25 mai 2022
Cour d'appel de Lyon
RG n° 18/07303

1ère chambre civile A

Texte de la décision

N° RG 18/07303 - N° Portalis DBVX-V-B7C-L7LQ









Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 12 septembre 2018

( chambre 9 cab 09F)



RG : 15/06871





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 25 Mai 2022







APPELANTE :



SAS BANQUE EUROPEENNE DU CREDIT MUTUEL

[Adresse 5]

[Localité 6]



Représentée par la SELAS AGIS, avocat au barreau de LYON,

toque : 538









INTIMES :



SELARL [B] représentée par Me [O] [B], mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire, en remplacement de Me [J] [H] ès qualités de liquidateur judiciaire (décision du TC du 19/12/2019) de la SCI LES DEMEURES DU SALEVE

[Adresse 3]

[Adresse 10]

[Localité 7]



Représenté par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938





LE COMPTABLE PUBLIC RESPONSABLE DU SIE D'[Localité 8]

[Adresse 4]

[Localité 8]



Représentée par la SCP GRAFMEYER BAUDRIER ALLEAUME JOUSSEMET, avocat au barreau de LYON, toque : 673







******





Date de clôture de l'instruction : 05 Novembre 2019



Date des plaidoiries tenues en audience publique : 23 Mars 2022



Date de mise à disposition : 25 Mai 2022



Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Anne WYON, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Annick ISOLA, conseiller



assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier



A l'audience, Françoise CLEMENT a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.



Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,



Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.




****



La société Banque de l'économie du commerce et de la monétique, devenue Banque européenne de crédit mutuel (la banque), comptait parmi sa clientèle la SCI Les demeures du Saleve (la SCI) à qui elle a, suivant acte notarié du 21 février 2007, consenti, dans le cadre d'une opération de promotion immobilière :



- une ouverture de crédit d'un montant de 2'088'000 euros répartis pour 1 500 000 euros en un 'crédit terrain' destiné à l'acquisition d'un terrain situé à [Localité 11] et pour 588 000 euros en un 'crédit relais TVA',



- une ouverture de crédit 'premières dépenses' de 500 000 euros,



- une ouverture de crédit 'd'accompagnement' de 3 000 000 euros.



Diverses sûretés étaient prévues à l'acte de prêt, dont un engagement de cession par la SCI de la créance détenue sur le trésor public ('cession [G] TVA') à hauteur de 588 000 euros, la banque ayant signé avec la SCI une convention cadre de cession de créances professionnelles le 2 février précédent.



Suite à une demande de remboursement de crédits de taxes formée le 9 mars 2009 à hauteur de 720 000 euros, la SCI a obtenu le 9 avril suivant, de l'administration fiscale, le remboursement partiel d'un crédit de TVA au titre du mois de février 2009 pour un montant de 696'316 euros, régularisé par virement le 21 avril suivant.



Par jugement du 8 septembre 2009, le tribunal de grande instance de Lyon a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SCI, Maître [Z], étant désigné en qualité d'administrateur judiciaire et Maître [H] en qualité de mandataire judiciaire ; par jugement du 6 septembre 2010, la SCI a été placée en liquidation judiciaire, Maître [H] étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire.



Par courrier du 23 novembre 2009, se prévalant de la cession de créance détenue sur le trésor public au titre de la TVA, la banque a réclamé en vain à Maître [Z] ès qualités, le règlement de la somme de 588'000 euros.



La banque a saisi, par acte du 22 avril 2014, la chambre des procédures collectives du tribunal de grande instance de Lyon pour obtenir le remboursement du crédit de TVA ; le tribunal, par jugement rendu le 13 mai 2014, confirmé par arrêt du 13 mai 2015 de la cour d'appel de Lyon, a dit que l'assignation délivrée à Maître [H] et au comptable public responsable du service des impôts des entreprises d'[Localité 8] était nulle, condamnant la banque aux dépens.



Par acte d'huissier de justice du 5 juin 2015, la banque a assigné Maître [H] et le comptable public responsable du service des impôts des entreprises d'[Localité 8] devant le tribunal de grande instance de Lyon, pour obtenir, au visa des articles L.313-23 et suivants du code monétaire et financier et 1235 du code civil, leur condamnation solidaire à lui régler respectivement les sommes de 645'202,50 euros et 723'542 euros.



Par jugement du 12 septembre 2018, le tribunal de grande instance a dit recevable la demande de la banque mais l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes, la condamnant aux dépens et au paiement à Maître [H] ès qualités et au comptable public responsable du service des impôts des entreprises d'[Localité 8], d'une somme de 2 000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile.



Selon déclaration du 18 octobre 2018, la banque a formé appel à l'encontre de ce jugement.



Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 29 août 2019 par la banque qui conclut à la réformation du jugement susvisé et à la condamnation du trésor public à lui payer les sommes de 696'316 euros solidairement avec Maître [H] à hauteur de la somme de 645'202,50 euros et 10'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens avec distraction au profit de Maître Rebotier, avocat,



Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 27 février 2020 par la Selarl [B], intervenant en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI, qui conclut à la réformation du jugement susvisé en ce qu'il a déclaré l'action de la banque recevable et demande à la cour, statuant à nouveau de :



- dire et juger irrecevable comme prescrite l'action en répétition de l'indu dirigée par la banque à son encontre,



- dire et juger irrecevable l'action en répétition de l'indu pour violation du principe de l'arrêt des poursuites individuelles,



- dire et juger irrecevable en l'absence de déclaration de créance, la demande en paiement dirigée par la banque à son encontre,



- débouter en conséquence la banque de l'ensemble de ses demandes,



- subsidiairement, confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a dit et jugé que la cession de créance était irrégulière et en ce qu'il a débouté la banque de l'ensemble de ses demandes,



- encore plus subsidiairement dire et juger que l'erreur de paiement a été commise par le trésor public et en conséquence débouter la banque de l'ensemble de ses demandes,



- en toute hypothèse condamner la banque aux dépens de l'instance, distraits au profit de la Selarl Laffly & Associés, avocats et au paiement d'une indemnité de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 22 juillet 2019 par le comptable public responsable du service des impôts des entreprises d'[Localité 8] qui conclut à la confirmation du jugement critiqué en ce qu'il a débouté la banque de l'intégralité de ses demandes et l'a condamnée à son profit au paiement d'une indemnité de procédure et aux dépens de première instance et demande à la cour de débouter la banque de l'intégralité de ses demandes et de la condamner aux dépens d'appel et au paiement d'une indemnité de 3 000 euros en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Vu l'ordonnance de clôture de la procédure du 5 novembre 2019.



Il convient de se référer aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.






MOTIFS ET DÉCISION





Postérieurement à l'ordonnance de clôture, le 27 février 2020, la Selarl [B] représentée par Maître [O] [B], en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Les demeures du Saleve, a déposé des 'conclusions d'intimé' ; la cour constate que :



- si ces dernières n'ont pas été expressément intitulées conclusions d'intervention volontaire, que ce soit en entête de l'acte ou au titre du choix du menu déroulant RPVJ, ces écritures sont identiques en tous points aux conclusions déposées par Maître [H] ès qualités le 4 mars 2019, à l'exception de la désignation du liquidateur judiciaire,



- si aucune demande tendant à voir reçue l'intervention volontaire du nouveau liquidateur judiciaire n'est présentée à la cour aux termes du dispositif de ces écritures, ces conclusions ont néanmoins pour seul objet l'intervention volontaire à l'instance d'appel, de la Selarl [B], intervenant en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Les demeures du Saleve en application d'un jugement rendu le 19 décembre 2019 par le tribunal de commerce de Lyon, lequel s'il n'est pas produit au dossier de la Selarl [B], n'est pas discuté pour autant dans son existence par les parties, a transféré l'intégralité des mandats de Maître [H] ayant fait valoir ses droits à la retraite, à cette dernière, représentée par Maître [O] [B].



La cour constate donc l'existence d'une intervention volontaire à l'instance d'appel de la Selarl [B], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SCI aux lieu et place de Maître [H] qui a perdu sa qualité, intervention autorisée, sans que soit pour autant révoquée la clôture, par application des dispositions combinées des articles 910-4 et 802 du code de procédure civile.



La cour considère en conséquence que les prétentions dirigées par les parties, qui n'ont pas actualisé leurs écritures pour prendre en compte cette intervention volontaire à la procédure, à l'encontre de Maître [H] ès-qualités, doivent être considérées comme étant dirigées contre le liquidateur judiciaire de la SCI Les demeures du Saleve, pris en personne de la Selarl [B], représentée par Maître [O] [B].



* * * * *



A titre liminaire, il sera rappelé que les « demandes » tendant à voir « constater » ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour ; il en est de même des « demandes » tendant à voir « dire et juger » lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.



La cour constate que si la Selarl [B] ès qualités demande à titre principal de dire et juger irrecevable, sur un triple fondement, la demande en paiement dirigée à son encontre par la banque, il demande 'en conséquence' à la cour de 'débouter' la banque de l'ensemble de ses demandes alors même qu'invoquant une fin de non-recevoir, seule l'irrecevabilité de la demande est encourue.



La cour constate encore que Maître [B] conclut à la confirmation du jugement de première instance en ce qu'il a dit et jugé que la cession de créances était irrégulière alors même que le dispositif du jugement critiqué a seulement débouté la banque de l'intégralité de ses demandes, aucune confirmation ne pouvant donc être prononcée conformément à ce qui est réclamé.

















I Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription :





La Selarl [B] ès qualités soutient que le paiement prétendument indu dont la banque réclame le remboursement a été régularisé au profit de la SCI par virement du 21 avril 2009; qu'ainsi la banque devait nécessairement interrompre le délai de prescription avant le 21 avril 2014, l'assignation n'ayant pourtant été délivrée que le 5 juin 2015.



Il ajoute que même en prenant en considération la date de l'assignation du 22 avril 2014, déclarée nulle par le tribunal le 13 mai suivant, elle s'avère de la même façon postérieure au délai de forclusion de cinq ans.



La banque soutient que l'assignation du 22 avril 2014, déclarée nulle, a interrompu la prescription quinquennale et fait courir un nouveau délai de cinq ans au cours duquel l'assignation du 5 juin 2015 a été délivrée.



Sur ce :



La banque fonde son action sur les dispositions de l'article 1235 ancien du code civil devenu 1302 prévoyant la répétition de l'indu ; quelle que soit la source du paiement indu et à défaut de dispositions spéciales applicables aux quasi-contrats, l'action en répétition de l'indu se prescrit selon le délai de droit commun de 5 ans prévu par l'article 2224 du même code.



Aux termes de cet article, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.



Contrairement à ce que soutient la Selarl [B] ès qualités, le jour où la banque a connu le paiement effectué par le trésor public au bénéfice de la SCI n'est pas le jour où le virement a été effectué au bénéfice de cette dernière, soit le 21 avril 2009, mais le jour où la banque en a appris l'existence, soit au plus tôt le 23 novembre 2009, jour de l'envoi, par le conseil de cette dernière, d'un courrier à destination de l'administrateur judiciaire de la SCI, sommant ce dernier de lui restituer les sommes reçues et aux termes duquel il était indiqué que la banque venait d'apprendre qu'il avait obtenu des services fiscaux le remboursement de la TVA afférente à l'acquisition du bien immobilier ; en effet, aucun élément du dossier ne permet d'établir une connaissance antérieure de ce paiement par la banque.



La banque disposait dès lors d'un délai expirant le 23 novembre 2014 pour exercer son action en répétition de l'indu contre la liquidation judiciaire de la SCI.



Une assignation a été délivrée en ce sens par la banque contre la liquidation judiciaire de la SCI et le comptable public responsable du pôle de recouvrement du centre des impôts des entreprises d'[Localité 8] par acte d'huissier de justice du 22 avril 2014, soit dans le délai de prescription de 5 ans susvisé ; par jugement rendu le 13 mai 2014, confirmé en appel par un arrêt du 13 mai 2015, le tribunal de grande instance a déclaré nulle l'assignation ainsi délivrée.



En application des dispositions de l'article 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure.



L'annulation de l'assignation introductive d'instance délivrée le 22 avril 2014 a interrompu le délai de prescription de cinq ans qui a alors recommencé à courir et l'assignation délivrée par acte d'huissier de justice du 5 juin 2015 à l'initiative de la banque a bien été délivrée dans ce délai.



Le tribunal a donc justement retenu que la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action devait être rejetée et la demande de la banque déclarée recevable.





II Sur la violation du principe de l'arrêt des poursuites individuelles et de l'absence de déclaration de créance :





La Selarl [B] ès qualités soutient que l'action en répétition de l'indu fait partie des actions interdites à compter du jugement d'ouverture de la procédure collective ; qu'au jour de la première assignation, la SCI avait d'ores et déjà été placée, depuis le 8 septembre 2009, en redressement judiciaire, l'action intentée par la banque étant interdite par l'article L.622-21 du code de commerce qui interdit les poursuites individuelles.



Il ajoute qu'il est inopérant pour la banque d'invoquer que le règlement effectué par le trésor n'a pu entrer dans le patrimoine de la SCI alors qu'au moment du paiement, cette dernière était parfaitement in bonis ; que la banque sollicite donc bien paiement d'une créance de restitution née antérieurement au placement en redressement judiciaire de cette dernière et que comme tous créanciers antérieurs, la banque avait l'obligation de déclarer sa créance entre les mains de l'administrateur judiciaire.



La banque fait valoir que le règlement par le trésor public n'est pas entré dans le patrimoine de la SCI et qu'ainsi dans une telle hypothèse, le droit pour le cessionnaire à agir sur le fondement de l'action en répétition de l'indu est admis.



Elle prétend produire aux débats copie de la déclaration de créance effectuée entre les mains de Maître [H] ainsi que le certificat d'admission de la créance, le tribunal ayant retenu à tort qu'elle ne justifiait pas avoir inclus la somme en cause dans sa déclaration dans la mesure où il ne faut pas confondre la créance (ouverture de crédit de 2'088'000 euros) avec le mode de remboursement (cession de créances de TVA notamment).



Sur ce :



Le fait générateur de l'action en répétition de l'indu consiste dans l'encaissement fait par la SCI le 21 avril 2009, de la somme de 696 316 euros virée sur un compte bancaire ouvert à son nom, soit antérieurement à l'ouverture de la procédure collective de la société placée en redressement judiciaire le 8 septembre 2009 lequel a été converti en liquidation judiciaire par jugement du 6 septembre 2010 ; l'action en justice fondée sur la répétition de l'indu, initiée par la banque aux termes de sa première assignation délivrée le 22 avril 2014, déclarée nulle, puis de celle du 5 juin 2015, se heurte donc au principe d'interdiction des poursuites individuelles de l'article L.622-21 du code de commerce dans sa rédaction applicable au présent litige.



En l'absence d'instance en cours à la date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire de la SCI, la banque, après avoir déclaré sa créance, ne pouvait donc qu'en faire constater le principe et fixer le montant en suivant la procédure de vérification des créances.



Sa demande tendant à voir condamner le liquidateur de la SCI à lui payer, solidairement pour partie avec le trésor public, la somme de 645 202,45 euros doit donc être déclarée irrecevable.



La cour constate à titre surabondant que :



- le bordereau de déclaration de créance qu'elle produit au dossier, établi à son nom le 29 septembre 2019, fait état de trois créances dues au jour du jugement de redressement judiciaire du 8 septembre 2009 :



- compte n° 00233 200399 40 : capital 2 971 571,89 euros, intérêts 34 208,02 euros soit un total de 3 065 211,35 euros échus, indemnités 59 431,44 euros,



- frais de procédure : 3 323,26 euros,



- émoluments de vente : 20 127,13 euros.



- il est produit au dossier de la banque les certificats délivrés le 7 mai 2010 par le juge commissaire ordonnant l'admission définitive des trois créances ainsi déclarées dont celle de 3 065 211,35 euros admise à titre privilégié.



- une lettre adressée par l'administration fiscale à la SCI le 9 avril 2009, établit qu'une somme de 696 316 euros a été admise au bénéfice de cette dernière en remboursement d'un crédit de TVA qui avait été réclamé à hauteur d'une somme de 720 000 euros pour le mois de février 2009 ; deux précédents courriers de l'administration fiscale en date des 23 octobre 2007 et 9 février 2009 avaient préalablement rejeté les demandes du promoteur tendant au remboursement de crédit de TVA à hauteur de 588 000 euros au titre du premier trimestre 2007 et 710 000 euros au titre du quatrième trimestre 2008.



- aucun élément ne permet d'établir que la somme virée sur le compte de la SCI par les services fiscaux en avril 2009, était effectivement incluse dans la déclaration de créance de la banque du 29 septembre 2009, laquelle, s'il y était certes fait état d'une première somme globale de 3 065 211,35 euros s'apparentant à un prêt puisqu'elle était divisée entre un capital et des intérêts, n'identifiait nullement la créance née de la cession [G] comme le soutient à tort cette dernière.







III Sur la demande en paiement de la banque dirigée à l'encontre du trésor public :





La banque soutient qu'il n'est pas contestable que la créance de TVA lui a été régulièrement cédée par la SCI, la notification au trésor public des 29 août et 7 novembre 2008 ne souffrant d'aucune irrégularité contrairement à ce qu'a retenu le tribunal qui, à tort, a retenu l'application de l'article L.313-29 du code monétaire et financier, aucune obligation de joindre à la notification le bordereau de cession de créances n'étant exigée.



Le comptable public responsable du service des impôts des entreprises d'[Localité 8] soutient quant à lui que la notification de la cession de créance est irrégulière en ce que la banque ne justifie d'aucun bordereau de cession de créance correspondant à la notification de cession de créance qui lui a été adressée le 7 novembre 2008 à hauteur de la somme de 723 542 euros, les explications et pièces produites par la banque démontrant par ailleurs une incertitude sur la nature complète de la créance.



Sur ce :



La banque justifie d'une convention cadre de cession de créances professionnelles régie par les articles L.313-23 à L.313-34 du code monétaire et financier, signée entre elle-même et la SCI le 2 février 2007 et d'un acte (ou bordereau) de cession de créance du même jour, fait par la SCI à destination de la banque, concernant 'une créance de TVA selon acte de vente signé pour l'acquisition d'une parcelle de terrain située sur la commune de [Localité 11] (Haute-Savoie) cadastrée (...) acte signé devant Maître [Y] notaire à [Localité 12]', pour la somme de 588 000 euros TTC.



Une première lettre recommandée avec accusé de réception ayant pour objet la 'notification cession [G] créances cédées par la SCI LES DEMEURES DU SALEVE à notre banque', a été adressée par la banque le 29 août 2008 au centre des impôts d'[Localité 8], pour l'informer que la SCI envers qui il était débiteur, lui avait cédé la créance suivante 'remboursement de TVA pour acquisition d'une parcelle de terrain située sur la commune de [Localité 11] (Haute-Savoie) cadastrée section [Cadastre 1] A n° [Cadastre 2] lieu-dit '[Localité 9]' d'une contenance de 2 ha 2 a 65 ca pour un montant de 588 000 euros ou toutes sommes qui seraient dues' ; il était alors demandé à l'administration fiscale, de cesser à compter de cette notification, tout paiement au titre de ses créances à la SCI 'Demeures du Saleve', tout paiement devant, pour être libératoire, obligatoirement être effectué entre les mains de la banque, soit par chèque soit par virement sur un compte désigné.





Était joint à cette lettre l'acte (ou bordereau) de cession de créance susvisé établi le 2 février 2007 à hauteur de 588 000 euros.



Une seconde lettre recommandée avec accusé de réception a ensuite été adressée par la banque au même centre des impôts d'[Localité 8] le 7 novembre 2008, avec en objet la mention 'notification cession [G] remplace l'envoi daté du 29 août 2008", identique dans l'information délivrée à la notification précédente, sauf en ce qui concerne le montant de la créance cédée porté à 723 542 euros ; aucun bordereau ou acte de cession de créance n'était joint à ce courrier.



En application des articles L.313-24 et L.313-27 du code monétaire et financier, la cession de créance professionnelle, dite cession [G], transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée ; la date de ce transfert est celle figurant sur le bordereau.



L'article L.313-23 précédent exige du bordereau de cession qu'il désigne ou individualise la créance cédée ou les éléments susceptibles d'effectuer cette désignation ou cette individualisation, notamment par l'indication du débiteur du paiement, du montant des créances ou de leur évaluation et, s'il y a lieu de leur échéance ; il est prévu qu'en cas de contestation portant sur l'existence ou la transmission d'une de ces créances, le cessionnaire pourra prouver, par tout moyen, que la créance objet de la contestation est comprise dans le montant global porté sur le bordereau.



L'article L.313-28 du même code prévoit que l'établissement de crédit peut à tout moment, interdire au débiteur de la créance cédée de payer entre les mains du signataire du bordereau. À compter de cette notification, dont les formes sont fixées par le décret en Conseil d'État prévu à l'article L.313-35, le débiteur ne se libère valablement qu'auprès de l'établissement de crédit mentionné à l'article L.313-23.



L'article R.313-15 indique enfin que la notification au débiteur d'une créance cédée peut être faite par tout moyen et qu'elle comporte les mentions obligatoires suivantes : le nom du cédant, la désignation de la créance cédée, le mode de règlement et l'indication de la personne à l'ordre de laquelle le règlement doit être effectué.



S'il n'est effectivement pas prévu comme le soutient la banque, que l'acte de cession de créance soit joint à cette notification, il importe cependant que la créance cédée soit clairement identifiée et qu'elle ait fait l'objet préalable d'un acte de cession de créance correspondant.



Seule la notification au débiteur cédé faite par courrier du 7 novembre 2008 doit être prise en compte dans la mesure où il était indiqué qu'elle remplaçait le précédent envoi fait le 29 août précédent ; si la nature de la créance cédée visée dans ce courrier du 7 novembre 2008 est identique à celle de la créance visée dans le courrier du 29 août 2008, consistant dans le 'remboursement de TVA pour acquisition d'une parcelle de terrain', son montant se trouve néanmoins différent et ne correspond à aucun bordereau de cession de créances établi préalablement par la SCI dans les conditions légales susvisées.



Aucun élément du bordereau de cession de créance établi par la SCI le 2 février 2008 à hauteur de 588 000 euros ne permet de constater que la créance cédée prévoyait d'éventuels frais d'actes et de travaux ; aucun décompte permettant de connaître le détail de la somme de 723 542 euros n'est d'ailleurs produit par la banque.



Les factures produites par la SCI à la demande de l'administration fiscale, dans le cadre de l'instruction par cette dernière de la demande de remboursement d'un crédit de TVA formée par la SCI à hauteur de 720 000 euros pour le mois de février 2009, outre même le fait qu'aucun décompte détaillé faisant apparaître quels montants ont été pris en compte pour fixer cette somme de 720 000 euros, ne permettent nullement d'établir que la créance de remboursement de TVA dont s'agit concernait bien les frais d'acquisition d'une parcelle de terrain alors même que parmi ces factures, des honoraires d'une société d'ingénierie et coordination du bâtiment, correspondant à des missions 'économie' et 'fluides', étaient notamment présentées au titre de la réalisation de 10 bâtiments + parkings + piscine.



Il n'est donc pas démontré par la banque, en application des dispositions susvisées de l'article L.313-23 du code monétaire et financier, que la créance objet de la contestation, a fait l'objet d'une cession pouvant être opposée au trésor public aux termes de la notification faite le 7 novembre 2008.



Le premier juge a donc débouté à juste titre la banque de sa demande en paiement présentée à l'encontre du trésor public.





IV Sur les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile:



Il sera statué en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile comme indiqué au dispositif de l'arrêt.





PAR CES MOTIFS





La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,





Reçoit l'intervention de la Selarl [B], représentée par Maître [O] [B], en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Les demeures du Saleve au lieu et place de Maître [H],



Infirme le jugement rendu le 12 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Lyon seulement en ce qu'il a déclaré recevable la société Banque européenne de crédit mutuel en sa demande dirigée contre la liquidation judiciaire de la SCI Les demeures du Saleve,



Statuant à nouveau de ce chef, confirmant pour le surplus et y ajoutant,



Déclare la société Banque européenne de crédit mutuel irrecevable en sa demande dirigée à l'encontre du liquidateur de la SCI Les demeures du Saleve,



Condamne la société Banque européenne de crédit mutuel aux dépens distraits au profit de la Selarl Laffly & associés et de Maître Joussemet, avocats,



Condamne la société Banque européenne de crédit mutuel à payer la somme de 3 000 euros à la Selarl [B] ès qualités d'une part et au comptable public responsable du service des impôts des entreprises d'[Localité 8] d'autre part, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.





LE GREFFIER LE PRESIDENT

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