24 novembre 2022
Cour d'appel de Chambéry
RG n° 22/01427

Chbre Sociale Prud'Hommes

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE











ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2022



N° RG 22/01427 - N° Portalis DBVY-V-B7G-HBZ3



Syndicat UNION SYNDICALE DES TRAVAILLEURS DE LA METALLURGIE CGT DE LA SAVOIE représentée par Monsieur Mickaël DELEMAR, son secrétaire général. etc...

C/ Syndicat L'UNION DES INDUSTRIES DE SAVOIE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège

etc...





Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CHAMBERY en date du 05 Juillet 2022, RG 22/00597





APPELANTS :



Syndicat UNION SYNDICALE DES TRAVAILLEURS DE LA METALLURGIE CGT DE LA SAVOIE représentée par Monsieur Mickaël DELEMAR, son secrétaire général.

[Adresse 5]

[Adresse 5]



Représenté par Me Elisabeth REPESSÉ, avocat plaidant inscrit au barreau de Paris

et par Me Guillaume PUIG, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY





Syndicat FEDERATION DES TRAVAILLEURS DE LA METALLURGIE CGT représentée par Monsieur [E] [V], son secrétaire général adjoint.

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par Me Elisabeth REPESSÉ, avocat plaidant inscrit au barreau de Paris

et par Me Guillaume PUIG, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY







INTIMES :



Syndicat L'UNION DES INDUSTRIES DE SAVOIE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représenté par Me Pierre SAFAR de la SELARL DUPUY AVOCATS, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

et par Me Franck GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY





SYNDICAT CFE-CGC DES DEUX SAVOIEDE LA METALLURGIE agissant poursuites et diligences de son représentant légal

en exercice demeurant es qualité

Maison des Syndicats

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représenté par Me Daniel SAADAT de la SELARL LPS AVOCATS ASSOCIES, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

et par Me Audrey BOLLONJEON de la SELARL BOLLONJEON, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY





UNION DES SYNDICATS DE LAMETALLURGIE FO DE SAVOIE Agissant poursuites et diligences de son représentant légal

en exercice, demeurant es qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 5]



Représenté par Me Daniel SAADAT de la SELARL LPS AVOCATS ASSOCIES, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

et par Me Audrey BOLLONJEON de la SELARL BOLLONJEON, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY





SYMETAL ALPES LOIRE CFDT agissant poursuites et diligences de son représentant légal

en exercice, demeurant es qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représenté par Me Daniel SAADAT de la SELARL LPS AVOCATS ASSOCIES, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

et par Me Audrey BOLLONJEON de la SELARL BOLLONJEON, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY





FEDERATION DE LA METALLURGIE CFE-CGC agissant poursuites et diligences de son représentant légal

en exercice, demeurant es qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]



Représenté par Me Daniel SAADAT de la SELARL LPS AVOCATS ASSOCIES, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

et par Me Audrey BOLLONJEON de la SELARL BOLLONJEON, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY





FEDERATION CONFEDEREE FORCEOUVRIERE DE LA METALLURGIE - FO METAUX agissant poursuites et diligences de son représentant légal

en exercice, demeurant es qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]



Représenté par Me Daniel SAADAT de la SELARL LPS AVOCATS ASSOCIES, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

et par Me Audrey BOLLONJEON de la SELARL BOLLONJEON, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY





FEDERATION GENERALE DES MINES ET DE LA METALLURGIE agissant poursuites et diligences de son représentant légal

en exercice, demeurant es qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]



Représenté par Me Daniel SAADAT de la SELARL LPS AVOCATS ASSOCIES, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

et par Me Audrey BOLLONJEON de la SELARL BOLLONJEON, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY







COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 27 Octobre 2022 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Frédéric PARIS, Président,

Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Sophie MESSA,










********

FAITS ET PROCÉDURE



Le représentant des employeurs, l'UIMM et les syndicats représentatifs de la branche de la métallurgie, la CGT, la CFDT, la CFE-CGC, et FO ont ouvert en 2016 une négociation pour créer une nouvelle convention collective nationale de branche.



La branche de la métallurgie est actuellement couverte par plusieurs conventions collectives, des accords et avenants nationaux de branche, une convention collective nationale applicable aux ingénieurs et cadres, une convention collective nationale de la sidérurgie et 76 conventions collectives territoriales de branche.



La nouvelle convention collective nationale de la métallurgie a été signée le 7 février 2022 par la CFDT, FO et la CFE-CGC.



Elle entre en application le 1er janvier 2024.



Un avenant en date du 9 février 2022 à la convention territoriale de la Savoie intitulé 'Avenant portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champ de la convention collective du 29/12/1975 modifié applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants' a été signé entre l'Union des industries de la Savoie et la CFDT, FO et la CFE-CGC, prévoyant que la convention collective du 29 décembre 1975 applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants et annexes 'sont abrogés et cessent de produire leurs effets à compter de l'entrée en vigueur de la convention collective nationale de la métallurgie' soit le 1er janvier 2024.



Le syndicat CGT a saisi le tribunal judiciaire à l'effet d'obtenir l'annulation de cet avenant.



Par jugement du 5 juillet 2022 le tribunal judiciaire de Chambéry a :

- constaté l'intervention volontaire de la Fédération de la Métallurgie CFE CGC, la Fédération FO de la Métallurgie, et la Fédération générale des Mines et de la Métallurgie,

- rejeté la demande de l'Union syndicale des travailleurs de la Métallurgie CGT de la Savoie (USTM CGT) et la Fédération des travailleurs de la Métallurgie CGT (FTM CGT) tendant à l'annulation de l'avenant du 9 février 2022, et au paiement de dommages et intérêts,

- condamné l'Union syndicale des travailleurs de la Métallurgie CGT de la Savoie (USTM CGT) et la Fédération des travailleurs de la Métallurgie CGT (FTM CGT) in solidum à payer à l'Union des industries et métiers de la Savoie la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et au Syndicat Métallurgie CFE-CGC des deux Savoie, à l'Union des Syndicats de la Métallurgie FO Savoie, à Symétal Alpes Loire CFDT, la Fédération de la Métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée FO de la Métallurgie et la Fédération générale des Mines et de la Métallurgie la somme de 250 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné l'Union syndicale des travailleurs de la Métallurgie CGT de la Savoie (USTM CGT) et la Fédération des travailleurs de la Métallurgie CGT (FTM CGT) aux dépens dont distraction au profit de la Selurl Bollonjeon,

- rejeté la demande tendant à ce que les frais d'exécution de la décision soient mis à la charge des demanderesses,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.



L'Union syndicale des travailleurs de la Métallurgie CGT de la Savoie (USTM CGT) et la Fédération des travailleurs de la Métallurgie CGT (FTM CGT) ont interjeté appel de l'intégralité des dispositions du jugement par déclaration du 28 juillet 2022 au réseau privé virtuel des avocats.



Par conclusions notifiées le 5 octobre 2022 auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, l'USTM CGT et Fédération FTM CGT demandent à la cour de :

- infirmer le jugement déféré,

statuant à nouveau,

- annuler en toutes ses dispositions l'avenant en date du 9 février 2022 portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champs de la convention collective du 29/12/1975 modifié applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants (IDCC n° 0822),

- condamner l'Union des Industries de la Savoie à payer à l'USTM CGT et Fédération FTM CGT à leur payer la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi et celle de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,









- condamner le Syndicat Métallurgie CFE-CGC des deux Savoie, l'Union des Syndicats de la Métallurgie FO Savoie, le Symétal Alpes Loire CFDT, la Fédération de la Métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée FO de la Métallurgie et la Fédération générale des Mines et de la Métallurgie à leur verser la somme de 6000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'Union des Industries de la Savoie et le Syndicat Métallurgie CFE-CGC des deux Savoie, l'Union des Syndicats de la Métallurgie FO Savoie, le Symétal Alpes Loire CFDT, la Fédération de la Métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée FO de la Métallurgie et la Fédération générale des Mines et de la Métallurgie aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Guillaume Puy avocat.



Ils soutiennent en substance que l'avenant dont les termes sont clairs a prévu de mettre fin à l'application de la convention collective territoriale de la Savoie et ses avenants, et d'abroger l'ensemble de ses dispositions qui cessent de produire ses effets à l'entrée en vigueur de la convention collective nationale de la Métallurgie.



Contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les parties n'ont pas entendu modifier les dispositions territoriales, l'objet de l'avenant étant de les abroger.



Le premier juge a donc dénaturé l'avenant et n'a pas statué sue la légalité de la 'révision-extinction'.



La disparition d'une convention collective est limitée à deux cas, sa dénonciation, ou sa mise en cause conformément aux articles L 2261-9 et suivants du code du travail.



La cour de cassation juge qu'un accord collectif reste en vigueur tant qu'il n'a pas été régulièrement dénoncé ou mis en cause ( Cass soc 25 avril 2001 n° 98-45.195 et n° 99-40.223).



L'article L 2261-9 prévoit que le délai de préavis précédant la dénonciation est de trois mois et que la dénonciation est notifiée à toutes les parties signataires de l'accord, et doit être déposée dans des conditions prévues par voie réglementaire.



L'article 2 de la convention collective territoriale prévoit que la durée de la convention est indéterminée sauf dénonciation.



Il stipule sur la révision que 'tant que les dispositions objet d'une demande de révision n'auront pas été remplacées par les dispositions nouvelles elles resteront en vigueur.'.

La procédure de révision ne peut pas avoir pour objet de mettre fin à un accord collectif.



En l'espèce l'avenant de révision n'est pas une révision de la convention collective au sens de l'article L 2261-8 du code du travail qui dispose que l'avenant portant révision de tout ou partie d'une convention ou d'un accord se substitue de plein droit aux stipulations de l'accord qu'il modifie.



Or l'avenant prévoit une abrogation.



Il appartenait à l'Union des Industries de la Savoie de dénoncer l'accord collectif, ce qu'elle n'a pas fait en utilisant une procédure de révision-extinction hybride et illicite.





Si les délais de la procédure de dénonciation étaient jugés trop longs, il était possible de réviser la convention collective en réduisant les délais, ce qui a été pratiqué dans le département de la Loire, la CGT parfaitement ouverte au dialogue ayant signé l'avenant de la révision.



L'Union des Industries de la Savoie connaissait les règles applicables et a voulu s'affranchir des contraintes résultant de la dénonciation.



La procédure de résiliation par consentement mutuel invoquée par l'Union des Industries de la Savoie n'existe pas dans le droit positif.



L'avenant de révision est donc illégal et doit être annulé.



L'Union des Industries de la Savoie ne peut se prévaloir d'une résiliation par consentement mutuel en se fondant sur un précédent des Industries de la Savoie jurisprudentiel validant une clause 'annule et remplace' alors qu'en l'espèce, il s'agit d'une abrogation.



La résiliation par consentement mutuel n'existe pas dans le droit positif.



Les parties à l'avenant 'révision-extinction' ont porté atteinte au droit de négociation collective, qui est un droit fondamental résultant de l'alinéa 8 du préambule de la constitution.



L'atteinte à la violation de l'intérêt collectif de la profession est manifeste, ce qui justifie la demande de dommages et intérêts de 10 000 €.



Par conclusions notifiées le 9 septembre 2022 auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, l'Union des industries et métiers de la Savoie demande à la cour de confirmer le jugement et de lui allouer une somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Elle fait valoir que tout contrat peut faire l'objet d'un accord mutuel portant sur sa résiliation.



Il s'agit d'une pratique courante dans le domaine des accords collectifs lorsque des partenaires sociaux négocient une nouvelle convention collective stipulant qu'elle annule et remplace l'ancienne convention collective.



La cour de cassation juge licite la clause 'annule et remplace' (Cass soc 11 juin 1980 n° 78-41.209.



La révision d'un accord peut porter sur tout ou partie de l'accord ainsi que le prévoit l'article L 2261-8 du code du travail. Elle peut mettre fin à l'accord collectif.



L'accord contesté en l'espèce est un accord de révision. qui respecte les règles du code civil et les règles de négociation et de capacité des articles L 2261-7 et L 2261-8 du code du travail, les règles de la majorité issues de l'article L 2232-6 du code du travail. Sur le contenu de la révision, il n'existe pas de règles spécifiques, et c'est le droit commun du contrat qui s'applique.





Si la cour de cassation notamment dans son arrêt du 25 avril 2001 énonce qu' 'un accord d'entreprise demeure en vigueur tant qu'il n'a pas été régulièrement dénoncé ou mise en cause', cela ne signifie pas qu'un accord d'entreprise demeurerait en vigueur sauf dans les seules hypothèses de la dénonciation ou de la mise en cause.



Il n'existe pas une liste limitative concernant les modes d'extinction d'une convention collective.



Il n'y pas d'interprétation possible, l'accord de révision a mis fin à l'accord territorial de la Savoie.



Elle se fonde sur deux avis de deux professeurs de droit versés au dossier.



L'avis du Lamy Social affirmant que seules la dénonciation et la mise en cause peuvent mettre fin à un accord collectif est inexact.



En outre le Lamy social cite la nullité comme forme de rupture, et la caducité dans le guide pratique 'Le Lamy négociation d'entreprise'.



La documentation sociale [R] [M] ne cite les arrêts cités par la CGT qu'à titre d'exemples de dénonciation irrégulière.



Il ne s'agit pas d'une dénonciation mais d'un accord. Les effets protecteurs liés à la dénonciation sont le corollaire de son caractère unilatéral.



Un accord collectif majoritaire peut éteindre les dispositions d'une convention collective territoriale de branche.



Par cette procédure, les intérêts des salariés sont préservés puisqu'il n'existera aucun vide conventionnel, l'extinction de la convention collective territoriale étant concomitante avec l'entrée en vigueur de la nouvelle convention collective nationale. Les partenaires ont considéré que celle-ci serait plus favorable aux salariés.



Si la procédure de dénonciation a été mise en oeuvre dans la Loire, c'est parce que la procédure de révision avait échoué.



Les parties signataires ont mis fin à l'accord territorial par la négociation collective et elles n'ont pas porté atteinte au droit à la négociation collective comme prétendu à tort par la CGT.



Par conclusions notifiés le 23 septembre 2022, auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, le Syndicat Métallurgie CFE-CGC des deux Savoie, l'Union des Syndicats de la Métallurgie FO Savoie, le Symétal Alpes Loire CFDT, la Fédération de la Métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée FO de la Métallurgie et la Fédération générale des Mines et de la Métallurgie demandent à la cour de confirmer le jugement, débouter l'Union syndicale des travailleurs de la métallurgie CGT de la Savoie et la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT de leurs demandes, et de leur allouer 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.







Elles exposent que pour modifier un accord collectif les partenaires sociaux disposent du mécanisme de la révision, de la dénonciation et de la substitution des accords.



La disparation de la convention territoriale peut intervenir à la suite d'une procédure de révision ou de dénonciation.



Si la procédure de révision échoue, le texte initial reste en vigueur alors que dans le cadre de dénonciation, si la négociation d'une nouvelle convention échoue, l'accord dénoncé disparaît.



La procédure de révision est donc plus respectueuse du consensualisme que la procédure de dénonciation et plus protectrice des intérêts des salariés.



La demande de révision était accompagnée d'un projet d'avenant. Elle est régulière et conforme aux articles L 2261-7 et L 2261-8 du code du travail.



La CGT a participé aux discussions et n' a jamais contesté la procédure choisie.



Elle prétend que la procédure de révision ne peut porter que sur une partie du texte et qu'elle ne peut aboutir à la disparition d'un accord.



Mais le code du travail ne prévoit pas que la révision est réservée à la modification partielle d'un texte.



La cour de cassation a posé très récemment le principe de liberté contractuelle des partenaires sociaux, elle a dans un arrêt du 7 avril 2022 (n° 20-18799) rappelé que les partenaires sociaux étaient libres de fixer le périmètre de la CPPNI.



Les partenaires sociaux sont donc libres dans le cadre d'un avenant de révision de déterminer le contenu de cet avenant de révision.



En l'espèce, ils étaient libres de prévoir une extinction de la convention collective territoriale.



A défaut de clause contraire dans le code du travail la révision peut aboutir à la disparition d'un texte.



A titre subsidiaire, si la cour considère que les partenaires sociaux ont à tort qualifié l'accord d'accord de révision, elle pourra qualifier l'accord comme un accord de dénonciation conformément à l'article 12 du code de procédure civile, les modalités de la procédure de dénonciation prévues par les articles L 2261-9 et suivants du code du travail ayant été respectées.



La procédure de négociation a respecté l'ensemble des droits des partenaires sociaux, la convention territoriale continuant à s'appliquer jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle convention collective ; le droit à la négociation collective a été préservé et l'avenant peut s'analyser comme un accord de substitution et la garantie légale de rémunération est reprise dans la nouvelle convention collective.



En tout état de cause, quelque soit la dénomination donnée à l'accord, l'irrégularité éventuelle n'est pas susceptible d'entraîner la nullité de l'accord.



La procédure de négociation a été choisie par les partenaires sociaux, une négociation a été ouverte, la loyauté de la négociation n'est pas mise en cause par la CGT, un avenant a été conclu et signé.



A titre infiniment subsidiaire, la disparition de la convention collective territoriale est la conséquence de la négociation d'une convention collective unifiée.



C'est à tort que la CGT affirme qu'il n'existe que la procédure de dénonciation pour mettre fin à un accord collectif.



Il existe également le mécanisme de la caducité des accords, l'application de la clause résolutoire et le mécanisme de substitution prévu en cas de fusion de conventions collectives de branches.



Sur ce dernier point, le nouvel article L 2261-33 du code du travail prévoit qu'en cas de fusion des champs d'application de plusieurs conventions collectives, les dispositions applicables avant la fusion lorsqu'elles régissent des situations équivalentes sont remplacées par des stipulations communes dans un délai de cinq ans à compter de la date d'effet de la fusion ou du regroupement. Pendant ce délai , la branche issue du regroupement peut maintenir plusieurs conventions collectives.



En l'espèce, la négociation du socle commun de la négociation de la convention collective de la métallurgie a été initiée spontanément par les partenaires sociaux de manière concomitante à la restructuration des branches professionnelles permettant d'aboutir à une seule convention collective.



Cet objectif de fusion était clairement énoncé dans l'accord de méthode.



Il résulte de l'article L 2261-33 du code du travail qu'à l'issue de la négociation suivant un accord de fusion, les dispositions communes remplacent les accords collectifs visés dans l'accord de champ.



Les partenaires sociaux en procédant par la procédure de révision ont évité cette substitution automatique et laissaient la possibilité aux territoires de conclure des accords autonomes sur des sujets particuliers tout en disposant d'un socle commun.



L'instruction de l'affaire a été clôturée le 27 octobre 2022.










MOTIFS DE LA DÉCISION



La révision des accords collectifs est prévue par les articles L 2261-7 et suivants du code du travail.



Ces dispositions ne définissent pas la révision.



L'initiative d'engager la procédure de révision appartient à l'une des organisations syndicales de salariés représentatives ou aux organisations professionnelles d'employeurs en application de l'article L L 2261-7-1 du code du travail.



En vertu de l'article L 2261-8 du code du travail l'avenant portant révision de tout ou partie d'une convention ou d'un accord se substitue de plein droit aux stipulations de la convention ou de l'accord qu'il modifie.



La chambre sociale de la cour de cassation dans un arrêt du 25 avril 2001 (n° 98-45.195) a jugé 'qu'un accord d'entreprise demeure en vigueur tant qu'il n'a pas été régulièrement dénoncé ou mis en cause.'.



Aucune disposition du code du travail ne prévoit que la révision peut porter sur la disparation ou l'abrogation totale d'un accord collectif.



Il en résulte que la procédure de révision est relative aux modifications des conventions collectives ou des accords collectifs et non de leur extinction.



La chambre sociale de la cour de cassation a jugé aussi que la caducité est un mode d'extinction d'une convention collective.



En l'espèce, il résulte de l'avenant du 9 février 2022 portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champs de la convention collective du 29 décembre 1975 modifiée applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants que les signataires de l'avenant ont exposé en préambule que dans la perspective de l'application de la convention collective nationale de la métallurgie à compter du 1er janvier 2024, que la convention collective applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants ont vocation à disparaître à compter de cette date.



L'intention des signataires est donc claire et non équivoque, l'avenant est destiné à mettre fin à la convention territoriale de la Savoie.



Au titre de l'objet de l'avenant, les partenaires sociaux ont convenu que la convention collective du 29 décembre 1975 applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants et annexes 'sont abrogés et cessent de produire leurs effets à compter de l'entrée en vigueur de la convention collective nationale de la métallurgie.



Il est stipulé que l'avenant est à durée indéterminée et qu'il 'entre en vigueur au lendemain de la date de son dépôt et entraîne la révision-extinction des dispositions territoriales aux dates indiquées aux articles précédents.'.



Il résulte des termes mêmes de cet avenant que ce dernier ne porte pas sur une modification de la convention collective territoriale, que celle-ci n'est donc pas révisée mais abrogée.



La procédure de révision est distincte de la procédure de dénonciation et les partenaires sociaux ne pouvaient se méprendre sur le sens de l'accord de 'révision-extinction'.



L'avenant ne peut être interprété comme une dénonciation, les parties signataires n'ayant pas volontairement choisi la procédure de dénonciation des articles 2261-9 et suivants du code du travail.



En outre, l'avenant ne constitue pas une simple modification de l'accord, en particulier sur sa durée de vie, par l'adoption d'une clause stipulant une durée déterminée, l'avenant prévoyant expressément sa disparation.



Il ne peut être tiré des termes de l'avenant exposés ci-avant que la révision est valide car elle porte sur la survivance de la convention territoriale jusqu'à l'application de la nouvelle convention collective alors même que l'objet de la révision est l'extinction de la convention collective territoriale.



Juger le contraire permettrait d'imposer une révision dans un cas non prévu par le code du travail et de forcer les textes.



De plus l'extension des règles de la révision à la disparition d'une convention collective, en ce qui concerne la procédure, la date d'effet et les conséquences de la révision ne peuvent s'appliquer à l'extinction d'une convention collective, en particulier la possibilité de prévoir l'extinction ou l'abrogation de la convention collective par une révision adoptée en vertu de la règle de la majorité et d'imposer ainsi à une organisation syndicale non signataire une extinction sans passer par la procédure de la dénonciation et les garanties y étant attachées.



Ces garanties sont celles notamment du préavis de trois mois qui doit précéder la dénonciation, la notification de la dénonciation aux autres signataires de la convention, ainsi que le prévoit l'article L 2261-9 du code du travail et celles des effets attachés à la dénonciation d'une seule partie signataire, l'article 2261-11 du code du travail prévoyant dans ce cas que les dispositions de la convention ou de l'accord continue de produire effet à l'égard de l'auteur de la dénonciation jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis, sauf clause prévoyant une durée déterminée supérieure.



L'avenant ne peut non plus être qualifié d'accord de révocation par consentement mutuel, par application des règles du droit commun des contrats, alors que l'un des partenaires sociaux ayant appliqué la convention territoriale depuis sa signature s'oppose à la signature d'un tel accord.



Le permettre serait également imposer à un partenaire social une révocation sans passer par la procédure de dénonciation des articles L 2261-9 et suivants du code du travail et l'application des dispositions protectrices suscitées de l'article L 2261-11.



La convention territoriale de la Savoie stipule encore que 'la présente convention est conclue pour une durée indéterminée sauf dénonciation par l'une des parties contractantes avec un préavis d'un mois.'



Les parties ont ainsi prévu expressément qu'il ne pourra être mis fin à la convention collective sauf dénonciation.



Il appartenait à l'un des partenaires sociaux de mettre en oeuvre la procédure de dénonciation.



En appliquant l'avenant litigieux, il était acté que la convention territoriale de la Savoie disparaissait, il n'existait donc aucune négociation possible sur la survie de cette convention notamment sur les garanties qu'elle apportait aux salariés par rapport à la convention nationale de la métallurgie.







Il ne s'agit nullement d'une irrégularité de procédure, la révision ayant été adoptée en violation de l'article 2 de la convention collective territoriale de la Savoie et des dispositions du code du travail relatives à la procédure de dénonciation.



Enfin, il ne peut être invoqué l'article L 2261-33 du code du travail, le litige ne s'inscrivant pas dans la procédure de fusion de l'article L 2261-32 initiée par le ministre du travail.



L'accord de révision-révocation sera annulé et le jugement sera infirmé. .



En n'utilisant pas la procédure de dénonciation, et les garanties prévues par le code du travail, l'UIMM a porté atteinte aux intérêts collectif de la profession.



Il sera alloué en conséquence à l'USTM CGT et la Fédération FTM CGT des dommages et intérêts de 1500 €.







PAR CES MOTIFS



La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;



INFIRME le jugement en date 5 juillet 2022 rendu par le tribunal judiciaire de Chambéry ;



Statuant à nouveau,



ANNULE en toutes ses dispositions l'avenant en date du 9 février 2022 portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champs de la convention collective du 29/12/1975 modifié applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants (IDCC n° 0822),



CONDAMNE l'Union des Industries de la Savoie à payer à l'USTM CGT et Fédération FTM CGT la somme de 1500 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi ;



Vu l'article 700 du code de procédure civile,



CONDAMNE l'Union des Industries de la Savoie à payer à l'USTM CGT et Fédération FTM CGT la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



CONDAMNE le Syndicat Métallurgie CFE-CGC des deux Savoie, l'Union des Syndicats de la Métallurgie FO Savoie, le Symétal Alpes Loire CFDT, la Fédération de la Métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée FO de la Métallurgie et la Fédération générale des Mines et de la Métallurgie à payer à l'USTM CGT et Fédération FTM CGT la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;









CONDAMNE l'Union des Industries de la Savoie et le Syndicat Métallurgie CFE-CGC des deux Savoie, l'Union des Syndicats de la Métallurgie FO Savoie, le Symétal Alpes Loire CFDT, la Fédération de la Métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée FO de la Métallurgie et la Fédération générale des Mines et de la Métallurgie aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Guillaume Puy avocat.





Ainsi prononcé publiquement le 24 Novembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Frédéric PARIS, Président, et Mme Capucine QUIBLIER, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.













Le Greffier Le Président

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