28 novembre 2022
Cour d'appel de Paris
RG n° 21/03398

Pôle 5 - Chambre 10

Texte de la décision

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2022



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03398 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDE5U



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Janvier 2021 -TJ Paris - RG n° 18/06695



APPELANTE



S.A.S. CORSEA PROMOTION

Ayant son siège social [Adresse 4] [Localité 3]

N° SIRET : 500 954 557



Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Paul-philippe MASSONI, avocat au barreau de PARIS, toque : L0220



INTIMES



Monsieur [I] [Z]



Madame [R] [W] épouse [Z]

Domiciliés ensemble [Adresse 2]

[Localité 1]



Représenté par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753



S.A.R.L. CORSEA VACANCES

Représentée par son gérant

Ayant son siége social [Adresse 5]

[Localité 6]

N° SIRET : 523 381 606



Représentée par Me Emmanuel ROUART, avocat au barreau de PARIS, toque : B0992



COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Edouard LOOS, Président, chargé du rapport et Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère



Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ



ARRÊT :



- contradictoire



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Edouard LOOS, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.






FAITS ET PROCEDURE





Le 21 juillet 2011, M. [B] [X] intervenant pour le compte de la société Elite Finance Conseil-EFC, a effectué pour M. [I] [Z] et Mme [R] [W] épouse [Z] une simulation intitulée « compte épargne fiscal », pour leur proposer d'acquérir, moyennant un prix de 118 728 euros TTC, un bien de type T1 auprès du promoteur Corséa Promotion dans une résidence en l'état futur d'achèvement dénommée « la citadelle resort », située sur la commune de [Localité 6] en Corse, dans le cadre d'une opération de défiscalisation avec location de leur bien.



Le 22 juillet 2011, M. [I] [Z] et Mme [R] [W] épouse [Z] ont signé un avant-contrat de réservation. La vente a été signée devant notaire le 12 octobre 2011.



Le 29 octobre 2011, M. et Mme [Z] ont signé un bail commercial avec la société Corséa Vacances, d'une durée de 11 ans en échange d'un loyer annuel HT de 4 404 euros, pour exercer une activité de location meublée de courte durée et avec différents services proposés à la clientèle. La totalité de la résidence est d'ailleurs louée et exploitée par la société Corséa Vacances.



Compte tenu de désordres qui sont apparus dans la résidence, le syndicat des copropriétaires a demandé et obtenu, par ordonnance de référé en date du 3 mai 2018 du tribunal judiciaire de Paris, la désignation d'un expert judiciaire, M. [O] [G], afin de réaliser des investigations portant sur la remontée d'humidité dans l'appartement n°7, l'absence de raccordement au réseau public des eaux usées, les infiltrations dans la fosse des ascenseurs et les infiltrations par la toiture.



Par acte d'huissier en date des 4 et 12 avril 2018, M. [I] [Z] et Mme [R] [W] épouse [Z] ont respectivement fait assigner devant le tribunal judiciaire de Paris la société Corséa Promotion et la société Corséa Vacances.





* * *





Vu le jugement prononcé le 5 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a statué comme suit :



- Condamne la société Corséa Promotion à payer à M. [I] [Z] et Mme [R] [W] épouse [Z] la somme de 40 000 euros au titre de la perte de chance, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement et capitalisation pour les intérêts échus, dus au moins pour une année entière ;

- Condamne la société Corséa Promotion à payer à M. [I] [Z] et Mme [R] [W] épouse [Z] la somme de 8 388,63 euros au titre de la perte des loyers, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement et capitalisation pour les intérêts échus, dus au moins pour une année entière ;

- Condamne la société Corséa Promotion à payer à M. [I] [Z] et Mme [R] [W] épouse [Z] la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement et capitalisation pour les intérêts échus, dus au moins pour une année entière ;

- Déboute la société Corséa Vacances de ses demandes fondées sur le préjudice financier, la perte d'exploitation et la procédure abusive ;

- Déboute la société Corséa Vacances de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la société Corséa Promotion à payer à M. [I] [Z] et Mme [R] [W] épouse [Z] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamne la société Corséa Promotion aux dépens.

- Ordonne l'exécution provisoire.



Vu l'appel déclaré le 19 février 2021 par la société Corséa Promotion,



Vu les dernières conclusions signifiées le 26 avril 2021 par la société Corséa Promotion,



Vu les dernières conclusions signifiées le 26 avril 2022 par M. [I] [Z] et Mme [R] [W] épouse [Z] ,



Vu les dernières conclusions signifiées le 26 juillet 2021 par la société Corséa Vacances



La société Corséa Promotion demande à la cour de statuer comme suit :



Vu les articles 1231-1 et 2224 du code civil et l'article 122 du code de procédure civile,



- Dire et juger ledit appel recevable et bien fondé.

- Réformer ledit jugement ce qu'il a condamné la société Corséa Promotion à payer aux époux [Z] :

* la somme de 40 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement et capitalisation pour les intérêts échus à titre de dommages et intérêts en réparation d'une perte de chance

* la somme de 8 388,63 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement et capitalisation pour les intérêts échus à titre de dommages et intérêts au titre d'une perte de loyers

* la somme de 5 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement et capitalisation pour les intérêts échus à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral

* la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau, à titre principal,

- Déclarer irrecevable comme prescrite l'action engagée par les époux [Z] pour manquement au devoir pré-contractuel d'information, de conseil et de mise en garde ;

- Dire et juger que la société Corséa Promotion n'a commis aucune faute contractuelle à l'origine des préjudices invoqués par les époux [Z] ;

- Débouter en conséquence les époux [Z] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire,

- Dire et juger que les époux [Z] ne sont pas fondés à se prévaloir d'un préjudice tiré de la perte de chance de ne pas contracter l'opération litigieuse équivalent à l'ensemble des sommes prétendument déboursés dans ce cadre ;

- Débouter en conséquence les époux [Z] de sa demande tendant à voir condamner la société Corséa Promotion à l'indemniser au titre de la perte de chance de ne pas contracter l'opération ;

- Dire et juger que les prétendus défauts d'information imputés à la société Corséa Promotion n'ont aucun lien avec le préjudice tiré de l'absence de paiement des loyers par la société Corséa Vacances ;

- Débouter en conséquence les époux [Z] de leur demande tendant à voir condamner la société Corséa Promotion à leur régler les loyers impayés, dus par la société Corséa Vacances

- Dire et juger que le préjudice moral allégué par les époux [Z] n'est établi ni dans son principe ni dans son quantum ;

- Débouter en conséquence les époux [Z] de leur demande tendant à l'indemnisation d'un préjudice moral ou à tout le moins rapporter son montant à une plus juste évaluation ;

- Dire et juger que la société Corséa Promotion n'a commis aucun manquement à un devoir pré-contractuel d'information, de Conseil ou de mise en garde à l'égard des époux [Z]  ;

- Débouter en conséquence les époux [Z] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions

En toute hypothèse,

- Condamner les époux [Z] à verser à la société Corséa Promotion la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.





M. [I] [Z] et Mme [R] [W] épouse [Z] demandent à la cour de statuer comme suit :



Vu l'article 1240 nouveau du code civil (article 1382 ancien du code civil), l'article 1343-2 nouveau du code civil (article 1154 ancien du code civil),les articles 1231 et suivants du code civil, (les anciens 1137 et 1147), les articles 699 et 700 du code de procédure civile,



- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté que la société Corséa Promotion a commis une faute dans son devoir d'information et de conseil et l'a déclaré responsable des agissements de son mandataire, la société Elite Finance Conseil et a condamné la société Corséa Promotion,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Corséa Vacances de sa demande de condamnation fondée sur la réparation du préjudice financier lié aux frais exposés pour les travaux imputables au bailleur et du préjudice de la perte d'exploitation lié à l'arrêt de son activité,

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté que rien ne permet d'établir l'existence d'une faute dans l'exercice de son mandat par la société Corséa Vacances et il y a lieu de rejeter la demande de condamnation formée par Monsieur et Madame [Z] à son encontre,

- Juger et constater que l'action de Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] n'est pas prescrite,

- Recevoir Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] en leur action,

Statuant à nouveau,

- Juger et constater que l'opération présentée à Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] était une opération financière complexe de long terme (i) ayant pour support un bien immobilier géré par un tiers, (ii) intégralement financée par un emprunt remboursé par la perception de loyers, par les réductions d'impôt procurées par le dispositif d'incitation fiscale Censi-Bouvard avec en complément un effort d'épargne mensuel, (iii) destinée à permettre, suivant la revente du bien au terme de l'engagement de location, le remboursement du prêt contracté et la réalisation d'un capital net supérieur à l'effort d'épargne fourni et donc la constitution d'un capital,

- Juger et constater que la société Elite Finance Conseil est intervenue dans le cadre d'un démarchage pour présenter l'opération financière à Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] étaient tenues à leur égard à une obligation d'information et à un devoir de conseil,

- Juger et constater qu'il appartenait en conséquence la société Elite Finance Conseil de se renseigner sur les perspectives réelles de valorisation du bien au terme de l'engagement de location pour (i) informer utilement Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] et satisfaire à son obligation d'information, (ii) vérifier que l'opération proposée était adaptée à l'objectif de constitution d'un capital de Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] et satisfaire à son devoir de conseil,

- Juger et constater qu'en s'abstenant de réaliser la moindre étude sur les perspectives réelles de valorisation du bien au terme de l'engagement de location et en communiquant à Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] une étude financière faisant état de perspectives de valorisation du bien litigieux au terme de l'engagement de location totalement irréalistes et fondées sur des données purement théoriques, la société Elite Finance Conseil a manqué à son obligation d'information et à leur devoir de conseil,

- Juger et constater que la société Elite Finance Conseil, nécessairement consciente en sa qualité de professionnel des risques qu'elle faisait courir à Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] aurait dû attirer l'attention de Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] sur le caractère purement théorique des informations de l'étude financière relative aux perspectives de réalisation d'un capital et les risques pour eux à s'engager dans une opération dont la réussite était fondée sur des données purement théoriques,

- Qu'à aucun moment, cette mise en garde n'a été opérée, la seule mention du caractère non contractuel de l'étude financière étant parfaitement insuffisante à caractériser une telle mise en garde,

- Juger et constater que dans le cadre de cette opération, les perspectives de valorisation du bien au terme de l'engagement de location revêtaient une importance essentielle pour ne pas dire cruciale dès lors que la possibilité d'atteindre l'objectif assigné à l'opération (la constitution d'un capital) dépendait très étroitement et principalement de la valeur du bien au terme de l'engagement de location,

- Juger et constater que la société Gestiprom (anciennement dénommée Corséa Promotion) est responsable du fait des manquements commis par la société Elite Finance Conseil,

- Juger et constater que quand bien même Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] n'ignoraient pas que l'investissement proposé (comme d'ailleurs tout investissement) comportait une part d'aléa, l'absence d'étude préalable par la société Elite Finance Conseil sur les perspectives réelles de valorisation du bien au terme de l'engagement de location et la communication sans mise en garde d'une information y relative totalement irréaliste, a conduit Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] à s'exposer à un risque certain ou quasi-certain qui s'est réalisé,

- Juger et constater que les manquements de la société Elite Finance Conseil à son obligation d'information et de conseil ont privé Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] de la chance d'éviter le risque certain ou quasi certain qui s'est réalisé (i) que la valeur du bien au terme de l'engagement de location ne permette pas de réaliser un capital net supérieur à l'effort d'épargne fourni, (ii) que la valeur du bien au terme de l'engagement de location ne permette même pas de rembourser le solde du capital restant dû auprès de l'établissement ayant financé l'opération litigieuse, (iii) d'avoir ainsi, et pendant de nombreuses années, fourni en vain un important effort d'épargne (sans constituer le moindre capital),

- Juger et constater que la société Corséa Vacances s'est rendue coupable de fautes contractuelles caractérisées dans l'exécution des prestations qui lui étaient dévolues.



En conséquence,

- Condamner in solidum, avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, dans les conditions des articles 1153-1 (ancien) et 1154 (ancien) du code civil, la société Gestiprom (anciennement dénommée Corséa Promotion), la société Corséa Vacances au paiement à Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] de la somme de 82 518,62 euros, (somme à parfaire), au titre de la réparation des préjudices,

- Condamner in solidum avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, dans les conditions des articles 1153-1 (ancien) et 1154 (ancien) du code civil, la société Gestiprom (anciennement dénommée Corséa Promotion), et la société Corséa Vacances, en réparation des pertes de loyers, au paiement à Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] de la somme de 7 982,25 euros (somme à parfaire), correspondant à la différence entre le montant du bail initial et celui de l'avenant pour la période du 1er janvier 2015 au 31 mars 2022,

- Condamner in solidum avec intérêts au taux légal à compter de la date du Jugement à intervenir et capitalisation dans les conditions des articles 1153-1 (ancien) et 1154 (ancien) du code civil, la société Gestiprom (anciennement dénommée Corséa Promotion), la société Corséa Vacances, en réparation des loyers non réglés, au paiement à Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] de la somme de 17 381,71 euros (somme à parfaire),

- Juger et constater que ces manquements fautifs sont aussi source pour Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] d'un important préjudice moral,



En conséquence ;

- Condamner in solidum avec intérêts au taux légal à compter de la date du jugement à intervenir et capitalisation dans les conditions des articles 1153-1 (ancien) et 1154 (ancien) du code civil, la société Gestiprom (anciennement dénommée Corséa Promotion) et la société Corséa Vacances, en réparation du préjudice moral, au paiement à Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] de la somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts.



En tout état de cause :

- Condamner in solidum la société Gestiprom (anciennement dénommée Corséa Promotion) et la société Corséa Vacances au paiement à Monsieur [I], [U] [Z] et Madame [R], [H] [W] épouse [Z] de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner les mêmes, in solidum, aux entiers dépens.

- Déclarer infondées les intimées en leur argumentation.

- Les débouter de toutes leurs demandes fins et conclusions contraires.



La société Corséa Vacances demande à la cour de statuer comme suit :



- Accueillir l'intimée en ses écritures d'appel incident et le dire bien fondé en ses prétentions ;

- Rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires ;

- Déclarer les époux [Z] mal fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter ;

- Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 05.01.2021 en ce qu'il a débouter les époux [Z] de toutes leurs demandes à l'encontre de la société Corséa Vacances.

Et, en tout état de cause : à titre principal, l'action en responsabilité civile contractuelle du mandant contre son mandataire est mal fondée en droit ;

- Juger et constater que l'action des époux [Z] à l'encontre de la société Corséa Vacances est mal fondée en droit ;

- Débouter les époux [Z] de l'ensemble de leurs demandes ;

A titre subsidiaire

- Juger et constater que Corséa Vacances, prise en sa qualité de mandataire, n'était pas débitrice des obligations suivantes :

* Vérifier si le chantier avait pris fin et si un procès-verbal de réception avait été établi entre les maîtres de l'ouvrage et les entreprises ;

* Vérifier si l'immeuble présentait des anomalies tant matérielles que juridiques et/ou administratives et était notamment raccordé au réseau public des eaux usées ;

* Et plus généralement, vérifier si l'état de l'ouvrage permettait de réaliser l'opération immobilière proposées aux différents acquéreurs, notamment en ce qui concerne le volet locatif : attractivité et prix ;

- Juger et constater que Corséa Vacances, prise en sa qualité de mandataire, était débitrice seulement des obligations suivantes :

* Représenter le copropriétaire-bailleur lors de la mise à disposition du lot et de la remise des clefs ;

* Constater, le cas échéant, l'achèvement du lot et sa mise à disposition ;

* Prendre livraison du lot en signant, au nom et pour le compte du bailleur, le procès-verbal de mise à disposition qui comportera, le cas échéant, des réserves.

- Juger et constater que Corséa Vacances, prise en sa qualité de mandataire, a parfaitement exécuté ses obligations ;

En tout état de cause, juger que le mandant ne souffre d'aucun préjudice réparable : absence de préjudice direct et certain du mandant :

Absence de perte de chance :

- Juger et constater que le préjudice de perte de chance est incertain car fondé sur des évènements hypothétiques et n'a aucun lien (direct ou indirect), avec les fautes reprochées à Corséa Vacances

- Débouter les époux [Z] de leurs demandes d'indemnisation du préjudice de perte de chance ;

Prétendue perte de loyers :

- Juger et constater que le préjudice de perte de loyers n'a aucun lien, ni direct ni indirect, avec les faits reprochés à Corséa Vacances ;

- Débouter les époux [Z] de leurs demandes d'indemnisation du préjudice de perte de loyers ;

Absence de préjudice moral :

- Juger et constater que le préjudice moral n'est pas démontré ;

- Débouter les époux [Z] de leurs demandes d'indemnisation du préjudice moral ;

Réformation du jugement sur le rejet de la demande reconventionnelle de la société Corséa Vacances de réparation du préjudice subi en raison du caractère abusif de l'action des époux [Z]

- Réformer le jugement rendu le 05 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il déboutait la société Corséa Vacances de sa demande fondée sur son préjudice résultant de la procédure abusive des époux [Z] ;

Et, statuant à nouveau :

- Condamner les époux [Z] à payer à Corséa Vacances la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du caractère abusif de la présente procédure ;

En toutes hypothèses :

- Condamner tout succombant à payer à Corséa Vacances la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens de l'instance, et dire que Maître Emmanuel Rouart pourra recouvrer directement ceux dont il aura fait l'avance sans avoir reçu provision conformément aux dispositions de l'article 699 du code procédure civile.






SUR CE, LA COUR





a) Sur la prescription



La société Corséa Promotion soutient pour la première fois en cause d'appel que l'action egagée par les époux [Z] serait prescrite.



Elle expose que lors de la signature du contrat de réservation (22 juillet 2011) ou au plus tard lors de la réitération de la vente par acte authentique (12 octobre 2011), les époux [Z] ne pouvaient ignorer l'absence de remise d'une étude préalable du marché immobilier local; que le point de départ de la prescription de l'action des époux [Z] pour défaut de remise d'une étude sur le marché immobilier local a donc commencé à courir au plus tard le 12 octobre 2011 pour expirer le 13 octobre 2016, soit avant l'introduction de la présente instance qui date du 4 et 12 avril 2018 ; que les époux [Z] étaient par ailleurs en mesure, lors de la livraison du bien le jour de la signature de l'acte de vente, de connaître sa valeur au regard du marché local et ne pouvaient légitimement ignorer sa prétendue surévaluation; que le point de départ de la prescription de leur action pour défaut d'information sur la valeur de leur bien a donc commencé à courir au plus tard le 31 janvier 2012 (date de livraison du bien) pour expirer le 1er février 2017.



Selon les époux [Z], le point de départ de la prescription doit se situer non pas au jour de la conclusion du contrat mais à la date à laquelle ils ont pris connaissance de leur préjudice à la réalisation certaine soit le 30 mars 2018.



Ceci étant exposé l'article 2224 du code civil est ainsi rédigé :

'Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.'

Cet article est applicable au litige dans sa partie relative au manquement à l'obligation précontractuelle d'information et de conseil puisque les faits dénoncés sont postérieurs à son entrée en vigueur.



Les époux [Z] reprochent à la société Elite Finance Conseil qui est intervenue pour le compte de la société Corséa Promotions une absence d'information relative d'une part à la valeur du bien, support de l'opération, d'autre part à la valeur locative et la rentalité du bien litigieux;



Le point de départ de la prescription concernant la valeur du bien acquis doit se situer au jour de l'acquisition, en l'espèce le 12 octobre 2011.

En effet, les époux [Z] ont été en mesure de prendre connaissance lors de l'achat de leur bien de sa valeur réelle et ont disposé d'un délai de plus de 3 mois entre le contrat préliminaire de réservation signé le 22 juillet 2011 et l'acte authentique de vente du 12 octobre 2011 pour s'informer de la valeur exacte du bien dont ils se portaient acquéreurs.



Les époux [Z] ne caractérisent pas quelles informations auraient dû leur être données sur des éléments qu'ils étaient personnellement en mesure d'obtenir.



Le point de départ de la prescription portant sur le défaut d'information relatif à la valeur locative et à la rentabilité corrélative de l'investissement se situe à compter des incidents locatifs ou de la révision à la baisse du loyer. En l'espèce un avenant a été signé le 29 avril 2016 entre les époux [Z] et la société Corséa Vacances ramenant le montant du loyer annuel de 4 404 euros HT à 3 303 euros annuels HT avec prise d'effet au 1er janvier 2015. Les époux [Z] sont ainsi fondés à soutenir qu'ils ont pris connaissance de leur préjudice à cette date et que leurs demandes contenues dans les assignations délivrées les 4 et 12 avril 2018 ne sont pas prescrites.





b) Sur les demandes formées contre la société Corséa Promotion



Les époux [Z] imputent à la société Corséa Promotion le comportement de la société Elite Finance Conseil, son commercialisateur, qui aurait manqué à son obligation d'information et de renseignement en leur présentant les seuls aspects favorables de l'opération sans faire état de ses aspects défavorales et des risques auxquels les investisseurs pouvaient se trouver confrontés . Ces griefs se rapportent à la valeur du bien, support de l'opération , à sa valeur locative et à sa rentablité locative.



La société Corséa Promotion conteste tout manquement au devoir pré-contractuel d'information, de conseil et de mise en garde tant sur la valeur vénale du bien et son risque de dévaluation que sur sa valeur locative et son risque locatif .



Concernant les perspectives locatives et la rentabilité de l'opération, les époux [Z] se sont vus remettre le 21 juillet 2011, en phase précontractuelle, un document intitulé 'Compte Epargne Fiscal'. Ce document personnalisé a été établi par M [X], salarié de la société Elite Finance Conseil, cette dernière étant intervenue comme commercialisateur et mandataire de la société Corséa Promotion.



Le document 'Compte Epargne Fiscal' au bas duquel figure la mention 'Document non contractuel' chiffre, dans l'hypothèse d'une défiscalisation Scellier sur 9 années, les 'revenus mensuels garantis' générés par les loyers perçus, ajoute les avantages fiscaux et présente aux époux [Z] un bilan chiffré des avantages suivi d'une valeur de cession du support fiscal selon 2 hypothèses.



En sa qualité d'agent immobilier intervenant dans des opérations de placement immobilier, la société Elite Finance Conseil, mandatée par la société Corséa Promotion, était tenue à un devoir d'information et de conseil renforcé.



Les époux [Z] dénoncent à juste raison le fait que l'étude personnalisée ne mentionne nulle part l'aléa lié à tout projet locatif. Les revenus locatifs sont qualifiés de 'garantis' sans envisager l'éventualité soit de carences locatives soit de nécessité de réduire le montant du loyer, cette situation s'étant concrétisée dans la présente espèce à compter du 29 avril 2016 avec prise d'effet au 1er janvier 2015.



Le document chiffre également un prix de revente du bien à l'issue des 9 années locatives. Ce document vise 2 hypothèses la valeur se chiffrant soit à 127 884 euros (hypothèse 1) soit à 149 587 euros (hypothèse 2). Il n'est aucunement mentionné que ce chiffrage est totalement aléatoire puisqu'il dépend de la situation immobilière 9 années plus tard .



Les époux [Z] sont fondés à soutenir que la société Elite Finance Conseil devait leur donner une information selon laquelle les résultats chiffrés n'étaient pas garantis et que certaines phases de l'opération pouvaient ne pas être atteintes .



La faute étant ainsi caractérisée, le jugement déféré doit être confirmé de ce chef



c) Sur le litige opposant les époux [Z] à la société Corséa Vacances ;



Les époux [Z] reprochent à la société Corséa Vacances, exploitant de la rèsidence, une faute contractuelle ayant consisté à signer un bail commercial avec les concluants le 29 octobre 2011 sans s'assurer que l'immeuble était achevé et normalement exploitable. Cette faute serait à l'origine d'un préjudice puique le montant du loyer annuel a dû être diminué par avenant du 29 avril 2016 ayant pris effet le 1er janvier 2015.



La société Corséa Vavances conteste tout comportement fautif dans l'exercice de son mandat pour les motifs repris dans le dispositif de ses conclusios dont le contenu a été ci- dessus rappelé.



Ceci étant exposé, par de justes motifs que la cour adopte, les premiers juges ont relevé que les désordres sont apparus dans la copropriété en 2016 et qu'il n'est aucunement établi qu'ils étaient apparents lors de la signature du bail commercial le 29 octobre 2011.



Les époux [Z] ne prouvant pas le comportement fautif de la société Corséa Vacances, les demandes de dommages et intérêts présentées à son encontre ont justement été rejetées.



Au delà de son caractère infondé, la société Corséa Vacances ne prouve pas le carctère abusif de la procédure engagée à son encontre par les époux [Z]. Elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts présentée à ce titre.



d) Sur le préjudice des époux [Z]



Le manquement au devoir d'information et de conseil de la société Corséa Promotion tel que ci- dessus caractérisé a causé aux époux [Z] un prèjudice de perte de chance de ne pas contracter ou de contracter à de meilleures conditions.



Ce préjudice en relation avec un aléa ne peut pas porter sur l'entier préjudice mais sur une partie de celui- ci. Au vu des circonstances ci dessus caractérisées la cour entend chiffrer à la somme 15 000 euros l'entier préjudice subi par les époux [Z].



Les époux [Z] ne sont pas fondés à soutenir que leur préjudice pour perte de chance devrait porter sur le montant exact des sommes qu'ils n'auraient pas exposées s'ils n'avaient pas conclu ni sur la perte subie quant à la valeur du bien ni sur les revenus fonciers et les réductions d'impôt, ni sur la perte de loyers (loyers réduits et loyers non réglés). Faire droit à ces demandes reviendrait à indemniser les époux [Z] de leur entier préjudice alors que cette solution ne peut pas être retenue dans l'hypothèse retenue de la perte de chance.



Les époux [Z] justifient avoir subi un préjudice moral en lien principalement avec les difficultés locatives et leur répercussion sur le bon déroulement de l'opération. La somme de 2 500 euros doit leur être allouée à ce titre .





e) Sur l'article 700 du code de procédure civile



Une indemnité doit être allouée sur ce fondement aux seuls époux [Z].



PAR CES MOTIFS



La cour,



DIT prescrite la demande fondée sur la surévaluation de prix d'achat ;



DIT non prescrites les autres demandes ;



CONFIRME le jugement déféré sur le rejet des demandes formées contre la société Corséa Vacances, sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;



INFIRME le jugement pour le surplus;



Statuant de nouveau :



CONDAMNE la société Corséa Promotion à verser aux époux [I] [Z] la somme de 15 000 euros en réparation de la perte de chance et celle de 2 500 euros pour préjudice moral ;



DIT que ces sommes porteront intérêts au taul légal à compter du 4 avril 2018 ;



DIT que les intérêts pourront eux mêmes produire intérêts aux conditions de l'article 1343-2 du code civil ;



CONDAMNE la société Corséa Promotion à verser aux époux [I] [Z] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;



REJETTE toutes autres demandes ;



CONDAMNE la société Corséa Promotion aux dépens et accorde à maître emmanuel Rouart, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.





LE GREFFIER LE PRÉSIDENT







S.MOLLÉ E.LOOS

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