28 septembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-17.213

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO01013

Texte de la décision

SOC.

CH9



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 septembre 2022




Rejet


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 1013 F-D

Pourvoi n° U 21-17.213




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

La société Hydr'o Berry, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° U 21-17.213 contre l'arrêt rendu le 26 mars 2021 par la cour d'appel de Bourges (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [I] [G], domicilié [Adresse 1],

2°/ à M. [B] [Z], domicilié [Adresse 2], pris en qualité de liquidateur amiable de la société Hydro Berry Technologies,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de la société Hydr'o Berry, de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de M. [G], après débats en l'audience publique du 28 juin 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Barincou, conseiller rapporteur, Mme Grandemange, conseiller, M. Gambert, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 26 mars 2021), M. [G] a été engagé, le 25 avril 2003, par la société Hydro Berry (la société HBT), en qualité de technicien de maintenance.

2. Le 7 février 2018, le salarié a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle que son employeur lui avait proposé en lui précisant que le prochain départ du gérant et l'absence de toute solution de reprise de l'entreprise impliquaient une cessation définitive et totale d'activité, ayant pour conséquence la suppression de tous les postes sans aucune possibilité de reclassement. La rupture du contrat de travail est intervenue le 12 février 2018.

3. La société Hydr'o Berry a été constituée le 30 janvier 2018 avec le même objet social que la société HBT, laquelle a fait l'objet d'une dissolution amiable le 30 avril 2018.

4. Le 1er juin 2018, le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins notamment, à titre principal, d'obtenir la nullité de son licenciement ou, à titre subsidiaire, qu'il soit jugé sans cause réelle et sérieuse. Il a mis en cause le liquidateur amiable de la société HBT ainsi que la société Hydr'o Berry.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés


5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

6. La société Hydr'o Berry fait grief à l'arrêt de la condamner à verser au salarié diverses sommes pour licenciement abusif, alors :

« 1° / que le licenciement d'un salarié, prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au transfert d'entreprise, est privé d'effet, de sorte que les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail ne sont pas applicables ; qu'en en faisant application, après avoir jugé que le licenciement du salarié était privé d'effet, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application ;

2° / que lorsque son licenciement est privé d'effet, le salarié, qui n'entend pas demander au repreneur la poursuite de son contrat de travail, ne peut réclamer à l'auteur de la rupture que la réparation du préjudice qu'il a effectivement subi ; qu'en fixant à 25 000 euros le préjudice subi par le salarié pour perte d'emploi, après avoir constaté que, tandis que son contrat a pris fin le 12 février 2018, celui-ci avait, dès le 1er mars suivant, constitué la société, dénommée Berry Maintenance Industrielle exerçant une activité concurrente de celle de la société Hydr'o Berry, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale ;

3° / qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si le salarié n'avait pas bénéficié dans le cadre du contrat de sécurisation qu'il a conclu avec la société HBT, de l'allocation de sécurisation professionnelle lui permettant de percevoir pendant douze mois une somme correspondant à son salaire net antérieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de la réparation intégrale. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel, qui a constaté l'existence d'un concert frauduleux entre les employeurs successifs, la société HBT et la société Hydr'o Berry, pour priver le salarié des droits qu'il tenait de l'article L. 1224-1 du code du travail, en a exactement déduit que le licenciement était privé d'effet et que chacun d'eux devait supporter les conséquences dommageables de la rupture du contrat de travail, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail.

8. Elle a ensuite, sans violer le principe de la réparation intégrale et sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, souverainement évalué le préjudice du salarié résultant de la perte injustifiée de son emploi.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

10. La société Hydr'o Berry fait grief à l'arrêt de la condamner à verser au salarié diverses sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, alors « que lorsque son licenciement est privé d'effet, le salarié, qui n'entend pas demander au repreneur la poursuite de son contrat de travail, ne peut réclamer à l'auteur de la rupture que la réparation du préjudice qu'il a effectivement subi, sans pouvoir prétendre au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble le principe de la réparation intégrale. »

Réponse de la Cour

11. Ayant retenu que le licenciement prononcé pour cause économique était privé d'effet, ce dont il résultait qu'en l'absence de motif économique, le contrat de sécurisation n'avait pas de cause, la cour d'appel en a exactement déduit que la société cessionnaire devait reverser au salarié les sommes correspondant au préavis réglées à Pôle emploi.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Hydr'o Berry aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Hydr'o Berry et la condamne à payer à M. [G] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour la société Hydr'o Berry

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société Hydr'o Berry fait grief à l'arrêt attaqué

D'AVOIR jugé le licenciement de M. [G] privé d'effet en l'état de la collusion frauduleuse de la Sarl HBT et la Sas Hydr'o Berry pour contourner les dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail et DE L'AVOIR condamnée, solidairement avec M. [B] [Z], ès qualité, à verser à M. [G] diverses sommes ;

1°) ALORS QUE si le juge peut restituer aux faits et actes leur exacte qualification, il ne peut, en revanche, modifier l'objet du litige qui ne résulte que des écritures respectives des parties ; qu'en jugeant que le licenciement de M. [G] était privé d'effet, quand celui-ci sollicitait que son contrat soit jugé nul ou, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a modifié les prétentions de M. [G] et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, en toute hypothèse, QU'en procédant d'office à la requalification des prétentions de M. [G], sans inviter les parties à s'expliquer sur les conséquences de cette requalification, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (Subsidiaire)

La société Hydr'o Berry fait grief à l'arrêt attaqué

D'AVOIR jugé le licenciement de M. [G] privé d'effet en l'état de la collusion frauduleuse de la Sarl HBT et la Sas Hydr'o Berry pour contourner les dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail et DE L'AVOIR condamnée, solidairement avec M. [B] [Z], ès qualité, à verser à M. [G] diverses sommes ;

1°) ALORS QUE la société repreneur ne peut être tenu des conséquences du licenciement prononcé par le premier employeur que si, et dans la mesure où, il existe une collusion frauduleuse dûment établie ; qu'en se bornant à déduire l'existence d'une collusion frauduleuse entre la Sarl HBT et la Sas Hydr'o Berry de ce que le contrat de travail de M. [G] aurait dû être transféré à cette dernière, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;

2°) ALORS, à tout le moins, QU'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si, avant de constituer la société Hydr'o Berry, M. [N] [Z], son gérant, n'avait pas cherché, mais en vain, à créer et développer une autre activité, ce qui excluait toute collusion frauduleuse entre la Sarl HBT et la Sas Hydr'o Berry, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (Subsidiaire)

La société Hydr'o Berry fait grief à l'arrêt attaqué

DE L'AVOIR condamnée à verser à M. [G] diverses sommes pour licenciement abusif ;

1°) ALORS QUE le licenciement d'un salarié, prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au transfert d'entreprise, est privé d'effet, de sorte que les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail ne sont pas applicables ; qu'en en faisant application, après avoir jugé que le licenciement de M. [G] était privé d'effet, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application ;

2°) ALORS QUE lorsque son licenciement est privé d'effet, le salarié, qui n'entend pas demander au repreneur la poursuite de son contrat de travail, ne peut réclamer à l'auteur de la rupture que la réparation du préjudice qu'il a effectivement subi ; qu'en fixant à 25 000 € le préjudice subi par M. [G] pour perte d'emploi, après avoir constaté que, tandis que son contrat a pris fin le 12 février 2018, celui-ci avait, dès le 1er mars suivant, constitué la société, dénommée Berry Maintenance Industrielle exerçant une activité concurrente de celle de la société Hydr'o Berry, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale ;

3°) ALORS, à tout le moins, QU'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si M. [G] n'avait pas bénéficié dans le cadre du contrat de sécurisation qu'il a conclu avec la société HBT, l'allocation de sécurisation professionnelle lui permettant de percevoir pendant 12 mois une somme correspondant à son salaire net antérieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de la réparation intégrale.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (Subsidiaire)

La société Hydr'o Berry fait grief à l'arrêt attaqué

DE L'AVOIR condamnée à verser à M. [G] diverses sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

ALORS QUE lorsque son licenciement est privé d'effet, le salarié, qui n'entend pas demander au repreneur la poursuite de son contrat de travail, ne peut réclamer à l'auteur de la rupture que la réparation du préjudice qu'il a effectivement subi, sans pouvoir prétendre au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble le principe de la réparation intégrale.

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