21 juin 2022
Cour d'appel de Poitiers
RG n° 21/03320

1ère Chambre

Texte de la décision

ARRET N°392



N° RG 21/03320 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GNGV















[Y]

[L]



C/



[R]















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE POITIERS



1ère Chambre Civile



ARRÊT DU 21 JUIN 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03320 - N° Portalis DBV5-V-B7F-GNGV



Décision déférée à la Cour : ordonnance du 02 novembre 2021 rendue par le Président du TJ de [Localité 1].





APPELANTS :



Madame [Z], [I] [Y] épouse [L]

née le 27 Février 1963 à [Localité 14] DE LA REUNION (974)

[Adresse 8]

[Localité 4]



Monsieur [U] [L]

né le 16 Janvier 1962 à PARAME (35)

[Adresse 8]

[Localité 4]



ayant tous les deux pour avocat Me Magalie ROUGIER de la SCP ROUGIER VIENNOIS FERNANDES, avocat au barreau de SAINTES







INTIMEE :



Madame [S] [R]

née le 13 Avril 1957 à ORAN ALGERIE

[Adresse 2]

[Localité 1]



ayant pour avocat postulant Me François MUSEREAU de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me François DRAGEON, avocat au barreau de La Rochelle-Rochefort







COMPOSITION DE LA COUR :



En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 16 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :



Monsieur Philippe MAURY, Conseiller



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller





GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,





ARRÊT :



- Contradictoire



- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,



- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.








PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES



Par acte notarié en date du 16 décembre 2016, Mme [S] [R] a vendu à M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] une maison d'habitation située sur la parcelle cadastrée section BO n°[Cadastre 5] [Adresse 10].



Par cet acte, une servitude de canalisation a été créée au profit de l'immeuble vendu, le fonds servant étant la parcelle BO [Cadastre 6] et BO [Cadastre 7] demeurant la propriété de Mme [S] [R]



Le même jour, M. [U] [L] et Mme [C] [Y] épouse [L] ont consenti à Mme [S] [R] la location du bien vendu pour une durée de trois ans.



La locataire a donné son congé pour le 31 mars 2018.



Par acte d'huissier en date du 19 juillet 2021, M. [U] [L] et Mme [C] [Y] épouse [L] ont fait assigner Mme [S] [R] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de LA ROCHELLE aux fins de, selon leurs dernières conclusions, voir prononcer :

- le rejet des demandes de Mme [S] [R],

- la condamnation de Mme [S] [R], sous astreinte de 150€ par jour

de retard passé le délai d'un mois suivant la signification de l'ordonnance à intervenir, à réaliser l'enduisage de son mur privatif de clôture côté [L] et à faire réaliser par un professionnel les travaux de nature à supprimer les trois flashes et à supprimer les canalisations illégales sur leur réseau,

- la condamnation de Mme [S] [R] à leur payer une provision mensuelle de 750 € à compter de l'assignation et jusqu'à la réalisation complète des travaux permettant la location de l'immeuble en raison de l'impossibilité pour M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] de louer leur maison affectée de désordres dus à l'inertie de leur voisine,

- la condamnation de Mme [S] [R] à leur verser la somme de 1500€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



En défense, Mme [S] [R] demandait l'instauration d'une servitude de tour d'échelle pour pouvoir réaliser l'enduit de son mur de clôture du côté de la propriété des demandeurs et s'opposait aux autres demandes de M. [U] [L] et Mme [C] [Y] épouse [L] qui se heurteraient à une contestation sérieuse et en l'absence de trouble manifestement illicite.

Elle sollicitait la condamnation de M. [U] [L] et Mme [C] [Y] épouse [L] à lui verser 2000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



Par ordonnance contradictoire en date du 02/11/2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de LA ROCHELLE a statué comme suit :



' ORDONNONS à Mme [S] [R] de faire réaliser cet enduit dans un délai de six mois à compter de la signification de cette ordonnance, et passé ce délai, sous astreinte de 50 € par jour de retard,

- ORDONNONS à M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] de laisser pénétrer sur leur propriété le professionnel choisi par Mme [S] [R] sous réserve pour la défenderesse, ou l'entreprise par elle mandatée, d'aviser les demandeurs de la date de cette intervention au moins quinze jours à l'avance et ce par lettre recommandée avec avis de réception pour éviter toute discussion ultérieure sur la réalité de l'information et le respect de ce délai,

- DÉBOUTONS M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] de leur demande de réalisation de travaux sur les canalisations des eaux usées,

- DÉBOUTONS M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] de leur demande de provision,

- DÉBOUTONS les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

- LAISSONS à la charge de chacune des parties les dépens par elle exposés'.



Le premier juge a notamment retenu que :

- les parties s'accordent sur l'obligation pour Mme [S] [R] d'enduire le mur de clôture lui appartenant privativement.

Il lui sera fait injonction de faire réaliser cet enduit dans un délai, eu égard à la période hivernale arrivant, de six mois à compter de la signification de cette ordonnance, et passé ce délai, sous astreinte de 50€ par jour de retard.

- il convient également d'ordonner à M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] de laisser pénétrer sur leur propriété le professionnel choisi par Mme [S] [R], sous réserve de les prévenir.

- sur les demandes de provisions, M. et Mme [L] invoquent des écrasements de canalisations et des raccordements illégaux d'autres canalisations sur les leurs, mais ne justifient cependant d'aucun dommage imminent alors que postérieurement au curage effectué le 29 mai 2018, aucun désordre n'est apparu sur la canalisation d'eaux usées de leur maison et aucune intervention d'un spécialiste n'ayant été requise depuis 3 ans.

- ils n'établissent pas non plus le trouble manifestement illicite dans la mesure où leur expert a constaté lui-même le 06 mai 2019 qu'il n'existait aucun dommage consécutif aux flashes indiqués ou aux raccordements dont l'origine n'est nullement établie.

- le 29 juillet 2020, le même expert parle 'd'hypothèse' en ce qui concerne les raccordements et conclut à la nécessité de poursuivre les investigations sans lesquelles une simple concomitance peut être constatée entre la construction des murs et la survenance de désordres sur le réseau en 2018.

- M. et Mme [L] sont défaillants dans la preuve qui leur incombe en ce qui concerne l'existence même du trouble manifestement illicite et actuel.

- ils ne justifient pas avoir voulu mettre en location le bien acquis et en avoir été empêchés par un problème sur les canalisations qui n'est pas établi.





LA COUR



Vu l'appel limité en date du 25/11/2021 interjeté par M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] en ce que le juge des référés les a déboutés de leur demande de réalisation des travaux sur les canalisations des eaux usées et de leur demande de provision, ainsi que de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.



Vu l'article 954 du code de procédure civile



Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 07/03/2022, M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] ont présenté les demandes suivantes :



'Réformer l'ordonnance rendue le 2 novembre 2021 par le Vice-président, juge des référés du tribunal judiciaire de LA ROCHELLE, en ce qu'elle a débouté les époux [L] de leur demande de réalisation des travaux sur les canalisations des eaux usées et de leur demande de provision, ainsi que de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Vu l'existence d'un trouble manifestement excessif constitué par l'existence de branchements illégaux,

Ordonner à Mme [R], sous astreinte de DEUX CENTS EUROS (200 €) par jour de retard, passé le délai de deux mois à compter de la signification de la décision à venir, compte tenu des délais de fait déjà octroyés, à procéder à des travaux de remise en état de la canalisation des eaux usées appartenant aux époux [L], qui seront effectués par un professionnel, à charge de prévenir suffisamment à l'avance les époux [L] des travaux à venir, afin qu'ils puissent mandater tout sachant pour vérifier la régularité des travaux et Mme [R] devra fournir préalablement un devis d'une entreprise spécialisée dans les travaux d'assainissement.



Vu l'existence de flaches constituant un dommage imminent, voire un trouble manifestement illicite,

Ordonner les réparations, à titre conservatoire, des canalisations, en même temps que les travaux d'enlèvement des branchements litigieux, pour éviter des travaux destructifs répétitifs et sous les mêmes conditions d'astreinte.



Subsidiairement, dans l'hypothèse où la Cour considérerait que la preuve de l'existence des branchements litigieux, mais surtout des flaches ne serait pas suffisamment rapportée,

Ordonner une expertise,

Désigner pour y procéder tel expert qu'il plaira à la cour d'appel avec pour mission de :

0 Se rendre sur les lieux [Adresse 3],

0 Entendre les parties, tous sachants et se faire remettre l'ensemble des documents contractuels et tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission,

0 Identifier l'origine des raccordements éventuels découverts sur la canalisation, en même temps que l'existence des flaches, ainsi que leur situation au niveau des murs de séparation élevés par Mme [R] par tout moyen, y compris destructifs,

0 Identifier l'origine des flaches,

0 Dire si ces divers désordres rendent la canalisation impropre à sa destination ou en compromettent l'usage normal,

0 Rechercher les divers préjudices subis par les époux [L], notamment au titre de la jouissance et de la perte locative,

0 Définir la nature exacte des travaux à mettre en oeuvre pour remédier aux désordres constatés et permettre un fonctionnement normal de la canalisation vendue en bon état, selon l'acte de vente, c'est-à-dire sans branchement et avec la pente minimum nécessaire, en chiffrant le montant des travaux à réaliser.

0 Donner à la cour d'appel les éléments techniques permettant de déterminer les responsabilités encourues

0 Dire que du tout sera dressé rapport qui devra être déposé au greffe de la cour d'appel de POITIERS, dans un délai de 4 mois à compter de la consignation du montant de la provision à valoir sur les frais d'expertise qui sera versée par Mme [R]

qui a systématiquement refusé de participer aux opérations d'expertise amiable.

En tout état de cause, condamner Mme [R] à payer aux époux [L] la somme de QUATRE MILLE EUROS (4.000 €) sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel'.



A l'appui de leurs prétentions, M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] soutiennent notamment que :



- Mme [R] a mentionné en février 2018 oralement un problème de bouchage de la canalisation d'eaux usées, selon elle, facile à régler.

La location a pris fin le 6 avril 2018 et Mme [R] a regagné sa nouvelle maison

achevée.

- le 11 juin 2018, les époux [L] ont fait réaliser un hydrocurage de la canalisation d'eaux usées avec une inspection qui a permis de révéler, dans un premier temps, deux flaches (fléchissements qui forment des dépressions où l'eau et les déchets stagnent) qui empêchent un écoulement normal des eaux usées.

Cette inspection a permis de révéler et de confirmer la présence de raccordements d'autres canalisations d'eaux usées, lesquels ne figurent absolument pas dans l'acte de vente des époux [L] et ne sont aucunement autorisés en l'absence de servitudes.

L'un des raccordements concerne la nouvelle maison édifiée par Mme [S] [R], qui n'est pas non plus autorisé.

- une expertise amiable a été réalisée à la suite de la demande de leur assureur la MAIF.

- en raison de refus de Mme [S] [R] de participer aux opérations destructives sur son fond, les opérations n'ont pu se poursuivre,

- le rapport d'inspection télévisée du 6 mai 2019, effectué par ORIAD PC, confirme l'existence de deux flaches, d'une troisième moins prononcée, et de raccordements illégaux.

- M. et Mme [L] justifient de l'existence d'un trouble manifestement illicite constitué par l'existence de déformations importantes de la canalisation à plusieurs endroits, ainsi que par les branchements illégaux de canalisation non autorisés, lequel nécessite une remise en état immédiate

- la preuve de l'existence de branchements interdits est établie et Mme [R] ne produit aucune facture de travaux concernant le raccordement privatif de ses immeubles

- les flaches ont également été à plusieurs reprises constatés le 11 juin 2018 (outre la présence des raccordements Interdits) puis en mai 2019 et le 5 août 2020, et l'absence de constatations contradictoires ne saurait suffire, à elle seule, à permettre de contester la réalité de leur existence. Seule l'origine des flaches questionne et il est rappelé que l'immeuble a été vendu sans désordre déclaré.

- ces constatations sont complétées par le constat d'huissier relatif à l'existence de l'absence de branchement privatif concernant les immeubles appartenant à Mme [R].

- Mme [R] qui ne bénéficie pas de servitude n'a jamais sollicité un branchement personnel au réseau public d'eaux usées pour ses parcelles, ainsi que son propre permis de construire le mentionne et l'exige.

- le constat d'huissier permet d'établir l'existence d'une seule évacuation des eaux usées pour les trois parcelles appartenant aux appelants et à l'intimée.

- il est produit les échanges de mails avec les services de l'assainissement qui confirment qu'aucune boîte de branchement ne dessert la parcelle BO [Cadastre 7].

- EUREXO, dans son compte rendu d'expertise, mentionne deux raccordements étrangers aux époux [L], propriétaires de la canalisation.

En outre, le rapport d'inspection télévisée du 6 mai 2019 mentionne ces raccordements, lesquels ont été photographiés.

- ces raccordements constituent des troubles manifestement illicites et manifestes

- des constructions sans autorisation qui ne peuvent être couvertes par une tolérance et la démolition est la sanction du droit réel transgressé.

- Mme [R] sera donc condamnée sous astreinte à procéder à des travaux

de remise en état de la canalisation des eaux usées appartenant aux époux [L].

- s'agissant des flaches, il s'agit de prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état, pour prévenir un dommage imminent lié aux déformations importantes des canalisations qui va entraîner un bouchage, si la maison est occupée.

L'origine des désordres à ce stade est sans intérêt et entraînera éventuellement ensuite une procédure contre les entreprises.

- les époux [L] ont dû procéder à un hydrocurage le 11 juin 2018, à l'occasion duquel les flaches ont été découverts.

- le devis s'élève à plus de 9.000 €, juste pour réparer les flaches et détruire les branchements illégaux.

- Mme [R] a dû faire intervenir l'entreprise «la compagnie des déboucheurs » le 12 novembre 2020 pour déboucher la canalisation et la preuve du trouble manifestement illicite est amplement rapportée.

- une mesure d'expertise devrait être ordonnée s'il était considéré un défaut d'éléments suffisants.

- la demande de provision est maintenue dès lors que M. et Mme [L] ne peuvent utiliser normalement leur bien ni le louer, alors qu'ils résident à [Localité 12].



Au surplus et par conclusions en date du 05/04/2022, M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] ont présenté, postérieurement à l'ordonnance de clôture, les demandes suivantes, en sus de leurs demandes précédentes :



'Vu les dispositions de l'article 784 du Code de Procédure Civile,

Ordonner le rabat de l'ordonnance de clôture du 21 mars 2022, reçue le 5 avril 2022,

Déclarer en conséquence recevables les conclusions des époux [L] signifiées le 4 avril 2022 et les présentes'.



Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 18/03/2022, Mme [S] [R] a présenté les demandes suivantes:



'Vu les articles 835 du code de procédure civile,

Vu les articles 700 du code de procédure civile,

Confirmant la décision entreprise en toutes ses dispositions critiquées,

Débouter M. [U] [L] et Mme [Z] [I] [L] de l'ensemble de leurs demandes.

Condamner M. [U] [L] et Mme [Z] [I] [L] au paiement de la somme de 4000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens'.



A l'appui de ses prétentions, Mme [S] [R] soutient notamment que :



- aucun des éléments avancés par les époux [L] ne permet de conclure à l'absence de contestation sérieuse.

- Les époux [L] ne versent d'ailleurs aux débats aucun commencement de preuve en ce sens et procèdent par affirmation.

- l'intervention qu'elle a diligentée en 2020 ne concernait que les canalisations d'eaux pluviales (gouttières) et en aucun cas les eaux usées.

- ensuite du curage du 29/05/2018, soit trois ans avant l'assignation, aucune pièce n'était versée aux débats de nature à démontrer un quelconque encombrement ou bouchage de la canalisation en question.

- le trouble manifestement illicite n'est pas établi. L'ensemble des allégations des époux [L] concernant la canalisation demeurent au stade des supputations faute d'éléments de preuve matériels, et les demandes de travaux sous astreinte seront donc écartées.

- aucun élément ne permet d'affirmer que l'écrasement de la canalisation et les branchements illégaux constituent un trouble manifestement illicite. L'expertise amiable va même jusqu'à indiquer que : « le dommage ne peut être caractérisé».

- Mme [R] a fait procéder à un contrôle de son assainissement par les services compétents qui par deux lettres en date des 23.01.2020 et 09.07.2020 indiquent que les installations sanitaires dudit immeuble sont correctement raccordées.

- aucun élément de preuve versé au dossier ne permet de déduire que les époux [L] se trouvent dans l'impossibilité de louer cet immeuble.

- aucune expertise judiciaire n'a permis de conclure de manière contradictoire à la présence de l'écoulement de la canalisation et à des branchements illégaux.

- à aucun moment il n'a été constaté un quelconque problème de canalisation, d'écoulement d'eaux usées, et l'imminence d'un dommage n'est pas caractérisée.



Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.



Vu l'ordonnance de clôture en date du 21/03/2022.






MOTIFS DE LA DÉCISION :



Sur la révocation de l'ordonnance de clôture :



L'article 802 du code de procédure civile dispose que : 'Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office'.



L'article 803 du même code précise que 'l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle un motif grave depuis qu'elle a été rendue...

L'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit après l'ouverture des débats, par décision du tribunal'.



En l'espèce, la clôture est intervenue le 21/03/2022, alors que Mme [R], intimée, avait conclu le 18/03/2022.



Toutefois, ces écritures ne justifient pas qu'une réponse soit apportée par les appelants et il n'y pas lieu, faute de motifs graves, d'ordonner la révocation de l'ordonnance de clôture, les conclusions délivrées postérieurement devant être déclarées irrecevables.



Sur les demandes de travaux sous astreinte et la demande de provision :



L'article 834 du code de procédure civile dispose que : Dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend."



L'urgence justifie la saisine du juge des référés sur le fondement de l'article 808, sous la réserve cumulative d'absence de contestation sérieuse ou d'existence d'un différend.

A contrario, l'absence d'urgence justifie le rejet de la demande, sans que le Juge ait à inviter les parties à s'en expliquer plus avant.



L'article 835 du code de procédure civile dispose que : "le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans tous les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire."



Le juge des référés peut ainsi intervenir même en présence d'une contestation sérieuse pour ordonner les mesures qui s'imposent lorsqu'il constate l'existence d'un trouble manifestement illicite ou d'un dommage sur le point de survenir.

Le trouble manifestement illicite peut se définir comme toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

Il procède de la méconnaissance d'un droit, d'un titre ou, corrélativement, d'une interdiction les protégeant.



Etant rappelé que la cour statue dans les limites de l'appel, les dispositions de l'ordonnance relatives aux travaux d'enduit n'ont pas fait l'objet de recours.



S'agissant de la demande d'exécution de travaux sous astreinte, M. et Mme [L] soutiennent l'existence d'un trouble manifestement illicite constitué par l'existence de déformations importantes de la canalisation à plusieurs endroits, alors que des flaches d'eaux auraient été constatées, ainsi que par les branchements illégaux de canalisation non autorisés, lequels nécessitent une remise en état immédiate.



Toutefois, s'agissant de l'existence de raccordements illicites, celle-ci ne peut être établie au seul regard d'une expertise amiable non contradictoire, pas plus que leur origine et leurs conséquences éventuelles, étant relevé que seules des investigations partielles ont été réalisées.



Il en est ainsi du compte rendu d'expertise EUREXO qui mentionne deux raccordements étrangers aux époux [L], ou du rapport d'inspection télévisée du 6 mai 2019 qui mentionne ces raccordements, photographiés, sans que ces constats non contradictoires vaillent preuve suffisante.



En outre, le constat d'huissier de maître [O], huissier de justice, en date du 2 décembre 2021, s'il indique l'existence d'une seule évacuation des eaux usées pour les trois parcelles, ne constitue pas un renseignement technique pertinent, alors que Mme [R] soutient que le service d'assainissement de la ville de [Localité 1] relevait que les installations sanitaires de son immeuble seraient correctement raccordées.



De même, la présence des flaches dont il est fait état n'est pas démontrée au regard des pièces établies hors débat contradictoire, et il n'est pas démontré l'existence d'un dommage survenu depuis l'intervention d'hydrocurage le 11 juin 2018.

Il ne résulte d'aucune pièce des débats que de tels dommages seraient sur le point de survenir et l'imminence d'un dommage n'est donc pas caractérisée de la part de M. et Mme [L] alors que 3 années se sont écoulées depuis cette intervention.



Il convient en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté en référé M. et Mme [L] de leur demande de réalisation de travaux sous astreinte sur les canalisations des eaux usées.



L'ordonnance sera également confirmée en ce que la demande de provision a été écartée, cela à défaut de preuve rapportée des dommages allégués, et faute pour M. et Mme [L] de justifier tant de leur intention locative que de la présence de désordres tels que cette location ne peut être envisagée.



Sur la demande d'expertise judiciaire :



L'article 145 du code de procédure civile dispose que 's'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé'.



L'article 146 du code de procédure civile dispose qu'une 'mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve'.



Il appartient dans ce cadre au juge des référés d'apprécier la légitimité de la demande d'expertise présentée en référé, au regard de la plausibilité d'un procès au fond et de l'utilité, voir la pertinence dans cette perspective, de la mesure d'instruction sollicitée.



Si l'existence d'une contestation sérieuse ne constitue pas en elle-même un obstacle à la saisine du juge des référés, le demandeur ne peut prétendre par contre à l'existence d'un motif légitime lorsque sa prétention est manifestement vouée à l'échec, comme irrecevable ou mal fondée.



En l'espèce, qu'il s'agisse de l'existence de raccordements litigieux ou de l'existence de flaches liées à un écrasement de canalisation, les éléments versés par M. et Mme [L], s'ils ne permettent pas d'établir la réalité de leurs griefs, constituent des éléments de plausibilité d'un procès au fond permettant de retenir la pertinence de la mesure d'instruction sollicitée.



Il sera fait droit à cette demande d'expertise, celle-ci devant toutefois être réalisée à leurs frais avancés.



Sur les dépens et l'application de l'article 699 du code de procédure civile:



Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'



Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge in solidum de M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L], appelants déboutés de leurs demandes, à l'exception de la demande subsidiaire d'expertise.



Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile :



Il est équitable de dire que chaque partie conservera la charge de ses propres frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, l'ordonnance entreprise étant confirmée en ce qu'elle a débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS,



La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,



DIT n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture.



DÉCLARE irrecevables les conclusions de M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] postérieures à l'ordonnance de clôture.



Statuant dans les limites de l'appel,



CONFIRME l'ordonnance entreprise.



Y ajoutant,



ORDONNE une mesure d'expertise, et la confie à



M. [M] [H], expert près la cour d'appel de Poitiers



[Adresse 11]

[Localité 9]

Port : 06 - 25 - 31 - 50 - 07.

Mail: [Courriel 13]



avec pour mission de :

o Se rendre sur les lieux [Adresse 3] ;

o Se faire communiquer les pièces utiles.

o Entendre les parties, tous sachants et se faire remettre l'ensemble des documents contractuels et tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission.

o Identifier l'existence et l'origine des raccordements éventuels présents sur la canalisation, propriété de M. et Mme [L].

o Identifier l'existence de flaches, et leur origine, au regard de leur situation, notamment au regard de leur situation au regard des murs de séparation élevés par Mme [R], cela par tout moyen nécessaires.

o Rechercher l'existence de désordres de la canalisation et dire s'il en existe si ces désordres rendent la canalisation impropre à sa destination ou en compromettent l'usage normal.

o Définir la nature exacte des travaux à mettre en oeuvre pour remédier aux désordres constatés et permettre un fonctionnement normal de la canalisation vendue en bon état, selon l'acte de vente, et si nécessaire, chiffrer le montant des travaux à réaliser.

o Décrire les éventuels défauts d'implantation, leurs conséquences et les moyens d'y remédier;

o Fournir tous éléments permettant de préconiser les travaux de remise en état ou en conformité, de chiffrer leur coût et de préciser leur durée,

o Donner tous éléments permettant d'apprécier les préjudices notamment de jouissance que pourraient subir les parties compte tenu de la nature des travaux de réfection à réaliser, en indiquant le coût de la maîtrise d'oeuvre s'il convient d'y recourir,

o Fournir tous éléments de fait permettant d'apprécier les responsabilités encourues et les préjudices subis ;



DIT que l'expert devra adresser aux parties un document de synthèse, ou pré-rapport :

- fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse, lesquelles disposeront d'un délai de 4 semaines au moins à compter de la transmission du rapport ;

- rappelant aux parties, au visa de l'article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu'il n'est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà du terme qu'il fixe ;



DIT que l'expert répondra de manière précise et circonstanciée à ces dernières observations ou réclamations qui devront être annexées au rapport définitif dans lequel devront figurer impérativement :

- la liste exhaustive des pièces par lui consultées,

- le nom des personnes convoquées aux opérations d'expertise en précisant pour chacune d'elle la date d'envoi de la convocation la concernant et la forme de cette convocation,

- le nom des personnes présentes à chacune des réunions d' expertise,

- la date de chacune des réunions tenues,

- les déclarations des tiers entendus par lui, en mentionnant leur identité complète, leur qualité et leurs liens éventuels avec les parties,

- le cas échéant, l'identité du technicien dont il s'est adjoint le concours, ainsi que le document qu'il aura établi de ses constatations et avis (lequel devra également être joint à la note de synthèse ou au projet de rapport) ;



DIT que l'expert exécutera sa mission conformément aux dispositions de l'article 263 du code de procédure civile ;



DIT que l'expert, en concertation avec les parties, définira un calendrier prévisionnel de ses opérations à l'issue de la première réunion d'expertise et qu'il actualisera le calendrier en tant que de besoin, notamment en fixant un délai aux parties pour procéder aux extensions de mission nécessaire ;





DIT que préalablement au dépôt de son rapport, l'expert adressera aux parties un document de synthèse présentant ses conclusions provisoires et destiné à provoquer leurs observations ; qu'il devra fixer la date limite de dépôt des observations qui lui seront adressées, rappellera qu'il n'est pas tenu de répondre aux observations transmises après cette date limite et rappellera la date de dépôt de son rapport ;



DIT que l'expert devra déposer son rapport en double au greffe de la cour d'appel de POITIERS dans le délai de 4 mois à compter de l'avis de consignation ; qu'il en adressera une copie à chaque partie ;



RAPPELLE que l'expert joindra au dépôt du rapport d'expertise sa demande de rémunération et que les parties disposeront alors de 15 jours pour formuler auprès du juge chargé du contrôle des expertises de la cour d'appel leurs observations sur cette demande ;



DIT que M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] feront l'avance des frais d'expertise qu'ils sollicitent et verseront au régisseur d'avances et de recettes de la cour d'appel de POITIERS une provision de 3000€ à valoir sur la rémunération du technicien, et ce avant le 01/09/2022, terme de rigueur.



DIT qu'à défaut de consignation dans le délai prescrit, la désignation de l'expert sera automatiquement caduque



DIT que la mesure d'expertise sera administrée par la cour d'appel de POITIERS et le magistrat de la première chambre civile chargé du contrôle des expertises.



DIT qu'en cas d'impossibilité de l'expert désigné, son remplacement interviendra par simple ordonnance du magistrat de la première chambre civile de la cour d'appel de POITIERS chargé du contrôle des expertises.





DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.



DIT que chaque partie conservera la charge de ses propres frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.



CONDAMNE in solidum M. [U] [L] et Mme [Z] [Y] épouse [L] aux dépens d'appel, étant rappelé que les dépens de première instance restent répartis ainsi que décidé par le premier juge.







LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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