11 mai 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-18.609

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:C100387

Texte de la décision

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 mai 2022




Cassation sans renvoi


Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 387 F-D

Pourvoi n° M 21-18.609

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [H].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 30 avril 2021.






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 MAI 2022

Mme [S] [H], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 21-18.609 contre l'ordonnance rendue le 4 mars 2021 par le premier président de la cour d'appel de Reims, dans le litige l'opposant :

1°/ à l'Etablissement public de santé mentale de l'Aube, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à l'Union départementale des associations familiales (UDAF) de l'Aube, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bacache-Gibeili, conseiller, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de Mme [H], après débats en l'audience publique du 15 mars 2022 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bacache-Gibeili, conseiller rapporteur, M. Mornet, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1.Selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Reims, 04 mars 2021), le 13 mai 2020, Mme [H] a été admise en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète au sein de l'établissement public de santé mentale de l'Aube, par décision du représentant de l'Etat, en application de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique.

2. Après s'être saisi d'office, en application de l'article L. 3211-12 du code de la santé publique, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Troyes a, le 19 février 2021, ordonné le maintien en hospitalisation complète de Mme [H].

Examen des moyens

Sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Mme [H] fait grief à l'ordonnance de décider de maintenir son hospitalisation, alors « qu'il résulte des articles L. 3211-12-2, L. 3211-12-4 et R. 3211-8 du code de la santé publique que le premier président, qui statue sur l'appel d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention, ne peut se dispenser d'entendre à l'audience la personne admise en soins psychiatriques que s'il résulte de l'avis d'un médecin des motifs médicaux qui, dans l'intérêt de celle-ci, font obstacle à son audition ou si, le cas échéant, est caractérisée une circonstance insurmontable empêchant cette audition ; qu'en se bornant à relever que « Madame [S] [H] régulièrement convoquée n'a pas comparu à l'audience du 4 mars 2021 », sans constater l'existence d'un avis médical exposant des motifs médicaux faisant obstacle à l'audition de Madame [H], qui était hospitalisée depuis le 22 novembre 2020, ni caractériser une circonstance insurmontable empêchant cette audition, le juge délégué du premier président de la cour d'appel de Reims a privé sa décision de base légale au regard des dispositions susvisées. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3211-12-2, L. 3211-12-4 et R. 3211-8 du code de la santé publique :

4. Selon ces textes, lorsqu'il statue sur l'appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, le premier président ne peut se dispenser d'entendre à l'audience la personne admise en soins psychiatriques que s'il résulte de l'avis d'un médecin des motifs médicaux qui, dans l'intérêt de celle-ci, font obstacle à son audition ou si, le cas échéant, est caractérisée une circonstance insurmontable empêchant cette audition.

5. L'ordonnance se borne à mentionner que Mme [H] n'est pas comparante alors qu'elle a été régulièrement convoquée et qu'elle n'est pas représentée, l'avocat de permanence, régulièrement avisé, ne s'étant pas présenté.

6. En statuant ainsi, sans constater l'existence d'un avis médical faisant obstacle à son audition, ni caractériser une circonstance insurmontable empêchant cette audition, le premier président a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

7. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

8. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que les délais légaux pour se prononcer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 4 mars 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Reims ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour Mme [H].

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Madame [S] [H] fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR confirmé l'ordonnance rendue 19 février 2021 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Troyes aux fins de maintenir la mesure de soins psychiatriques sans consentement, sous le régime de l'hospitalisation complète dont bénéficie Madame [S] [H] ;

ALORS QUE l'arrêt attaqué mentionne que l'avocat général « par avis écrit du 26 février 2021, a conclu à la confirmation de l'ordonnance déférée »; qu'en s'abstenant de constater que le Madame [H] en avait reçu communication afin de pouvoir y répondre utilement, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Madame [S] [H] fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR confirmé l'ordonnance rendue 19 février 2021 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Troyes aux fins de maintenir la mesure de soins psychiatriques sans consentement, sous le régime de l'hospitalisation complète dont bénéficie Madame [S] [H] ;

1/ ALORS QU'il résulte des articles L. 3211-12-2, L. 3211-12-4 et R. 3211-8 du code de la santé publique que le premier président, qui statue sur l'appel d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention, ne peut se dispenser d'entendre à l'audience la personne admise en soins psychiatriques que s'il résulte de l'avis d'un médecin des motifs médicaux qui, dans l'intérêt de celle-ci, font obstacle à son audition ou si, le cas échéant, est caractérisée une circonstance insurmontable empêchant cette audition ; qu'en se bornant à relever que « Madame [S] [H] régulièrement convoquée n'a pas comparu à l'audience du 4 mars 2021 », sans constater l'existence d'un avis médical exposant des motifs médicaux faisant obstacle à l'audition de Madame [H], qui était hospitalisée depuis le 22 novembre 2020 (arrêt, p. 2), ni caractériser une circonstance insurmontable empêchant cette audition, le juge délégué du premier président de la cour d'appel de Reims a privé sa décision de base légale au regard des dispositions susvisées ;

2/ ALORS QU'il résulte des articles L. 3211-12-2, et R. 3211-8 que la personne faisant l'objet de soins psychiatrique est assistée ou représentée par un avocat ; que l'ordonnance attaquée, qui constate que Madame [H], non comparante, n'était pas représentée, l'avocat de permanence régulièrement avisé ne s'étant pas présenté, a été rendue en méconnaissance de ces dispositions ;

3/ ALORS QU'en toute hypothèse, en confirmant la mesure de soins psychiatriques sans consentement sous le régime de l'hospitalisation complète prise à l'égard de Madame [H], sans constater que celle-ci souffrirait de troubles mentaux compromettant la sûreté des personnes ou portant gravement atteinte à l'ordre public, le juge n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 3213-1, L. 3211-2-1 et L. 3211-11 du Code de la santé publique ;

4/ ALORS QU'au surplus, en déduisant l'absence de consentement libre et éclairé de Madame [H] de ce qu'elle n'acceptait de prendre ses médicaments que dans le cadre contraint de l'hôpital et refusait l'instauration d'un traitement neuroleptique injectable retard, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3213-1, L. 3211-2-1 et L. 3211-11 du Code de la santé publique.

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