25 mai 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-18.897

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00645

Texte de la décision

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 mai 2022




Cassation partielle


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 645 F-D

Pourvoi n° D 20-18.897







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 MAI 2022

La société Dekra automotive solutions France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 20-18.897 contre l'arrêt rendu le 27 février 2020 par la cour d'appel de Caen (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à M. [K] [J], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Monge, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la société Dekra automotive solutions France, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [J], après débats en l'audience publique du 30 mars 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Monge, conseiller rapporteur, M. Rouchayrole, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 27 février 2020), M. [J] a été engagé en qualité d' "enquêteur mystère" par la société Dekra automotive solutions France (la société) suivant plusieurs contrats à durée déterminée, du 19 janvier 2015 au 1er juillet 2016.

2. Il a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir paiement d'un rappel de salaire pour heures supplémentaires et d'une indemnité pour travail dissimulé.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le premier moyen, pris en ses deuxième et quatrième branches

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié un rappel de salaire au titre des heures de déplacement effectuées sur la base de son décompte entre ses différents déplacements à l'exclusion des trajets domicile / travail et de juger qu'en cas de difficulté, les parties pourront saisir la cour d'appel par requête, alors :

« 2°/ qu'un salarié ne peut prétendre à un rappel de salaire à titre d'heures supplémentaires pour des temps de déplacement qu'à la triple condition que ceux-ci constituent du temps de travail effectif, qu'ils ne soient pas déjà inclus dans le temps de travail déjà payé au salarié et qu'ils constituent des heures supplémentaires au-delà de celui-ci ; qu'en l'espèce, après avoir relevé que la durée de travail du salarié était fixée à 37 heures hebdomadaires, avec jours de repos supplémentaires, et que les documents fournis par le salarié n'étayaient pas sa demande au titre des 60 heures par semaine prétendument effectuées, la cour d'appel ne pouvait accorder au salarié, un rappel de salaire au titre des heures de déplacement effectuées sur la base de son décompte entre ses différents déplacements à l'exclusion des trajets domicile-travail, en se bornant à énoncer que les documents versés par le salarié lui permettaient de prétendre à la rémunération de trajets entre ses différents lieux de rendez-vous, sans pouvoir prétendre au paiement d'heures supplémentaires pour ses temps de déplacement entre son domicile et son premier lieu d'intervention et son dernier rendez-vous et son domicile, sans caractériser d'abord que ces heures de déplacement correspondaient à du temps de travail effectif, c'est-à-dire pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, sans vérifier ensuite si elles avaient été incluses dans le temps de travail déjà payé au salarié ou pour lequel il bénéficiait des jours de repos supplémentaires, et sans décompter enfin le nombre d'heures du temps de travail effectif effectué par le salarié par semaine ; qu'ainsi, la cour d'appel qui n'a ni vérifié ni précisé la réalité, la nature voire même l'ampleur des heures qui resteraient à payer au salarié, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-1, L. 3121-4 et L. 3121-20 ancien, devenu L. 3121-29 du code du travail ;

4°/ que le juge commet un déni de justice lorsqu'il refuse d'évaluer le montant d'un rappel de salaire auquel il fait droit ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait, sans commettre de déni de justice, accorder au salarié "un rappel de salaire au titre des heures de déplacement, sur la base de son décompte entre ses différents déplacements à l'exclusion des trajets domicile / travail", lorsqu'il renvoie aux parties le soin d'en faire le calcul sur cette base et lorsqu'il dit "qu'en cas de difficulté, les parties pourront saisir la cour par requête", sans fixer elle-même le montant de ce rappel de salaire dans sa décision ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3171-4 du code du travail et 4 du code civil :

5. Selon le premier de ces textes, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

6. Aux termes du second, le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice.

7. Pour infirmer le jugement en ce qu'il avait débouté le salarié de ses demandes au titre du rappel d'heures supplémentaires et condamner l'employeur à verser à l'intéressé un rappel de salaire au titre des heures de déplacement, l'arrêt retient que les documents versés par le salarié lui permettent de prétendre uniquement à la rémunération des trajets entre ses différents lieux de rendez-vous à l'exclusion des temps de déplacement entre son domicile et le premier rendez-vous et de son dernier rendez-vous pour retourner à son domicile car ils ne peuvent donner lieu qu'à une contrepartie financière et non au paiement d'heures supplémentaires. Il décide que les parties sont renvoyées à faire le calcul sur cette base et à saisir la cour en cas de difficulté. Il ajoute que les documents que l'intéressé fournit n'étayent pas sa demande au titre des soixante heures supplémentaires par semaine.

8. En statuant ainsi, alors qu'ayant retenu l'existence d'heures supplémentaires, il lui appartenait d'en évaluer l'importance et de fixer les créances salariales s'y rapportant, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une certaine somme au titre du travail dissimulé, ainsi qu'aux entiers dépens et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que la cassation encourue, au titre du premier moyen, sur le chef du dispositif de l'arrêt attaqué ayant condamné la société à verser au salarié un rappel de salaire au titre d'heures de déplacement effectuées sur la base de son décompte entre ses différents déplacements à l'exclusion des trajets domicile/travail emportera, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, et compte tenu du lien de dépendance nécessaire, la censure sur le chef du dispositif de l'arrêt attaqué ayant condamné la société à verser une indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

10. La cassation prononcée entraîne la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif condamnant l'employeur à payer au salarié une certaine somme au titre du travail dissimulé, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Dekra automotive solutions France à verser à M. [J] un rappel de salaire au titre des heures de déplacement effectuées sur la base de son décompte entre ses différents déplacements à l'exception des trajets domicile/travail, dit qu'en cas de difficulté les parties pourront saisir la cour par requête, condamne la société au paiement de la somme de 10 500 euros au titre du travail dissimulé et de celle de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, l'arrêt rendu le 27 février 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne M. [J] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société Dekra automotive solutions France


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la sté exposante à verser à M. [J] un rappel de salaire au titre des heures de déplacement effectuées sur la base de son décompte entre ses différents déplacements à l'exclusion des trajets domicile / travail ET D'AVOIR jugé qu'en cas de difficulté, les parties pourront saisir la cour d'appel par requête ;

AUX MOTIFS QUE « Sur les heures supplémentaires, Aux termes des contrats à durée déterminée qu'il a conclus, la durée du travail de M. [J] était fixée à 37 heures hebdomadaires, avec des jours de repos supplémentaires. Les contrats à durée déterminée se sont succédés comme suit : - du 19 janvier au 30 avril 2015, - du 26 mai au 3 juillet 2015, - du 7 septembre au 30 octobre 2015, - du 25 janvier au 15 avril 2016, - du 16 avril au 1er juillet 2016. Dans le dispositif de ses conclusions, M. [J] réclame la somme globale de 28.547,44 euros et dans le corps des écritures présente une demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires qu'il prétend avoir réalisées : - en 2015, pour un montant de 8 861,25 euros, outre 10 % de congés payés et 10 % de prime de précarité, - en 2016, pour un montant de 7 757,90 euros, outre 10 % de congés payés et 10 % de prime de précarité. Il expose que son travail consistait à créer des anomalies techniques sur un véhicule test mis à sa disposition par la société tels que griller une ampoule de feux stop ou de débrancher un capteur un câble de capteur ABS, de se faire passer pour un client lambda, de prendre par téléphone rendez-vous chez les concessionnaires et agences du groupe afin de contrôler la qualité du service puis une fois l'anonymat levé de faire un débriefing avec le responsable de la concession et le technicien en charge des réparations et enfin de rendre compte. Il explique qu'il devait se rendre suivant le planning fourni par la société dans quatre ou cinq lieux différents chaque semaine et parfois chez d'autres concessionnaires, partant vers le lieu le plus éloigné en recherchant une chambre d'hôtel dans les tarifs autorisés puis rentrait chez lui chaque fin de semaine. Il soutient : - que son temps de trajet réalisé entre son domicile et le premier lieu de rendez-vous auquel il se rendait doit s'analyser en temps de travail effectif, de sorte qu'il aurait dû percevoir, conformément à l'article L. 3121-4, alinéa 2 du code du travail une contrepartie, énonçant qu'il n'avait pas de lieu habituel de travail et que son temps de travail était inhabituel ; - qu'il a réalisé des semaines de 60 heures de travail sur une période de 25 semaines, ce qui a généré par conséquent 575 heures supplémentaires non payées qui doivent être majorées au taux de 25 % pour 150 heures et de 50 % pour les 425 heures restantes, énonçant que l'employeur sous-estime le temps de préparation des visites passé en appels téléphoniques, travail administratif et mise au point des anomalies. Il verse à l'appui de sa prétention : - trois plannings prévisionnels adressés le 31 juillet 2015 pour la troisième campagne avec des dates et lieux de visite fournis par l'employeur s'échelonnant du 8 au 18 septembre et sur plusieurs départements, le 14 janvier 2016 avec des dates de visites du 2 février au 18 mars et le 21 mars 2016 pour la période du 5 au 15 avril 2016 (pièces 7A, 7B et 7C) ; - des tableaux récapitulatifs établis pour les campagnes 2015 et 2016 mentionnant pour chaque contrat à durée déterminée, les trajets entre le domicile de [Localité 3] dans l'Orne et la ville d'arrivée en précisant les dates de prise de rendez-vous et la marque du véhicule utilisé, le nombre de kilomètres parcourus pour chacun des trajets, le temps de route correspondant et le véhicule utilisé pour le réaliser (pièces 29A et 29B) ; - la description d'une semaine-type de travail (pièce 24), dans lequel il a indiqué chacune des tâches qu'il réalise quotidiennement et le temps de travail qui y est consacré, en sus de son temps de travail contractualisé. Par exemple, il fait état de 2 heures de travail effectuées le lundi et consacrées à "la recherche par internet et réservation par téléphone des hôtels pour les futurs lieux de visite" ou bien encore de 2 heures de travail consacrées au "maquillage de la voiture" ; - un décompte récapitulatif des heures supplémentaires par année qui n'est que la projection de semaines à 60 heures. Il entend se prévaloir de l'interprétation de l'article L. 3121-4, alinéa 2 du code du travail par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), dans des circonstances dans lesquelles les travailleurs n'ont pas de lieu fixe ou habituel de travail et qui considère que constitue du temps de travail le temps de déplacement que ces travailleurs consacrent aux déplacements quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier clients désignés par l'employeur. La cour considère que les documents versés par l'appelant lui permettent de prétendre uniquement à la rémunération des trajets entre ses différents lieux de rendez-vous à l'exclusion des temps de déplacement entre son domicile et son 1er lieu de rendez-vous et de son dernier rendez-vous pour retourner à son domicile car ils ne peuvent donner lieu qu'à une contrepartie financière et non au paiement d'heures supplémentaires. Les parties sont renvoyées à faire le calcul sur cette base et à saisir la cour en cas de difficulté. Les documents qu'il fournit n'étayent pas sa demande au titre des 60 h supplémentaires par semaine prétendument effectuées qui reposent sur des estimations et non sur des horaires précis et qui sont d'ailleurs sujettes à caution, l'employeur disposant d'attestations d'autres salariés dont il ressort une surévaluation par M. [J] du temps pris pour la prise téléphonique de rendez-vous. » (arrêt, p. 2-4) ;

1./ ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties figurant dans le dispositif de leurs écritures ; qu'en l'espèce, dans le dispositif de leurs conclusions, M. [J] sollicitait la condamnation de l'employeur à lui payer des heures supplémentaires, tandis que la sté exposante demandait de l'en débouter ; que, cependant, après avoir relevé que sa demande au titre des 60 heures par semaine n'était pas étayée, la cour d'appel a, d'office, sans inviter les parties à en débattre préalablement, condamné la sté employeur à verser à M. [J] un rappel de salaire, non pas au titre des heures supplémentaires, mais au titre d'« heures de déplacement », dénaturant ainsi les termes du litige fixés par les parties, la cour d'appel a violé les articles 4, 5, 16, 906 et 954 du code de procédure civile ;

2./ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'un salarié ne peut prétendre à un rappel de salaire à titre d'heures supplémentaires pour des temps de déplacement qu'à la triple condition que ceux-ci constituent du temps de travail effectif, qu'ils ne soient pas déjà inclus dans le temps de travail déjà payé au salarié et qu'ils constituent des heures supplémentaires au-delà de celui-ci ; qu'en l'espèce, après avoir relevé que la durée de travail du salarié était fixée à 37 heures hebdomadaires, avec jours de repos supplémentaires, et que les documents fournis par le salarié n'étayaient pas sa demande au titre des 60 heures par semaine prétendument effectuées, la cour d'appel ne pouvait accorder à M. [J], un rappel de salaire au titre des heures de déplacement effectuées sur la base de son décompte entre ses différents déplacements à l'exclusion des trajets domicile-travail, en se bornant à énoncer que les documents versés par le salarié lui permettaient de prétendre à la rémunération de trajets entre ses différents lieux de rendez-vous, sans pouvoir prétendre au paiement d'heures supplémentaires pour ses temps de déplacement entre son domicile et son 1er lieu d'intervention et son dernier rendez-vous et son domicile, sans caractériser d'abord que ces heures de déplacement correspondaient à du temps de travail effectif, c'est à dire pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, sans vérifier ensuite si elles avaient été incluses dans le temps de travail déjà payé au salarié ou pour lequel il bénéficiait des jours de repos supplémentaires, et sans décompter enfin le nombre d'heures du temps de travail effectif effectué par le salarié par semaine ; qu'ainsi, la cour d'appel qui n'a ni vérifié ni précisé la réalité, la nature voire même l'ampleur des heures qui resteraient à payer au salarié, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-1, L. 3121-4 et L. 3121-20 ancien, devenu L. 3121-29 du code du travail ;

3./ ALORS, EN OUTRE, QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit ; qu'en l'espèce, saisie par le salarié d'une demande en paiement d'heures supplémentaires, que l'employeur contestait en faisant valoir que le salarié effectuait une seule visite par jour et que ce dernier mélangeait la compensation financière avec le paiement d'heures supplémentaires, il appartenait à la cour d'appel , non pas de renvoyer les parties à faire eux-mêmes le calcul de la rémunération des trajets sur une base comme sur des documents qu'elle n'a pas précisés, mais de trancher elle-même le litige; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans même préciser le fondement sur lequel elle prononçait la condamnation de l'employeur, la cour d'appel a empêché la Cour de Cassation d'exercer son contrôle et a méconnu son office en violation de l'article 12 du code de procédure civile ;

4./ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE le juge commet un déni de justice lorsqu'il refuse d'évaluer le montant d'un rappel de salaire auquel il fait droit ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait, sans commettre de déni de justice, accorder au salarié « un rappel de salaire au titre des heures de déplacement, sur la base de son décompte entre ses différents déplacements à l'exclusion des trajets domicile / travail, lorsqu'il renvoie aux parties le soin d'en faire le calcul sur cette base et lorsqu'il dit « qu'en cas de difficulté, les parties pourront saisir la cour par requête » », sans fixer elle-même le montant de ce rappel de salaire dans sa décision ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil.


SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la sté exposante à payer à M. [J] la somme de 10.500 euros au titre du travail dissimulé, ainsi qu'aux entiers dépens et au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Sur le travail dissimulé, M. [J] sollicite le paiement de la somme de 10.500 euros ; telle qu'elle ressort du dispositif de ses conclusions, au titre du travail dissimulé. Il fait la démonstration de la volonté de l'employeur de dissimuler les heures de travail effectivement accomplies au titre des déplacements entre lieux de mission. Dès lors que le contrat de travail a été rompu par la survenance du terme, il peut prétendre à l'indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé. La société sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à l'appelant une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile » (arrêt, p. 6) ;

1./ ALORS QUE la cassation encourue, au titre du premier moyen, sur le chef du dispositif de l'arrêt attaqué ayant condamné la sté exposante à verser à Monsieur [J] un rappel de salaire au titre d'heures de déplacement effectuées sur la base de son décompte entre ses différents déplacements à l'exclusion des trajets domicile / travail emportera, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, et compte tenu du lien de dépendance nécessaire, la censure sur le chef du dispositif de l'arrêt attaqué ayant condamné la sté exposante à verser une indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé ;

2./ ALORS, AUSSI, QUE lorsque le débat entre les parties ne porte que sur la réalisation d'heures supplémentaires au-delà de la durée contractuelle du salarié, seule peut constituer l'élément matériel de la dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5, 2° du code du travail l'absence de mention sur les bulletins de paie d'un nombre d'heures supplémentaires accomplies par le salarié au-delà de sa durée contractuelle ; qu'ayant elle-même relevé que la durée de travail du salarié était fixée à 37 heures hebdomadaires, avec jours de repos supplémentaires, et que les documents fournis par le salarié, qui reposaient sur de simples estimations, et non sur des horaires précis, au demeurant sujettes à caution, n'étayaient pas sa demande au titre des 60 heures par semaine prétendument effectuées, la cour d'appel ne pouvait condamner la sté exposante à payer au salarié une indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé en se bornant à énoncer que le salarié, qui sollicitait seulement des heures supplémentaires au-delà de sa durée contractuelle, faisait la démonstration de la volonté de l'employeur de dissimuler les heures de travail accomplies au titre des déplacements entre lieux de mission, sans vérifier ni constater si ces heures de déplacement constituaient des heures supplémentaires non mentionnées dans ses bulletins de paie allant au-delà de sa durée contractuelle de travail ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-1, L. 3121-4, L. 3121-20 ancien, devenu L. 3121-29, L. 8221-5, 2°, dans sa rédaction applicable au litige, et L. 8223-1 du code du travail ;

3./ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE, ayant relevé elle-même que la durée de travail du salarié était fixée à 37 heures hebdomadaires, avec jours de repos supplémentaires, et que les documents produits par le salarié, qui reposaient uniquement sur des estimations, et non sur des horaires précis, au demeurant sujettes à caution, n'étayaient pas sa demande de 60 heures effectuées par semaine, la cour d'appel ne pouvait condamner l'employeur à une indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé, en se bornant à énoncer que le salarié faisait la démonstration de la volonté de l'employeur de dissimuler des heures de travail effectivement accomplies au titre des déplacements entre lieux de mission, sans vérifier, ainsi qu'elle y était invitée, si, dès lors que le salarié, qui était en déplacements et disposait d'une large autonomie dans l'organisation de son temps de travail, ne lui avait jamais adressé pendant l'exécution des contrats de travail, aucun retour ni aucune déclaration sur l'accomplissement d'heures supplémentaires, qu'il avait toujours validé ses soldes de tout compte sans aucune réservé, la sté exposante avait eu -ou pu avoir- connaissance, pendant l'exécution des contrats de travail du salarié, de ce que M. [J], qui sollicitait seulement des heures supplémentaires au-delà de sa durée contractuelle, avait effectivement réalisé de telles heures supplémentaires et si elle avait eu l'intention de ne pas les mentionner sur ses bulletins de paie ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-1, L. 3121-4, L. 3121-20 ancien, devenu L. 3121-29, L. 8221-5, 2°, dans sa rédaction applicable au litige, et L. 8223-1 du code du travail.

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