26 octobre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-50.047

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:C100786

Titres et sommaires

MAGISTRAT - Nomination à d'autres fonctions judiciaires - Cessation des anciennes fonctions - Date de prise des nouvelles fonctions - Définition - Date d'installation

Aux termes de l'article 7, alinéa 1, de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, les magistrats sont installés dans leurs fonctions en audience solennelle de la juridiction à laquelle ils sont nommés ou rattachés. Il en résulte que c'est l'installation des magistrats qui fixe la date de la prise des nouvelles fonctions et, par voie de conséquence, de la cessation des anciennes

Texte de la décision

CIV. 1

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 octobre 2022




Cassation


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 786 F-B

Pourvoi n° G 21-50.047




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 OCTOBRE 2022

Le procureur général près la cour d'appel de Douai, domicilié en son parquet général, [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 21-50.047 contre l'arrêt rendu le 20 mai 2021 par la cour d'appel de Douai (audience solennelle), dans le litige l'opposant à M. [L] [B], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kerner-Menay, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [B], et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Kerner-Menay, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 20 mai 2021), le 6 décembre 2019, Mme [Z], agissant en qualité de procureure générale près la cour d'appel de Douai, a saisi le conseil régional de discipline des barreaux du ressort de cette cour d'appel, aux fins de poursuites disciplinaires à l'encontre de M. [B], avocat au barreau d'Avesnes-sur-Helpe, condamné définitivement le 27 juillet 2017 pour violation du secret professionnel.

2. Celui-ci a soulevé une exception d'irrecevabilité de la saisine, au motif que Mme [Z] n'avait plus qualité pour y procéder, dès lors qu'elle avait été nommée procureure générale près la cour d'appel d'Aix-en-Provence par décret du président de la République du 2 décembre 2019, publié au Journal officiel le 4 décembre 2019.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Le procureur général près la cour d'appel de Douai fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'acte de saisine du conseil régional de discipline par Mme [Z], alors « que la décharge d'un magistrat, fut-il procureur général, est effective, par application de l'article 7 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, non pas à compter de la date du décret de nomination ou de sa publication mais à compter de sa date d'installation dans ses nouvelles fonctions, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 7, alinéa 1, de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 :

4. Aux termes de ce texte, les magistrats sont installés dans leurs fonctions en audience solennelle de la juridiction à laquelle ils sont nommés ou rattachés.

5. Il en résulte que c'est l'installation des magistrats qui fixe la date de la prise des nouvelles fonctions et, par voie de conséquence, de la cessation des anciennes.

6. Pour déclarer irrecevable l'acte de saisine du conseil régional de discipline par Mme [Z], l'arrêt retient que M. [B] est bien fondé à soutenir qu'à la date de cette saisine le 6 décembre 2019, la magistrate n'avait plus qualité pour agir dès lors qu'elle avait été déchargée de ses fonctions de procureure générale près la cour d'appel de Douai par décret.

7. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que Mme [Z] avait été installée dans ses nouvelles fonctions de procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 2 janvier 2020, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [B] ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille vingt-deux.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par le procureur général près la cour d'appel de Douai

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé madame [W] [Z] irrecevable à . introduire un recours, le 6 décembre 2020, contre la décision rendue par l'instance disciplinaire à l'encontre d'un avocat au motif qu'elle avait été déchargée des fonctions de·procureur général près la cour· d'appel de Douai par Décret du 2 décembre 2019.

AU MOTIF QUE :

« Aux termes de l'article 23 de la loi n071-1J30 du 31 décembre 1971 portant réforme de certames professions judiciaires et juridiques: « l'instance discipline tire compétente en application de l'article 22 est saisie par le procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle elle est instituée ou le bâtonnier dont relève l'avocat mis en cause ».

Maître [L] [B] étant avocat au barreau d'Avesnes-sur-Helpe, le conseil de discipline des avocats des barreaux du ressort de la cour d'appel de Douai devait en conséquence être par le procureur général près la cour d'appel de Douai.

Il résulte du décret du 2 décembre 2019 publié au journal officiel de la Républiqùe française du 4 décembre 2019 que, par décret du président de la· République Française en date du 2 décembre 2019, Madame [W] [Z], avocate générale à la Cour de cassation, est déchargée des fonctions de procureur générale près la cour d'appel de Douai et chargée des fonctions de procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence ».

Certes, il est bien exact,comme le soutient le parquet général, que la prise de fonction de Madame [Z] en qualité de procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence n'est intervenue qu'à la date de son installation dans ses nouvelles fonctions, en application de l'article 7 de l'ordonnance de n°058270 du 22 décembre 1958, cette installation ayant été réalisée le 2 janVier 2020.

Il n'en demeure pas moins, que Maître [B] est bien fondé à soutenir qu'à la date du 6 décembre 2019, quand elle a saisi le conseil régional de discipline, Madame [Z] n'avait plus qualité pour saisir cette instance disciplinaire, dès lors qu'elle avait été déchargée des fonctions de procureure générale près la cour d'appel de Douai par décret, dont Maître [B] peut se prévaloir puisqu'il avait été publié au journal officiel du 4 décembre 2019.

Ne peut être retenu l'argument soulevé par le parquet général au terme duquel il convenait d'assurer la continuité du service public de la justice, alors même qu'il rappelle que le parquet est indivisible dans son organisation et son fonctionnement, et que le premier avocat général avait toute qualité pour saisir l'instance disciplinaire.

Sera en conséquence confirmée la décision du conseil régional de discipline des barreaux du ressort de la cour d'appel de Douai en ce qu'il a déclaré irrecevable l'acte de saisine du-dit conseil en date du décembre 2019 à l'encontre de Monsieur le bâtonnier [L] [B] par Madame la procureure générale de la cour d'appel de Douai ainsi que la procédure subséquente. »

ALORS QUE : "La décharge des fonctions d'un magistrat, procureur général, est effective, par application de l'article 7 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, non pas à compter de la date du décret de nomination ou de sa publication mais à compter de la date d'installation dans ses nouvelles fonctions.

En statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

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