21 septembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-15.169

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00941

Texte de la décision

SOC.

OR



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 septembre 2022




Cassation partielle partiellement sans renvoi


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 941 F-D

Pourvoi n° X 21-15.169




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 SEPTEMBRE 2022

La société Secanim Sud-Est, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée Sarval Sud-Est, a formé le pourvoi n° X 21-15.169 contre l'arrêt rendu le 17 février 2021 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale A), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [V] [C], domicilié [Adresse 1],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

M. [C] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Marguerite, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Secanim Sud-Est, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [C], après débats en l'audience publique du 14 juin 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Marguerite, conseiller référendaire rapporteur, Mme Le Lay, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 17 février 2021), M. [C], engagé le 8 octobre 2002 en qualité de chauffeur poids-lourd par la société Soleval, a été désigné délégué syndical le 20 janvier 2014. Son contrat de travail a été transféré à la société Sarval Sud-Ouest, devenue la société Secanim Sud-Est, le 1er juillet 2015. Par décision du 12 août 2016, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement du salarié pour motif économique, qui lui a été notifié le 26 août 2016.

2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale afin de voir juger son licenciement nul ou, à titre subsidiaire, sans cause réelle et sérieuse et de voir constater le non-respect des critères d'ordre de licenciement.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal de l'employeur, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, de le condamner à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour préjudice subi en raison du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de lui ordonner le remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage versées dans la limite de trois mois d'indemnités, alors « que lorsqu'une autorisation administrative de licenciement a été accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, apprécier le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement ; qu'en l'espèce, il ressort des motifs de l'arrêt attaqué que l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement pour motif économique du salarié, par décision du 12 août 2016 ; que dans ses conclusions d'appel, l'exposante demandait en conséquence à la cour d'appel de dire irrecevable la demande du salarié relative à la contestation du caractère réel et sérieux de son licenciement, en vertu du principe de la séparation des pouvoirs ; qu'en décidant néanmoins d'apprécier le motif économique du licenciement et de juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, faute pour l'employeur de produire des pièces de nature à établir la réalité d'une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité pertinent, la cour d'appel a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs et violé la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. »

Réponse de la Cour

Vu la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III ensemble le principe de séparation des pouvoirs :

4. Le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de séparation des pouvoirs, en l'état d'une autorisation administrative de licenciement devenue définitive, apprécier le caractère réel et sérieux du motif de licenciement au regard de la cause économique.

5. Pour confirmer le jugement ayant jugé le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'employeur ne verse aux débats aucune pièce de nature à établir la réalité d'une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe auquel il appartient, qui devait s'apprécier au sein du secteur équarissage.

6. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié était délégué syndical et que son licenciement avait été autorisé par une décision, devenue définitive du 16 août 2016, de l'inspecteur du travail, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisé.

Et sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

7. Le salarié fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il l'a jugé mal fondé en sa demande sur le non respect des critères d'ordre des licenciements et l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts subséquente, alors « que la cassation qui interviendrait sur le pourvoi principal s'étendra au chef du dispositif ayant débouté le salarié de sa demande d'indemnisation pour inobservation des critères déterminant l'ordre des licenciements en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

8. La cassation de l'arrêt des chefs du dispositif visés par le moyen du pourvoi principal de l'employeur, pris en sa première branche, entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs du dispositif visés par le moyen du pourvoi incident du salarié qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

Portée et conséquence de la cassation

9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond sur les demandes du salarié relatives à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour:

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement en ce qu'il a dit et jugé M. [C] mal fondé en sa demande de nullité du licenciement et en ce qu'il a fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire de M. [C] à la somme de 2 908,70 euros, l'arrêt rendu le 17 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi sur les demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Infirme le jugement du Conseil de prud'hommes de Lyon en ce qu'il a dit le licenciement économique sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné la société Sarval Sud-Est à payer à M. [C] les sommes de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice subi en raison du licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1 000 euros à titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a condamné la société Sarval Sud-Est à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de trois mois d'indemnités ;

Déclare le juge judiciaire incompétent pour se prononcer sur les demandes de M. [C] au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ;

Remet, sur les points restant en litige, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;

Condamne M. [C] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Secanim Sud-Est, demanderesse au pourvoi principal

La société Secanim Sud-Est fait grief fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de M. [C] était sans cause réelle et sérieuse, de l'AVOIR condamnée à payer à M. [C] la somme de 20. 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice subi en raison du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de lui AVOIR ordonné le remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à M. [C] dans la limite de trois mois d'indemnités ;

1. ALORS QUE lorsqu'une autorisation administrative de licenciement a été accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, apprécier le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement ; qu'en l'espèce, il ressort des motifs de l'arrêt attaqué que l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement pour motif économique de M. [C], par décision du 12 août 2016 ; que dans ses conclusions d'appel, l'exposante demandait en conséquence à la cour d'appel de dire irrecevable la demande du salarié relative à la contestation du caractère réel et sérieux de son licenciement, en vertu du principe de la séparation des pouvoirs ; qu'en décidant néanmoins d'apprécier le motif économique du licenciement et de juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, faute pour l'employeur de produire des pièces de nature à établir la réalité d'une menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité pertinent, la cour d'appel a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs et violé la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

2. ALORS QUE dans le dispositif de ses conclusions notifiées le 13 juillet 2018, la société Sarval Sud-Est demandait à la cour d'appel de « déclarer irrecevable la demande de Monsieur [C] relative à la contestation du caractère réel et sérieux de son licenciement » et soutenait, dans le corps de ses conclusions (p. 4), que « La contestation du licenciement d'un salarié protégé autorisé par l'administration du travail est irrecevable devant le Conseil de prud'hommes en vertu du principe de la séparation des pouvoirs » ; qu'en affirmant que les conclusions de l'employeur notifiées au salarié le 13 juillet 2018 « ne comportent aucun développement sur le moyen tiré de l'absence de motif économique », la cour d'appel a dénaturé par omission les conclusions de l'exposante, en violation de l'article 4 du code de procédure civile.


Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [C] demandeur au pourvoi incident

M. [C] fait grief aÌ l'arre.t attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il l'a dit et jugé mal fondé en sa demande sur le non respect des critères d'ordre des licenciements et débouté de sa demande de dommages et intérêts subséquente.

ALORS QUE la cassation qui interviendrait sur le pourvoi principal s'étendra au chef du dispositif ayant débouté le salarié de sa demande d'indemnisation pour inobservation des criteÌres déterminant l'ordre des licenciements en application de l'article 624 du code de procédure civile.

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