30 septembre 2022
Cour d'appel de Rennes
RG n° 19/04309

2ème Chambre

Texte de la décision

2ème Chambre





ARRÊT N°483



N° RG 19/04309

N° Portalis DBVL-V-B7D-P4NL





(1)







SAS BONJOUR CARAVANING



C/



Mme [B] [C] épouse [N]

M. [G] [N]



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée















Copie exécutoire délivrée



le :



à :

- Me BIHAN

- Me LEMBO







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 30 SEPTEMBRE 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,





GREFFIER :



Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé





DÉBATS :



A l'audience publique du 21 Juin 2022





ARRÊT :



Contradictoire, prononcé publiquement le 30 Septembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats





****





APPELANTE :



SAS BONJOUR CARAVANING

[Adresse 6]

[Localité 2]



Représentée par Me Gwendal BIHAN de la SELARL ARVOR AVOCATS ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES





INTIMÉS :



Madame [B] [C] épouse [N]

née le 15 Mai 1951 à [Localité 3] (MORBIHAN)

[Adresse 1]

[Localité 3]



Monsieur [G] [N]

né le 21 Décembre 1949 à [Localité 5] (Côtes d'Armor)

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représenté par Me François LEMBO de la SELARL SELARL GUITARD & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES












EXPOSÉ DU LITIGE



Selon bon de commande du 9 avril 2015, M. [G] [N] et Mme [B] [C] (les époux [N]) ont, moyennant le prix de 27 000 euros TTC, commandé auprès de la société Bonjour Caravaning un camping-car d'occasion mis en circulation en 2004 et présentant un kilométrage de 87 400 km.

Le véhicule, livré le 19 mai 2015, est tombé en panne le 18 juin suivant.



Se fondant sur les conclusions d'une expertise extrajudiciaire organisée par leur assureur de protection juridique et concluant à l'existence de divers défauts, dont la corrosion du câblage des freins ayant provoqué la panne, les acheteurs ont, par acte du 24 novembre 2016, fait assigner le vendeur devant le tribunal de grande instance de Vannes en résolution de la vente pour vices cachés, ou subsidiairement au titre de la garantie légale de conformité ou de la garantie contractuelle.

Par jugement du 26 mars 2019, le premier juge a :


prononcé la résolution de la vente du camping-car Fiat immatriculé [Immatriculation 4] intervenue le 19 mai 2015 entre la société Bonjour Caravaning et les époux [N] sur le fondement de la garantie des vices cachés,

condamné la société Bonjour Caravaning à restituer aux époux [N] la somme de 27 213, 50 euros,

enjoint aux époux [N] de restituer le camping-car à la société Bonjour Caravaning dès paiement de la somme susdite,

débouté les époux [N] de leur demande en paiement de dommages-intérêts,

condamné la société Bonjour Caravaning à payer aux époux [N] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la société Bonjour Caravaning aux dépens,

ordonné l'exécution provisoire de la décision,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.




Prétendant que la preuve de l'existence d'un vice rédhibitoire du camping-car n'était pas rapportée, la société Bonjour Caravaning a relevé appel de cette décision le 28 juin 2019, pour demander à la cour de l'infirmer et de :


à titre principal, débouter les époux [N] de leur demande de résolution de la vente,

débouter les époux [N] de leur demande en paiement de dommages-intérêts complémentaires,

condamner reconventionnellement les époux [N] au paiement de la somme de 17 213,50 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation des conséquences dommageables de l'exécution provisoire du jugement attaqué,

condamner les époux [N] au paiement d'une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.






Les époux [N] concluent quant à eux à la confirmation de la décision attaquée, sauf en ce qu'elle a rejeté leur demande en paiement de dommages-intérêts, sollicitant à cet égard le paiement d'une somme de 5 000 euros.

Subsidiairement, en cas de rejet de leur action en résolution de la vente, ils demandent à la cour de condamner la société Bonjour Caravaning, sur le fondement de la garantie légale de conformité, au paiement d'une somme de 4 960,18 euros au titre des frais de réparation du véhicule.

Ils réclament enfin la condamnation de la société Bonjour Caravaning au paiement d'une indemnité de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.



Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour la société Bonjour Caravaning le 27 avril 2022 et pour les époux [N] le 27 avril 2022, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 12 mai 2022.





EXPOSÉ DES MOTIFS



Il résulte du rapport d'expertise extrajudiciaire établi par le cabinet BCA, commis par l'assureur de protection juridique des époux [N], qu'un phénomène de corrosion affecte la ligne d'échappement, le berceau, la traverse avant-gauche, les tuyaux de direction assistée ainsi que le système de freinage, la rouille du câblage des freins ayant provoqué l'immobilisation du véhicule du 18 juin 2015, et que, de surcroît, les plaquettes et les disques des freins avants sont à remplacer et le radiateur-condenseur du système de climatisation présente une fuite.

L'expert souligne aussi que, selon le devis de réparation établi par le garage Pailloux qui a procédé au dépannage du véhicule après la panne, le coût des réparations s'élève à 4 960,18 euros TTC.



La société Bonjour Caravaning soutient que la cour ne saurait se baser sur cette expertise extrajudiciaire non contradictoire, rédigée à la demande de l'assureur de protection juridique des acquéreurs et qui ne serait corroborée par aucun élément extrinsèque.

Cependant, s'il est exact que les opérations d'expertise ont été réalisées en l'absence de la société Bonjour Caravaning qui n'a pas déféré à la convocation de l'expert, il doit être observé que, comme le soulignent à juste titre les intimés, ses conclusions sont corroborées par le devis de réparation du garage Pailloux confirmant la nécessité de changer divers éléments de l'échappement, de la direction et du système de freinage.

L'appelante a de surcroît elle-même produit son propre 'devis suite expertise', proposant le remplacement de l'échappement, du radiateur-condenseur de climatisation, du câblage de frein à main, ainsi que le démontage et le nettoyage des tambours de freins avec remplacement des mâchoires.



La société Bonjour Caravaning soutient par ailleurs que l'expert se serait borné à établir une liste des défauts invoqués par les époux [N], sans procéder à leur analyse technique ni démontrer leur caractère de vice caché rédhibitoire, alors que, selon elle, le camping-car, âgé de 11 ans et ayant déjà parcouru près de 90 000 km au moment de la vente, aurait été dans un état d'usure normal, ou en tous cas affecté de défauts mineurs facilement réparables pour un coût total ressortant, selon le devis qu'elle a elle-même établi, à 2 145,24 euros TTC.

Pourtant, ainsi que l'a exactement relevé le premier juge, les acheteurs sont tombés en panne le 18 juin 2015, soit à peine plus de deux mois après la vente, et les défauts constatés procèdent pour la plupart d'un phénomène de corrosion, par nature évolutif et nécessairement présent deux mois auparavant, de sorte que la preuve de l'antériorité à la vente des vices affectant le camping-car est rapportée.

Par ailleurs, si le procès-verbal de contrôle technique du 15 mai 2015 relevait déjà la corrosion du berceau et d'une traverse ainsi que la détérioration du silencieux d'échappement, rien ne pouvait révéler à des acquéreurs non professionnels le dysfonctionnement des organes de freinage et de direction, de sorte que ces défauts doivent être regardés comme cachés au moment de la vente.

En outre, de tels défauts, affectant des organes dont la défaillance est susceptible de toucher à la sécurité du véhicule, et dont l'un d'eux a en tous cas entraîné son immobilisation le 18 juin 2015, rendent nécessairement ce dernier impropre à son usage, quand bien même il s'agissait d'un véhicule d'occasion dont, au demeurant, le kilométrage n'était pas considérable.

De même, ces défauts affectant le véhicule ne sauraient être qualifiés de mineurs, alors qu'ils concernent des organes de sécurité et que le coût de réparation est, quel que soit le devis auquel on se réfère, substantiel.



En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a prononcé la résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés, condamné la société Bonjour Caravaning à restituer le prix de vente de 27 000 euros ainsi que les frais de la vente consistant dans le coût du certificat d'immatriculation de 213,50 euros, et enjoint aux époux [N] de restituer le véhicule.



Il résulte par ailleurs de l'article 1645 du code civil que le vendeur professionnel, réputé connaître les vices affectant la chose vendue, est tenu de réparer l'intégralité du préjudice subi par l'acheteur.

En l'occurrence, les époux [N] sollicitent l'octroi de dommages-intérêts à l'effet de réparer la privation de jouissance du véhicule impropre à son usage, les ayant notamment exposés à régler des frais d'hôtel ainsi que des frais d'assurance du véhicule.

Ils ont en effet été privés de la jouissance de leur camping-car depuis la panne du 18 juin 2015 jusqu'à sa restitution courant 2020, le rapprochement du devis de réparation du garage Pailloux et de la facture de revente du véhicule par la société Bonjour Caravaning après restitution révélant que celui-ci a été immobilisé depuis la panne de 2015.

En outre, ils ont, durant cette période, exposé des frais d'assurance en pure perte sans aucun lien avec l'usage du véhicule qui se trouvait immobilisé du fait des vices l'affectant.

Il sera en conséquence alloué une somme de 2 800 euros à titre de dommages-intérêts en réparation exacte et intégrale de leur préjudice économique et de jouissance.



La société Bonjour Caravaning estime que l'exécution provisoire du jugement attaqué lui aurait fait subir un préjudice de 17 213, 50 euros procédant de la différence entre la condamnation qu'elle a réglée et le prix de revente du véhicule de 10 000 euros.





5





Mais, si l'exécution provisoire est en effet toujours réalisée aux risques et périls de la partie qui poursuit l'exécution, la condamnation exécutée a en l'espèce été confirmée, de sorte que la poursuite n'était pas fautive et que la demande reconventionnelle de l'appelante est dénuée de fondement.



Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge des époux [N] l'intégralité des frais exposés par eux à l'occasion de l'instance d'appel et non compris dans les dépens, en sorte qu'il leur sera alloué une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS, LA COUR :



Confirme le jugement rendu le 26 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Vannes, sauf en ce qu'il a rejeté la demande des époux [N] en paiement de dommages-intérêts ;



Condamne la société Bonjour Caravaning à payer aux époux [N] la somme de 2 800 euros à titre de dommages-intérêts ;



Condamne la société Bonjour Caravaning à payer aux époux [N] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;



Condamne la société Bonjour Caravaning aux dépens d'appel ;



Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.









LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

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