13 septembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-83.914

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:CR01076

Titres et sommaires

ACTION CIVILE - Partie civile - Constitution - Comité d'entreprise - Représentation en justice - Représentant du comité - Mandat préalable - Recevabilité - Question inscrite à l'ordre du jour - Applications diverses

Le délai de huit jours au moins avant la séance, dans lequel, en application de l'article L. 2327-14 du code du travail, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail, l'ordre du jour du comité central d'entreprise est communiqué à ses membres, est édicté dans l'intérêt de ceux-ci afin de leur permettre d'examiner les questions à l'ordre du jour et d'y réfléchir. Justifie sa décision la cour d'appel qui, pour écarter l'exception d'irrecevabilité de la constitution de partie civile du comité central d'entreprise, prise de l'irrégularité de la délibération autorisant le secrétaire de ce comité à agir en justice du chef d'entrave, relève notamment qu'il résulte des pièces produites que, lors de la réunion de celui-ci, son secrétaire est intervenu en début de séance pour solliciter l'ajout d'un point à l'ordre du jour relatif au vote d'un mandat pour ester en justice pour entrave. En effet, il résulte du procès-verbal de ladite réunion, dont la Cour de cassation a le contrôle, que la modification de l'ordre du jour a été adoptée à l'unanimité des membres présents, de sorte qu'il en résulte que ces derniers ont accepté, sans objection, de discuter de la question du mandat, manifestant ainsi avoir été avisés en temps utile

Texte de la décision

N° V 21-83.914 F-B

N° 01076


ECF
13 SEPTEMBRE 2022


REJET


M. BONNAL conseiller le plus ancien faisant fonction de président,



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 13 SEPTEMBRE 2022


La société [1] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-13, en date du 16 juin 2021, qui, pour entrave, l'a condamnée à 15 000 euros d'amende dont 5 000 euros avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Sur le rapport de Mme Labrousse, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société [1], les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du comité social et économique central de [1] venant aux droits du comité central d'entreprise de [1], et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 juin 2022 où étaient présents M. Bonnal, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Labrousse, conseiller rapporteur, Mme Ménotti, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par actes en date du 9 mars 2017, le comité central d'entreprise de [1] a fait citer devant le tribunal correctionnel la société éponyme et Mme [L] [Z], présidente du groupe [1], du chef d'entrave pour avoir « omis d'informer et de consulter le comité central d'entreprise de [1] préalablement à la mise en oeuvre, en avril 2014 et au cours de l'année 2015, de la revue du personnel au sein de la société [1] ».

3. Par jugement en date du 27 juin 2018, le tribunal correctionnel a rejeté les exceptions de nullité de la citation et d'irrecevabilité de la constitution de partie civile du comité central d'entreprise, relaxé Mme [Z], déclaré la société [1] coupable des faits reprochés et a prononcé sur la peine et les intérêts civils.

4. La société prévenue a relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen


5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.


Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes de la société [1] liées à la nullité de la citation, alors « qu'il résulte de la combinaison des dispositions des articles 550, alinéa 4, 551, 565 et 121-2 du code pénal que porte nécessairement atteinte aux intérêts de la prévenue la citation délivrée par la partie civile à l'encontre d'une personne morale qui s'abstient de désigner l'identité de l'organe ou du représentant, personne physique, ayant commis les faits poursuivis pour son compte ; qu'en refusant de prononcer la nullité d'une citation après avoir relevé qu'il est « indifférent que la personne physique représentant la société n'ait pas été nommément désignée », quand ce défaut d'identification portait nécessairement atteinte aux intérêts de la prévenue en ne répondant pas aux exigences de certitude et de précision des faits qui lui étaient reprochés, la cour d'appel a méconnu les textes visés au moyen. »

Réponse de la Cour

7. Pour écarter l'exception de nullité de la citation, prise de ce que cet acte ne mentionne pas l'identité de la personne physique, organe ou représentant de la personne morale, susceptible d'avoir commis le délit d'entrave, l'arrêt attaqué énonce qu'il est indifférent que celle-ci n'ait pas été nommément désignée.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen.

9. En effet, l'article 551, alinéa 2, du code de procédure pénale n'exige que soient mentionnés dans la citation que la description détaillée des faits poursuivis et les textes de loi les réprimant.

10. Il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

11. Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes de la société [1] liées à l'irrecevabilité de la citation directe, alors « qu'est irrégulière la délibération par laquelle le comité d'entreprise donne mandat à son secrétaire d'exercer des poursuites correctionnelles pour entrave à son fonctionnement lorsque cette délibération n'a pas été préalablement inscrite à l'ordre du jour de la réunion du comité et ne présente aucun lien avec les questions devant être débattues de telle sorte que les membres titulaires absents sont privés de toute possibilité de s'exprimer sur ce sujet ; que pour écarter toute irrecevabilité de la citation directe délivrée par le CCE de [1] résultant de l'irrégularité de la délibération du CCE du 1er octobre 2015 et du mandat confié à son secrétaire en conséquence pour exercer des poursuites correctionnelles du chef d'entrave, l'arrêt attaqué se borne à relever que « lors de la réunion du CCE du 1er octobre 2015, son secrétaire M. [N] est intervenu en début de séance pour solliciter l'ajout d'un point à l'ordre du jour : vote d'un mandat au secrétaire du CCE pour ester en justice pour entrave » et qu'en outre, « lors de la réunion du CCE du 7 avril 2016, une résolution désignant le cabinet d'avocat en charge de l'action a été inscrite à l'ordre du jour et adoptée à l'unanimité » ; qu'en se déterminant ainsi sans même rechercher si l'ajout de ce point à l'ordre du jour de la réunion du 1er octobre 2015 en tout début de séance, n'était pas de nature à établir l'irrégularité de la résolution litigieuse et du mandat confié à M. [N] en conséquence, faute d'avoir permis aux membres titulaires absents de la possibilité de s'exprimer sur ce sujet, et quand la circonstance que le CCE ait désigné lors de la réunion du CCE du 7 avril 2016 le cabinet d'avocat en charge de l'action était indifférente à établir la régularité de la délibération du 1er octobre 2015 et du mandat confié à son secrétaire, le mandat confié au cabinet d'avocat étant distinct du mandat confié au secrétaire du comité d'entreprise, et ne pouvant en aucun cas suppléer l'irrégularité de ce dernier, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui s'imposaient et privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 2325-1 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'époque des faits et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

12. Pour écarter l'exception d'irrecevabilité de la constitution de partie civile du comité central d'entreprise, prise de l'irrégularité de la délibération autorisant le secrétaire de ce comité à agir en justice du chef d'entrave, l'arrêt attaqué relève notamment qu'il résulte des pièces produites que, lors de la réunion du comité central d'entreprise du 1er octobre 2015, son secrétaire, M. [N], est intervenu en début de séance pour solliciter l'ajout d'un point à l'ordre du jour ainsi intitulé : « vote d'un mandat au secrétaire du CCE pour ester en justice pour entrave ».

13. En l'état de ces seules énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision.

14. En effet, si l'article L. 2327-14 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, prévoyait que l'ordre du jour du comité central d'entreprise est communiqué aux membres huit jours au moins avant la séance, ce délai était édicté dans leur intérêt afin de leur permettre d'examiner les questions à l'ordre du jour et d'y réfléchir.

15. Or, il résulte du procès-verbal du comité du 1er octobre 2015, dont la Cour de cassation a le contrôle, que la modification de l'ordre du jour a été adoptée à l'unanimité des membres présents, de sorte qu'il en résulte que ces derniers ont accepté, sans objection, de discuter de la question du mandat, manifestant ainsi avoir été avisés en temps utile.

16. Le moyen ne peut dès lors être accueilli.

17. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;



FIXE à 2 500 euros la somme que la société [1] devra payer au comité social et économique central de [1] venant aux droits du comité central d'entreprise de [1], en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le treize septembre deux mille vingt-deux.

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