27 septembre 2022
Cour d'appel d'Amiens
RG n° 20/05145

1ère Chambre civile

Texte de la décision

ARRET







[B]





C/



[R]

[R]













MS/VB





COUR D'APPEL D'AMIENS



1ERE CHAMBRE CIVILE



ARRET DU VINGT SEPT SEPTEMBRE

DEUX MILLE VINGT DEUX





Numéro d'inscription de l'affaire au répertoire général de la cour : N° RG 20/05145 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H4JA



Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS DU NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT





PARTIES EN CAUSE :



Monsieur [V] [B] exerçant sous l'enseigne DEBOSS'AUTO, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représenté par Me BARLOY substituant Me Marion MANGOT de la SELARL MANGOT, avocats au barreau D'AMIENS





APPELANT



ET



Monsieur [M] [R]

né le 24 Juillet 1968 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représenté par Me Audrey BOUDOUX D'HAUTEFEUILLE, avocat au barreau D'AMIENS



Madame [P] [R]

née le 07 Septembre 1995 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Audrey BOUDOUX D'HAUTEFEUILLE, avocat au barreau D'AMIENS





INTIMES







DEBATS :



A l'audience publique du 28 juin 2022, l'affaire est venue devant Mme Myriam SEGOND, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l'article 805 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 septembre 2022.



La Cour était assistée lors des débats de Mme Vitalienne BALOCCO, greffier.





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :



Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de M. Pascal BRILLET, Président, M. Vincent ADRIAN et Mme Myriam SEGOND, Conseillers, qui en ont délibéré conformément à la Loi.





PRONONCE DE L'ARRET :



Le 27 septembre 2022, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et le Président étant empêché, la minute a été signée par Mme Myriam SEGOND, Conseiller, et Mme Vitalienne BALOCCO, greffier.





*

* *



DECISION :




EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE



Le 14 mars 2017, M. [R] a confié à M. [B] exerçant sous l'enseigne Deboss'Auto (le garagiste) un véhicule appartenant à sa fille, Mme [R], afin de procéder à la réfection complète de la peinture et la remise en état de la carrosserie, au prix de 2 160 euros TTC. Il a repris le véhicule le 24 mai 2017 pour une exposition et l'a ensuite remis au garagiste qui a poursuivi sa prestation. Suite à des réclamations, le garagiste a accepté de reprendre le véhicule qui a été restitué le 11 août 2017. Mécontent de la prestation, M. [R] a, après mise en demeure du 1er décembre 2017, pris contact avec son assureur de protection juridique qui a diligenté une expertise amiable.



Par acte du 30 juillet 2019, M. et Mme [R] ont assigné M. [B] en indemnisation.



Par jugement du 9 septembre 2020, le tribunal judiciaire d'Amiens a :



- déclaré irrecevables les demandes de M. [R],

- déclaré recevables les demandes de Mme [R],

- déclaré M. [B] responsable des désordres constatés sur le véhicule de Mme [R],

- condamné M. [B] à payer à Mme [R] la somme de 10 963,79 euros TTC à titre de dommages-intérêts pour son préjudice matériel,

- condamné M. [B] à payer à Mme [R] la somme de 1 569 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, incluant le coût de l'expertise amiable,

- condamné M. [B] aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire

- rejeté toute plus ample demande.



Par déclaration du 15 octobre 2020, M. [B] a formé un appel limité à toutes les dispositions du jugement sauf celles ayant déclaré irrécevables les demandes de M. [R] et rejeté toute plus ample demande.



Le 6 novembre 2020, Me [Y] a notifié une constitution d'avocat au soutien des intérêts de M. et Mme [R]. Le 15 juin 2021, Me [E] [T] s'est constituée au lieu et place pour Mme [R] qui a indiqué ne pas avoir mandaté Me [Y]. Mme [R] n'a pas conclu par la suite.



L'ordonnance de clôture a été prononcée le 1er décembre 2021.



EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES



Par conclusions du 13 janvier 2021, M. [B] demande à la cour :



- d'infirmer le jugement,

- avant-dire droit, ordonner une expertise,

- au fond et à titre principal, débouter Mme [R] de ses demandes,

- à titre subsidiaire, débouter Mme [R] de sa demande de condamnation au paiement de la somme de 10 963,79 euros en réparation du préjudice matériel,

- en tout état de cause, condamner in solidum M. et Mme [R] à lui payer la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral, 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.



Il expose que la demande d'indemnisation est mal-fondée. Il indique d'abord qu'il n'a pas été préalablement mis en demeure d'exécuter son obligation, comme l'article 1231 du code civil le prévoit. Selon lui, M. et Mme [R] ne rapportent pas la preuve de l'existence et de l'imputablilité des désordres. Il rappelle que M. [R] a repris le véhicule du 24 mai au 13 juin 2017 pour une exposition, le stockant dans les conditions ignorées et que la première réclamation date de plus de quatre mois après sa restitution. Il conclut qu'en tout état de cause, une expertise judiciaire doit avoir lieu pour chiffrer le préjudice matériel. Il réclame, enfin, des dommages-intérêts pour préjudice moral du fait des mesures d'exécution forcée du jugement.



Par conclusions du 10 avril 2021, M. et Mme [R] demandent la confirmation du jugement, le rejet des demandes de M. [B] et sa condamnation à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Ils répliquent qu'une mise en demeure a été valablement adressée, que le rapport d'expertise amiable fait état de multiples défauts postérieurement à l'intervention du garagiste, ce qui fait présumer sa faute et le lien causal entre la faute et les désordres, la preuve contraire n'étant pas rapportée. Selon eux, le montant du dommage est prouvé par le devis précis retenu par l'expert, celui fourni par M. [B] devant être écarté en raison de son imprécision. Ils ajoutent, enfin, que la mise en oeuvre de mesures d'exécution forcée, qui n'est que la conséquence de l'exécution provisoire assortissant le jugement, ne peut leur être reprochée.




MOTIVATION



1. Sur le défaut de mise en demeure préalable



Vu l'article 1231 du code civil,



A moins que l'inexécution soit définitive, les dommages et intérêts ne sont dus que si le débiteur a été préalablement mis en demeure de s'exécuter dans un délai raisonnable.



Lors des opérations expertales, M. [B] a accepté de reprendre seulement une partie des désordres, ce qui caractérise une inexécution définitive permettant au créancier d'agir en justice.



2. Sur la responsabilité du garagiste



Il résulte des articles 1231-1 et 1353 du code civil que, si la responsabilité du garagiste au titre des prestations qui lui sont confiées n'est engagée qu'en cas de faute, dès lors que des désordres surviennent ou persistent après son intervention, l'existence d'une faute et celle d'un lien causal entre la faute et ces désordres sont présumées.



La facture porte sur la remise en état carrosserie, mise en peinture et fourniture de produits de peinture metallisée.



Le véhicule a été définitivement restitué le 11 août 2017.



Aux termes de sa mise en demeure du 1er décembre 2017, M. [R] a énuméré précisément les défauts présentés par le véhicule : matage sur le pare-choc avant et cache-vitre latétal, traces sur le capot et aile arrière conducteur, claquage du mastic une semaine après la reprise du véhicule sur le côté du pare-choc côté passager et de l'arrondi au-dessus du pot d'échappement droit, coulures sur les rétroviseurs et en bas de l'aile arrière côté conducteur, baie de pare-brise à remplacer, peinture peau d'orange sur tout le véhicule, innombrables poussières collées sur la peinture, système frein à main à changer, pare-choc mal remonté décalage côté droit.



Le 14 février 2018, l'expert amiable a constaté que la quasi-totalité de la peinture présentait un aspect peau d'orange, les poignées de porte présentaient des défauts sur le vernis suite à un mauvais camouflage, un manque de vernis était visible sur le côté droit du bouclier arrière, ainsi que les grains de poussière et les traces de silicone, une craquelure de la peinture était visible au-dessus de la sortie d'échappement, la colle sur les entrées d'air sur les ailes arrières était visible, les joints de portes et de pare-brise étaient recouverts de peinture, les rétroviseurs présentaient des coulures de vernis, la lunette arrière était rayée sur le pourtour suite au lustrage de la carrosserie, un défaut de vernis était visible au niveau de la base d'antenne, l'aile arrière gauche présentait des coulures de vernis et des traces de silicones et des grains de poussières étaient visibles sur le becquet arrière. Les photographies annexées au rapport d'expertise amiable attestent des défauts présents sur l'intégralité du véhicule.



Lors des opérations expertales, M. [B] a accepté de reprendre la peinture du becquet arrière et des rétroviseurs, reconnaissant ainsi la persistance de désordres après son intervention.



Ces éléments établissent, de façon concordante, que le véhicule confié pour une mise en peinture présentait, dans un délai suffisamment bref après l'intervention du garagiste, des défauts de peinture sur l'ensemble du véhicule, ce qui fait présumer la faute de ce dernier et le lien de causalité entre la faute et les désordres.



Les photographies non datées versées par le garagiste ne sont pas suffisantes pour écarter la présomption de faute pesant sur lui et celle du lien causal.



La responsabilité de M. [B] est établie.



L'expert a préconisé la reprise totale des travaux.



Au vu de l'ensemble des défauts précisément décrits dans le courrier de mise en demeure et corroboré par le rapport d'expertise amiable, la conclusion de l'expert est justifiée.



Selon le devis de la société Automobiles Chauny [Localité 4], le montant des travaux s'élève à la somme de 10 963,79 euros TTC, le courriel fourni par M. [B] étant insuffisament précis pour remettre en cause cette estimation.



En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré M. [B] responsable des désordres et condamné M. [B] à payer à Mme [R] la somme de 10 963,79 euros TTC à titre de dommages-intérêts pour son préjudice matériel. La demande d'expertise est rejetée.



3. Sur la demande de dommages-intérêts de M. [B]



Vu l'article L. 111-10 du code des procédures civiles d'exécution,



Sous réserve des dispositions de l'article L. 311-4, l'exécution forcée peut être poursuivie jusqu'à son terme en vertu d'un titre exécutoire à titre provisoire.



Le jugement, assorti de l'exécution provisoire, a conféré à Mme [R] un droit à son exécution par la mise en oeuvre de mesures d'exécution forcée. Il ne peut lui en être fait grief, ce d'autant plus que le jugement est confirmé.



La demande de M. [B] est rejetée.



4. Sur les frais du procès



Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.



M. [B] qui succombe en ses prétentions en cause d'appel supportera la charge des dépens d'appel.



L'équité commande enfin d'allouer à Mme [R] en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour. La demande est rejetée s'agissant de M. [R] qui a été, par une disposition du jugement devenue définitive, déclaré irrecevable en ses demandes.





PAR CES MOTIFS



La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,



Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,



Y ajoutant :



Rejette la demande d'expertise,



Déboute [V] [B] de sa demande de dommages-intérêts,



Condamne [V] [B] aux dépens d'appel,



Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne [V] [B] à payer à [P] [R] la somme de 2 000 euros.







LE GREFFIERP/LE PRESIDENT EMPECHE

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.