22 juin 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-13.476

Troisième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:C300512

Texte de la décision

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 juin 2022




Cassation partielle sans renvoi


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 512 F-D

Pourvoi n° H 21-13.476




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 JUIN 2022

1°/ M. [N] [M],

2°/ Mme [U] [H], épouse [M],

tous deux domiciliés [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° H 21-13.476 contre l'arrêt rendu le 16 décembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 2), dans le litige les opposant au syndicat des copropriétaires [Adresse 2], dont le siège est [Adresse 2], représenté par son syndic le cabinet Jourdan, dont le siège est [Adresse 1], défendeur à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jobert, conseiller, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. et Mme [M], de la SCP Foussard et Froger, avocat du syndicat des copropriétaires [Adresse 2], après débats en l'audience publique du 17 mai 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Jobert, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 décembre 2020), M. et Mme [M] sont propriétaires d'un lot à usage d'habitation dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, dont le plancher s'est effondré sur l'appartement situé en dessous le 31 janvier 2014.

2. Par acte du 4 novembre 2015, le syndicat des copropriétaires [Adresse 2] (le syndicat des copropriétaires) les a assignés en réparation de son préjudice.

3. M. et Mme [M] ont formé une demande de délais de paiement en appel.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen relevé d'office

5. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article 1343-5 du code civil :

6. Aux termes de ce texte, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

7. Pour déclarer la demande de délais de paiement de M. et Mme [M] irrecevable, l'arrêt retient qu'aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la révélation d'un fait.

8. En statuant ainsi, alors que les mesures de grâce peuvent être sollicitées en tout état de cause, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. Tel que suggéré par le mémoire en défense, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

11. La demande de délais de paiement de M. et Mme [M], formée pour la première fois en appel, est recevable car les mesures de grâce peuvent être sollicitées en tout état de cause.

12. Ils produisent un avis de la caisse d'allocations familiales du Val-de-Marne du 24 février 2022 dont il ressort que M. [M] perçoit un revenu de solidarité active à hauteur de 520,11 euros par mois et que son quotient familial est de 260 euros. Même si aucun élément n'a été communiqué sur les ressources de Mme [M], les pièces justificatives fournies révèlent à elle seules un état de grande précarité, M. et Mme [M] se trouvant en dessous du seuil de pauvreté.

13. Leur situation justifie, sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil, un report de paiement de deux ans des sommes dues au syndicat des copropriétaires, en l'absence de toute capacité de remboursement de leurs dettes.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable la demande de délais de paiement de M. et Mme [M], l'arrêt rendu le 16 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare la demande de délais de paiement de M. et Mme [M] recevable ;

Reporte le paiement de sommes dues par ces derniers au syndicat des copropriétaires [Adresse 2] pour une durée de deux ans à compter du jour du présent arrêt ;

Condamne le syndicat des copropriétaires [Adresse 2] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [M]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Les époux [M] font grief à l'arrêt confirmatif attaqué de les avoir condamnés solidairement à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 16.136,30 € au titre du préjudice matériel et financier ;

ALORS QUE le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; Que les époux [M] faisaient valoir (page 11 de leurs conclusions d'appel) que les frais et honoraires de l'architecte de la copropriété devaient rester intégralement à la charge de celle-ci, l'expert judiciaire n'ayant pas considéré que le recours à l'architecte de l'immeuble s'imposait ; Qu'en confirmant le jugement entrepris sur le quantum du préjudice matériel et financier du syndicat des copropriétaires en se bornant à affirmer, sans répondre au moyen soulevé par les appelants principaux, que comme l'ont dit les premiers juges, les frais d'architecte sont nécessaires aux travaux, s'agissant de maîtrise d'oeuvre de travaux portant sur la solidité de l'immeuble, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Les époux [M] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme nouvelle en appel leur demande tendant à l'octroi de délais de paiement ;

ALORS QUE la juridiction d'appel est tenue d'examiner la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité d'une prétention nouvelle au regard des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile ; Qu'en la présente espèce, la cour d'appel s'est contentée d'affirmer, après avoir cité les dispositions du seul article 564 du code de procédure civile, que comme le soulève le syndicat des copropriétaires, la demande de délais de paiement des époux [M] formulée pour la première fois devant elle est irrecevable ; Qu'en statuant ainsi sans même rechercher, au besoin d'office, si l'une ou l'autre des exceptions à l'irrecevabilité des demandes nouvelles en appel prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile n'était pas remplie, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

ALORS EN TOUTE HYPOTHÈSE QUE les parties peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire ; Que le juge d'appel doit vérifier, au besoin d'office, que les conditions de l'article 566 du code de procédure civile ne sont pas remplies avant de prononcer l'irrecevabilité d'une demande nouvelle ; Qu'en se contentant d'énoncer, après avoir rappelé les dispositions du seul article 564 du code de procédure civile, que, comme le soulève le syndicat des copropriétaires, la demande de délais de paiement des époux [M] formulée pour la première fois devant elle est irrecevable, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 566 du même code.

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