13 juillet 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-10.875

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:C100702

Texte de la décision

CIV. 1

COUR DE CASSATION



CF


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 13 juillet 2022




NON-LIEU A RENVOI


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 702 F-D

Pourvoi n° A 22-10.875



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 13 JUILLET 2022

Par mémoire spécial présenté le 24 mai 2022, la société Emrys la carte (Scopsa), société coopérative à capital variable, dont le siège est [Adresse 2], a formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° A 22-10.875 qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2021 par la cour d'appel de Toulouse (3e chambre civile), dans une instance l'opposant :

1°/ à l'association UFC-Que choisir, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à M. [N] [K], domicilié [Adresse 1],

3°/ au procureur général près la cour d'appel de Toulouse, domicilié en son parquet général, 10 place Salin, BP 7008, 31068 Toulouse cedex,

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de la société Emrys la carte, de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'association UFC-Que choisir et de M. [K], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 juillet 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, Mme Mallet-Bricout, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Au mois de juillet 2020, le magazine « Que choisir argent », édité par l'association UFC-Que choisir (l'association), a publié un article intitulé « Le (faux) monde enchanté d'Emrys », évoquant les programmes de fidélité proposés par la société Emrys la carte (la société). Par lettre recommandée du 27 août 2020, la société a adressé à M. [K], directeur de publication du magazine, une réponse qui n'a pas été publiée.

2. Le 23 septembre 2020, la société a assigné en référé l'association et M. [K] aux fins d'insertion forcée sous astreinte. En appel, l'association et M. [K] ont opposé la prescription de l'action. Un arrêt du 24 novembre 2021 a déclaré l'action de la société irrecevable comme prescrite.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

3. A l'occasion du pourvoi qu'elle a formé contre l'arrêt du 24 novembre 2021, la société a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les dispositions des articles 12 et 13 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881, combinées à celles de l'article 65 alinéa 1er de la même loi, en ce qu'elles prévoient que l'action en insertion forcée d'un droit de réponse est soumise à la prescription trimestrielle prévue pour l'exercice d'une action (civile ou publique) résultant d'un crime, d'un délit ou d'une contravention prévus par la loi sur la presse, portent-elles atteinte au droit d'accès à un juge, au droit à un recours effectif et à l'équilibre des droits des parties tels qu'ils sont garantis par les articles 4 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

4. Les dispositions contestées sont applicables au litige au sens et pour l'application de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958.

5. Elle n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

6. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

7. D'autre part, elle ne présente pas un caractère sérieux.

8. En effet, les dispositions contestées, qui soumettent l'exercice d'un droit de réponse à un délai de trois mois à compter de la publication de l'article qui met en cause la personne nommée ou désignée, puis l'exercice d'une action en justice afin de faire sanctionner le refus d'insertion à un délai de trois mois à compter de la date de ce refus, ne privent pas la personne mise en cause d'un accès au juge et assurent un juste équilibre entre la protection constitutionnelle de la liberté d'expression, consacrée par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et le droit au recours résultant de l'article 16 de la Déclaration. De plus, dans les instances civiles en réparation des délits prévus par la loi du 29 juillet 1881, le demandeur a la faculté d'interrompre la prescription par tout acte régulier de procédure manifestant son intention de continuer l'action, même si cet acte n'est pas porté à la connaissance de la partie adverse elle-même.

9. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille vingt-deux.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.