25 mai 2022
Cour d'appel de Montpellier
RG n°
19/02459
1re chambre sociale
Texte de la décision
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re chambre sociale
ARRET DU 25 MAI 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 19/02459 - N° Portalis DBVK-V-B7D-ODGL
Arrêt n° :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 13 MARS 2019 du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER
N° RG F17/00823
APPELANTE :
Madame [G] [F]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Jacques CAVANNA, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
Société GENERALE DE TELEPHONE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité devenue ORANGE
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Marie camille PEPRATX NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER (postulante) et par Me Jean-Christophe GENIN, avocat au barreau de Nancy (plaidant)
Ordonnance de clôture du 16 Mars 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 AVRIL 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Georges LEROUX, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Georges LEROUX, Président de chambre
Madame Caroline CHICLET, Conseiller
M. Pascal MATHIS, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Marie BRUNEL
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Georges LEROUX, Président de chambre, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.
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EXPOSE DU LITIGE
Mme [F] était embauchée le 30 septembre 1999 par la société Photo Station dans les droits de laquelle a succédé la société Générale de Téléphone, exerçant une activité de distribution de produits, d'accessoires et de services dans le domaine de la téléphonie mobile/internet et des télécommunications, pour occuper les fonctions de conseillère de vente à temps partiel avec une première affectation au magasin de [Localité 6].
Son activité relève de la convention collective nationale des commerces et services de l'audiovisuel, de l'électronique et de l'équipement ménager.
A partir du 2 octobre 2000, Mme [F] était à temps plein.
Elle était ultérieurement affectée au magasin de [Localité 4] Loge.
Le 16 novembre 2009, Mme [F] repassait à temps partiel, a raison de 30 heures par semaine. Elle occupait en dernier lieu les fonctions de vendeur expert, sous la classification d'employé, vendeur expert, niveau ll, échelon 2.
Elle était placée en arrêt de travail du 3 au 7 mars 2014, puis du 6 juin au 16 août 2014, puis du 1er septembre 2014 au 17 septembre 2015.
A cette dernière date, le médecin du travail déclarait Mme [F] inapte à son poste par une seule visite, au visa de l'article R. 4624-31 du code du travail.
Le 23 septembre 2015, la société Générale de Téléphone adressait une offre de reclassement à Mme [F], offre qu'elle refusait le 25 septembre 2015.
Elle était convoquée a un entretien préalable à licenciement pour le 16 octobre 2015, puis licenciée pour inaptitude par courrier du 27 octobre 2015.
Mme [F] a saisi le 31 juillet 2017 le conseil de prud'hommes de Montpellier aux fins notamment de paiement de salaires et d'indemnité de licenciement.
Par jugement du 13 mars 2019, le conseil de prud'hommes a débouté Mme [F] de ses demandes, déboutant les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [F] a interjeté « appel nullité » de ce jugement le 8 avril 2019.
Dans ses conclusions déposées au RPVA le 24 novembre 2021, Mme [F] demande à la cour de débouter la Société Générale de Téléphone de son moyen tiré de l'absence de mention des chefs du jugement expressément critiqués, de constater qu'elle a fait une déclaration « de nullité du jugement '' de « juger de nullité du jugement recevable et fondé en droit », de déclarer le jugement nul.
A titre subsidiaire, « Si la Cour fait droit en déclarant nul le jugement querellé », de condamner l'intimée à payer :
- les 3 mois de salaires non payés soit la somme de 3.990,87 € avec intérêts de droit et application de l'article 1343-2 du code civil.
- la somme de 48 686,40 € au titre de l'indemnité de licenciement avec intérêt de droit et application de l'article 1343-2 du code civil
- la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens avec droit de recouvrement direct, en application de l'article 699 du code de procédure civile et débouté des demandes adverses.
Dans ses conclusions déposées au RPVA le 11 mars 2022, la société intimée demande à la cour de dire qu'en l'absence de mention des chefs du jugement expressément critiqués, la cour n'est pas saisie de l'appel et en tout état de cause, de juger infondée la demande de nullité du jugement
A titre subsidiaire, elle demande la confirmation du jugement sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de débouter Mme [F] de ses demandes et de la condamner au paiement des sommes de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la présente instance, outre les dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 mars 2022.
Vu l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé des moyens des parties, il sera renvoyé à leurs conclusions susvisées.
MOTIFS
Sur l'effet dévolutif de l'appel
L'article 562 du code de procédure civile prévoit : « L'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. »
En l'espèce, Mme [F] a effectué un appel-nullité de sorte qu'en application de l'article susvisé, la dévolution s'est opérée pour le tout.
Par contre, c'est pertinemment que l'intimée relève que dans ses premières conclusions déposées le 25 juin 2019, l'appelante n'a développé aucun moyen à l'appui de sa demande de nullité
L'article 910-1 du code de procédure civile prévoit : « Les conclusions exigées par les articles 905-2 et 908 à 910 sont celles, adressées à la cour, qui sont remises au greffe et notifiées dans les délais prévus par ces textes et qui déterminent l'objet du litige. »
L'article 908 du code de procédure civile prévoit : « A peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour remettre ses conclusions au greffe. »
L'article 910-4 du code de procédure civile prévoit : « A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
Ce n'est que dans ses conclusions déposées le 24 novembre 2021 en réplique aux conclusions adverses, que l'appelante a développé des moyens à l'appui de son appel-nullité, soit après l'expiration du délai de trois mois suivant la déclaration d'appel.
Alors que le débat porte sur l'effet dévolutif de la déclaration d'appel et sur la recevabilité des moyens aux fins de nullité développées dans des conclusions postérieures au délai de trois mois suivant la déclaration d'appel, les moyens développés par l'appelante relatifs au régime des nullités de forme est sans pertinence.
Il résulte de ces dispositions et constatations que si l'appelante a régulièrement saisi la cour d'un appel aux fins de nullité du jugement, saisine qui opère dévolution de l'entier litige à la cour, elle n'a régulièrement saisi la cour d'aucun moyen à l'appui de cette demande d'annulation, ce dont il résulte que la demande d'annulation du jugement doit être rejetée.
Par contre, en application des articles 561 et 562, alinéa 2, du code de procédure civile, lorsqu'un appel porte sur la nullité du jugement et non sur celle de l'acte introductif d'instance, la cour d'appel, saisie de l'entier litige par l'e'et dévolutif de l'appel, est tenue de statuer sur le fond quelle que soit sa décision sur la nullité
Sur le paiement des trois derniers mois de salaire
En application de l'article D. 1226-1 et suivants du code du travail, l'indemnité complémentaire à la charge de l'employeur en cas d'absence pour maladie ou accident du salarié est de :
« 1° Pendant les trente premiers jours, 90 % de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s'il avait continué à travailler ;
2° Pendant les trente jours suivants, deux tiers de cette même rémunération. »
L'article D1226-2 du même code prévoit que « Les durées d'indemnisation sont augmentées de dix jours par période entière de cinq ans d'ancienneté en plus de la durée d'une année requise à l'article L1226-1, sans que chacune d'elle puisse dépasser quatre-vingt-dix jours »
L'article D1226-4 du même code prévoit : « Pour le calcul des indemnités dues au titre d'une période de paie, il est tenu compte des indemnités déjà perçues par l'intéressé durant les douze mois antérieurs, de telle sorte que si plusieurs absences pour maladie ou accident ont été indemnisées au cours de ces douze mois, la durée totale d'indemnisation ne dépasse pas celle applicable en application des articles D. 1226-1 et D. 1226-2. ».
Mme [F] avait été embauchée le 30 septembre 1999 avait une ancienneté de 15 ans à compter du 30 septembre 2014. Elle était déclarée inapte à compter du 17 septembre 2015.
Ainsi, en application des dispositions du code du travail, elle pouvait prétendre à compter du 1er septembre 2014 à des indemnisations à hauteur de 90% pendant 50 jours et aux 2/3 pendant les 50 jours suivants, sous réserve des indemnisations perçues pendant les 12 mois précédents.
L'article 29.3 de la convention collective prévoit un maintien de salaire à hauteur de « 100% de son salaire pendant les soixante premiers jours d 'arrêt suivant les trois jours de carence, après huit ans révolus d'ancienneté ''.
L'article 29-3 de la convention collective prévoit « La durée d'indemnisation ne peut, à aucun moment, dépasser sur une période « glissante » de 12 mois la durée fixée ci-dessus, cette période s'appréciant au premier jour d'arrêt. »
Le dernier arrêt de travail de Mme [F] partait du 1er septembre 2014 et s'est achevé au 17 septembre 2015.
En application des dispositions plus favorables de la convention collective, Mme [F] pouvait prétendre à une indemnisation à 100% à compter du 1er septembre 2014 pendant les 60 premiers jours d'arrêt après les trois jours de carence, sous réserve de la prise en compte d'une indemnisation antérieure pendant les douze mois précédents.
Du fait du bénéfice d'une indemnisation plus favorable pendant 60 jours au titre des dispositions conventionnelles, elle ne pouvait plus prétendre en application du régime prévu par le code du travail, qu'à une indemnisation à 2/3 pendant 40 jours, le code du travail prévoyant une période d'indemnisation d'une durée maximale de 100 jours.
Elle avait déjà bénéficié d'une indemnisation à 100% pendant 59 jours au titre de deux arrêts de travail des 3 au 7 mars 2014 et du 6 juin au 16 août 2014 et d'une indemnisation à 2/3 pendant 12 jours.
Elle a bénéficié à compter de son arrêt du 1er septembre 2014, d'une indemnisation à 100 % pendant 1 jour et à 2/3 pendant 28 jours.
A compter du 17 septembre 2015, elle faisait l'objet d'un avis d'inaptitude, de sorte que l'employeur n'était plus tenu au maintien du salaire.
En application de l'article L1226-4 du code du travail qui prévoit l'obligation de reprise du paiement du salaire en l'absence de licenciement ou de reclassement à l'expiration du délai d'un mois suivant l'avis d'inaptitude, l'employeur a repris le paiement du salaire à compter du 17 octobre 2015 jusqu'à la date du licenciement. L'employeur n'était pas tenu au paiement d'une indemnité de préavis dans la mesure où la salariée, déclarée inapte, était dans l'impossibilité de l'exécuter.
Il en résulte que la salariée ayant bénéficié à compter du 1er septembre 2014 et pendant les douze mois précédents, d'un maintien intégral du salaire pendant 60 jours et d'un maintien à 2/3 pendant 40 jours a été remplie de ses droits.
Elle doit être déboutée de sa demande de rappel de salaires au titre des trois derniers mois.
Sur l'indemnité de licenciement
L'article 36 de la convention collective prévoit : « Le salarié lié par un contrat de travail à durée indéterminée et qui est licencié par son employeur perçoit, s'il a droit à un délai-congé, une indemnité de licenciement dans les conditions suivantes :
- le salarié doit avoir, à la date où le licenciement prend effet, au moins 1 an d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur ;
- la rémunération brute servant de référence au calcul de l'indemnité de licenciement est le salaire brut mensuel moyen des 3 derniers mois ou des 12 derniers mois si ce calcul est plus favorable au salarié.
Le taux et les modalités de calcul de l'indemnité de licenciement sont fixés par le tableau ci-dessous :'. »
Le tableau figurant à cet article prévoit pour une ancienneté supérieure à 16 ans révolus, un « coefficient à appliquer au salaire brut mensuel moyen » de 2,20.
En prenant en compte le montant de 1.529,62 € comme salaire de référence retenu par l'employeur alors que la salariée ne retient qu'un salaire moyen de 1.330,29 €, l'application des dispositions conventionnelles aboutit à un montant d'indemnité de licenciement de 1.529,62 € X 2,20 = 3.365,16 €
C'est donc à juste titre que l'employeur a retenu les dispositions, plus favorables à la salariée, de l'article L1234-9 du code du travail fixant les modalités de l'indemnité légale du licenciement et aboutissant sur la base du même salaire de référence et de la même ancienneté, à une indemnité de 6.160,89 € qu'il a arrondi à 6.200€.
En effet, les dispositions conventionnelles prévoient pour obtenir le montant de l'indemnité de licenciement un coefficient à appliquer au salaire brut moyen en fonction de l'ancienneté, et non une indemnité de licenciement correspondant à un salaire de référence majoré d'un coefficient en fonction de l'ancienneté qui devrait être ensuite multiplié par le nombre d'années d'ancienneté.
Mme [F] doit être déboutée de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement.
Sur les frais
Il apparait équitable d'allouer à l'intimée une indemnité de 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition :
Dit que l'appel-nullité a déféré à la cour l'entier jugement ;
Déboute Mme [F] de sa demande de nullité du jugement ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant
Condamne Mme [F] à payer à la Société générale de téléphone la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Condamne Mme [F] aux dépens de l'instance.
Le greffierLe président