11 mai 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-21.651

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:C300405

Titres et sommaires

BAIL COMMERCIAL - Prix - Révision - Fixation du prix du loyer révisé - Décision exclusive de toute condamnation - Portée

En application de l'article R. 145-23 du code de commerce, la compétence du juge des loyers qui lui permet, après avoir fixé le prix du bail révisé ou renouvelé, d'arrêter le compte que les parties sont obligées de faire, est exclusive du prononcé d'une condamnation


BAIL COMMERCIAL - Prix - Fixation du loyer du bail renouvelé - Valeur locative

Selon l'article L. 145-33, 1°, du code de commerce, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative. A défaut d'accord, cette valeur est notamment déterminée d'après les caractéristiques du local considéré. Selon l'article R. 145-3 du code de commerce, les caractéristiques propres au local s'apprécient notamment en considération de l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux , de ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée. Prive sa décision de base légale au regard de ces textes, la cour d'appel qui fixe le loyer commercial à une certaine somme en considération de la surface de vente effectivement exploitée par le locataire compte tenu de la transformation en réserve d'une partie antérieurement utilisée en surface de vente, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'affectation à la vente d'une surface moindre que celle autorisée par le bail pour cette activité ne résultait pas d'un choix de gestion du locataire inopposable au bailleur

Texte de la décision

CIV. 3

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 mai 2022




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 405 FS-B


Pourvois n°
P 20-21.689
X 20-21.651
Y 20-21.652 JONCTION









R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 MAI 2022

I - La société Dax meubles, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 20-21.689 contre un arrêt n° RG 19/00730 rendu le 9 septembre 2020 par la cour d'appel de Pau (2e chambre, section 1), dans le litige l'opposant à la société Besson chaussures, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

II - La société Besson chaussures, société par actions simplifiée, a formé le pourvoi n° X 20-21.651 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant à la société Dax meubles, société par actions simplifiée, défenderesse à la cassation.

III - La société Besson chaussures, société par actions simplifiée, a formé le pourvoi n° Y 20-21.652 contre un arrêt n° RG 19/03611 rendu le 9 septembre 2020 par la cour d'appel de Pau (2e chambre, section 1), dans le litige l'opposant à la société Dax meubles, société par actions simplifiée, défenderesse à la cassation.

La demanderesse au pourvoi n° P 20-21.689 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Les demanderesses aux pourvois n° X 20-21.651 et Y 20-21.652 invoquent, chacune, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Andrich, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Besson chaussures, de la SCP Spinosi, avocat de la société Dax meubles, et l'avis de Mme Guilguet-Pauthe, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 avril 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Andrich, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, MM. Jessel, David, Jobert, Mme Grandjean, conseillers, Mmes Schmitt, Aldigé, M. Baraké, Mme Gallet, conseillers référendaires, Mme Guilguet-Pauthe, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° P 20-21.689, X 20-21.651 et Y 20-21.652 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon le premier arrêt attaqué (Pau, 9 septembre 2020, n° 19/00730), la société Besson chaussures, locataire de locaux commerciaux appartenant à la société Dax meubles, a saisi le juge des loyers commerciaux, qui a fixé le loyer du bail renouvelé à compter du 1er février 2013, par jugement du 20 février 2019.

3. Selon le second arrêt attaqué (Pau, 9 septembre 2020, n° 19/03611), la société Besson chaussures a fait pratiquer, le 28 juin 2019, sur un compte bancaire ouvert au nom de la société Dax meubles, une saisie-attribution d'une certaine somme, en vertu de la décision du juge des loyers commerciaux. La société Dax meubles a saisi le juge de l'exécution en annulation de la saisie-attribution invoquant l'inexistence d'un titre exécutoire.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi n° P 20-21.689, ci-après annexé


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le moyen du pourvoi n° X 20-21.651

Enoncé du moyen

5. La société Besson chaussures fait grief à l'arrêt n° 19/00730 de dire n'y avoir lieu à condamnation de la société Dax meubles au remboursement du trop-perçu de loyers, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2013, puis à compter de chaque échéance trimestrielle, alors « que le juge des loyers commerciaux qui fixe le prix du loyer révisé à un montant inférieur à celui du loyer versé par le preneur est compétent pour statuer sur la demande de restitution par le bailleur du trop-perçu qui en résulte, cette demande étant accessoire à la demande principale ; qu'en retenant, après avoir fixé le montant du loyer du bail renouvelé, que la condamnation de la société Dax meubles au remboursement du trop-perçu de loyers, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2013, excédait sa compétence, la cour d'appel a violé l'article 1376, devenu l'article 1302-1 du code civil, ensemble l'article R. 145-23 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

6. En application de l'article R. 145-23 du code de commerce, la compétence du juge des loyers qui lui permet, après avoir fixé le prix du bail révisé ou renouvelé, d'arrêter le compte que les parties sont obligées de faire est exclusive du prononcé d'une condamnation.

7. La cour d'appel, statuant sur l'appel d'une décision du juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire, qui a retenu que la locataire sollicitait la condamnation de la bailleresse au paiement d'une certaine somme, a exactement décidé que le prononcé d'une condamnation excédait ses pouvoirs.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen du pourvoi n° P 20-21.689

Enoncé du moyen

9. La société Dax meubles fait grief à l'arrêt n° 19/00730 de fixer le loyer commercial à la somme de 185 061,63 euros hors taxes et hors charges, alors « que la décision du locataire de ne pas exploiter certaines surfaces n'est pas opposable au bailleur ; qu'en énonçant que c'était de manière conforme à la réalité qu'en l'espèce, l'expert judiciaire avait déterminé que la surface de vente exploitée par la société Besson chaussures était de 1 571 m², compte tenu de la transformation en réserve, unilatéralement décidée et mise en oeuvre par cette société preneur, d'une partie du local qu'elle utilisait antérieurement comme surface de vente, la cour d'appel a violé les articles L. 145-33 et R. 145-3 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 145-33, 1°, et R. 145-3 du code de commerce :

10. Selon le premier texte, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative. A défaut d'accord, cette valeur est notamment déterminée d'après les caractéristiques du local considéré.

11. Selon le second, les caractéristiques propres au local s'apprécient notamment en considération de l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux et de ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée.

12. Pour fixer le loyer commercial à une certaine somme, l'arrêt, après avoir constaté que le bail désigne un local à usage commercial représentant une surface de vente en rez-de-chaussée d'environ 2 000 m², retient que la superficie d'exploitation mentionnée au bail ne correspond pas à la surface réellement consacrée par l'exploitant à ses activités de vente à la clientèle mais inclut nécessairement des parties à vocation administrative ou de réserve et que la surface de vente exploitée était en l'espèce de 1 571 m², compte tenu de la transformation en réserve d'une partie antérieurement utilisée en surface de vente.

13. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'affectation à la vente d'une surface moindre, que celle autorisée par le bail pour cette activité, ne résultait pas d'un choix de gestion du locataire inopposable au bailleur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Sur le moyen du pourvoi n° Y 20-21.652, ci-après annexé

14. En application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen du pourvoi n° Y 20-21.652, dès lors que la cassation de l'arrêt du 9 septembre 2020 (n° 19/00730) entraîne, par voie de conséquence, l'annulation de l'arrêt du 9 septembre 2020 (n° 19/03611) qui est l'exécution de la décision cassée.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe le loyer au 1er février 2013 à la somme de 185 061,63 euros hors taxes et hors charges, l'arrêt rendu le 9 septembre 2020 (n° 19/00730), entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

ANNULE l'arrêt rendu le 9 septembre 2020 (n° 19/03611), rendu entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;

Condamne la société Besson chaussures aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi n° P 20-21.689 par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Dax meubles.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société Dax Meubles fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande en nullité du rapport d'expertise judiciaire et d'avoir fixé le loyer commercial au 1er février 2013 à la somme de 185.061,63 € hors taxes et hors charges ;

Alors que le caractère équitable de la procédure et le principe du contradictoire s'imposent aussi au stade de l'expertise, dont les conclusions doivent pouvoir être contradictoirement débattues, essentiellement dans les contentieux techniques, où les préconisations de l'expert sont, concrètement, susceptibles d'exercer une forte influence sur l'issue du litige ; qu'a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 16 du Code de procédure civile la cour d'appel qui s'est bornée à retenir, pour écarter le moyen de la société Dax Meubles qui faisait valoir qu'elle n'avait pas eu connaissance de la version de la charte de l'expertise immobilière sur laquelle s'était fondé l'expert judiciaire, que cette charte était accessible à tous et consultable sur Internet, sans préciser s'il s'agissait de la version de 2012 ou de celle de 2015 ; que la version de 2012, sur laquelle l'expert semble s'être fondé en l'espèce, ayant été annulée et remplacée par celle de 2015, ce point conditionnait la détermination du loyer commercial, puisque les deux versions successives de la charte prévoyaient des solutions différentes, notamment quant à l'évaluation des annexes et des réserves du local donné à bail commercial ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

La société Dax Meubles fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé le loyer commercial au 1er février 2013 à la somme de 185.061,63 € hors taxes et hors charges ;

Alors que la décision du locataire de ne pas exploiter certaines surfaces n'est pas opposable au bailleur ; qu'en énonçant que c'était de manière conforme à la réalité qu'en l'espèce, l'expert judiciaire avait déterminé que la surface de vente exploitée par la société Besson Chaussures était de 1.571 m², compte tenu de la transformation en réserve, unilatéralement décidée et mise en oeuvre par cette société preneur, d'une partie du local qu'elle utilisait antérieurement comme surface de vente, la cour d'appel a violé les articles L. 145-33 et R. 145-3 du Code de commerce. Moyen produit au pourvoi n° X 20-21.651 par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Besson chaussures.

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à condamnation de la SAS Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyers, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2013, puis à compter de chaque échéance trimestrielle ;

AUX MOTIFS QUE – Sur l'appel incident de la SAS Besson Chaussures - La société intimée a formé un appel incident à l'encontre de la décision déférée en sollicitant la condamnation de la SAS Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyer qu'elle a réglé sur la base de ce qui lui a été facturé par son bailleur à compter du renouvellement intervenu le 1er février 2013, au regard de la valeur locative estimée à l'issue de l'expertise judiciaire. Toutefois, c'est à juste titre que le premier juge a rejeté cette demande au motif qu'elle excède la compétence du juge des loyers commerciaux. En effet, la juridiction de première instance a été saisie sur le fondement de l'article R. 145-23 du code de commerce qui donne compétence au président du tribunal de grande instance ou au juge qui le remplace pour statuer sur les contestations relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé. La compétence du juge des loyers commerciaux est donc limitée à la fixation du prix du bail renouvelé sans pouvoir statuer sur une demande en restitution d'un trop-perçu de loyer ;

ET AUX MOTIFS QUE – Sur les autres demandes – La demande tendant à la condamnation de la Sas Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyers, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2013, puis à compter de chaque échéance trimestrielle, excède la compétence du juge des loyers commerciaux ;

ALORS QUE le juge des loyers commerciaux qui fixe le prix du loyer révisé à un montant inférieur à celui du loyer versé par le preneur est compétent pour statuer sur la demande de restitution par le bailleur du trop-perçu qui en résulte, cette demande étant accessoire à la demande principale ; qu'en retenant, après avoir fixé le montant du loyer du bail renouvelé, que la condamnation de la société Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyers, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2013, excédait sa compétence, la cour d'appel a violé l'article 1376, devenu l'article 1302-1 du code civil, ensemble l'article R. 145-23 du code de commerce. Moyen produit au pourvoi n° Y 20-21.652 par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Besson chaussures.

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR ordonné la mainlevée de la saisie-attribution ;

AUX MOTIFS QUE – Si l'article L. 111-1 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que tout créancier peut, dans les conditions prévues par la loi, contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses obligations à son égard, l'article L. 111-2 du même code précise que c'est sur la base d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible qu'une mesure d'exécution forcée peut être pratiquée sur les biens du débiteur. Il n'est pas exigé, pour retenir la qualification de titre exécutoire, que la décision juridictionnelle contienne formellement une condamnation à effectuer un paiement mais seulement qu'il en résulte, sans ambiguïté, une obligation de payer une somme liquide et exigible. En d'autres termes, le recouvrement forcé d'une créance peut intervenir lorsqu'elle est liquide, c'est-à-dire évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation, et qu'elle est exprimée dans une décision juridictionnelle qui emporte de manière claire et non ambiguë une obligation de paiement. En l'espèce, la SAS Besson Chaussures a fait pratiquer, le 28 juin 2019, une saisie attribution sur le compte ouvert auprès de la Société Générale, prise en son agence d'Anglet, au nom de la SAS Dax Meubles pour obtenir paiement d'une somme évaluée en principal à 382 736,52 €, en déclarant agir en vertu de la décision prononcée par le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Dax le 20 février 2019. Le procès-verbal énonce, au titre du détail des éléments de la créance, qu'il s'agit de «trop-perçus de loyer au 31 mars 2019». Ainsi qu'il résulte des écritures de la SAS Besson Chaussures, cette somme résulte de la différence qui existe entre le montant des loyers qu'elle a réglés à la SAS Dax Meubles sur la base du loyer provisionnel fixé avant expertise par jugement du 13 septembre 2017 et celui dont elle est réellement redevable, après fixation du loyer du bail renouvelé, dans les termes du jugement du 28 juin 2019, au demeurant non définitif puisque frappé d'appel sur l'initiative du bailleur. Or, sur la demande de la SAS Besson Chaussures qui avait sollicité du juge des loyers commerciaux qu'il se prononce sur cette créance de restitution et qu'il condamne son bailleur à la lui rembourser, la juridiction saisie, dans le dispositif de sa décision, n'a pas fait droit à cette demande et, au contraire, a «dit n'y avoir lieu à condamnation de la SAS Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyer, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2013, puis à compter de chaque échéance trimestrielle». Le juge des loyers commerciaux s'est donc prononcé de manière claire et expresse en excluant, dans le cadre de la procédure dont il était saisi et dans les limites de sa compétence, une condamnation du bailleur au remboursement du trop-perçu de loyer. Cette décision judiciaire, même si elle constitue bien un titre exécutoire, n'a donc pas prononcé condamnation à paiement à l'encontre de la SAS Dax Meubles et n'a pas davantage exprimé, de manière claire et non ambiguë, une obligation de paiement à la charge de celle-ci et au profit du preneur au titre des sommes réclamées dans le cadre de la mesure de saisie-attribution. Contrairement à ce qu'affirme la SAS Besson Chaussures, l'impossibilité pour elle de se prévaloir du jugement du 20 février 2019 pour pratiquer une mesure d'exécution forcée à l'encontre de son bailleur ne conduit pas à la priver du bénéfice de l'exécution provisoire dont ce jugement est assorti puisque c'est en vertu de cette même décision que le montant du loyer dont elle est redevable est fixé à un certain montant, à compter du 1er février 2013, date de renouvellement du bail, et qu'à compter de ce même jugement, en vertu de l'exécution provisoire dont il est assorti, elle n'est plus redevable que du loyer qu'il fixe. En outre, l'article 1305-2 du code civil ne peut être utilement invoqué par l'appelante ainsi qu'elle le fait. En effet, si cette disposition prévoit que ce qui n'est dû qu'à terme ne peut être exigé avant l'échéance, elle ajoute que ce qui a été payé d'avance ne peut être répété. En conséquence, la mesure de saisie-attribution ne pouvait être maintenue et c'est à juste titre que sa mainlevée a été ordonnée par le premier juge dont la décision est confirmée ;

ET AUX MOTIFS QUE – Aux termes de l'article L 111-2 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d'exécution. En l'espèce, la SAS Besson Chaussures ne peut poursuivre l'exécution d'un jugement rendu par le juge des loyers commerciaux ayant fixé rétroactivement le loyer à une somme moindre que celle dont elle s'acquittait, au titre d'une créance de restitution qui n'a pas été constatée dans ce titre exécutoire ni dans un autre, le juge ayant du reste dit n'y avoir lieu à condamnation de la SAS Besson Chaussures au remboursement du trop-perçu après avoir retenu que pareille demande excédait sa compétence. Il convient d'ordonner la mainlevée de la saisie-attribution. La SAS Dax Meubles ne peut démontrer le caractère abusif de la mesure d'exécution contestée, dès lors que la SAS Besson Chaussures pouvait en toute bonne foi tirer du jugement la conclusion qu'il lui reconnaissait implicitement une créance certaine ;

1) ALORS QUE le jugement fixant le loyer du bail commercial, même en l'absence de condamnation au paiement, constitue un titre exécutoire permettant au preneur d'agir en exécution forcée pour recouvrer le trop-perçu des loyers versés ; qu'en retenant, pour ordonner la mainlevée de la saisie attribution, que le jugement du 20 février 2019, dans son dispositif, n'a pas fait à droit à la demande de la société Besson Chaussures tendant à la condamnation du bailleur à la créance de restitution mais a, au contraire dit n'y avoir lieu à condamnation de la société Dax Meubles au remboursement du trop-perçu de loyer, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution ;

2) ALORS QUE l'obligation pour le bailleur de restituer le trop-perçu des loyers versés depuis le renouvellement du bail est une conséquence inéluctable de la fixation par le juge d'un loyer renouvelé inférieur au loyer payé par le preneur ; qu'en retenant, pour ordonner la mainlevée de la saisie attribution, que le jugement ayant fixé le loyer du bail renouvelé n'a pas exprimé, de manière claire et non ambigüe, une obligation de paiement à la charge de la société Dax Meubles et au profit du preneur au titre des sommes réclamées dans le cadre de la saisie attribution quand ce jugement emportait nécessairement un tel effet, la cour d'appel a violé l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution.

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