7 septembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-13.362

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:CO10485

Texte de la décision

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 7 septembre 2022




Rejet non spécialement motivé


Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10485 F

Pourvoi n° N 20-13.362




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 SEPTEMBRE 2022

La société BB Design, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 20-13.362 contre l'arrêt rendu le 15 novembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l'opposant à la société Dorel France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations écrites de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société BB Design, de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société Dorel France, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 mai 2022 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.


1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société BB Design aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BB Design et la condamne à payer à la société Dorel France la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société BB Design.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société BB Design de ses demandes tendant à la condamnation de la société Dorel de l'indemniser de ses préjudices consécutifs à la procédure intentée à son encontre, en lui allouant la somme de 27 525 000 euros en réparation de la perte de valeur de l'entreprise et la somme de 1 000 000 euros en réparation de son préjudice moral et d'image du fait de la procédure et d'AVOIR débouté la société BB Design de ses demandes tendant à la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux ou périodiques de son choix et aux frais avancés de la société DOREL, dont au moins un journal spécialisé en puériculture, un journal national français et un journal national distribué aux Etats-Unis et sur les pages d'accueil des sites internet http://www.bebeconfort.com/fr-fr/, http://www.bebeconfort.com/fr-fr/sieges-auto.aspx, et http://www.bebeconfort.com/frfr/sieges-auto/sieges-auto-bebes.aspx ;

AUX MOTIFS QUE Sur la demande de nullité du brevet EP 968 ; que la société BB Design soutient que la société Dorel a déposé une demande de brevet français antérieure couvrant la même invention que le brevet européen EP 968 litigieux, et a fait expirer le délai de priorité en déposant son brevet européen un an et un jour après le dépôt du brevet français, de sorte qu'il constitue au sens de l'article L. 611-11 du code de la propriété intellectuelle une antériorité opposable à la société Dorel et donc destructrice de nouveauté ; que la société Dorel argue que ces différents dépôts ont été réalisés par un conseil en propriété industrielle, que l'objet de l'article L.611-11 du code de la propriété intellectuelle est de protéger les titulaires de demandes de brevet non encore publiées contre des dépôts postérieurs de la part de tiers de sorte que la reconnaissance en l'espèce du brevet français, également déposé par elle, comme étant une antériorité destructrice de nouveauté, serait contraire à l'objectif poursuivi par le législateur ; que la cour rappelle qu'en application de l'article L. 611-11 du code de la propriété intellectuelle, une invention est considérée comme nouvelle si elle n'est pas comprise dans l'état de la technique, lequel est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet, en ce compris le contenu de demandes de brevets français, européen ou international désignant la France, qui ont une date de dépôt antérieure et qui n'ont été publiées qu'à une date postérieure ; qu'en l'espèce, la société Dorel a déposé le brevet EP 968 le 14 août 2004 ainsi qu'il résulte du fascicule du brevet produit (pièce 2 de l'appelante) ; qu'il n'est pas contesté qu'il existait une demande antérieure d'un brevet français FR 2 858 787 (FR 787) déposée le 13 août 2003 couvrant la même invention, la société Dorel prétendant qu'elle en est également le déposant sans s'expliquer sur le fait que le certificat de ladite demande versé au débat (pièce B10 de l'intimée) mentionne en qualité de déposant une autre société, la société Ampa France ; qu'en tout état de cause, compte tenu de ce que le droit de priorité revendiqué sur la demande du brevet FR 787 n'a pas été reconnu par l'office européen des brevets, ce qui n'est pas contesté et résulte notamment de son courrier du 12 janvier 2005 (pièce B8), il est avéré que la demande de brevet FR 787 déposée plus d'un an avant le brevet en cause, peu important que sa publication soit postérieure, est comprise dans l'état de la technique de sorte qu'elle constitue une antériorité de toutes pièces du brevet litigieux, qui se voit ainsi privé de nouveauté, laquelle doit être appréciée objectivement sans considération du fait que les déposants de l'antériorité et du brevet revendiqué seraient les mêmes ; qu'il convient en conséquence de constater la nullité de la partie française du brevet EP 968, de rejeter en conséquence les demandes formées par la société Dorel sur le fondement de la contrefaçon dudit brevet et d'infirmer le jugement entrepris de ces chefs ;

ET QUE la société BB Design prétend que la société Dorel ne pouvait ignorer que la partie française de son brevet était nulle, que la procédure intentée est donc abusive, et qu'elle doit donc l'indemniser du préjudice subi du fait notamment de l'interdiction de commercialisation qui l'a privée de l'exécution du contrat conclu avec la société BB Neuf, et en conséquence de la valeur de son entreprise estimée à plus de 27 millions d'euros, outre un préjudice moral de 1 million d'euros ; que la cour observe que la société Dorel a intenté la présente instance en juillet 2013 sur le fondement du brevet européen EP 968 déposé en août 2004 et délivré en octobre 2007 dont elle était titulaire ; que le fait que la priorité sur le brevet français antérieur FR 787 ne lui a pas été accordée ne suffit à établir que la société Dorel a agi dans l'unique intention de nuire ou avec une légèreté blâmable sur le fondement du brevet litigieux, alors qu'elle a pu se méprendre sur l'étendue de ses droits, ledit brevet bénéficiant d'une présomption de validité et le moyen de nullité pour défaut de nouveauté du fait de l'antériorité du brevet FR 787 n'ayant jamais été soulevé jusqu'aux conclusions n°3 de la société BB Design signifiées le 21 novembre 2017 ; que l'action de la société Dorel en elle-même n'est pas abusive pas plus que le fait que cette dernière a procédé le 26 avril 2016 à la signification du jugement dont appel après l'échec de tentatives de rapprochement entre les parties, et qu'elle a cherché à l'exécuter, aucun abus n'étant caractérisé de ce chef, la société BB design qui indique avoir cessé la commercialisation de son siège auto Rotax à la suite dudit jugement n'ayant pas produit les pièces comptables au soutien de sa demande de suspension de l'exécution provisoire présentée devant le Président délégataire de la cour d'appel de Paris qui l'a en conséquence déboutée par ordonnance du 24 novembre 2016, ce qui ne peut être imputé à l'intimée ; que les demandes indemnitaires de la société BB Design formées sur le fondement du caractère abusif de la procédure tout comme ses demandes de publication seront donc rejetées ;

1°) ALORS QUE l'exécution d'une ordonnance de référé n'a lieu qu'aux risques et périls de celui qui la poursuit, à charge pour lui d'en réparer les conséquences dommageables lorsque cette ordonnance a été ultérieurement démentie par une décision sur le fond, sans qu'il soit nécessaire de relever une faute à son encontre ; qu'après avoir jugé que le brevet EP 1 625 968 était nul et que les demandes de la société Dorel sur le fondement de la contrefaçon de ce brevet à l'encontre de la société BB Design devaient être rejetées (arrêt p. 7, al. 5 et 7), la cour d'appel a néanmoins débouté l'exposante de ses demandes tendant à l'indemnisation de ses préjudices économiques et moral consécutifs à l'interdiction qui lui avait été faite par l'ordonnance du 21 novembre 2013, que la société Dorel lui avait fait signifier et que la société BB Design avait été contrainte d'exécuter à compter du 1er janvier 2014, de poursuite de la commercialisation des produits argués de contrefaçon de ce brevet nul au motif qu'il n'aurait pas été démontré que cette dernière société aurait « agi dans l'unique intention de nuire ou avec une légèreté blâmable sur le fondement du brevet litigieux » et que son action n'était « pas abusive » (arrêt p. 6, dernier al.) ; qu'en statuant ainsi, quand l'existence d'une faute n'était pas une condition de l'indemnisation des conséquences de l'exécution provisoire de l'ordonnance du 21 novembre 2013, démentie par l'arrêt, la cour d'appel a violé l'article L. 111-10 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 1240 du code civil ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'exécution d'une décision de justice exécutoire à titre provisoire n'a lieu qu'aux risques et périls de celui qui la poursuit, à charge par lui, si le titre est ultérieurement modifié, d'en réparer les conséquences dommageables ; qu'après avoir infirmé le jugement et jugé que le brevet EP 1625 968 était nul et que les demandes de la société Dorel sur le fondement de la contrefaçon de ce brevet à l'encontre de la société BB Design devaient être rejetées (arrêt p. 7, al. 5 et 7), la cour d'appel a constaté que la société Dorel « a[vait] procédé le 26 avril 2016 à la signification du jugement [du 19 mars 2015 qui avait « interdit à la société BB Design de distribuer et commercialiser en France des sièges auto reproduisant les caractéristiques du brevet européen EP 1 625 968 et ce, sous astreinte provisoire de 1 000 euros par produit contrefaisant » (jugement du 19 mars 2015, p. 20, al. 7)] et qu'elle [avait] cherché à l'exécuter » (arrêt p. 6, denier al. et suite p. 7, al. 1er) mais a néanmoins débouté la société BB Design de ses demandes tendant à l'indemnisation de ses préjudices économiques et moral consécutifs à l'exécution provisoire du jugement du 19 mars 2015 au motif que la procédure intentée par la société Dorel n'était pas abusive ; qu'en statuant ainsi, quand l'existence d'une faute n'était pas une condition de l'indemnisation des conséquences de l'exécution provisoire intervenue aux risques et périls de la société Dorel, du jugement du 19 mars 2015, qu'elle a infirmé, la cour d'appel a violé l'article L. 111-10 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 1240 du code civil ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, commet un abus du droit d'agir en justice la partie qui introduit une action en contrefaçon de brevet et fait interdire à un concurrent la commercialisation de ses produits, pour contrefaçon d'un brevet lorsqu'il ne pouvait ignorer que le brevet sur lequel son action était fondée était nul ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que le brevet EP 968 sur lequel la société Dorel a fondé son action en contrefaçon à l'encontre de la société BB Design avait été déposé plus d'un an après le brevet FR 787 dont il revendiquait la priorité et que l'Office européen des brevets avait, dès le 12 janvier 2005, refusé de reconnaitre le droit de priorité invoqué (arrêt p. 4, al. 5), de sorte qu'elle ne pouvait ignorer que le brevet européen était nul pour défaut de nouveauté ; qu'en jugeant néanmoins que l'action en contrefaçon intentée sur la base de ce brevet nul n'était pas abusive, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 32-1 du code de procédure civile.

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