18 mai 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-70.003

Autre - Formation de section

Publié au Bulletin - Publié au Rapport

ECLI:FR:CCASS:2022:AV15005

Titres et sommaires

SANTE PUBLIQUE - Lutte contre les maladies et les dépendances

Texte de la décision

.Demande d'avis
n°V 22-70.003

Juridiction : le tribunal judiciaire de Vannes




CTD





Avis du 18 mai 2022



n° 15005 +B+R








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

COUR DE CASSATION
_________________________

Première chambre civile

Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile :

La Cour de cassation a reçu le 28 février 2022, une demande d'avis formée le 23 février 2022 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Vannes, dans une instance concernant [Z] [J], Mme [S] [J], le directeur de l'établissement Public de Santé Mentale du Morbihan et le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Vannes.

La première chambre civile de la Cour de cassation a rendu le présent avis sur le rapport de Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire, et les observations écrites et orales de M. Chaumont, avocat général.

Énoncé de la demande d'avis

1. La demande est ainsi formulée :

« L'article L. 3211-10 du code de la santé publique s'analyse-t-il comme interdisant toute mesure d'hospitalisation d'un mineur à la demande d'un tiers ou limite-t-il la qualité de tiers demandeurs aux seuls titulaires de l'autorité parentale ? »

Examen de la demande d'avis

2. Un mineur peut faire l'objet de soins psychiatriques, sous la forme d'une hospitalisation complète :

- à l'initiative des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, qui, chargés conformément à l'article 371-1 du code civil de le protéger dans sa santé, demandent son admission et autorisent les soins sur le fondement des articles L. 3211-10 et L. 3211-1, alinéa 1er, du code de la santé publique, le juge aux affaires familiales statuant en cas de désaccord entre eux, ou à l'initiative du tuteur. Le mineur est alors en soins psychiatriques libres en application de l'article L. 3211-2, alinéa 1er, de sorte que sa situation n'est pas soumise au contrôle du juge des libertés et de la détention et que ne peuvent être mises en oeuvre un isolement ou une contention, mesures de dernier recours qui, selon l'article L. 3222-5-1, ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Le mineur, dont le consentement doit être recherché, conformément à l'article L. 1111-4, et qui conteste les soins psychiatriques, a, selon l'article 375 du code civil, la possibilité de saisir le juge des enfants au motif que sa santé est en danger ou que les conditions de son développement sont gravement compromises.

- sur décision de placement prise par le juge des enfants en assistance éducative sur le fondement des articles 375, alinéa 1er, et 375-3, 5°, du code civil et dans les conditions prévues à l'article 375-9, si sa santé est en danger et si sa protection l'exige, ou par le procureur de la République, en cas d'urgence, à charge pour lui de saisir dans les huit jours le juge compétent sur le fondement de l'article 375-5, 2°. Aux termes de l'article R. 1112-35, alinéa 4, du code de la santé publique, lorsque la santé ou l'intégrité corporelle d'un mineur risquent d'être compromises par le refus du représentant légal du mineur ou l'impossibilité de recueillir le consentement de celui-ci, le médecin responsable du service peut saisir le ministère public afin de provoquer les mesures d'assistance éducative lui permettant de donner les soins qui s'imposent.

- sur décision du représentant de l'Etat dans le département, prononçant son admission en soins psychiatriques sans consentement lorsque, selon l'article L. 3213-1 du code de la santé publique, il est atteint de troubles mentaux qui nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Il peut alors, dans les conditions prévues à l'article L. 3222-5-1 précité, être placé en isolement ou sous contention pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour lui ou autrui. Le juge des libertés et de la détention exerce un contrôle obligatoire et systématique de la mesure, en application de l'article L. 3211-12-1, et peut, sur le fondement de l'article L. 3211-12, à tout moment, se saisir d'office ou être saisi aux fins de mainlevée immédiate soit de la mesure de soins psychiatriques, soit de la mesure d'isolement ou de contention, par les personnes visées à ce même texte.
- sur décision de la chambre de l'instruction ou d'une juridiction de jugement, prononcée à la suite d'une déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale. Le régime de cette hospitalisation est, pour l'essentiel, celui prévu pour les admissions en soins psychiatriques prononcées en application de l'article L. 3213-1 précité.

3. L'article L. 3211-10, qui ne prévoit que l'admission en soins psychiatriques libres à la demande des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale ou du tuteur et, par renvoi au seul chapitre III du titre 1er, l'admission en soins psychiatriques contraints sur décision du représentant de l'Etat, exclut par conséquent l'admission en soins psychiatriques contraints sur décision du directeur d'établissement à la demande d'un tiers ou des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

EST D'AVIS QUE l'article L. 3211-10 du code de la santé publique s'analyse comme interdisant toute mesure d'hospitalisation d'un mineur décidée sur le fondement de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique par le directeur d'établissement à la demande d'un tiers ou des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale.

Fait à Paris et mis à disposition au greffe de la Cour le 18 mai 2022, après examen de la demande d'avis lors de la séance du 10 mai 2022 où étaient présents, conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire : M. Chauvin, président, Mme Duval Arnould, conseiller doyen , Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire rapporteur, assisté de Mme Anton, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, MM. Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Bacache conseillers, Mmes Gargoullaud, Dazzan, Le Gall et M. Serrier, conseillers référendaires
M. Chaumont, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre ;

Le présent avis est signé par le conseiller référendaire rapporteur, le président et le greffier de chambre.

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