21 avril 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-22.379

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00514

Texte de la décision

SOC.

CDS



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 avril 2022




Cassation partielle


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 514 F-D

Pourvoi n° P 20-22.379




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 AVRIL 2022

M. [L] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 20-22.379 contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Ooblada, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], en liquidation judiciaire,

2°/ à la société BDR et associés, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], prise en la personne de M. [W] [B], en qualité de liquitateur judiciaire de la société Ooblada, venant aux droits de la SCP [B]-Daudé, mandataire au redressement judiciaire de la société Ooblada,

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Carillon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [F], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société BDR et associés, ès qualités, après débats en l'audience publique du 8 mars 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Carillon, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Intervention

1. Il est donné acte à la société BDR et associés, agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ooblada, de son intervention.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 septembre 2020), M. [F] a été engagé par la société Ooblada le 15 octobre 2007, en qualité de secrétaire général.

3. Convoqué le 19 juin 2012 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 3 juillet suivant et mis à pied à titre conservatoire, il a été licencié pour faute lourde par lettre du 23 juillet 2012.

4. Il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement, notamment, de diverses indemnités au titre de la rupture contractuelle, à titre de rappels de salaires et de rémunération de la clause de non-concurrence.

5. Par jugement du 26 novembre 2020, la société Ooblada a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, convertie, le 6 août 2021, en liquidation judiciaire, la société BDR et associés étant désignée en qualité de liquidateur.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés


6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

7. Le salarié fait grief à l'arrêt de condamner l'employeur à lui verser la seule somme de 5 000 euros au titre de la clause de non-concurrence, alors « qu'en toute hypothèse que, en retenant, pour dire que M. [F] était seulement fondé à obtenir la somme de 5 000 euros au titre de la clause de non-concurrence qu'il ne justifiait pas avoir respecté l'intégralité de la clause, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1315 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

8. Il résulte de ces textes qu'il incombe à l'employeur qui se prétend libéré du versement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, de prouver que le salarié n'a pas respecté cette clause.

9. Pour limiter le montant de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, l'arrêt, après avoir constaté que le salarié est fondé à solliciter l'application de la clause de non-concurrence, retient qu'il ne justifie toutefois pas qu'ait été respectée l'intégralité des termes de la clause de non-concurrence.

10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Ooblada à payer à M. [F] la somme de 5 000 euros au titre de la clause de non-concurrence, l'arrêt rendu le 30 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société BDR et associés, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Ooblada, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BDR et associés, ès qualités, et la condamne, ès qualités, à payer à M. [F] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un avril deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [F]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Monsieur [L] [F] fait grief à l'arrêt attaqué, de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse, en conséquence, que la Société OOBLADA soit condamnée à lui verser diverses sommes au titre de rappel de salaires sur la période de mise à pied, outre les congés payés afférents, à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, à titre d'indemnité de licenciement, d'indemnité de congés payés, d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à ce que la Société OOBLADA soit condamnée à lui verser diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral du fait de la violation de sa vie privée et au titre du préjudice moral du fait des circonstances vexatoires ayant entouré la rupture du contrat de travail ;

1) ALORS QUE, dans ses écritures, M. [F] avait soutenu que les preuves sur lesquelles son licenciement était fondé étaient irrecevables car obtenues au prix d'un stratagème mis en place par son employeur dès lors que d'abord, ce dernier l'avait invité à déjeuner à l'extérieur pour en profiter pour subtiliser son disque dur personnel et transférer les données de ce dernier sur son ordinateur professionnel, ensuite, l'avait immédiatement mis à pied après ce transfert par lettre remise en mains propres au restaurant sans lui restituer son disque dur personnel et sans qu'il puisse à nouveau accéder à son bureau, ce qui avait privé M. [F] de toute possibilité d'établir que ses données personnelles avaient été transférées sur son ordinateur professionnel ; qu'en retenant, pour dire que les preuves apportées par l'employeur étaient recevables, que M. [F] ne prouvait pas que l'employeur avait transféré sur son ordinateur professionnel des données contenues sur son disque dur externe personnel, la cour d'appel, qui a reproché à M. [F] de ne pas avoir établi une preuve impossible à rapporter, a violé l'article 1315 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur ;

2) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, dans ses écritures, M. [F] avait soutenu que les preuves sur lesquelles le licenciement était fondé étaient irrecevables car obtenues au prix d'un stratagème mis en place par son employeur dès lors que d'abord, ce dernier l'avait invité à déjeuner à l'extérieur pour en profiter pour subtiliser son disque dur personnel et transférer les données de ce dernier sur son ordinateur professionnel, ensuite, l'avait immédiatement mis à pied après ce transfert par courrier remis en main propres au restaurant, sans lui restituer son disque dur personnel et sans qu'il puisse à nouveau accéder à son bureau, ce qui avait privé M. [F] de toute possibilité d'établir que ses données personnelles avaient été transférées sur son ordinateur professionnel ; qu'en se bornant à affirmer que M. [F] ne rapportait pas la preuve de ce que son employeur avait transféré sur son ordinateur professionnel, les données de son disque dur personnel, sans rechercher ni préciser si, au vu des circonstances du licenciement, M. [F] était en mesure de rapporter une telle preuve et ce faisant, s'il n'appartenait pas à l'employeur, qui seul détenait les éléments de preuves, de démontrer que les données figuraient dès l'origine dans l'ordinateur professionnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Monsieur [L] [F] fait grief à l'arrêt attaqué, de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse, en conséquence, que la Société OOBLADA soit condamnée à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaires sur la période de mise à pied, outre les congés payés afférents, à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, à titre d'indemnité de licenciement, d'indemnité de congés payés, d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à ce que la Société OOBLADA soit condamnée à lui verser diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral du fait de la violation de sa vie privée et au titre du préjudice moral du fait des circonstances vexatoires ayant entouré la rupture du contrat de travail ;

1) ALORS QUE, par application de l'article 624 du code de procédure civile, la censure, qui ne manquera pas d'intervenir du chef du premier moyen, emportera la censure de l'arrêt en ce qu'il a débouté M. [F] de sa demande tendant à ce que son licenciement soit jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse et de ses demandes subséquentes ;

2) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE, dans ses écritures et pièces à l'appui, M. [F] avait soutenu et démontré que la cause déterminante de son licenciement était d'ordre économique dès lors que la Société OOBLADA était placée dans une situation financière particulièrement délicate et qu'elle avait dès lors tout mis en oeuvre pour se séparer de lui sans frais ; qu'en se bornant à se prononcer sur le bien-fondé de la prétendue faute lourde, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, quelle avait été la cause déterminante du licenciement de M. [F], et notamment si la véritable cause du licenciement n'était pas de nature économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Monsieur [L] [F] fait grief à l'arrêt d'AVOIR condamné la Société OOBLADA à lui verser la seule somme de 5 000 euros au titre de la clause de non-concurrence ;

1) ALORS QUE, la cassation à intervenir du chef du premier moyen emportera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a condamné la Société OOBLADA à lui verser la seule somme de 5 000 euros au titre de la clause de non-concurrence ;

2) ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE, en retenant, pour dire que M. [F] était seulement fondé à obtenir la somme de 5 000 euros au titre de la clause de non-concurrence qu'il ne justifiait pas avoir respecté l'intégralité de la clause, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction alors en vigueur.

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