25 mai 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-40.006

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00777

Titres et sommaires

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Travail réglementation, durée du travail - Congés payés - Droit au repos et à la santé des salariés - Article L. 3141-32 du code du travail - Droit de propriété - Liberté d'entreprendre - Liberté d'association - Caractère sérieux ou nouveau (non) - Non lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

La question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à la Constitution de l'article L. 3141-32 du code du travail ne présente pas un caractère sérieux dès lors que cette disposition n'encourt pas le grief d'incompétence négative du législateur, qui a assorti l'intervention des caisses de congés payés de garanties légales suffisantes, et que l'atteinte portée au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre et à la liberté d'association est justifiée par la mission d'intérêt général confiée aux caisses de congés payés, dont l'accomplissement est de nature à garantir la protection du droit au repos et de la santé des salariés concernés résultant du paragraphe 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, et n'est pas manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi

Texte de la décision

SOC.

COUR DE CASSATION



LG


______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 25 mai 2022




NON-LIEU A RENVOI


M. CATHALA, président



Arrêt n° 777 FS-B

Affaire n° Q 22-40.006




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 MAI 2022

Le tribunal de commerce de Nantes a transmis à la Cour de cassation, suite au jugement rendu le 7 mars 2022, la question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 14 mars 2022, dans l'instance mettant en cause :

D'une part,

la société D.V.M. Renov', société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

D'autre part,

l'association Caisse du Grand Ouest (CGO), membre du réseau Congés intempéries BTP (CIBTP) du Grand Ouest, dont le siège est [Adresse 1].

Partie intervenante volontaire : L'association Collectif contre les caisses de congés du BTP, dont le siège est [Adresse 3].

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Techer, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de la société D.V.M. Renov' et de l'association Collectif contre les caisses de congés du BTP, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la caisse Congés intempéries BTP du Grand Ouest, et l'avis de Mme Rémery, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 mai 2022 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Techer, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Lecaplain-Morel, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, conseillers référendaires, Mme Rémery, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Intervention

1. Selon les articles 327 et 330 du code de procédure civile, l'intervention volontaire n'est admise devant la Cour de cassation que si elle est formée à titre accessoire, à l'appui des prétentions d'une partie, et n'est recevable que si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.

2. L'association « Collectif contre les caisses de congés du BTP » ne justifiant pas d'un tel intérêt dans le présent litige, son intervention volontaire n'est pas recevable.

Faits et procédure

3. Le 15 juin 2018, l'association Caisse de congés payés (CGO) caisse du Grand Ouest a assigné la société D.V.M. Renov' en vue d'obtenir le paiement de cotisations impayées.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

4. Par jugement du 7 mars 2022, le tribunal de commerce de Nantes a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« En édictant les dispositions de l'article L. 3141-32 du code du travail -lesquelles abandonnent au pouvoir réglementaire non seulement le pouvoir de décider de soumettre un secteur d'activité professionnelle à un régime dérogatoire d'affiliation obligatoire à une caisse de congés payés mais aussi celui de définir l'organisation et le fonctionnement de la caisse de congés payés ainsi que de fixer la nature et l'étendue des obligations de l'employeur, le tout sans aucunement prévoir un encadrement légal approprié et des garanties légales suffisantes susceptibles de protéger effectivement le droit de propriété, la liberté d'entreprendre et la liberté d'association-, le législateur a-t-il, d'une part, méconnu sa propre compétence en affectant des droits et libertés que la Constitution garantit -dont en particulier la liberté d'association, la liberté d'entreprendre ainsi que le droit de propriété- et d'autre part, porté une atteinte injustifiée et disproportionnée à ces mêmes droits et libertés, tels qu'ils résultent notamment du Préambule de la Constitution de 1946 ainsi que des articles 2, 4 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

5. La disposition contestée est applicable au litige.

6. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

7. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

8. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux dès lors que la disposition contestée n'encourt pas le grief d'incompétence négative du législateur, qui a assorti l'intervention des caisses de congés payés de garanties légales suffisantes, et que l'atteinte portée au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre et à la liberté d'association est justifiée par la mission d'intérêt général confiée aux caisses de congés payés, dont l'accomplissement est de nature à garantir la protection du droit au repos et de la santé des salariés concernés résultant du paragraphe 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, et n'est pas manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi.

9. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question posée au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DÉCLARE IRRECEVABLE l'intervention volontaire de l'association « Collectif contre les caisses de congés du BTP » ;

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse CIBTP du Grand Ouest ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille vingt-deux et Mme Jouanneau, greffier de chambre, en remplacement du greffier empêché.

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