21 avril 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-17.038

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00527

Texte de la décision

SOC.

ZB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 avril 2022




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 527 F-D

Pourvoi n° G 20-17.038



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 AVRIL 2022

1°/ M. [P] [T], domicilié [Adresse 8],

2°/ l'union locale CGT d'[Localité 3], dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° G 20-17.038 contre l'arrêt rendu le 27 février 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-5), dans le litige les opposant à la société Transgourmet opérations, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La société Transgourmet opérations a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [T] et l'union locale CGT d'[Localité 3], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Transgourmet opérations, après débats en l'audience publique du 9 mars 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 février 2020), M. [T], salarié de la société Transgourmet opérations (la société), affecté au sein de l'établissement de [Localité 9], exerce plusieurs mandats électifs et syndicaux, soit, à l'époque des faits, ceux de membre du comité d'entreprise, membre du comité central d'entreprise et délégué syndical central suppléant.

2. Le 7 avril 2014, le salarié a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir le paiement d'un rappel de salaire au titre de son temps de déplacement pour se rendre aux réunions du comité central d'entreprise en région parisienne organisées par l'employeur et de la part excédant le temps normal de déplacement entre son domicile et son lieu de travail habituel, ainsi que de dommages-intérêts, notamment à titre de discrimination syndicale. L'union locale CGT d'[Localité 3] (l'union locale) est intervenue volontairement à l'instance et a demandé le paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal, ci-après annexé


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le moyen du pourvoi incident, dont l'examen est préalable

Enoncé du moyen

4. La société fait grief à l'arrêt de déclarer fondée la demande d'indemnisation du temps de déplacement aux réunions convoquées par la société et de la condamner à payer au salarié certaines sommes à titre de rappels de salaire à ce titre, alors :

« 1°/ que le temps de déplacement professionnel qui ne coïncide pas avec l'horaire de travail et dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail peut faire l'objet d'une contrepartie sous forme de repos ; qu'en refusant en l'espèce de faire application de cette règle à un représentant du personnel, pour exclure qu'il ait pu être rempli de son droit à compensation au titre de temps de trajet effectué pour l'exercice de son mandat par l'octroi d'un repos compensateur, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-4 du code du travail et l'article L. 2325-9 devenu L. 2315-12 du code du travail ;

2°/ à tout le moins que le temps de trajet effectué en exécution de mandats de représentant du personnel ne doit être rémunéré comme du temps de travail effectif que s'il est pris en dehors de l'horaire normal de travail et pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail ; qu'en l'espèce, le salarié sollicitait, au titre de l'indemnisation des temps de trajet réalisés les jours où il devait se rendre en région parisienne depuis [Localité 4] pour les besoins de l'exercice de ses mandats représentatifs, le paiement de sept heures de trajet, en sus de la rémunération de sept heures de travail qui lui était versée pour ces journées; que l'employeur contestait le bien-fondé de cette demande en faisant valoir, notamment, que les réunions duraient habituellement bien moins de sept heures, si bien que le salarié n'avait pas à partir systématiquement à 5 h 45 pour prendre l'avion à 7 heures ni à reprendre l'avion à 18 h, les liaisons aériennes [Localité 6]-[Localité 4] étant très fréquentes ; qu'en faisant droit à la demande du salarié pour un total de 11 206,94 euros (2 574,80 + 8 632,14), sans constater que l'intégralité des temps de trajet correspondants avait été réalisés en dehors de l'horaire normal de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé, ensemble l'article L. 2325-9 devenu L. 2315-12 du code du travail ;

3°/ qu'il incombe au représentant du personnel, qui sollicite l'indemnisation d'un temps de trajet réalisé en dehors de l'horaire normal de travail, de rapporter la preuve de son droit, et donc de prouver la réalisation de trajets en dehors de ses horaires normaux de travail ; qu'en faisant droit aux demandes du salarié au prétexte que la société Transgourmet ne satisfaisait pas à son offre probatoire et ne prouvait pas le paiement du salaire, sans constater qu'au préalable le salarié avait prouvé avoir réalisé des trajets en dehors de ses horaires habituels, la cour d'appel a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil ;

4°/ subsidiairement, que la cour d'appel a retenu que la demande d'indemnisation du temps de déplacement aux réunions convoquées par la société Transgourmet opérations formées par M. [T] était fondée en son principe et "pour partie justifiée en son quantum" après avoir constaté que l'employeur reconnaissait à titre subsidiaire le bien-fondé de la demande du salarié à hauteur de 8 632,14 euros ; qu'en faisant droit à la demande du salarié non seulement à hauteur de cette somme, mais en confirmant en outre le jugement en ce qu'il avait alloué au salarié la somme de 2 574,80 euros, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 2325-9 devenu L. 2315-12 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article L. 2325-9 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, alors applicable, le temps passé aux séances du comité par les représentants syndicaux au comité d'entreprise est rémunéré comme temps de travail.

6. Il en résulte que le représentant syndical au comité d'entreprise ne devant subir aucune perte de rémunération en raison de l'exercice de son mandat, le temps de trajet, pris en dehors de l'horaire normal de travail et effectué en exécution des fonctions représentatives, doit être rémunéré comme du temps de travail effectif pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail.

7. La cour d'appel, qui a constaté que le salarié, en exécution de ses fonctions de délégué syndical, s'était rendu aux réunions du comité central d'entreprise dans la région parisienne, organisées à l'initiative de l'employeur, en a déduit à bon droit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérantes et sans inverser la charge de la preuve, que le salarié était fondé à réclamer la rémunération de son temps de trajet effectué pendant et hors l'horaire normal de travail, pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail, et a souverainement évalué le rappel de salaire dû à ce titre.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le deuxième moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

9. Le salarié et l'union locale font grief à l'arrêt de débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale, alors :

« 1°/ que l'octroi d'avantages particuliers à certains salariés n'est pas discriminatoire que si tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique en bénéficient et si les critères déterminant l'attribution de cet avantage sont préalablement définis et contrôlables ; que l'exposant faisait valoir qu'il n'avait pas été rémunéré des temps de déplacement pour assister aux réunions organisées par l'employeur, contrairement à deux autres de ses collègues ; qu'en jugeant non pertinente la comparaison motif pris que la localisation géographique différait, alors que l'avantage était dû quel que soit le site de l'entreprise où travaille le salarié, la cour d'appel a statué par des motifs tout aussi erronés qu'inopérants, et violé les articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail, ensemble les articles 1.1 et 1.2 de l'accord de droit syndical du 12 juin 2006 ;

2°/ que l'octroi d'avantages particuliers à certains salariés n'est pas discriminatoire que si tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique en bénéficient et si les critères déterminant l'attribution de cet avantage sont préalablement définis et contrôlables ; que la cour d'appel a considéré que le fait que M. [X], syndiqué FO, et que M. [W], syndiqué CGT, perçoivent le remboursement de ces temps de transport n'était pas suffisant à laisser supposer l'existence d'une discrimination, motif pris que M. [W] appartenait au même syndicat que l'exposant ; qu'en statuant ainsi, alors que la comparaison avec M. [X], placé dans une situation identique au regard de l'avantage octroyé, suffisait à laisser présumer l'existence d'une discrimination, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, en violation des articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail dans leur version applicable en la cause, ensemble les articles 1.1 et 1.2 de l'accord de droit syndical du 12 juin 2006. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1132-1 et L. 2141-5, dans leur rédaction applicable en la cause, et L. 1134-1 du code du travail :

10. En application du dernier des textes susvisés, lorsque le salarié présente plusieurs éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

11. Pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale, l'arrêt, après avoir relevé que le salarié invoque une discrimination syndicale caractérisée par le défaut de paiement des temps de déplacement des seuls salariés syndiqués de l'union locale tandis que MM. [X] et [W] sont indemnisés en totalité de leurs temps de déplacement, retient que si M. [X], salarié du site de [Localité 7] de la société, syndiqué FO, et M. [W], salarié de la société Transgourmet opérations, syndiqué CGT, attestent avoir été indemnisés de tous leurs temps de déplacement sans aucune difficulté, ces éléments de comparaison ne sont pas pertinents pour apprécier le comportement discriminatoire de la société en ce qui concerne les salariés du site de [Localité 9], ces derniers étant dans une situation différente en raison de la localisation géographique de ce site. L'arrêt en déduit que ces éléments sont à eux seuls insuffisants pour laisser supposer l'existence d'une discrimination dès lors que M. [W] est adhérent du syndicat CGT.

12. En statuant ainsi, alors, d'une part, que M. [X] auquel se comparaît le salarié était placé dans une situation identique à la sienne au regard de la nécessité pour chacun d'eux, en leur qualité de représentant du personnel, de se rendre aux réunions organisées par l'employeur, peu important la localisation de leur établissement d'affectation respectif, d'autre part, que la différence de traitement qu'elle avait constatée entre M. [X], délégué syndical FO, et M. [T], délégué syndical CGT, relative à l'indemnisation de leur temps de trajet, laissait présumer l'existence d'une discrimination syndicale subie par le second, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le troisième moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

13. Le salarié et l'union locale font grief à l'arrêt de débouter l'union locale de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession, alors « que la discrimination syndicale cause nécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession ; que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen s'étendra au chef de dispositif ici querellé, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

14. La cassation prononcée sur le deuxième moyen du pourvoi principal entraîne la cassation, par voie de conséquence, des dispositions de l'arrêt déboutant l'union locale de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal, la Cour :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [T] de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale et en ce qu'il déboute l'union locale CGT d'[Localité 3] de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession, l'arrêt rendu le 27 février 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne la société Transgourmet opérations aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Transgourmet opérations et la condamne à payer à M. [T] et à l'union locale CGT d'[Localité 3] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un avril deux mille vingt-deux.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [T] et l'union locale CGT d'[Localité 3], demandeurs au pourvoi principal.


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour violation de l'accord d'entreprise du 12 juin 2006.

AUX MOTIFS propres QUE selon cet accord, une journée de repos est accordée à tous les participants des délégations syndicales. Cette journée, devra être prise h lendemain ou le premier jour ouvré suivant la journée de réunion. Le temps passé aux réunions avec la direction ainsi que le temps passé en transport stricto sensu sont payés comme temps de travail à l'échéance normale. ; que l'accord d'entreprise du 12 juin 2006 ne dit pas expressément que le temps de trajet domicile lieu de réunion doit être Intégralement pris en charge mais dit qu'il s'apprécie « stricto sensu » ; que ce n'est que par avenants du 7 février 2014, 16 janvier 2017, et finalement du 16 mars 2017, que cet accord initial a été remplacé par la disposition suivante : Le temps de trajet effectué en exécution du mandat pour se rendre aux réunions de négociation organisées par la direction est également, rémunéré comme du temps de travail effectif déduction faite du temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail. par la disposition suivante afin de le mettre notamment en adéquation avec l'évolution de la jurisprudence en matière de traitement des temps de déplacement des membres des délégations syndicales participant aux réunions de négociation et des commissions de suivi des accords (...) ; que la société Transgourmet Opérations est fondée à soutenir, qu'elle n'a pas violé l'accord initial d'entreprise en décomptant le temps de réunion lorsque celui-ci était inférieur à 7 heures compte tenu des strictes dispositions de cet accord ; qu'il s'ensuit que la demande en paiement de dommages-intérêts pour violation de l'accord d'entreprise du 12 juin 2006 n'est pas fondée, ce qu'a exactement retenu le conseil de prud'hommes ;

AUX MOTIFS partiellement adoptés QUE Monsieur [P] [T] n'apporte pas la preuve que la société TRANSGOURMET OPÉRATIONS a violé l'accord d'entreprise signé par les partenaires sociaux en juin 2006 ; que Monsieur [P] [T] n'apporte pas la preuve que les accords sur le règlement intérieur du CCE qui entérine le paiement de 4 h en sus de la journée de récupération, n'ont pas été tenus ; que l'article L.3121-4 du Code du Travail est respecté par la société TRANSGOURMET OPÉRATIONS article mentionnant que la part de déplacement professionnel coïncidant avec l'horaire de travail ne peut entraîner de perte de salaire ; que l'accord de TRANSGOURMET OPÉRATIONS de 2006 accorde 7 heures plus 7 de récupération et l'accord de 2013, 4 heures de plus soit 18 heures pour compenser une journée de Monsieur [P] [T] en réunion à [Localité 6] pouvant aller jusqu'à 11h45 ; que les revendications de Monsieur [P] [T] concernent la période 2009 à 2013 ; qu'à l'audience de jugement du 19 novembre 2015, le Conseil a demandé à la société TRANSGOURMET de lui transmettre pour le 15 décembre 2015 les comptes rendus des réunions d'[Localité 5] et de [Localité 10] pour les périodes 2009 à 2013, et que cette demande est restée sans réponse à la date du délibéré ; que le Conseil considère que les demandes de dommages et intérêts pour non-paiement de salaire et pour violation de l'accord d'entreprise sont injustifiés tant sur le principe que sur le quantum.

1° ALORS QUE selon l'article 1.2 de l'accord sur le droit syndical en date du 12 juin 2006, le temps passé aux réunions avec la direction ainsi que le temps passé en transport stricto sensu sont payés comme temps de travail à l'échéance normale ; qu'il en résulte que lorsqu'ils sont pris en dehors de l'horaire habituel de travail, les temps de trajet pour se rendre aux réunions avec la direction et en revenir doivent être rémunérés comme du temps de travail effectif pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail ; que l'exposant sollicitait sur ce fondement le paiement des temps de transport afférents aux réunions organisées à l'initiative de l'employeur ; qu'en jugeant que ce dernier n'avait pas violé l'accord collectif susvisé en décomptant le temps de réunion lorsque celui-ci était inférieur à 7 heures, quand la demande était afférente aux temps de trajets et non de réunion, la cour d'appel a statué par des motifs tout aussi erronés qu'inopérants, en violation des articles L.2143-17, L.2315-3, L.2325-7, L. 2142-1-3, L. 2251-1 et L. 3121-4 du code du travail et de l'article 1134 du code civil dans sa version applicable aux faits de la cause antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 1.2 de l'accord sur le droit syndical en date du 12 juin 2006.

2° ALORS QUE selon l'article 1.2 de l'accord sur le droit syndical en date du 12 juin 2006, le temps passé aux réunions avec la direction ainsi que le temps passé en transport stricto sensu sont payés comme temps de travail à l'échéance normale ; qu'il en résulte que lorsqu'ils sont pris en dehors de l'horaire habituel de travail, les temps de trajet pour se rendre aux réunions avec la direction et en revenir doivent être rémunérés comme du temps de travail effectif pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail ; qu'en jugeant que l'employeur n'a pas méconnu ledit accord quand elle a jugé la demande d'indemnisation du temps de déplacement fondée en son principe, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé les articles L.2143-17, L.2315-3, L.2325-7, L.2142-1-3, L.2251-1 et L.3121-4 du code du travail et de l'article 1134 du code civil dans sa version applicable aux faits de la cause antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 1.2 de l'accord sur le droit syndical en date du 12 juin 2006.

3° ALORS QUE l'article 1.1 dernier alinéa de l'accord sur le droit syndical en date du 12 juin 2006 accorde à tous les participants des délégations syndicales aux négociations d'entreprise une journée de repos à prendre le premier jour ouvré suivant la réunion ; que l'article 1.2 de l'accord dispose que le temps passé aux réunions avec la direction ainsi que le temps passé en transport stricto sensu sont payés comme temps de travail à l'échéance normale ; que l'accord ne spécifie aucunement que la journée de repos octroyée à l'article 1.1 est destinée à compenser les dépassements de temps de trajet des représentants des salariés participant aux réunions de négociation ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1.1. et 1.2. de l'accord sur le droit syndical en date du 12 juin 2006, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa version applicable aux faits de la cause antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale.

AUX MOTIFS propres QUE M. [T] fait grief au jugement déféré de le débouter de sa demande en invoquant essentiellement le fait que la société ne réserve pas le même sort à tous ses salariés investis de mandats et qu'elle discrimine les représentants du syndicat GGT ; que la discrimination serait caractérisée par le défaut de paiement des temps de déplacement des seuls salariés syndiqués de l'Union locale CGT pendant que d'autres salariés, en particulier Messieurs [X] et [W] sont indemnisés en totalité pour lesdits temps de déplacement ; que [G] [X], chauffeur livreur salarié du site de [Localité 7] de la société Transgourmet Opérations, syndiqué F.O, ainsi [Z] [W], exploitant transport collaborateur de la société appartenant également à la société Transgourmet Opérations, syndiqué CGT attestent avoir été indemnisés de tous leurs temps de déplacement sans aucune difficulté ; que ces éléments de comparaison ne sont toutefois pas pertinents pour apprécier le comportement discriminatoire de la société Transgourmet Opérations en ce qui concerne les salariés du site de [Localité 9] qui sont dans une situation différente ne serait-ce que par sa localisation géographique ; que par ailleurs ces éléments sont à eux seuls insuffisants pour laisser supposer l'existence d'une discrimination alors même que M. [W] est adhérent du syndicat CGT ; que c'est donc par une exacte appréciation des éléments de la cause que le conseil de prud'hommes n'a pas fait droit à la demande.

AUX MOTIFS adoptés QUE les éléments apportés par Monsieur [P] [T], pour venir conforter une discrimination syndicale, sont injustifiés puisque les personnes incriminées et appartenant à d'autres sites sont soit du même syndicat que Monsieur [P] [T] (CGT), soit dans des situations de déplacement complètement différentes (ligne desservant la Bretagne et ligne desservant [Localité 4] à [Localité 6]).

1° ALORS QUE l'octroi d'avantages particuliers à certains salariés n'est pas discriminatoire que si tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique en bénéficient et si les critères déterminant l'attribution de cet avantage sont préalablement définis et contrôlables ; que l'exposant faisait valoir qu'il n'avait pas été rémunéré des temps de déplacement pour assister aux réunions organisées par l'employeur, contrairement à deux autres de ses collègues ; qu'en jugeant non pertinente la comparaison motif pris que la localisation géographique différait, alors que l'avantage était dû quel que soit le site de l'entreprise où travaille le salarié, la cour d'appel a statué par des motifs tout aussi erronés qu'inopérants, et violé les articles L.1132-1 et L.2141-5 du code du travail, ensemble les articles 1.1 et 1.2 de l'accord de droit syndical du 12 juin 2006.

2° ALORS QUE l'octroi d'avantages particuliers à certains salariés n'est pas discriminatoire que si tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique en bénéficient et si les critères déterminant l'attribution de cet avantage sont préalablement définis et contrôlables ; que la cour d'appel a considéré que le fait que Monsieur [X], syndiqué FO, et que Monsieur [W], syndiqué CGT, perçoivent le remboursement de ces temps de transport n'était pas suffisant à laisser supposer l'existence d'une discrimination, motif pris Monsieur [W] appartenait au même syndicat que l'exposant ; qu'en statuant ainsi, alors que la comparaison avec Monsieur [X], placé dans une situation identique au regard de l'avantage octroyé, suffisait à laisser présumer l'existence d'une discrimination, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, en violation des articles L.1132-1 et L.2141-5 du code du travail dans leur version applicable en la cause, ensemble les articles 1.1 et 1.2 de l'accord de droit syndical du 12 juin 2006.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le syndicat de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession.

AUX MOTIFS propres QUE la cour n' a pas reconnu la discrimination syndicale, ni la violation de l'accord d'entreprise du 12 juin 2006 ; que l'Union locale CGT ne caractérise pas son préjudice en se référant, pour démontrer un comportement irrégulier de la société Transgourmet Opérations allant â l'encontre du dialogue social et un traitement particulier réservé au syndicat concerné, à. un unique courrier qu'elle a adressé à M. [B] le 4 février 2015, et qui évoque en termes vagues et généraux une « remise en cause des droits élémentaires des délégués du personnel et du comité d'entreprise », sans faire mention ni du défaut l'indemnisation des temps de déplacement ni de la violation des accords d'entreprises, ni de la discrimination syndicale des salariés concernés ; qu'en l'absence de caractérisation du traitement particulier réservé à l'organisation syndicale au sein de l'établissement de [Localité 9] portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'elle représente, l'Union locale CGT sera déboutée de sa demande ;

AUX MOTIFS adoptés QU'il en va de même pour la demande de dommages et intérêts à payer à l'Union Locale CGT.

1° ALORS QUE le non-paiement des temps de trajets afférents aux réunions des représentants du personnel cause un préjudice direct au syndicat auquel le salarié investi de mandat appartient ; qu'en jugeant que le préjudice n'était pas caractérisé, au motif que le syndicat s'était référé à un unique courrier évoquant une remise en cause des droits élémentaires des représentants du personnel, sans mention du défaut d'indemnisation des temps de déplacement, quand elle a reconnu la demande de paiement de ces temps bien fondée en son principe, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les articles L.2131-1 et L.2132-3 du code du travail.

2° ALORS QUE la violation d'une convention ou d'un accord collectif de travail, même non étendu, cause nécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen s'étendra au chef de dispositif ici querellé, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

3° ALORS QUE la discrimination syndicale cause nécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession ; que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen s'étendra au chef de dispositif ici querellé, en application de l'article 624 du code de procédure civile







Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Transgourmet opérations, demanderesse au pourvoi incident.

La société Transgourmet opérations fait grief à la décision attaquée d'AVOIR déclaré fondée la demande d'indemnisation du temps de déplacement aux réunions convoquées par la société Transgourmet opérations, d'AVOIR condamné la société Transgourmet opérations à payer à Monsieur [P] [T] la somme de 8 632,14 euros à titre de frais de déplacement entre mai 2009 et décembre 2018 outre celle de 863,21 euros de congés payés y afférents, et d'AVOIR confirmé le jugement ses dispositions condamnant la société Transgourmet opérations à payer à Monsieur [P] [T] la somme de 2 574,80 euros à titre de rappel de salaire outre 257,48 euros pour les congés payés afférents,

1) ALORS QUE le temps de déplacement professionnel qui ne coïncide pas avec l'horaire de travail et dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail peut faire l'objet d'une contrepartie sous forme de repos ; qu'en refusant en l'espèce de faire application de cette règle à un représentant du personnel, pour exclure qu'il ait pu être rempli de son droit à compensation au titre de temps de trajet effectués pour l'exercice de son mandat par l'octroi d'un repos compensateur (arrêt page 6, § 1 des motifs), la cour d'appel a violé l'article L.3121-4 du code du travail et l'article L. 2325-9 devenu L. 2315-12 du code du travail ;

2) ALORS à tout le moins QUE le temps de trajet effectué en exécution de mandats de représentant du personnel ne doit être rémunéré comme du temps de travail effectif que s'il est pris en dehors de l'horaire normal de travail et pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail ; qu'en l'espèce, le salarié sollicitait, au titre de l'indemnisation des temps de trajet réalisés les jours où il devait de rendre en région parisienne depuis [Localité 4] pour les besoins de l'exercice de ses mandats représentatifs, le paiement de sept heures de trajet, en sus de la rémunération de sept heures de travail qui lui était versée pour ces journées ; que l'employeur contestait le bien-fondé de cette demande en faisant valoir, notamment, que les réunions duraient habituellement bien moins de sept heures, si bien que le salarié n'avait pas à partir systématiquement à 5 h 45 pour prendre l'avion à 7 heures ni à reprendre l'avion à 18 h, les liaisons aériennes [Localité 6]-[Localité 4] étant très fréquentes (conclusions page 18) ; qu'en faisant droit à la demande du salarié pour un total de 11 206,94 euros (2 574,80 + 8 632,14), sans constater que l'intégralité des temps de trajet correspondant avait été réalisée en dehors de l'horaire normal de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé, ensemble l'article L. 2325-9 devenu L. 2315-12 du code du travail ;

3) ALORS QU'il incombe au représentant du personnel, qui sollicite l'indemnisation d'un temps de trajet réalisé en dehors de l'horaire normal de travail, de rapporter la preuve de son droit, et donc de prouver la réalisation de trajets en dehors de ses horaires normaux de travail ; qu'en faisait droit aux demandes du salarié au prétexte que la société Transgourmet ne satisfaisait pas à son offre probatoire et ne prouvait pas le paiement du salaire (arrêt attaqué page 7§ 4 à 6), sans constater qu'au préalable le salarié avait prouvé avoir réalisé des trajets en dehors de ses horaires habituels, la cour d'appel a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil ;

4) ALORS, subsidiairement, QUE la cour d'appel a retenu que la demande d'indemnisation du temps de déplacement aux réunions convoquées par la société Transgourmet opérations formée par M. [T] était fondée en son principe et « pour partie justifiée en son quantum » après avoir constaté que l'employeur reconnaissait à titre subsidiaire le bien-fondé de la demande du salarié à hauteur de 8 632,14 euros (arrêt page 7, § 6 et 7) ; qu'en faisant droit à la demande du salarié non seulement à hauteur de cette somme, mais en confirmant en outre le jugement en ce qu'il avait alloué au salarié la somme de 2 574,80 euros, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 2325-9 devenu L. 2315-12 du code du travail

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