24 juin 2022
Cour d'appel de Paris
RG n° 21/15999

Pôle 5 - Chambre 2

Texte de la décision

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS







Pôle 5 - Chambre 2









ARRÊT DU 24 JUIN 2022



(n°106, 6 pages)









Numéro d'inscription au répertoire général : n° RG 21/15999 - n° Portalis 35L7-V-B7F-CEJ6L



Jonction avec le dossier 21/16815





Décision déférée à la Cour : décision du 06 juillet 2021 - Institut National de la Propriété Industrielle - Numéro national et référence : OP20-3255 / 4656912 / SHF







DECLARANTE AU RECOURS





Société E-BOREALIS, société de droit portugais, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 6]

[Localité 3]

PORTUGAL



Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque P 480

Assistée de Me Emmanuel PLAZANET, avocat au barreau de PARIS, toque P 129







EN PRESENCE DE





MONSIEUR LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE (INPI)

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]



Représenté par Mme Marianne CANTET, Chargée de Mission













APPELEE EN CAUSE





S.A.S. DYP SOLUTIONS, prise en la personne de ses dirigeants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Localité 2]

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 812 462 380



Représentée par Me Sophie MICALLEF de l'AARPI HOYNG - ROKH - MONEGIER, avocate au barreau de PARIS, toque P 512

Assistée de Me Charlotte CUNY, avocate au barreau de PARIS, toque P 512 substituant Me Caroline LEVESQUE, avocate au barreau de LYON







COMPOSITION DE LA COUR :





En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Laurence LEHMANN, Conseillère



Mme Laurence LEHMANN a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



Mme Brigitte CHOKRON, Présidente

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Agnès MARCADE, Conseillère





Greffière lors des débats : Mme Karine ABELKALON





Le dossier a préalablement été transmis au Ministère Public, représenté par Mme Monica d'ONOFRIO, Avocate Générale







ARRET :



Contradictoire

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Laurence LEHMANN, Conseillère, Faisant Fonction de Présidente, en remplacement de Mme Brigitte CHOKRON, Présidente, empêchée, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.






Vu la demande d'enregistrement n°4 656 912 déposée le 15 juin 2020 par la société française Dyp Solutions portant sur le signe verbal VERIFPASS destiné à distinguer notamment les services suivants :

- en classe 35 pour les «Publicité ; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; diffusion de matériel publicitaire (tract, prospectus, imprimés, échantillons) ; service d'abonnement à des journaux (pour des tiers) ; services d'abonnement à des services de télécommunications pour des tiers ; présentation de produits sur tout moyen de communication pour la vente au détail ; conseil en organisation et direction des affaires ; comptabilité ; reproduction de documents ; service de bureau et de placement ; portage salarial ; service de gestion informatisée

de fichiers ; organisation de trafic pour des sites web ; organisation d'expositions à buts commerciaux ou de publicité ; publicité en ligne sur un réseau informatique ; location de temps publicitaire sur tout moyen de communication ; publications de textes publicitaires ; location d'espace publicitaire ; diffusion d'annonces publicitaires ; conseil en communication (publicité) ; relation publique ; conseil en communication (relations publiques ; audit d'entreprises (analyse commerciale) ; service d'intermédiation commerciale (conciergerie)»,

- en classe 36 pour les «Assurances ; services bancaires ; services de caisse de prévoyance ; émission de carte de crédit ; estimations immobilières ; gestion financière ; gérance de biens

immobiliers ; service de financement ; analyse financière ; constitution de capitaux ; consultation en matière financière ; estimation financière (assurance, banque, immobilier) ; placement de fonds».



Vu l'opposition à l'enregistrement de cette marque pour la totalité des services visés formée le 1er septembre 2020 par la société portugaise E-Borealis sur la base de droits antérieurs, le nom commercial VERIFPASS et le nom de domaine verifpass.com.



Vu la décision de rejet de l'opposition du directeur général de l'Institut national de la

propriété industrielle (INPI) du 6 juillet 2021,



Vu le recours contre cette décision remis au greffe par la société E-Borealis, le 6 août 2021, enregistré à la cour d'appel sous le RG 21/15999,



Vu le second recours contre cette décision remis au greffe par la société E-Borealis, le 23 septembre 2021, enregistré à la cour d'appel sous le RG 21/16815,



Vu les conclusions de la société E-Borealis prises au visa du 21/16815 remises au greffe le 27 septembre 2021,



Vu l'assignation délivrée le 13 octobre 2021 par huissier de justice à la société Dyp Solutions et remise au greffe le 16 octobre 2021 comportant notamment dénonciation des deux recours exercés les 6 août 2021 et 23 septembre 2021, des conclusions du 27 septembre 2021 et l'avis de fixation pour l'audience du 21 avril 2022,



Vu les conclusions de la société E-Borealis prises au visa des deux numéros de RG 21/15999 et 21/16815 remises au greffe le 27 octobre 2021, et les dernières conclusions prises à l'appui des deux procédures remises au greffe le 7 mars 2022,



Vu les dernières conclusions de la société Dyp Solutions prises au visa des deux numéros de RG 21/15999 et 21/16815 remises au greffe le 23 décembre 2021,



Vu les observations écrites du directeur général de l'INPI reçues au greffe le 22 mars 2022,



Le Ministère public ayant été avisé de l'audience du 21 avril 2022.






SUR CE,





Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.











Sur la jonction des procédures RG 21/15999 et 21/16815



La cour constate que les deux recours exercés les 6 août et 23 septembre 2021, enregistrés à la cour sous les RG 21/15999 et 21/16815 ont été formés par la même société et à l'encontre de la même décision du directeur général de l'INPI de rejet de son opposition formée contre l'enregistrement sollicité par la société Dyp Solutions et que dès lors il est de bonne administration de la justice de joindre ces deux procédures ainsi que sollicité par la société E-Borealis.



Les procédures RG 21/15999 et 21/16815 seront jointes sous le numéro RG 21/15999.



Sur la validité du recours



L'article R.411-25 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

«Les recours sont portés devant la cour d'appel par acte contenant, outre les mentions prescrites par le 3° de l'article 54 du code de procédure civile, et à peine de nullité :

1° Le numéro unique d'identification de l'entreprise requérante ou tout document équivalent à l'extrait d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés pour les opérateurs situés hors de France,

2° L'objet du recours ;

3° Le nom et l'adresse du titulaire du titre si le requérant n'a pas cette qualité ;

4° La constitution de l'avocat du requérant.

Sauf en cas de décision implicite de rejet, une copie de la décision attaquée est jointe à cet acte à peine de nullité.

L'acte est daté et signé par l'avocat constitué. Il est remis au greffe et vaut demande d'inscription au rôle».



L'article R.411-21 du même code dispose :

« Les recours mentionnés à l'article R. 411-19 sont formés dans un délai d'un mois à compter de la notification des décisions en cause».



L'article R.411- 43 prévoit une augmentation de deux mois du délai de l'article R. 411-21 pour un requérant demeurant à l'étranger ce qui est le cas de la société E-Borealis sise au Portugal.



La Société Dyp Solutions fait valoir que le premier recours du 6 août 2021 serait irrecevable sur le fondement de l'article R.441-25 aux motifs que la requérante n'aurait pas fourni de document équivalent à un extrait d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés pour les opérateurs situés hors de France et n'aurait pas indiqué le nom et l'adresse du titulaire du titre invoqué.



Elle fait ensuite valoir que le second recours, dont elle ne conteste pas qu'il contenait les indications sollicitées par l'article R441-25, formé le 23 septembre 2021 serait tardif comme exercé plus d'un mois de la décision du directeur général de l'INPI.



Or, s'il est exact que des mentions prescrites faisaient défaut lors du premier recours, ces omissions ont été régularisées par la société lors de l'assignation à comparaître délivrée à la société Dyp Solutions par acte en date du 13 octobre 2021.



De plus, le second recours qui contient l'intégralité des mentions exigées par le dit article a été, contrairement aux allégations de la société Dyp Solutions, remis au greffe dans le délai légal prévu par l'article R.411-21 augmenté de deux mois en application de l'article R 411- 43 du code de la propriété intellectuelle.



Dès lors, la société E-Borealis est recevable en son recours formé en annulation de la décision rendue le 6 juillet 2021 par le directeur général de l'INPI.





Au fond



L'article R 411-25 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

«Dans le délai de deux mois suivant la publication de la demande d'enregistrement, une opposition peut être formée auprès du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle à l'encontre d'une demande d'enregistrement en cas d'atteinte à l'un des droits antérieurs suivants ayant effet en France :

(') 4° Un nom commercial, une enseigne ou un nom de domaine, dont la portée n'est pas seulement locale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public (...)».



La société E-Borealis a opposé son nom commercial VERIFPASS et le nom de domaine verifpass.com. Le directeur général de l'INPI a considéré, au vu des pièces produites par l'opposante, que n'étaient pas démontrés l'exploitation effective du nom commercial VERIFPASS sur le territoire français pour les activités invoquées au jour du dépôt de la marque contestée, ni l'usage en France pour une portée qui n'est pas seulement locale du nom de domaine allégué.



La société E-Borealis soumet à la cour d'appel de nouvelles pièces numérotées 13 à 16 qui n'avaient pas été produites devant l'INPI.



Or, en vertu des articles L. 411-4 et R. 411-19 du code de la propriété intellectuelle, le recours exercé contre une décision rendue par le directeur général de l'INPI se prononçant sur une opposition est dépourvu d'effet dévolutif et ne porte que sur l'appréciation de la validité de la décision administrative, au regard des éléments qui ont été soumis et débattus dans le cadre de la procédure d'opposition et sur le fondement desquels cette décision a été prise.



La cour d'appel, saisie d'un recours en annulation d'une décision du directeur général de l'INPI, doit se placer dans les conditions qui existaient au moment où cette décision a été prise, de sorte que les pièces nouvellement produites, ici les pièces 13 à 16, doivent doivent être écartées du débat.



Les pièces qui avaient été soumises par la société lors de la procédure devant l'INPI sont :

- Un document intitulé «Permanent Certificate» en langue anglaise et non traduit (pièce Borealis 1),

- Une fiche ICANN/LOOKUP portant sur le nom de domaine verifpass.com dont est titulaire la société opposante, (pièce Borealis 8),

- Un extrait du site internet VerifPass.com (pièce Borealis 9),

- Les FAQ du site VerifPass.com comportant une description de l'activité de la société opposante laquelle consiste en « des solutions de facturation et de support client à de nombreuses entreprises à travers le monde qui proposent des services et produits en ligne », « un système de gestion d'abonnement », permettant l'«accès [au] compte client pour gérer, résilier, annuler ou stopper [les] abonnements et prélèvements Verifpass.com » (pièce Borealis 10),

- Les conditions générales d'utilisation des services proposés sur le site Verifpass.com (pièce Borealis 11),

- Les audiences du site sur la période du 1er juin 2018 au 30 août 2020 comportant l'indication suivante «fr.: 50  - 1,52%» et «fr-fr : 111 - 3,37%» (pièce Borealis 12).



La cour après examen de ces pièces constate que le seul document référant au nom commercial est celui, rédigé en anglais, intitulé «Permanent Certificate», qui ne permet pas de justifier de l'exploitation effective du nom VERIFPASS à titre de nom commercial sur le territoire français.











Les autres pièces ayant trait au site internet verifpass.com portent, à l'exception de la pièce numérotée 12, sur la présentation du site, les conditions générales d'utilisation du service et les FAQ. Si ces pièces donnent des informations sur les services offerts par la société requérante, elles ne sont pas aptes à prouver que le nom de domaine invoqué fait l'objet d'un usage effectif sur le territoire français, ni qu'il aurait une portée non seulement locale.



Quant à la pièce 12 portant sur les audiences du site pour la période du 1er juin 2018 au 30 août 2020, elle fait état de seulement 111 visites en langue française sur le territoire français (symbolisé par la mention «fr-fr») sur 26 mois, ce qui représente 3,37% des utilisations sur la période. Ainsi, et même si on y ajoute les 11 visites mentionnées «fr» qui représentent 0,33% des utilisations, on ne peut conclure à un usage effectif sur le territoire français du site.



En outre, la société requérante n'a produit devant l'INPI aucun document, tel des factures ou documents comptables, de nature à démontrer une fourniture réelle et effective des services invoqués à l'appui de son opposition sur le territoire français.



C'est ainsi à juste titre que le directeur général de l'INPI a rejeté comme non fondée l'opposition de la société E-Borealis tant regard de son nom commercial que de son nom de domaine.



Le recours contre la décision du directeur général de l'INPI doit en conséquence être rejeté.



Il ne sera pas prononcé de condamnation aux dépens et l'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS





Prononce la jonction des procédures enregistrées sous les numéros RG 21/15999 et RG 21/16815 sous le numéro RG 21/15999,



Dit recevables les recours exercés par la société E-Borealis à l'encontre de la décision du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle du 6 juillet 2021,



Les déclare mal fondés et les rejette,



Rejette les demandes au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,



Dit n'y voir lieu à condamnation aux dépens,



Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre recommandée avec avis de réception par les soins du greffier aux parties et au directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle.





La Greffière La Conseillère, Faisant Fonction de Présidente

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.