6 juillet 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-10.261

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00810

Texte de la décision

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 juillet 2022




Cassation partielle


Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 810 F-D

Pourvoi n° N 21-10.261


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [N].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 17 novembre 2020.





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 JUILLET 2022

M. [L] [N], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-10.261 contre l'arrêt rendu le 18 septembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société Federal Express Corporation, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Valéry, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de M. [N], après débats en l'audience publique du 24 mai 2022 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Valéry, conseiller référendaire rapporteur, M. Ricour, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 septembre 2019), M. [N] a été engagé le 25 octobre 2000 par la société Federal Express Corporation (Fedex Corporation), et exerçait en dernier lieu les fonctions d'agent de piste.

2. Il a été licencié pour cause réelle et sérieuse le 9 juillet 2008.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande de dommages-intérêts, alors « que les dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause, ne s'opposent pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié, si toutefois ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder au remplacement définitif du salarié par l'engagement d'un autre salarié ; qu'en déboutant, dès lors, M. [N] de sa demande tendant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans caractériser que les absences du salarié avaient perturbé le fonctionnement de la société Fedex corporation, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1132-1 et L. 1232-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1132-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 :

5. Ce texte, qui fait interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, ne s'oppose pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié.

6. Pour débouter le salarié de sa demande au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'employeur a dû pallier l'absence du salarié par une organisation interne, et qu'il justifie du remplacement définitif de celui-ci.

7. En statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la lettre de licenciement visait la désorganisation, non de l'entreprise, mais du service auquel appartenait le salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en qu'il déboute M. [N] de ses demandes au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 18 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Federal Express Corporation aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Federal Express Corporation à payer à la SCP Yves et Blaise Capron la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour M. [N]


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt, sur ces points confirmatif, attaqué D'AVOIR débouté M. [L] [N] de ses demandes au titre du harcèlement moral ;

ALORS QU'il résulte des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail et que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement moral et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en déboutant, dès lors, M. [L] [N] de ses demandes au titre du harcèlement moral, sans examiner la circonstance qu'invoquait M. [L] [N] dans ses conclusions d'appel, à l'appui de ces demandes, tenant à ce que son manager, M. [P], instrumentalisait le système de notation tous les six mois des salariés pour exercer une pression considérable sur lui, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.


SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt, sur ces points infirmatif, attaqué D'AVOIR débouté M. [L] [N] de sa demande tenant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

ALORS QUE, de première part, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement ; que les dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause, ne s'opposent pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié, si toutefois ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder au remplacement définitif du salarié par l'engagement d'un autre salarié ; qu'il en résulte que la lettre de licenciement doit énoncer expressément la perturbation dans le fonctionnement de l'entreprise et la nécessité de pourvoir au remplacement du salarié absent et qu'à défaut, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; qu'en déboutant, dès lors, M. [L] [N] de sa demande tendant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, quand elle relevait que la lettre de licenciement en date du 9 juillet 2008 visait la désorganisation qu'entraînaient les absences de M. [L] [N] sur l'organisation du service auquel il était rattaché, et non de l'entreprise, et quand, en conséquence, le licenciement de M. [L] [N] était sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les dispositions des articles L. 1132-1 et L. 1232-6 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause ;

ALORS QUE, de deuxième part, les dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause, ne s'opposent pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié, si toutefois ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder au remplacement définitif du salarié par l'engagement d'un autre salarié ; qu'en déboutant, dès lors, M. [L] [N] de sa demande tendant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sans caractériser que les absences de M. [L] [N] avaient perturbé le fonctionnement de la société Federal express corporation, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1132-1 et L. 1232-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause ;

ALORS QUE, de troisième part, les dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause, ne s'opposent pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié, si toutefois ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder au remplacement définitif du salarié par l'engagement d'un autre salarié ; que si le remplacement définitif du salarié peut se faire en cascade, par la voie de la mutation interne d'un autre salarié, le poste laissé vacant par le salarié licencié ou par le salarié remplaçant doit en tout état de cause donner lieu à l'embauche d'un salarié sous un contrat de travail à durée indéterminée ; que c'est à l'employeur qu'il appartient d'apporter la preuve que le salarié licencié a été remplacé définitivement par un autre salarié et, le cas échéant, si ce remplacement a été opéré par la voie d'une mutation interne, que le salarié remplaçant a été lui-même remplacé par un autre salarié ; qu'en énonçant, par conséquent, pour débouter M. [L] [N] de sa demande tendant à voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, que la société Federal express corporation justifiait du remplacement définitif de M. [L] [N] par M. [E] [O] par un recrutement définitif, sans caractériser que la société Federal express corporation avait établi avoir embauché, pour remplacer M. [E] [O], qui, comme l'avaient relevé les premiers juges, avait remplacé M. [L] [N] par la voie d'une mutation interne, un autre salarié sous un contrat de travail à durée indéterminée, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1132-1 et L. 1232-1 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause.

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