28 avril 2022
Cour d'appel de Caen
RG n° 19/02560

Chambre sociale section 3

Texte de la décision

AFFAIRE : N° RG 19/02560

N° Portalis DBVC-V-B7D-GMVF

 Code Aff. :



ARRET N°



C.P





ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de COUTANCES en date du 26 Juin 2019 - RG n° 16/00714









COUR D'APPEL DE CAEN

Chambre sociale section 3

ARRET DU 28 AVRIL 2022





APPELANT :



Monsieur [O] [S]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représenté par Me Emmanuel LEBAR, avocat au barreau de COUTANCES, substitué par Me GUYOMARD, avocat au barreau d'ALENCON





INTIMEE :



[5]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée par Me Frédéric FORVEILLE, substitué par Me DREUX, avocats au barreau de CAEN





DEBATS : A l'audience publique du 10 février 2022, tenue par Monsieur LE BOURVELLEC, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré



GREFFIER : Mme GOULARD



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :



Mme CHAUX, Présidente de Chambre,

Mme ACHARIAN, Conseiller,

M. LE BOURVELLEC, Conseiller,



ARRET prononcé publiquement le 28 avril 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier











La cour statue sur l'appel interjeté par M. [S] d'un jugement rendu le 26 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Coutances dans un litige l'opposant à la [5].






FAITS ET PROCEDURE





M. [S] avait une activité de travaux agricoles, location de matériels, de négoce de paille et de foin, de travaux d'assainissement et d'hydrocurage. Cette activité était mise en location gérance à la société [S] [O].



Cette activité a été dissoute le 15 novembre 2014, puis liquidée le 30 juin 2015. A l'issue de la liquidation, le matériel de la société, qui appartenait à M. [S] et était loué à l'entreprise, a été vendu.



Le revenu exceptionnel dégagé par M. [S] à l'occasion de la vente de son matériel a été pris en considération par la [5] (ci-après 'la caisse') pour le calcul des cotisations dont il est redevable à l'égard de l'organisme de sécurité sociale.



La caisse a ainsi appelé des cotisations pour un montant de 30 486 euros, que M. [S] a réglé au moyen d'un échéancier, mais dont il a cependant contesté le principe, considérant qu'il s'agissait de bénéfices industriels et commerciaux qui n'auraient pas dû être pris en compte dans le calcul des cotisations.



Par courrier du 26 novembre 2015, M. [S] a demandé à la caisse de ne pas prendre en compte ses revenus exceptionnels de l'année 2015 pour l'appel de cotisations 2016.



Par courrier de la caisse en date du 23 février 2016, M. [S] a été informé du rejet de sa demande par la commission de recours amiable en sa séance du 21 janvier 2016.



Par courrier du 31 mars, M. [S] a ensuite saisi le médiateur de la caisse, lequel par courrier du 19 avril 2016 l'a informé ne pouvoir donner une suite favorable à sa demande.



M. [S] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale par requête adressée le 22 avril 2016.



Par jugement du 26 juin 2019, le tribunal de grande instance de Coutances, auquel le contentieux de la sécurité sociale a été transféré à compter du 1er janvier 2019, a :



- déclaré recevable le recours formé par M. [S],

- validé la décision de la commission de recours amiable, notifiée le 23 février 2016, de confirmer que les revenus exceptionnels de 2015 doivent être intégrées dans l'assiette de cotisations 2016,

- laissé les dépens à la charge de M. [S].



Par acte du 30 août 2019, M. [S] a interjeté appel de ce jugement.



Par conclusions déposées le 25 octobre 2021, soutenues oralement par son conseil, M. [S] demande à la cour de :



- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- déclaré recevable le recours formé par M. [S],

- l'a débouté de ses demandes, à savoir :

dire recevable et bien fondée sa demande

dire que la caisse est incompétente pour lever les cotisations résultant des revenus de l'activité industrielle et commerciale de M. [S],

condamner la caisse à restituer à M. [S] la somme de 33 215 euros,

condamner la caisse à verser à M. [S] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de la procédure,









- validé la décision de la commission de recours amiable, notifiée le 23 février 2016, de confirmer que les revenus exceptionnels de 2015 doivent être intégrés dans l'assiette de cotisations 2016,

- laissé les dépens à la charge de M. [S].



Statuant à nouveau,

- 'condamne' la caisse à verser à M. [S] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de la procédure de première instance et d'appel,

- 'juger à nouveau dire' que la caisse est incompétente pour lever les cotisations résultant des revenus de l'activité industrielle et commerciale de M. [S],

- ordonner à la caisse de restituer à M. [S] la somme de 33 215 euros,

- condamner la caisse à verser à M. [S] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de la procédure.





Par écritures déposées le 27 janvier 2022, soutenues oralement par son conseil, la caisse demande à la cour de :



- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions,

- débouter M. [S] de l'intégralité de ses demandes,

- confirmer la décision de la commission de recours amiable, notifiée le 23 février 2016, validant l'intégration des revenus exceptionnels de 2015 dans l'assiette de calcul de cotisations de l'année 2016,

- condamner M. [S] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.



Il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation détaillée de leurs prétentions respectives et des moyens développés à leur soutien.






SUR CE, LA COUR,





L'article L.731-14 du code du rural dispose notamment :



Sont considérés comme revenus professionnels pour la détermination de l'assiette des cotisations dues au régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles :



1° Les revenus soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles ;



2° Les revenus provenant des activités non-salariées agricoles mentionnées à l'article L. 722-1 et soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux.



L'article L.722-1 du code rural dispose :



Le régime de protection sociale des non-salariés des professions agricoles est applicable aux personnes non salariées occupées aux activités ou dans les exploitations, entreprises ou établissements énumérés ci-dessous :



1° Exploitations de culture et d'élevage de quelque nature qu'elles soient, exploitations de dressage, d'entraînement, haras ainsi qu'établissements de toute nature dirigés par l'exploitant agricole en vue de la transformation, du conditionnement et de la commercialisation des produits agricoles lorsque ces activités constituent le prolongement de l'acte de production, ou structures d'accueil touristique, précisées par décret, situées sur l'exploitation ou dans les locaux de celle-ci, notamment d'hébergement et de restauration ;





















2° Entreprises de travaux agricoles définis à l'article L. 722-2.



Il résulte du rapprochement de ces deux textes que l'article L. 713-14 a inclus dans l'assiette des cotisations sociales les revenus provenant de l'ensemble des activités énumérées par l'article L.722-1.



M. [S] fait valoir que pour l'année 2015, où le bénéfice exceptionnel a été constaté, son activité principale relevait des bénéfices industriels et commerciaux et non des bénéfices agricoles.



Il souligne que l'activité de location de matériels, de négoce de paille et de foin, de travaux d'assainissement et d'hydrocurage n'est manifestement pas du travail agricole et n'est en tout état de cause pas visée par l'article L.722-2 du code rural et de la pêche maritime.



La caisse rétorque que M. [S] était affilié auprès de la [5] et qu'il n'a jamais contesté cette affiliation, de sorte qu'elle a fait application des dispositions prévues par la législation pour le rappel de cotisations prévoyant notamment la prise en compte des revenus des bénéfices industriels et commerciaux.



Il est acquis que si les revenus soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux sont susceptibles d'entrer dans la catégorie des revenus professionnels pour la détermination de l'assiette des cotisations dues au régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles, c'est à la condition qu'ils proviennent d'une des activités énumérées à l'article L.722-1 du code rural.



Il en résulte que la seule circonstance que le bénéfice exceptionnel de 2015 relève de bénéfices industriels et commerciaux ne pouvait justifier que ceux-ci soient exclus de l'assiette des cotisations.



M. [S] affirme cependant que son activité, au titre de la société [S] [O], n'est pas du travail agricole et n'est pas visée par l'article L.722-2 du code rural.



Cet article dispose :



Sont considérés comme travaux agricoles :



1° Les travaux qui entrent dans le cycle de la production animale ou végétale, les travaux d'amélioration foncière agricole ainsi que les travaux accessoires nécessaires à l'exécution des travaux précédents ;



2° Les travaux de création, restauration et entretien des parcs et jardins comprenant les travaux de maçonnerie paysagère nécessaires à l'exécution des travaux précédents.



Il convient de constater que dans ses différents courriers adressés à la caisse ou au médiateur de la caisse, M. [S] ne précise pas en quoi consistait son activité, et se borne à faire valoir que son revenu exceptionnel de 2015 était dû à des plus values professionnelles dégagées sur son entreprise individuelle qui était en location gérance de la Sarl [S] [O].



Il convient dès lors de se référer aux éléments produits par l'appelant, qui sont les suivants :



- l'extrait Kbis de la société [S] [O], en date du 30 décembre 2014, qui mentionne au titre de l'activité exercée : 'travaux agricoles, assainissement, négoce paille, matériel, location engins.'



- le contrat de location-gérance signé entre d'une part M. [S], Mme [B], d'autre part la Sarl [6], comportant en son article 1er la mention 'un fonds de commerce de travaux d'assainissement - travaux agricoles - négociant en paille et fourrage'.



Aucun autre élément du dossier ne permet de s'informer sur l'activité de la société.



Il apparaît ainsi que les deux documents relatifs à la société font état d'une activité de travaux agricoles.







M. [S] procède par pure affirmation lorsqu'il indique que la mention 'travaux agricoles'sur l'extrait Kbis ne correspondait à aucune réalité et qu'il se réservait la possibilité de la mettre en oeuvre, et ce d'autant qu'il ne fournit aucun autre document permettant de déterminer la nature de son activité.



Il doit en être retenu que la société a fait l'objet dès son origine d'une affiliation auprès de la caisse, que cette affiliation n'a jamais été remise en cause par M. [S], et que la société avait notamment pour activité, selon ses statuts, les travaux agricoles.



C'est donc à juste titre que la commission de recours amiable de la caisse a rejeté le recours de M. [S], les bénéfices industriels et commerciaux de ce dernier pour l'année 2015 provenant bien d'une activité de travaux agricoles.



Le jugement déféré mérite par conséquent confirmation en toutes ses dispositions, y compris en ce qu'il a condamné l'appelant aux dépens de première instance.



Succombant, M. [S] sera condamné aux dépens d'appel.



Aucune considération tirée de l'équité ne s'oppose en revanche à ce que la caisse conserve la charge de ses frais irrépétibles. La demande formée à ce titre sera rejetée.



PAR CES MOTIFS,





La cour,



Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;



Déboute la [5] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



Condamne M. [S] aux dépens d'appel.



LE GREFFIERLE PRESIDENT











E. GOULARD C. CHAUX

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