17 novembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-18.047

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:C201174

Titres et sommaires

PARTAGE - Licitation - Vente - Jugement d'adjudication - Effets - Titre d'expulsion (non)

Un jugement de vente sur adjudication par licitation ne vaut pas titre d'expulsion

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures d'exécution forcée - Expulsion - Conditions - Titre - Jugement d'adjudication sur licitation

INDIVISION - Vente - Adjudication d'un bien indivis - Licitation - Jugement d'adjudication - Effets - Titre d'expulsion (non)

ADJUDICATION - Licitation-partage - Jugement - Effets

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 17 novembre 2022




Cassation sans renvoi


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1174 F-B

Pourvoi n° E 20-18.047

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [G], veuve [K].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 12 novembre 2020.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 NOVEMBRE 2022

Mme [N] [G], veuve [K], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 20-18.047 contre l'arrêt rendu le 3 octobre 2019 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la proximité), dans le litige l'opposant à la société Intramuros, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de Mme [G], veuve [K], de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Intramuros, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 3 octobre 2019), à la requête du liquidateur de Mme [G], par jugement du 27 août 2015, confirmé par un arrêt du 14 septembre 2016, il a été ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l'indivision existant entre Mme [G] et sa fille, Mme [K], sur un bien immobilier.

2. Par jugement d'adjudication sur licitation du 18 mai 2018, il a été procédé à la vente de cet immeuble au bénéfice de la société Intramuros.

3. Sur appel de ce jugement, par arrêt du 28 février 2019, une cour d'appel a notamment déclaré irrecevable l'appel de Mme [G] à l'encontre de ce jugement et rejeté les demandes de Mme [K].

4. Par acte du 21 juin 2018, la société Intramuros a fait délivrer à Mme [G] un commandement de quitter les lieux dans le délai de deux mois.

5. Le 9 août 2018, Mme [G] a saisi un juge de l'exécution en nullité de ce commandement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Mme [G] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en nullité du commandement de quitter les lieux, alors « que les articles L. 642-18 du code de commerce, L. 311-6 et L. 322-13 du code des procédures civiles d'exécution ne sont pas applicables à la vente sur licitation ordonnée en vue du partage d'une indivision ; que, dès lors, en déduisant de ces textes que Mme [G], du fait de sa qualité de saisie, ne pouvait se fonder sur les articles 621 et 764 du code civil pour faire valoir ses droits d'usufruitière et d'usage et d'habitation, la cour d'appel a violé les articles L. 642-18 du code de commerce, L. 311-6 et L. 322-13 du code des procédures civiles d'exécution, par fausse application, ensemble les articles 621 et 764 du code civil, par refus d'application. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 322-13 du code des procédures civiles d'exécution et les articles 1271 à 1281 et 1377 du code de procédure civile :

7. S'il résulte de la combinaison des articles 1377 et 1271 à 1281 du code de procédure civile relatives à la vente sur licitation que de nombreuses règles régissant la procédure de saisie immobilière s'appliquent, par renvoi de texte, à la procédure de vente judiciaire d'immeubles après partage, l'article L. 322-13 du code des procédures civiles d'exécution ne lui est pas applicable.

8. Il en résulte qu'un jugement de vente sur adjudication par licitation ne vaut pas titre d'expulsion.

9. Pour confirmer le jugement ayant rejeté la demande de nullité du commandement d'avoir à quitter les lieux, l'arrêt retient, d'abord, que la vente des immeubles d'une personne physique en liquidation judiciaire est régie par l'article L. 642-18 du code de commerce, lequel renvoie aux articles L. 322-5 à L. 322-13 du code des procédures civiles d'exécution à l'exception des articles L. 322-6 et L. 322-9, R. 642-27 et suivants du code de commerce renvoyant aux dispositions du code des procédures civiles d'exécution relatives à la saisie immobilière.

10. L'arrêt retient, ensuite, que l'article L. 322-13 du code des procédures civiles d'exécution précise que le jugement d'adjudication sur licitation constitue un titre d'expulsion à l'encontre du saisi conformément à l'article L. 311-6 de ce code.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

12. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

13. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

14. Il résulte des paragraphes 7 et 8 que le jugement d'adjudication sur licitation ne valant pas titre d'expulsion, il convient d'annuler le commandement de quitter les lieux du 21 juin 2018.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Infirme le jugement du 27 février 2019 ;

Annule le commandement de quitter les lieux du 21 juin 2018 ;

Condamne la société Intramuros aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel de Rouen ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées tant devant la cour d'appel de Rouen que devant la Cour de cassation ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme [G], veuve [K]

Mme [G] fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté sa demande en nullité du commandement de quitter les lieux ;

ALORS QUE les articles L. 642-18 du code de commerce, L. 311-6 et L. 322-13 du code des procédures civiles d'exécution ne sont pas applicables à la vente sur licitation ordonnée en vue du partage d'une indivision ; que, dès lors, en déduisant de ces textes que Mme [G], du fait de sa qualité de saisie, ne pouvait se fonder sur les articles 621 et 764 du code civil pour faire valoir ses droits d'usufruitière et d'usage et d'habitation, la cour d'appel a violé les articles L. 642-18 du code de commerce, L. 311-6 et L. 322-13 du code des procédures civiles d'exécution, par fausse application, ensemble les articles 621 et 764 du code civil, par refus d'application.

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