25 mai 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-12.195

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00628

Texte de la décision

SOC.

CDS



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 mai 2022




Cassation partielle


Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 628 F-D

Pourvoi n° Q 21-12.195




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 MAI 2022

Mme [P] [D], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 21-12.195 contre l'arrêt rendu le 26 novembre 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-4), dans le litige l'opposant à l'Association oecuménique d'accueil pour personnes âgées et réfugiés ( AOAPAR), dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de Mme [D], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'Association oecuménique d'accueil pour personnes âgées et réfugiés, après débats en l'audience publique du 29 mars 2022 où étaient présentes Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 novembre 2020), Mme [D] a été engagée le 24 septembre 2007 par l'Association oecuménique d'accueil pour personnes âgées et réfugiés en qualité d'assistante de soins hospitaliers, à temps complet.

2. La salariée a été déclarée le 17 juin 2013 « inapte définitivement à son poste et à tous postes avec charges physiques supérieures ou égales à 5 kg. Apte à un poste léger à temps partiel », à l'issue de deux examens médicaux.

3. Le 21 juin 2013, l'employeur a adressé à la salariée une proposition de reclassement, qu'elle a refusée.

4. La salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 16 juillet 2013.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé


5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en paiement au titre du solde d'indemnité spéciale de licenciement et de l'indemnité compensatrice de préavis, alors « qu'est dépourvu de caractère abusif le refus par le salarié du poste de reclassement proposé par l'employeur en application de l'article L. 1226-10 du code du travail, emportant modification du contrat de travail ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que la salariée, embauchée en qualité d'ASH à temps complet (151,67 heures), s'était vue proposer un poste à temps partiel pour une durée de travail de 75,83 heures par mois qu'elle avait refusé en indiquant que la liste des tâches n'était pas en cohérence avec les horaires proposés, a néanmoins, pour dire que ce refus était abusif et priver en conséquence la salariée de ses demandes, énoncé qu'elle avait refusé un poste correspondant aux préconisations du médecin du travail et n'induisant aucune réduction de sa rémunération, sans permettre à l'employeur de préciser avec elle les modalités concrètes de mise en place le cas échéant, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la proposition de poste de reclassement faite à la salariée, qui emportait passage d'un horaire à temps complet à un horaire à temps partiel, constituait une modification du contrat de travail que cette dernière était en droit de refuser, violant ainsi l'article L. 1226-14 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1226-14 du code du travail :

7. Aux termes de ce texte, la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 du code du travail ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.
Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.

8. Pour débouter la salariée de sa demande au titre des indemnités spéciales de rupture, l'arrêt retient qu'alors qu'il lui était proposé un poste correspondant aux préconisations du médecin du travail comprenant des horaires inférieurs à quatre heures par jour et n'induisant aucune réduction de sa rémunération, la salariée a opposé un refus, et que les motifs invoqués par la salariée pour refuser cette proposition n'apparaissent pas pertinents au regard de ces éléments.

9. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la proposition de reclassement entraînait une modification du contrat de travail de la salariée, la cour d'appel a violé le texte sus-visé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la salariée de ses demandes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité spéciale de licenciement, l'arrêt rendu le 26 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne l'Association oecuménique d'accueil pour personnes âgées et réfugiés aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'Association oecuménique d'accueil pour personnes âgées et réfugiés et la condamne à payer à Mme [D] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SAS Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour Mme [D]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Mme [D] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande tendant à voir juger son licenciement pour inaptitude sans cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de sa demande en paiement de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnités de rupture ;

ALORS QUE lorsqu'un salarié a été licencié en raison d'une inaptitude consécutive à un accident du travail qui a été jugé imputable à la faute inexcusable de l'employeur, il a droit à l'indemnisation réparant la perte de son emploi due à cette faute de l'employeur ; qu'en se bornant, pour débouter la salariée de ses demandes, à énoncer que l'employeur avait respecté son obligation de reclassement et les règles protectrices du salarié licencié pour inaptitude d'origine professionnelle, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la circonstance que la cour d'appel d'Aix-en-Provence avait, par un arrêt du 27 novembre 2019, dit que l'accident du travail dont la salariée avait été victime le 19 juillet 2012 était imputable à la faute inexcusable de l'employeur, ne privait pas le licenciement pour inaptitude de cause réelle et sérieuse de sorte que la salariée avait droit à l'indemnisation réparant la perte de son emploi due à cette faute de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-10 et L. 1235-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Mme [D] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande en paiement au titre du solde d'indemnité spéciale de licenciement et de l'indemnité compensatrice de préavis ;

ALORS QU' est dépourvu de caractère abusif le refus par le salarié du poste de reclassement proposé par l'employeur en application de l'article L. 1226-10 du code du travail, emportant modification du contrat de travail ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que la salariée, embauchée en qualité d'ASH à temps complet (151,67 heures), s'était vue proposer un poste à temps partiel pour une durée de travail de 75,83 heures par mois qu'elle avait refusé en indiquant que la liste des tâches n'était pas en cohérence avec les horaires proposés, a néanmoins, pour dire que ce refus était abusif et priver en conséquence la salariée de ses demandes, énoncé qu'elle avait refusé un poste correspondant aux préconisations du médecin du travail et n'induisant aucune réduction de sa rémunération, sans permettre à l'employeur de préciser avec elle les modalités concrètes de mise en place le cas échéant, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la proposition de poste de reclassement faite à la salariée, qui emportait passage d'un horaire à temps complet à un horaire à temps partiel, constituait une modification du contrat de travail que cette dernière était en droit de refuser, violant ainsi l'article L. 1226-14 du code du travail.

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