23 mai 2022
Cour d'appel d'Agen
RG n° 21/01058

CHAMBRE CIVILE

Texte de la décision

ARRÊT DU

23 Mai 2022









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N° RG 21/01058

N° Portalis DBVO-V-B7F -C6M2

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[W] [C]



C/



[E] [M]



CPAM DU LOT



SA AXA FRANCE IARD





-------------------































GROSSES le

à









ARRÊT n° 245-22











COUR D'APPEL D'AGEN



Chambre Civile







LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,





ENTRE :



Monsieur [W] [C] assisté par l'association lotoise d'initiative sociale et éducative (ALISE) curateur désigné par jugement du 06/09/2018 (curatelle renforcée)

né le [Date naissance 2] 1983 à [Localité 9]

de nationalité française, sans emploi

domicilié : [Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 8]



représenté par Me Amélie TINTILLIER, membre de l'association CAMBON - SAINT-PRIX, TINTILLIER, avocate au barreau du LOT





APPELANT d'une ordonnance de référé du tribunal judiciaire de CAHORS en date du 24 novembre 2021, RG 21/00034



D'une part,



ET :



Monsieur [E] [M]

né le [Date naissance 1] 1939 à [Localité 11]

de nationalité française, retraité

domicilié : [Adresse 4]

[Localité 8]



représenté par Me Christian CALONNE, avocat postulant au barreau du LOT

et Me Ghislaine JACQUES-HUREAUX, avocat au barreau de PARIS





CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE (CPAM) DU LOT prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 8]



n'ayant pas constitué avocat



SA AXA FRANCE IARD prise en la personne de son directeur général actuellement en exercice domicilié en cette qualité audit siège social

[Adresse 5]

[Localité 7]



représentée par Me Hélène GUILHOT, avocate associée de la SCP TANDONNET ET ASSOCIES, substituée à l'audience par Me Anne-Sophie RIGAL, avocate postulante au barreau d'AGEN

et Me Annie BERLAND, SELARL RACINE, substituée à l'audience par Me Benoit PERINGUEY, avocate plaidante au barreau de BORDEAUX





INTIMÉS

D'autre part,







COMPOSITION DE LA COUR :



l'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 21 mars 2022, sans opposition des parties, devant la cour composée de :



Valérie SCHMIDT, Conseiller,



qui en a rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre elle-même de :



Benjamin FAURE et Pascale FOUQUET, Conseillers



en application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, et après qu'il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,





Greffière : Nathalie CAILHETON





ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.




' '

'



Faits et procédure :



Par acte du 1er mai 2017, M. [E] [M] a donné à bail à M. [W] [C] un appartement se trouvant au second étage d'un immeuble situé [Adresse 6], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 410 euros comprenant une provision sur charges.



Le 15 septembre 2017, le service départemental d'intervention et de secours (SDIS) du Lot est intervenu à la suite de la défenestration de M. [W] [C].



M. [W] [C] a été placé sous curatelle renforcée pour une durée de 60 mois par décision du juge des tutelles du 3 octobre 2018.



Une conciliation a été vainement tentée entre M. [W] [C] assisté de son curateur, l'association lotoise d'initiatives sociales et éducatives (l'association Alise), et M. [E] [M].





Par acte du 9 avril 2021, M. [W] [C], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, a assigné M. [E] [M] et la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Lot (la CPAM) devant la présidente du tribunal judiciaire de Cahors, juge des référés, sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile, afin de voir ordonner une expertise médicale, et voir enjoindre à M. [E] [M] de communiquer, sous astreinte, l'attestation de son assurance auprès de la SA AXA.



Par acte du 17 septembre 2021, M. [W] [C] a attrait à la procédure la SA AXA France IARD.



Les deux instances ont été jointes.



Par ordonnance de référé du 24 novembre 2021, le juge des référés a :



- déclaré commune et opposable l'ordonnance à venir à la CPAM du Tarn,

- rejeté la totalité des demandes,

- laissé les dépens à la charge du trésor public.



Le juge des référés a considéré qu'il résultait des éléments versés aux débats que M. [W] [C], qui présentait des troubles psychiatriques antérieurs, s'était probablement défenestré volontairement, et n'apportait aucun début de preuve de la défectuosité du garde-corps en place permettant de justifier sa demande d'expertise.



M. [W] [C] assisté de l'association Alise a formé appel le 7 décembre 2021, désignant en qualité d'intimé M. [E] [M], la SA AXA et la CPAM du Lot.



L'avis de fixation de l'affaire à bref délai a été délivré le 15 décembre 2021.





Prétentions :



Par dernières conclusions du 25 février 2022, M. [W] [C] demande à la Cour de :



- déclarer recevable son appel,

- réformer l'ordonnance de référé RG N°21/00034 rendue le 24 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Cahors en ce qu'elle l'a débouté de sa demande d'expertise médicale,

- faire droit à sa demande d'expertise judiciaire compte tenu qu'il justifie d'un intérêt légitime au sens des dispositions de l'article 145 du Code de procédure civile,

- dire ce que de droit quant aux dépens.



M. [W] [C] présente l'argumentation suivante :



- son appel est recevable car sa déclaration indique expressément les chefs de l'ordonnance critiquée : 'la demande d'expertise sera rejetée ainsi que toutes les autres demandes', et de surcroît ses conclusions signifiées le 7 janvier 2022 confirment les critiques des chefs du jugement,



- il justifie d'un intérêt légitime à solliciter une expertise médicale :



- son ancienne compagne atteste qu'il a basculé en voulant ouvrir les volets, et qu'elle a tenté de le rattraper en vain, ce qui écarte l'hypothèse d'une tentative de suicide,

- l'absence de garde-corps au dessus de la fenêtre a été constatée par procès-verbal de Maître [F] du 22 septembre 2017, 7 jours après l'accident,

- il conserve de graves séquelles de l'accident.



Par uniques conclusions du 4 février 2022, M. [E] [M] demande à la Cour de :



- dire l'appel de M. [W] [C] infondé,

- confirmer l'ordonnance du juge des référés,

- condamner M. [W] [C] aux dépens.



M. [E] [M] observe que l'attestation de la compagne de M. [W] [C] produite en cause d'appel ne permet pas d'écarter les éléments desquels il résulte qu'avant les faits, il avait effectué trois séjours en secteur psychiatrique avant de s'installer dans l'appartement ; que les pompiers et urgentistes de [Localité 8] ont relevé lors de sa prise en charge 'une probable TS avec IMV', évoquant une tentative de suicide et une intoxication médicamenteuse volontaire ; qu'il présentait un état stuporeux depuis trois jours avec mutisme et trouble du comportement d'après les voisins et la femme présente lors de l'intervention, laquelle expliquait alors qu'il acceptait mal la rupture prochaine du couple. Par ailleurs, le logement étant occupé depuis le 1er mai 2017 le soudain défaut du garde-corps n'est pas expliqué par l'appelant.



Par uniques conclusions du 4 février 2022, la SA AXA France IARD demande à la Cour de :



- à titre principal,

- juger que la déclaration d'appel est privée de tout effet dévolutif, que la Cour n'est pas valablement saisie et qu'il n'y a pas lieu à statuer,

- à titre subsidiaire,

- confirmer l'ordonnance de référé,

- rejeter toutes autres demandes de l'appelant,

- condamner M. [W] [C] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner M. [W] [C] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Annie Berland, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



La SA AXA France IARD présente les observations suivantes :



- la Cour n'est pas saisie des prétentions formulées par M. [W] [C], car sa déclaration d'appel omet de mentionner expressément les chefs de l'ordonnance critiquée, qui correspondent aux points tranchés dans le dispositif, la mention de la motivation de la décision ne palliant pas l'inobservation des dispositions de l'article 562 du Code de procédure civile,



- l'existence d'un motif légitime requis par l'article 145 du Code de procédure civile n'est pas démontrée, la mesure sollicitée devant notamment être pertinente, avoir pour objectif d'établir une preuve dont la production est susceptible d'influer sur la solution d'un litige futur, et ne pas se heurter de manière manifeste à une irrecevabilité ou à un échec ; or ni grief, ni observation ou fondement sur lequel une action au fond pourrait être engagée ne sont formulés, et les éléments versés aux débats ne sont pas en faveur de l'hypothèse d'un accident dont la cause pourrait être reprochée au bailleur, mais d'une défenestration volontaire.



La CPAM du Lot ne s'est pas constituée. La déclaration d'appel lui a été signifiée le 17 décembre 2021 et les conclusions de l'appelant lui ont été signifiées le 11 janvier 2022 suivant les modalités de la remise à personne morale. Les conclusions de la SA AXA France IARD lui ont été signifiées le 11 février 2022 suivant les mêmes modalités.



Il sera statué par arrêt réputé contradictoire, conformément à l'article 474 du Code de procédure civile.






Motifs



L'article 562 du Code de procédure civile énonce que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.



Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement, sans mentionner ceux de ses chefs qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas.



L'irrégularité en résultant peut être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel, dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond.



La déclaration d'appel de M. [W] [C] n'indique pas si elle tend à l'annulation ou à l'infirmation de l'ordonnance de référé du 24 novembre 2021, reproduit la motivation de la décision, mais ne mentionne expressément aucun des chefs de son dispositif.



Il n'a pas été établi de nouvelle déclaration dans le délai imparti pour conclure au fond.



La cour n'est donc saisie d'aucun chef de la décision visée par le recours.



Les dépens d'appel seront supportés par M. [W] [C], partie perdante.



L'équité permet de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en faveur de la SA AXA France IARD.





PAR CES MOTIFS :



La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt réputé contradictoire prononcé par mise à disposition et en dernier ressort,



Constate qu'elle n'est saisie d'aucun chef de l'ordonnance de référé du 24 novembre 2021,



Condamne M. [W] [C] aux dépens d'appel,



Rejette la demande présentée par la SA AXA France IARD sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.



Le présent arrêt a été signé par Valérie SCHMIDT, conseiller faisant fonction de présidente, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



La Greffière,La Présidente,

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