7 septembre 2022
Cour d'appel de Paris
RG n° 22/02489

Pôle 1 - Chambre 3

Texte de la décision

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3



ARRET DU 07 SEPTEMBRE 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/02489 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFFKB



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 20 Janvier 2022 -Juge des contentieux de la protection de PARIS - RG n° 1201002808





APPELANT



Monsieur [J] [P]



[Adresse 1]

[Localité 4]



représenté par Me Stéphane MONGELOUS, avocat au barreau de PARIS, toque : R284





INTIMEE



Madame [Y] [D]



[Adresse 3]

[Localité 5]



représentée par Me Jean-didier MEYNARD de la SCP BRODU - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER - MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240,

et par Me Gilles DE POIX, avocat au barreau de PARIS, toque : D1853





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Edmée BONGRAND, Conseillère, chargée du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre

M. Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre

Mme Edmée BONGRAND, conseillère





Greffier, lors des débats : Mme Sonia DAIRAIN





ARRÊT :



- CONTRADICTOIRE







- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par M. Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre, et par Saveria MAUREL, greffière présente lors de la mise à disposition.




*****



EXPOSÉ DU LITIGE



Par acte sous seing privé du 20 aout 2017, M. [J] [P] a donné à bail à Mme [Y] [D] et M.[O] [L] un appartement de quatre pièces principales à usage d'habitation situé [Adresse 2], moyennant un loyer mensuel de 2.165 euros, charges comprises.



Un dépôt de garantie de 2015 euros a été versé. Les locataires ont donné congé à effet au 31 juillet 2019. L'état des lieux de sortie a été réalisé le 31 juillet 2019.



N'obtenant pas la restitution du dépôt de garantie, Mme [Y] [D] a, par acte du 13 octobre 2021, fait assigner M. [J] [P] devant le tribunal des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé aux fins de le voir condamner à lui payer à titre provisionnel la somme de 7040 euros au titre de la restitution du dépôt de garantie et de la majoration prévue à l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 août 2021 outre une somme de 3.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



Par ordonnance de référé contradictoire du 20 janvier 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :



- condamné M. [J] [P] à payer à Mme [Y] [D], la somme de 126,62 euros au titre du solde du dépôt de garantie,

- condamné M. [J] [P] à payer à Mme [Y] [D] la somme de 4.836 euros au titre de la majoration pour la période du 31 septembre 2019 au 31 août 2021,

- condamné M. [J] [P] à payer à Mme [Y] [D] la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné M. [J] [P] aux dépens,

- rappelé que la présente décision est assortie de plein droit de l'exécution provisoire.



Par déclaration du 1er février 2022,M. [P] a interjeté appel de l'ensemble des chefs expressément énoncés de cette ordonnance.



Dans ses dernières conclusions du 6 mai 2022, M. [J] [P] demande à la cour de :



vu l'article 835 du code de procédure civile,

vu l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, vu le décret du 26 août 1987,

vu l'article 1730 du code civil,

vu le contrat de bail, et l'état des lieux d'entrée et sortie dressé en présence des parties,

vu les courriels échangés entre les parties,

vu les articles 546 et 547 du code civil,

vu l'article 131-1 du code civil,

à titre principal :

- infirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a débouté M. [P] de sa demande en n'y avoir lieu à référé et de sa demande de débouter Mme [Y] [D] de ses demandes,

ce faisant,statuant à nouveau,juger n'y avoir lieu à référé et débouter Mme [D] de l'intégralité de ses demandes,

à titre subsidiaire,

- infirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a condamné M. [P] à la somme provisionnelle de 162,62 euros au titre de l'indmenité légale de l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989,

Ce faisant statuant à nouveau,

- condamner Mme [D] à payer à M. [P] la somme de 11.510,27 euros à titre de provision, correspondant au montant des réparations locatives, de la valeur de remplacement du lave vaisselle et des sommes dues principalement, sur le fondement du remboursement entre les mains du bailleur des sous loyers perçus par les locataires et subsidiairement sur le fondement des dommages intérêts en réparation du préjudice moral du fait de la sous location non autorisée ;

En toute hypothèse,

- infirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a condamné M. [P] à payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

Ce faisant, statuant à nouveau,

- condamner Mme [D] à payer à M. [P] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



Il fait valoir que le bail ayant été conclu au profit de deux colocataires, Mme [D] n'a qualité pour agir en restitution du dépôt de garantie que dans la limite de sa quote- part soit la somme de 1.007,50 euros, la clause de solidarité passive insérée dans le bail n'emportant pas mandat d'agir pour l'autre locataire.



Il soutient que son obligation de restituer le dépôt de garantie se heurte à des contestations sérieuses compte tenu des réparations locatives constatées lors de l'état des lieux de sortie et des travaux de remise en état après l'état des lieux de sortie du 31 juillet 2019.



Il déclare être bien fondé sur le fondement des articles 546 et 547 du code civil à réclamer le remboursement des sous loyers perçus par les locataires en violation des clauses du bail ou la réparation de son préjudice moral résultant des nuisances du fait des sous-locations, ayant été contraint de gérer les problèmes induits par celles-ci avec les autres occupants de l'immeuble et le syndicat des copropriétaires.



Il affirme qu'en tout état de cause, l'indemnité de l'article 22 de la loi de 1989 régissant les rapports locatifs n'est pas due puisque le défaut de restitution ne résulte que de l'absence de connaissance de la nouvelle adresse des locataires.



Par dernières conclusions remises et notifiées le 16 mai 2022, Mme [Y] [D] demande à la cour de :



Vu les dispositions de l'article 835 du code de procédure civile,

vu l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989,

vule décret du 26 aoît 1987,

vu l'article 1730 du code civil,

vu le contrat de bail et l'état des lieux d'entrée et de sortie dressé en présence des parties

vu les courriels échangés entre les parties,

vu les articles 546 et 547 du code civil,

vu l'article 1231-1 du code civil, anciennement 1147,

vu les présentes conclusions et les pièces communiquées à l'appui des demandes,



- dire l'appel de M. [J] [P] aussi irrecevable que mal fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions,

- l'en débouter ;

- infirmant l'ordonnance rendue en ce qu'elle a réduite à 126,62 euros la restitition du solde du dépôt de garantie et limité à 4836 euros la majoration pour la période du 31 septembre 2019 au 31 août 2021 ert fixé à 500 euros les frais irrépétibles,





- juger que le défaut de restitution du dépôt de garantie ne résulte que du refus de M. [J] [P] de le faire et non d'un quelconque empêchement et qu'il ne peut justifier ni de travaux de remise en état à effectuer au-delà de la somme de 54,90 euros pour un store ni d'un quelconque préjudice au titre des sous locations alléguées,



Ce faisant, statuant à nouveau :

- condamner, à titre de provision M. [J] [P] au paiement de la somme de 7.040 euros à Mme [Y] [D],

- dire que cette somme portera intérêts à compter du 24 août 2021 et ce jusqu'à son parfait paiement,

- condamner M.[J] [P] au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsiqu'en tous les dépens de l'instance.



Elle soutient avoir qualité à agir en restitution du dépôt de garantie dans sa totalité car elle n'agit pas au nom de son co-locataire, sollicitant le remboursement d'une somme qu'elle a entièrement versée et sur laquelle le co-locataire reconnaît qu'il n'a aucun droit, la jurisprudence invoquée par l'appelant n'étant pas applicable en l'espèce ne visant pas le même cas.



Elle rappelle qu'en première instance,le bailleur soutenait avoir effectué pour 2.205,96 euros de travaux de réparation et qu'en cause d'appel il porte ce montant à la somme de 4.238,77 euros en prétendant avoir effectué des dépenses pour la remise en état de l'appartement en raison de désordres locatifs, lesquels ne sont pas établis.



Elle fait valoir que le bailleur ne justifie d'aucun droit à obtenir le versement des sous-loyers perçus lesquels ne dépassent pas en outre la somme de 150 euros et qu'il ne justifie d'aucun préjudice.



Elle affirme que le défaut de non restitution du dépôt de garantie ne résulte que de la seule volonté du bailleur et non pas du défaut de transmission de la nouvelle adresse des locataires, ainsi qu'il résulte de l'échange de mails entre les parties et de l'envoi d'une lettre recommandée du 14 novembre 2019 mentionnant son adresse.






MOTIFS



Selon l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non recevoir, tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.



L'appelant ne démontre nullement que Mme [D] agit pour le compte du co-locataire, ce que celle-ci n'a jamais prétendu ni invoqué, démontrant même le contraire par la production d'une attestation non sérieusement contestable établie par ce dernier, lequel déclare que le dépôt de garantie a été versé en totalité par Mme [D].



L'appelant n'est pas fondé à se prévaloir de la clause de solidarité insérée dans le bail pour conclure au défaut de qualité de Mme [D] à solliciter le remboursement intégral du dépôt de garantie dès lors que cette clause est une clause de solidarité passive au sens de l'article1313 du code civil en ce qu'elle prévoit que 'en cas de pluralité de locataires, ceux-ci sont tenus de manière solidaire et indivisible de toutes les obligations du bail permettant ainsi au bailleur d'agir à l'encontre de l'un quelconque des co-locataires au titre de leurs obligations du bail '.



Le défaut de qualité à agir de Mme [D] pour réclamer la restitution de l'intégralité du dépôt de garantie ne saurait en conséquence résulter de cette clause.



L'ordonnance critiquée sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la fin de non recevoir soulevée par l'appelant.



En vertu de l'alinéa 2 de l'article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.



Par application des dispositions combinées des articles 22 et 7 c de la loi du 6 juillet 1989 régissant les rapports locatifs,le dépôt de garantie doit être restitué au locataire, déduction faite des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont le locataire pourrait être tenu au titre des dégradations locatives, sous réserve qu'elles soient dûment justifiées par le bailleur.



En l'espèce, le bailleur soutient en cause d'appel que les réparations locatives à déduire du montant du dépôt de garantie s'élèvent à la somme de 4.238,77 euros, les ayant limitées devant le premier juge à la somme de 2.205,86 euros, outre la somme de 279 euros au titre du remplacement du lave-vaisselle.



C'est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge, après avoir procédé à une exacte et précise analyse de la comparaison des états des lieux d'entrée et de sortie et des pièces versées aux débats, a considéré que les réparations locatives étaient dûment justifiées à hauteur de 1.888,88 euros (1.397 euros pour le verrou de sécurité, 286,48 euros pour les joints, 54,90 euros pour le store, 150 euros pour travaux de bricolage et nettoyage).



S'agissant du surplus correspondant selon le bailleur à la remise en état du mur au dos de la salle de bains et du parquet, celui-ci ne rapporte pas la preuve de la dégradation du sol du couloir ni d'une dégradation du parquet et du mur au dos de la salle de bain,du fait des locataires, les peintures et parquet étant décrits en bon état dans l'état des lieux de sortie.



En conséquence, l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a déduit la somme de 1.888,88 euros du dépôt de garantie et condamné le bailleur à restituer à Mme [D] la somme de 126,62 euros.



La non-restitution du solde du dépôt de garantie emporte paiement de l'indemnité légale prévue à l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989 dès lors que l'origine du défaut de restitution dans les délais ne résulte pas de l'absence de transmission par le locataire de l'adresse de son nouveau domicile.



En l'espèce, s'il est constant que les parties ont à plusieurs reprises échangé des courriels après la fin du contrat de bail et l'établissement de l'état des lieux de sortie, il n'en résulte pas pour autant que le bailleur ait sollicité la communication de la nouvelle adresse de la locataire intimée et qu'il se soit heurté au refus de celle-ci d'une telle communication.



L'obligation pour le bailleur de restituer le dépôt de garantie dans le délai prescrit par l'article 22 sus-visé n'a donc pas été réalisée. Aucune contestation n'étant soulevée quant au point de départ dudit délai de restitution, la non restitution du dépôt de garantie n'ouvrant droit qu'au paiement de l'indemnité légale de l'article 22, sans intérêts légaux en plus, l'ordonnance critiquée sera confirmée en ce qu'elle a fait droit à ce chef de demande de Mme [D] et condamné le bailleur au paiement de la somme de 4.836 euros à ce titre.



La demande de M.[P] en paiement de la somme de 8.000 euros au titre de sous-locations effectuées par les locataires se heurte à une contestation sérieuse en ce qu'elle n'est nullement justifiée en son montant.









La même demande en paiement formulée subsidiairement par M.[P] à titre de dommages intérêts se heurte également à la même contestation sérieuse dès lors qu'il ne résulte pas des pièces versées aux débats, avec l'évidence requise en la matière, l'existence du préjudice moral allégué par celui-ci.



L'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a rejeté ces demandes.



Le sort des dépens et de l'indemnité de procédure a été exactement réglé par le premier juge. L'ordonnance entreprise sera confirmée de ce chef.



M. [P], succombant en son appel, supportera la charge des dépens d'appel ainsi que celle d'une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS,



Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;



Y ajoutant,



Condamne M. [J] [P] aux dépens d'appel,



Condamne M. [J] à payer à Mme [Y] [D] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



LE GREFFIER LE PRESIDENT

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