25 mai 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-23.326

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:C100425

Titres et sommaires

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Défaillance de l'emprunteur - Action - Délai de forclusion - Point de départ - Découvert en compte bancaire - Découvert tacitement consenti par la banque - Date du dépassement non régularisé - Applications diverses

Il résulte des articles L. 311-47, L. 311-1, 11°, et L. 311-52 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que les actions en paiement d'un découvert en compte tacitement accepté doivent être engagées, à peine de forclusion, dans les deux ans suivant l'expiration du délai de trois mois à compter du dépassement non régularisé. Ayant relevé qu'un compte courant a précédemment présenté des positions débitrices ayant été régularisées et qu'il n'a été en position débitrice continue qu'à compter d'une certaine date, ce dont il résultait que l'action en paiement du solde débiteur devait être engagée dans les deux ans suivant l'expiration du délai de trois mois à compter de cette date correspondant à celle du dépassement non régularisé, une cour d'appel en déduit exactement que l'action de la banque, introduite dans les deux ans suivant l'expiration du délai de trois mois à compter de cette date, n'est pas atteinte par la forclusion

Texte de la décision

CIV. 1

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 mai 2022




Rejet


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 425 F-P+B

Pourvoi n° T 20-23.326




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 MAI 2022

1°/ M. [W] [P], domicilié [Adresse 3],

2°/ Mme [N] [L], épouse [G], domiciliée [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° T 20-23.326 contre l'arrêt rendu le 20 octobre 2020 par la cour d'appel d'Angers (chambre civile A), dans le litige les opposant à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel (CRCAM) de l'Anjou et du Maine, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [P], et de Mme [L], de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel (CRCAM) de l'Anjou et du Maine, après débats en l'audience publique du 29 mars 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneau, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 20 octobre 2020), Mme [L] et M. [P] ont chacun ouvert auprès de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Anjou et du Maine (la banque) un compte courant, la première suivant convention du 21 mars 2007 n° 0014711210, le second suivant convention n° 2439742000.

2. Le 16 juillet 2014, la banque les a assignés en paiement des soldes débiteurs de ces comptes.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Mme [L] fait grief à l'arrêt de dire que l'action en paiement engagée par la banque à son encontre n'est pas forclose et de la condamner à lui payer la somme de 175 001,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2014 au titre du solde débiteur du compte n° 0014711210, alors :

« 1°/ que le dépassement au sens du 11° de l'article L. 311-1 du code de la consommation, non régularisé à l'issue du délai de trois mois prévu par l'article L. 311-47, fait courir le délai de forclusion biennale applicable à l'action en paiement engagée à l'encontre de l'emprunteur ; que le délai de forclusion commence à courir le jour où le dépassement atteint trois mois sans être régularisé, peu important que ce dépassement fasse ultérieurement l'objet de régularisations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Mme [L] bénéficiait d'un découvert autorisé de 5 000 euros sur son compte n° 000147101210 ouvert dans les livres de la banque, et que le solde de son compte avait dépassé le débit de 5 000 euros de manière continue, du 1er janvier au 15 mai 2012, soit pendant une période excédant trois mois ; qu'en jugeant cependant que la banque n'était pas forclose en son action en paiement introduite le 16 juillet 2014 à l'encontre de Mme [L], la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 311-52 du code de la consommation, applicable à la cause, devenu l'article R. 312-35 du même code ;

2°/ que le délai de forclusion commence à courir le jour où le dépassement atteint trois mois sans être régularisé, peu important que ce dépassement fasse ultérieurement l'objet de régularisations ; qu'en énonçant, pour juger que la banque n'était pas forclose en son action dirigée contre Mme [L], que le compte de Mme [L] n'a été en position débitrice de manière continue et permanente qu'à compter du 31 juillet 2012" et que précédemment, les différents dépassements ont été régularisés ", la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants, en violation de l'article L. 311-52 du code de la consommation, applicable à la cause, devenu l'article R. 312-35 du même code. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des articles L. 311-47, L. 311-1, 11°, et L. 311-52 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que les actions en paiement d'un découvert en compte tacitement accepté doivent être engagées, à peine de forclusion, dans les deux ans suivant l'expiration du délai de trois mois à compter du dépassement non régularisé.

6. Ayant relevé que le compte avait précédemment présenté des positions débitrices ayant été régularisées et qu'il n'avait été en position débitrice continue qu'à compter du 31 juillet 2012, ce dont il résultait que l'action en paiement du solde débiteur devait être engagée dans les deux ans suivant l'expiration du délai de trois mois à compter de cette date correspondant à celle du dépassement non régularisé, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action de la banque, introduite le 16 juillet 2014, n'était pas atteinte par la forclusion.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [L] et M. [P] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [L] et M. [P] et les condamne à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Anjou et du Maine la somme de 1 500 euros chacun ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille vingt-deux.


Le conseiller referendaire rapporteur le president






Le greffier de chambre

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [P],

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Mme [L] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'action en paiement engagée par la CRCAM à son encontre n'est pas forclose et de l'avoir condamnée à payer à la CRCAM la somme de 175.001,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2014 au titre du solde débiteur du compte n° 0014711210 ;

ALORS QUE 1°), le dépassement au sens du 11° de l'article L. 311-1 du code de la consommation, non régularisé à l'issue du délai de trois mois prévu par l'article L. 311-47, fait courir le délai de forclusion biennale applicable à l'action en paiement engagée à l'encontre de l'emprunteur ; que le délai de forclusion commence à courir le jour où le dépassement atteint trois mois sans être régularisé, peu important que ce dépassement fasse ultérieurement l'objet de régularisations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Mme [L] bénéficiait d'un découvert autorisé de 5.000 euros sur son compte n°000147101210 ouvert dans les livres de la CRCAM, et que le solde de son compte avait dépassé le débit de 5.000 euros de manière continue, du 1er janvier au 15 mai 2012, soit pendant une période excédant trois mois (arrêt p. 6 §6 et p. 7§2) ; qu'en jugeant cependant que la CRCAM n'était pas forclose en son action en paiement introduite le 16 juillet 2014 à l'encontre de Mme [L], la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 311-52 du code de la consommation, applicable à la cause, devenu l'article R. 312-35 du même code ;

ALORS QUE 2°), le délai de forclusion commence à courir le jour où le dépassement atteint trois mois sans être régularisé, peu important que ce dépassement fasse ultérieurement l'objet de régularisations ; qu'en énonçant, pour juger que la CRCAM n'était pas forclose en son action dirigée contre Mme [L], que le compte de Mme [L] « n'a été en position débitrice de manière continue et permanente qu'à compter du 31 juillet 2012 » et que « précédemment, les différents dépassements ont été régularisés » (p. 7§ 3), la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants, en violation de l'article L. 311-52 du code de la consommation, applicable à la cause, devenu l'article R. 312-35 du même code.

SECOND MOYEN DE CASSATION

M. [P] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à la CRCAM la somme de 84.554,18 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2014 au titre du compte n° 2439742000 ;

ALORS QUE 1°), il incombe à celui qui invoque une fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de rapporter la preuve de son bien-fondé ; qu'en énonçant, pour juger que les virements intervenus sur le compte de M. [P] faisaient échec à la forclusion biennale, que M. [P] ne justifiait pas qu'il avait qualité à faire valoir que ces virements auraient été opérés sans l'autorisation des sociétés en cause, cependant qu'il incombait à la CRCAM qui contestait la qualité de M. [P] à faire valoir ce moyen de rapporter la preuve de ce prétendu défaut de qualité, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315, devenu 1353 du code civil,

ALORS QUE 2°), les moyens de défense échappent à toute prescription ; qu'ainsi, le moyen par lequel M. [P] contestait la régularité des virements opérés sur son compte les 15 février et 16 mai 2012, en défense à l'action en paiement introduite par la banque, laquelle, au soutien de sa demande, faisait valoir que lesdits virements auraient fait échec à la forclusion biennale, n'était pas soumis à prescription ; qu'en jugeant au contraire que M. [P] ne pouvait pas contester la régularité des virements susvisés, en raison de la prescription quinquennale, la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile.

Le greffier de chambre

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