28 septembre 2022
Cour d'appel de Paris
RG n° 20/11025

Pôle 3 - Chambre 1

Texte de la décision

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1



ARRET DU 28 SEPTEMBRE 2022



(n° 2022/ , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/11025 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFJZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Mars 2020 - Tribunal Judiciaire de PARIS - RG n° 18/13443





APPELANTE



Madame [Y] [C] divorcée [M]

née le 14 Janvier 1942 à TUNIS (TUNISIE)

[Localité 6]

[Localité 5]



représentée et plaidant par Me Jacques CHARLES de la SELARL LEGE FORI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0987







INTIMEES



Madame [P] [V] [C] épouse [I]

née le 26 Mai 1945 à TUNIS (TUNISIE)

[Adresse 2]

[Localité 1]



représentée et plaidant par Me Herveline RIDEAU DE LONGCAMP de l'AARPI MRL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0139





Madame [K] [C] épouse [S]

née le 15 Octobre 1948 à TUNIS (TUNISIE)

[Adresse 4]

[Localité 3]



représentée par Me Chantal MEININGER BOTHOREL de la SELARL DLBA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : J149

ayant pour avocat plaidant Me Cédric CABANES, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

















COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sophie RODRIGUES, Conseiller, chargée du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Patricia GRASSO, Président

Mme Sophie RODRIGUES, Conseiller

Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller



Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON





ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Patricia GRASSO, Président, et par Mme Emilie POMPON, Greffier.






***



EXPOSE DU LITIGE



[R] [T] veuve [C] est décédée le 29 novembre 2007, laissant pour lui succéder ses trois filles :

- [P] [C],

- [Y] [C],

- [K] [C].



Par jugement en date du 6 mars 2015, le tribunal de grande instance de Paris a ordonné le partage judiciaire de la succession de [R] [C].



Me [Z] [D], notaire à [Localité 7], a été chargé des opérations. Le 22 juin 2018, il a dressé un projet d'état liquidatif et un procès-verbal de carence.



Par jugement du 6 mars 2020, le tribunal judiciaire de Paris a notamment :

- déclaré irrecevable l'ensemble des demandes formées par Mme [Y] [C], à l'exception de la demande tendant au remplacement du notaire commis,

- rejeté la demande tendant à la fixation de la date de jouissance divise formée par Mme [P] [C],

- rejeté les demandes d'attribution d'une montre en or et de dommages et intérêts formées par Mme [P] [C],

- homologué le projet d'état liquidatif de l'indivision successorale de Mme [R] [T] veuve [C] dressé le 22 juin 2018 par Me [Z] [D], notaire à [Localité 7],

- rejeté la demande tendant au remplacement du notaire commis,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens seront partagés entre les copartageants à proportion de leurs parts respectives,

- ordonné l'exécution provisoire.



Mme [Y] [C] a interjeté appel de ce jugement par une déclaration du 27 juillet 2020 indiquant, quant à la portée de l'appel : « appel total ».

Elle a remis au greffe ses premières conclusions le 20 octobre 2020.



Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 6 mai 2021, l'appelante demande à la cour :

in limine litis,

- de débouter Mmes [P] et [K] [C] de leurs demandes de nullité ou d'irrecevabilité de la déclaration d'appel ou des conclusions d'appelante,

- de déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté le 27 juillet 2020 par Mme [Y] [C] à l'encontre du jugement du tribunal judiciaire de Paris du 6 mars 2020,

y faisant droit,

- d'infirmer ledit jugement en toutes ses dispositions à l'exception de la demande de Mme [P] [C] concernant la fixation de la date de jouissance divise et la demande de Mme [P] [C] l'attribution d'une montre en or ainsi que des dommages et intérêts,

statuant à nouveau :

- de prononcer la nullité du procès-verbal de dire et de carence du 22 juin 2018,

- de rejeter l'homologation de l'état liquidatif dressé par Me [D] le 2 juin 2018,

- de dire et juger que Mme [Y] [C] est recevable dans ses demandes sur le fond du partage,

- de dire et juger que le testament de [R] [C] n'est pas un testament-partage,

- de dire et juger que la jouissance divise du partage devra être fixée à une date la plus proche du partage,

- de commettre le président de la chambre interdépartementale des notaires de [Localité 7] avec faculté de délégation en remplacement de Me [Z] [D] dans les opérations de partage à intervenir,

- de dire et juger que le notaire commis devra établir les comptes d'administration des copartageants du jour du décès au jour du partage, en ce compris les loyers ayant pu être perçus par les indivisaires,

- de dire et juger que le notaire commis devra former la masse partageable selon la valeur des biens existants au jour du partage, l'indemnité de réduction devant être calculée sur la valeur du bien donné à la même date et leur consistance au jour de la donation,

- de débouter Mmes [P] et [K] [C] de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions plus amples ou contraires,

en tout état de cause :

- de condamner Mmes [P] [C] et Mme [K] [C], in solidum, au paiement de la somme de 10 000 euros au profit de Mme [Y] [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de dire et juger que les dépens seront portés au passif de la masse partageable.



Aux termes de ses uniques conclusions notifiées le 11 janvier 2021, Mme [P] [C], intimée, demande à la cour :

à titre principal,

- de prononcer la nullité de la déclaration d'appel en date du 27 juillet 2020,

- de condamner Mme [Y] [C] à lui payer la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de la condamner aux entiers dépens d'appel,

à titre subsidiaire,

- de confirmer le jugement en date du 6 mars 2020,

- de dire et juger Mme [Y] [C] irrecevable en ses demandes,

- de la débouter de ses demandes, fins et conclusions,

- d'homologuer le projet d'acte liquidatif annexé au procès-verbal de dire et de carence, dressé par le notaire liquidateur, Me [Z] [D] le 22 juin 2018,

y ajoutant,

- de condamner Mme [Y] [C] à lui payer la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de la condamner aux entiers dépens d'appel.





Aux termes de ses uniques conclusions notifiées le 5 novembre 2020, Mme [K] [C], intimée, demande à la cour de :

- dire et juger que la cour d'appel n'est saisie d'aucun des chefs de jugement critiqués par Mme [Y] [C], l'acte d'appel n'ayant déféré à la cour la connaissance d'aucun des chefs de jugement critiqués par cette dernière, en l'état d'une formulation insuffisante en ces termes : « appel total »,

- confirmer en tout point le jugement dont appel,

- débouter Mme [Y] [C] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions comme étant mal fondées,

subsidiairement :

- dire et juger qu'en l'absence de Mme [C] en l'étude de Me [D] et aux fins de régulariser le projet d'état liquidatif résultant d'un accord total entre les parties, il y a lieu d'homologuer purement et simplement le projet d'état liquidatif dressé par Me [D] et figurant en dernière annexe du procès-verbal de dire et de carence dressé par ses soins le 22 juin 2018,

- débouter Mme [Y] [C] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions comme étant mal fondées, en l'état de l'accord intervenu en l'étude de Me [D] et dont ce dernier atteste, mais encore en l'état de l'absence totale de dire formé par Mme [Y] [C] au procès-verbal de carence partielle et de dires du 22 juin 2018, absence dont Mme [Y] [C] reconnaît elle-même le caractère volontaire,

- condamner Mme [Y] [C] au paiement d'une somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance distraits au profit de Me Chantal Meininger-Bohorel qui y a pourvu.



Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties au soutien de leurs prétentions, il sera renvoyé à leurs écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 juin 2022.

L'affaire a été appelée à l'audience du 21 juin 2022.






MOTIFS DE LA DÉCISION



Sur l'effet dévolutif de la déclaration d'appel



En vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.



Aux termes de l'article 901-4° du même code, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2022-245 du 25 février 2022, la déclaration d'appel est faite par un acte contenant notamment les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.



En outre, il est acquis que seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.



Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, sauf indivisibilité de l'objet du litige, l'effet dévolutif n'opère pas.



En l'espèce, il y a lieu de constater que la déclaration d'appel se borne à énoncer qu'il s'agit d'un « appel total » du jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 6 mars 2020 sans énoncer les chefs de dispositif critiqués.





L'appelante se prévaut de l'indivisibilité de l'objet du litige, au sens de l'article 901 du code de procédure civile. Elle rappelle qu'aux termes de l'article 4 du même code, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, de sorte que, selon elle, il convient de se référer à ses conclusions d'appelante remises au greffe et notifiées le 20 octobre 2020 pour déterminer ces prétentions. Elle souligne que les chefs de jugement critiqués y sont précisément détaillés. Elle soutient que l'objet du litige consiste à traiter de la liquidation et du partage de la succession de [R] [T], avec imputation des donations réalisées et liquidation des éventuelles indemnités de réduction, l'ensemble formant un tout indivisible ayant vocation à aboutir à un partage unique.



Cependant, si l'appelant n'est pas tenu de mentionner dans la déclaration d'appel un ou plusieurs des chefs de dispositif du jugement qu'il critique lorsqu'il entend se prévaloir de l'indivisibilité de l'objet du litige, il n'en doit pas moins se référer, dans la déclaration, à cette indivisibilité.



Il y a lieu de constater qu'en l'espèce, l'indivisibilité alléguée n'est pas évoquée dans la déclaration d'appel du 27 juillet 2020.

Il faut donc constater qu'aucun chef de dispositif du jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 6 mars 2020 n'a été déféré à la cour.



En conséquence, il n'y a pas lieu même d'examiner la nullité soulevée par Mme [P] [C].



Il n'y a pas lieu davantage de confirmer le jugement comme le sollicite Mme [K] [C], ni de débouter Mme [Y] [C] de ses demandes.



Sur les frais et dépens



Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.



Il convient, en application de cette disposition, de condamner l'appelante aux dépens qui seront recouvrés par Me Chantal Meininger-Bohorel, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



L'équité commande qu'elle soit en outre condamnée à payer à chacune des intimées une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS



Constate qu'aucun chef de dispositif du jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 6 mars 2020 n'a été dévolu à la cour ;



Condamne Mme [Y] [C] aux dépens ;



Autorise Me Chantal Meininger-Bohorel à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;



Condamne Mme [Y] [C] à payer à Mmes [P] et [K] [C] la somme de 2 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



Rejette la demande de Mme [Y] [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Le Greffier, Le Président,

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