20 avril 2022
Cour d'appel de Paris
RG n° 20/03755

Pôle 6 - Chambre 4

Texte de la décision

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 20 AVRIL 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03755 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB53J



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Janvier 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F 17/01285



APPELANTE



S.A.S. GREEN RECUPERATION, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Clémence HILLEL-MANOACH, avocat au barreau de PARIS, toque : C1444

Représentée par Mme [I] [B] (Responsable juridique groupe) en vertu d'un pouvoir spécial



INTIMEE



Madame [L] [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Manuella METOUDI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1137



COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Bruno BLANC, président, chargé du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Bruno BLANC, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère





Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD



ARRET :



- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Bruno BLANC, Président et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.










EXPOSÉ DU LITIGE :



Madame [L] [F] a été engagée par la société COVED, dans le cadre d'un contrat de travail écrit, à durée indéterminée, à temps complet, à compter du 22 octobre 2009, en qualité d'« Assistante d'exploitation », coefficient 118 .



Suite à un plan de sauvegarde, la société GREEN RECUPERATION a repris une partie de l'activité de la société COVED.



Ainsi, Madame [L] [F] a signé un nouveau contrat de travail à durée indéterminée avec la société GREEN RECUPERATION, en qualité d' « Assistante d'exploitation », statut Agent de Maîtrise, ETAM niveau 3- Echelon B, à compter du 1 er août 2015. L'ancienneté de Madame [L] [F] a été reprise par la société GREEN RECUPERATION



La convention collective applicable au contrat de travail est celle des Industries et du Commerce de la Récupération en date du 21 décembre 1950, étendue par arrêté du 1er février 1955.



Le 27décembre 2016, madame [L] [F] a été convoquée à un entretien préalable de licenciement en date du 6 janvier 2017, avec la notification d'une mise à pied à titre conservatoire.



Le 13 janvier 2017, Madame [L] [F] a été licenciée pour faute grave.



Contestant son licenciement, madame [L] [F] a saisi le Conseil de Prud'Hommes de Bobiny le 03 mai 2017 en indemnisation des préjudices liés à la rupture du contrat de travail.



La cour statue sur l'appel interjeté par la société GREEN RECUPERATION du jugement rendu le 20 janvier 2020 par le Conseil de Prud'Hommes de Bobigny qui :

- Condamné la SAS GREEN RECUPERATION à verser à Madame [F] [L] les sommes suivantes :

* DIX NEUF MILLE CINQ CENT TRENTE NEUF EUROS ET DIX CENTIMES (19.539,10 €) au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* CINQ MILLE CINQ CENT QUATRE VINGT DEUX EUROS ET SOIXANTE CENTIMES (5.582,60€) au titre de 1°indemnité compensatrice de préavis ;

* CINQ CENT CINQUANTE HUIT EUROS ET VINGT CENTIMES (558,20€) au titre des Congés payés y afférents ;

* TROIS MILLE DEUX CENT QUATRE VINGT TROIS EUROS ET QUATREVINGT DIX CENTIMES (3.283,90€) au titre de 1'indemnité légale de licenciement ;

* MILLE DEUX CENTS EUROS (l.200€) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- Rappelé que les créances salariales porteront intérêts de droit à compter de la datede réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation, soit le 9/5/2017 , et les créances à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du présent jugement ;

- Ordonné à la SAS GREEN RECUPERATION de remettre à Madame [F] [L] les documents de fin de contrat de travail conformes au présent jugement ;

- Débouté du surplus ;

- Condamné la SAS GREEN RECUPERATION à rembourser à Pôle Emploi les indemnités perçues par Madame [F] [L] dans la limite de six mois de salaire ;

- Condamné la société GREEN RECUPERATION aux dépens.











Par conclusions notifiées sur le RPVA le 21 juin 2021, la société GREEN RECUPERATION demande à la cour de :

INFIRMER le jugement du Conseil de prud'hommes de Bobigny en date du 20 janvier 2020, en ce qu'il a :

- Requalifié implicitement le licenciement prononcé pour faute grave, en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Fixé implicitement le salaire de référence à la somme de 2.791,30 €,

- Condamné, en retenant implicitement que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, la société GREEN RECUPERATION à verser à Madame [F] les sommes suivantes :

o 19.539 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

o 5.582,60 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

o 558,20 € au titre des congés payés y afférents ;

o 3.283,90 € au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

o 1.200 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Ordonné à la société GREEN RECUPERATION de remettre les documents de fin de contrat conformes au jugement,

- Condamné la société GREEN RECUPERATION à rembourser à Pôle Emploi les indemnités perçues par Madame [F] dans la limite de 6 mois de salaire,

- Condamné la société GREEN RECUPERATION à payer la somme de 1.200 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens,

- Débouté la société GREEN RECUPERATION de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a :

- Débouté Madame [F] du surplus de ses demandes et notamment :

o de sa demande de de dommages et intérêts pour préjudice moral d'un montant de 5.000 € ;

o de sa demande d'astreinte relative à la remise des documents de fin de contrat ;

ET, STATUANT A NOUVEAU, il est demandé à la Cour d'appel de :

A titre principal

- Dire et juger que le licenciement repose sur une faute grave ;

En conséquence,

- Débouter Madame [F] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif (22.330,40 €),

- Fixer le salaire de référence à 2.435,87 € ;

- Débouter Madame [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et notamment des demandes suivantes :

o 5.582,60 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 558,20 € au titre des congés payés afférents,

o 3.283,90 € à titre d'indemnité de licenciement,

o 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

o 596,71 € au titre de la période de mise à pied et 56,71 € de congés payés afférents,

o Ordonner la remise des documents de fin de contrat conforme à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour,

o 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire,

- Dire et juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

- Débouter Madame [F] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif (22.330,40 €),

- Fixer le salaire de référence à 2.435,87 € ;

- Débouter Madame [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et notamment des demandes suivantes :

o 5.582,60 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 558,20 € au titre des congés payés afférents,

o 3.283,90 € à titre d'indemnité de licenciement,

o 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

o 596,71 € au titre de la période de mise à pied et 56,71 € de congés payés afférents,

o Ordonner la remise des documents de fin de contrat conforme à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour,

o 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre infiniment subsidiaire, si la Cour jugeait que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse :

- Ramener à de plus justes proportions la condamnation prononcée par le Conseil de prud'hommes ;

En toute hypothèse,

- Fixer le salaire de référence à 2.435,87 € ;

- Débouter Madame [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et notamment des demandes suivantes :

o 5.582,60 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 558,20 € au titre des congés payés afférents,

o 3.283,90 € à titre d'indemnité de licenciement,

o 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

o 596,71 € au titre de la période de mise à pied et 56,71 € de congés payés afférents,

o Ordonner la remise des documents de fin de contrat conforme à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour,

o 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner Madame [F] à verser à la société GREEN RECUPERATION la somme de 3.000 € euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jugement ;

- Condamner Madame [F] aux entiers dépens.



Par conclusions notifiées sur le RPVA le 21 décembre 2020, madame [L] [F] demande à la cour de :

- DÉCLARER recevable mais mal fondée la SAS GREENRECUPERATION en son appel du jugement sus énoncé ;

- L'EN DÉBOUTER ainsi que de toutes demandes, fins et conclusions comme infondées et en tout cas injustifiées,;

- RECEVOIR Madame [L] [F] en son appel incident, du jugement sus énoncé ;

- LA DECLARER recevable et bien fondé en son appel incident,

En Conséquence,

- CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Bobigny en date du 20 janvier 2020 en ce qu'il a dit et jugé le licenciement de Madame [L] [F] sanscause sérieuse et en a tiré les conséquences légales au titre de la requalification du licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Bobigny en date du 20 janvier 2020 en ce qu'il a débouté Madame [L] [F] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral;

- L'INFIRMER en ce qu'il a limité les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alloués à Madame [L] [F] à la somme de 19.539,10 euros ;

Et statuant à nouveau,

CONDAMNER la société GREEN ENVIRONNEMENT à payer à Madame [L] [F] les sommes suivantes:

- Indemnité de licenciement : 3.283,90 €,

Article L.1234-9 du Code du travail,

- Indemnité compensatrice de préavis (2 mois) : 5.582,60 €,

Article L.1234-5 du Code du travail,

- Congés payés sur préavis : 558,20 €,

- Rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire injustifiée : 596,71€ (28 décembre au 5 janvier 2017) Congés payés afférents : 59,67€,

- Indemnité licenciement sans cause réelle et sérieuse (8mois) : 22.330,40 €,

Article L.1235-3 du Code du travail,

- Dommages et intérêt pour préjudice moral : 5.000,00 € Article 1240 du Code civil ;

lesdites sommes avec intérêts au taux légal à compter du jour de la demande ;

- ORDONNER la remise de l'attestation Pôle emploi, solde de tout compte et certificat de travail conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document ;

- CONDAMNER la société GREEN ENVIRONNEMENT à payer à Madame [L] [F], la somme de 2.500,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- LA CONDAMNER enfin aux entiers dépens.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 04 janvier 2022.



Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément fait référence aux conclusions sus visées.



Les parties, présentes à l'audience, ont été informées que l'affaire était mise en délibéré et que l'arrêt serait rendu le 20 avril 2022 par mise à disposition au greffe de la cour.



La cour, lors de l'audience de plaidoiries a invité les parties à rencontrer un médiateur. Elles n'ont pas entendu donner suite à la proposition de médiation.




MOTIFS DE LA DÉCISION :



Aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, madame [L] [F] a été licenciée pour les motifs suivants :

- « une récurrence d'erreurs de saisies sur MKGT, logiciel dédié à l'exploitation et à la facturation » : cette récurrence d'erreurs est corroborée par de nombreux mails adressés à Madame [L] [F] et dans lesquels ses supérieurs lui faisaient part des erreurs constatées dans ses saisies ;

- une absence de réponse aux mails de demandes d'explications, lorsqu'il était relevé des négligences ;

- l'absence de transmission d'un tableau ; - la planification de collecte auprès d'un client qui ne payait pas ses factures et dont le compte était par conséquent bloqué ;

- l'utilisation détournée du compte « Green divers » pour permettre à des clients ne payant pas les factures de décharger, malgré tout, leurs déchets ;

- « une récurrence d'erreurs de saisie des éléments de paie et de retards dans l'exécution de vos missions ['] entrainant des erreurs de paie plus ou moins importantes et pénalisant les salariés financièrement ».



L'article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié. Aux termes de l'article L.1232-1 du même code, le licenciement par l'employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.



Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise.



Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.



Force est de constater que l'ensemble des griefs reprochés à la salariée , présente dans l'entreprise depuis 7 ans et sans passé disciplinaire, relèvent , en l'absence de volonté délibéré de mal faire établie, de l'insuffisance professionnelle et qui n'empêchaient pas, en toute hypothèse, l'exécution du préavis.



Si l'appréciation des aptitudes professionnelles à l'emploi incombe à l'employeur, l'insuffisance professionnelle et l'insuffisance de résultat dés lors qu'elles sont soutenues doivent reposer sur des éléments concrets et des griefs suffisamment pertinents pour justifier le licenciement .



Le jugement sera confirmé, les premiers juges ayant fait, par ailleurs, une exacte appréciation du préjudice subi par la salariée qui n'établit pas l'existence d'un préjudice moral distinct indemnisable.



Il n'apparaît pas équitable que madame [L] [F] conserve la charge de ses frais irrépétibles.



PAR CES MOTIFS :



La Cour statuant par mise à disposition et contradictoirement,



Confirme le jugement défér dans toutes ses dispositions ;



Condamne la société GREEN RECUPERATION à payer à madame [L] [F] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;



Condamne la société GREEN RECUPERATION aux dépens d'appel.



LA GREFFI'RE LE PR''SIDENT

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