



Or le terme « épidémie » est porteur d'une certaine ambiguïté dans la mesure où il est contradictoire de l'associer à la fermeture d'un seul établissement alors que le sens général donné au terme « épidémie » caractérise la propagation de maladies comme la peste, la variole, le virus Ebola, la covid-19 dont le territoire peut être des régions, des Etats' et dépasse largement la notion d'établissement.



Il n'est pas admissible que le contrat garantisse une épidémie frappant par hypothèse une large population tout en excluant la même garantie dès que plusieurs personnes sont atteintes de la même épidémie et que plusieurs établissements sont touchés par la décision de fermeture administrative. Cette clause n'est pas limitée et vide la garantie de toute sa substance.



Il doit être en conséquence retenu que la clause d'exclusion n'est ni formelle ni limitée et doit donc être déclarée comme non écrite de sorte que la compagnie d'assurance ne saurait s'en prévaloir.



La mise en 'uvre de la garantie est donc acquise.





Sur la demande d'indemnisation :



Il est prévu à l'article 2.1 des conditions générales que la garantie perte d'exploitation s'exerce pour la perte subie « et pour les frais supplémentaires que devez engager, soit elle est limitée à ces seuls frais supplémentaires », la perte d'exploitation faisant l'objet de la garantie étant définie comme suit :

« soit la perte de marge brute que vous subissez durant la période d'indemnisation à la suite de la diminution du chiffre d'affaires causée par les évènements précédents. La marge brute est la différence entre le chiffre d'affaires annuel hors tva corrigée de la variation des stocks et le total des achats et charges variables'».



Les frais supplémentaires sont quant à eux « les frais d'exploitation excédant vos charges normales, qu'au cours de la période d'indemnisation vous engagez avec notre accord afin de retrouver ou de maintenir, à la suite des évènements concernés, le niveau de marge brute ou de revenus (honoraires) correspondant à votre activité professionnelle garantie » .



Il est ensuite proposé les modalités de calcul de l'indemnité au titre de la perte de marge brute qui est obtenue par :

« la différence entre le chiffre d'affaires qui, à dire d'expert, aurait été réalisé pendant la période d'indemnisation en l'absence de sinistre et le chiffre d'affaires effectivement réalisé pendant cette même période. Le chiffre d'affaires réalisé en l'absence de sinistre est calculé à partir des écritures comptables et résultats des exercices antérieurs, en tenant compte des tendances générales de l'évolution de vos activités et des facteurs internes et externes susceptibles d'avoir eu, indépendamment de ce sinistre, une influence sur votre activité et sur ce chiffre d'affaires. (')Du total de la perte de marge brute et des frais d'exploitation calculés ci-dessus doivent être retranchés tous montants de charges constitutive de la marge brute que l'entreprise cesserait de supporter du fait du sinistre pendant la période d'indemnisation. De cette différence est défalquée la portion de charges normales que, du fait du sinistre, vous cessez de payer pendant la période d'indemnisation ; »



Les conditions particulières prévoient que « La garantie intervient pendant la période d'indemnisation c'est-à-dire la période commençant le jour du sinistre et qui dure tant que les résultats de l'établissement sont affectés par ledit sinistre, dans la limite de 3 mois maximum' » de sorte que la période garantie est au maximum de trois mois.



L'assuré réclame une indemnisation d'un montant total de 144 672 euros s'agissant des deux périodes de fermeture et produit deux tableaux de calcul de la perte de marge brute pour chacune des périodes concernées (pièces 12 et 22) dont seul l'un comporte la signature et le cachet du comptable. Il n'est produit qu'un seul bilan, concernant l'exercice arrêté au 30 juin 2020, alors que la seconde période de fermeture est postérieure.



Dès lors, ces pièces ne peuvent suffire à faire droit à la demande d'indemnisation d'une part en raison de leur caractère non contradictoire mais également en l'absence d'explication sur les modalités de calcul et de leur conformité aux clauses du contrat de sorte qu'il est nécessaire de faire droit à la demande d'expertise sollicitée à titre subsidiaire selon les modalités prévues au dispositif.



Sur la demande de dommages intérêts :



L'article L.112-3 du code des assurances donne le droit aux parties de proposer un avenant. Par ailleurs, l'article 7.1 du contrat, relatif à sa vie, stipule que le contrat est reconduit tacitement d'année en année, sauf résiliation par une partie, faculté qui a été exercée par l'assureur.



Le courrier du 22 octobre 2020 adressé par l'assureur à son assuré informe ce dernier qu'à défaut d'acceptation sur les conditions de renouvellement, le contrat sera résilié. Il donne un ultime délai à l'assuré pour signer l'avenant.



Le courriel du 8 décembre 2020 propose une tarification plus avantageuse que celle mentionnée dans l'avenant.



Aucune menace n'est formulée dans ces courriers qui ont été adressés à 2 mois d'intervalle (octobre et novembre) ce qui va à l'encontre de l'allégation de harcèlement.



Aucune déloyauté contractuelle ne peut donc être reprochée à l'assureur, lequel a seulement fait une appréciation inexacte de ses droits, et sa résistance abusive n'est pas caractérisée.



La demande de dommages intérêts présentée par la société Maison Ripert n'est pas fondée et est rejetée.





Sur les frais de l'instance :



La garantie perte d'exploitation étant due par la compagnie d'assurance, celle-ci doit supporter les dépens de première instance et d'appel et doit être également condamnée au paiement d'une somme totale de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS



La Cour, par arrêt contradictoire,



Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a dit que la clause de garantie pour pertes d'exploitation et la clause d'exclusion y attachée sont valables, eu égard aux dispositions de l'article L.112-4 du code des assurances,



Et statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées,



Dit que la clause d'exclusion n'est ni formelle ni limitée au sens de l'article L.113-1 du code des assurances, et se trouve non écrite,



Dit par conséquent que la société Axa France Iard ne peut se prévaloir de la clause d'exclusion de garantie,



Dit que la garantie pertes d'exploitation en cas de fermeture provisoire (3 mois maximum) totale ou partielle de l'établissement par décision administrative à la suite d'une maladie contagieuse, de meurtre, de suicide, d'épidémie ou d'intoxication est mobilisable en ce qui concerne l'activité de la société Maison Ripert pour les périodes suivantes, et ce dans les limites contractuelles :



du 15 mars 2020 à courant juin 2020,

à compter du 30 octobre 2020 jusqu'au 31 décembre 2020,



Déboute la société Maison Ripert de sa demande de dommages intérêts pour déloyauté contractuelle et résistance abusive,



Avant dire droit,



Ordonne une mesure d'expertise confiée à Mme [Z] [K], [Localité 2] à [Localité 5], rel : [XXXXXXXX01] , mel : [Courriel 7] avec pour mission de :



' Se faire communiquer tous documents et pièces qu'elle estimera utile à l'accomplissement de sa mission, notamment l'estimation effectuée par l'expert-comptable de l'appelante, accompagnée de ses bilans et comptes d'exploitation sur les trois dernières années ;

' Entendre les parties ainsi que tout sachant et évoquer, à l'issue de la première réunion avec les parties le calendrier possible de la suite de ses opérations ;

-donner son avis sur le montant des pertes d'exploitation consécutives à la baisse du chiffre d'affaires causée par l'interruption de l'activité, de la marge brute (chiffre d'affaires ' charges variables) incluant les charges salariales et les économies réalisées ;

' déterminer les pertes d'exploitation garanties contractuellement par le contrat d'assurance, sur une première période du 15 mars 2020 à courant juin 2020, puis une seconde période débutant le 29 octobre 2020 jusqu'au 31 décembre 2020, dans les limites contractuelles (franchise, durée de garantie)

' Donner son avis sur le montant des pertes d'exploitation consécutives à la baisse du chiffre d'affaires causée par l'interruption ou la réduction de l'activité, de la marge brute (chiffre d'affaires ' charges variables) incluant les charges salariales et les économies réalisées

' Donner son avis sur le montant des aides/subventions d'État perçues par l'assurée ;

' Donner son avis sur les coefficients de tendance générale de l'évolution de l'activité et des facteurs externes et internes susceptibles d'être pris en compte pour le calcul de la réduction d'activité imputable à la mesure de fermeture,

Faire application si nécessaire du plafond contractuel de garantie,



Dit que la société Axa France Iard devra consigner par chèque libellé à l'ordre du régisseur des avances et des recettes de la cour d'appel de Nîmes dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision la somme de 4.000 euros afin de garantir le paiement des frais et des honoraires d'expert,



Dit qu'à défaut de consignation selon les modalités fixées, la désignation de l'expert sera caduque à moins que le magistrat chargé du contrôle de l'expertise, à la demande d'une partie se prévalant d'un motif légitime, ne décide d'une prorogation du délai ou du relevé de forclusion,



Dit que s'il estime insuffisante la provision fixée, l'expert devra, lors de la première convocation ou au plus tard lors de la deuxième, dresser un programme de ses investigations et évaluer de manière aussi précise que possible le montant de ses honoraires et débours,



Dit que l'expert devra déposer son rapport au greffe de la cour dans le délai de quatre mois à compter du versement de la consignation à moins qu'il refuse la mission,



Désigne le président de la chambre en qualité de magistrat chargé du contrôle des expertises, ou tout magistrat délégué par lui,



Dit que l'expert devra accomplir sa mission en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées, les entendre en leurs observations et répondre à leurs dires,



Dit que l'expert devra déposer son pré-rapport au résultat de ses investigations et recueillera les avis des parties sous forme de dires auxquels l'expert doit répondre dans son rapport d'expertise,



Dit qu'en application des dispositions de l'article 173 du code de procédure civile, l'expert devra remettre une copie de son rapport à chacune des parties, ou à leurs représentants, en mentionnant cette remise sur l'original,



Dit que si les parties viennent à se concilier, elles peuvent demander au magistrat chargé du contrôle de l'expertise de donner force exécutoire à leur accord,



Dit qu'il sera pourvu au remplacement de l'expert dans les cas, conditions et formes des articles 234 et 235 du code de procédure civile,



Renvoie l'affaire à l'audience de mise en état du 2 février 2023 à 9 :30 pour vérifier le versement de la consignation, et prendre toutes mesures utiles du fait de ce versement ou non versement,



Condamne la société Axa France Iard à payer à la société Maison Ripert la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la société Axa Iard aux dépens de première instance et d'appel.



La minute du présent arrêt a été signée par Madame Christine Codol, présidente et par Monsieur Julian Launay-Bestoso, greffier présent lors de son prononcé.



LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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