14 septembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-12.251

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00916

Texte de la décision

SOC.

OR



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 14 septembre 2022




Cassation partielle


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 916 F-D

Pourvoi n° A 21-12.251


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 SEPTEMBRE 2022

Mme [Z] [X], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 21-12.251 contre l'arrêt rendu le 16 décembre 2020 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société ETP [3], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de Mme [X], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société ETP [3], après débats en l'audience publique du 9 juin 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 16 décembre 2020), Mme [X] a été engagée le 1er octobre 2004 par l'école technique privée [3], gérée par la société ETP [3], selon onze contrats de travail à durée déterminée à temps partiel, en qualité de chargée d'enseignement en sanitaire et social.

2. Elle a saisi, le 10 décembre 2015, la juridiction prud'homale de demandes en requalification des contrats de travail en un contrat à durée indéterminée et à temps complet ainsi qu'en paiement de diverses indemnités ou rappels de salaire subséquents.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de requalification de ses contrats de travail à temps partiel en un contrat à temps complet et de sa demande de rappel de salaire subséquente, alors « que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet ; qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les contrats successifs conclus entre les parties ne comportaient pas de répartition journalière ou hebdomadaire de l'horaire de travail, mais a considéré, pour écarter néanmoins la requalification des contrats à temps partiel en un contrat à temps complet, que la salariée connaissait à l'avance ses plannings de travail et que l'employeur produisait un courriel de la salariée daté du 1er septembre 2014 mentionnant une durée de 33 heures hebdomadaires en période scolaire ; qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'employeur rapportait la preuve de la durée de travail exacte, mensuelle ou hebdomadaire, initialement convenue, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016. »


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3123-14 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

4. Selon ce texte, le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. Il en résulte que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

5. Pour débouter la salariée de sa demande de paiement d'un rappel de salaire au titre de la requalification de son contrat de travail en un contrat à temps complet, l'arrêt retient d'abord que les contrats de travail à temps partiel ne comportaient pas de répartition journalière ou hebdomadaire de l'horaire de travail, de sorte que la salariée était fondée à se prévaloir de la présomption qui en découle.

6. Ensuite, l'arrêt constate, d'une part, que l'employeur produit des emplois du temps et plannings ainsi que des attestations de professeurs indiquant que les emplois du temps étaient établis en chaque début d'année scolaire et que la salariée était donc informée de ses heures de cours ainsi que des périodes de stage des élèves et de vacances, d'autre part, que la société justifie par de tels emplois du temps communiqués aux enseignants au début de chaque année, lesquels tenaient compte des voeux exprimés par ces derniers, la salariée comprise ainsi que cela résultait d'un mail de sa part en date du 1er septembre 2014, mentionnant 33 heures de cours par semaine sans que celle-ci ne fasse état de modifications au cours de l'année scolaire, ni d'une année sur l'autre.

7. En statuant ainsi, sans constater que l'employeur rapportait la preuve de la durée exacte, hebdomadaire ou mensuelle, convenue, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquence de la cassation

8. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs du dispositif condamnant l'employeur au paiement d'une indemnité de requalification, de licenciement ainsi que d'une indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes en requalification des contrats de travail à temps partiel en contrat à temps complet et en condamnation de la société ETP [3] au paiement d'une somme de 30 982,00 euros à titre de rappel de salaire pour les années scolaires 2013-2014 et 2014-2015, outre les congés payés afférents, et en ce qu'il limite la condamnation de la société ETP [3] à lui payer les sommes de 1 013,05 euros à titre d'indemnité de requalification, 2 026,10 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents, et de 2 363,78 euros à titre d'indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 16 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société ETP [3] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société ETP [3] et la condamne à payer à Mme [X] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme [X],

Mme [X] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de L'AVOIR déboutée de sa demande de requalification de ses contrats de travail à temps partiel en un contrat à temps complet et de sa demande de rappel de salaire subséquente ;

ALORS, 1°), QUE l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet ; qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve,d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les contrats successifs conclus entre les parties ne comportaient pas de répartition journalière ou hebdomadaire de l'horaire de travail, mais aconsidéré, pour écarter néanmoins la requalification des contrats à temps partiel en un contrat à temps complet, que la salariée connaissait à l'avance ses plannings de travail et que l'employeur produisait un courriel de la salariée daté du 1er septembre 2014 mentionnant une durée de 33 heures hebdomadaires en période scolaire ; qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'employeur rapportait la preuve de la durée de travail exacte, mensuelle ou hebdomadaire, initialement convenue, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

ALORS, 2°), QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que, dans ses conclusions d'appel (pp. 35 et 36), la salariée soutenait que les plannings et dates de stage distribués en début d'année se limitaient aux élèves en formation initiale mais ne tenaient compte ni des adultes en formation continue ni des élèves en contrat de professionnalisation qui relevaient d'un emploi du temps irrégulier et dont les périodes de stage convenues en début d'année étaient remplacées par des cours de rattrapage qu'elle devait dispenser ; qu'en considérant, pour écarter la requalification des contrats à temps partiel en un contrat à temps complet, que la salariée ne faisait pas état d'une modification de plannings au cours de l'année scolaire, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS, 3°), QU'en écartant la requalification des contrats à temps partiel en un contrat à temps complet, après avoir relevé que lesdits contrats ne comportaient pas de répartition journalière ou hebdomadaire de l'horaire de travail, au motif que la salariée connaissait à l'avance ses plannings de travail, que l'employeur produisait un courriel de la salariée daté du 1er septembre 2014 mentionnant une durée de 33 heures hebdomadaires en période scolaire et que la salariée ne faisait pas état d'une modification des horaires d'une année sur l'autre, sans analyser les bulletins de paie et les tableaux de décompte produits par la salariée, desquels il ressortait une importante variation d'horaires d'une année sur l'autre, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

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