19 avril 2022
Cour d'appel de Versailles
RG n° 21/07176

13e chambre

Texte de la décision

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 4DC



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 AVRIL 2022



N° RG 21/07176

N° Portalis

DBV3-V-B7F-U3XR



AFFAIRE :



Me [P] [L]



C/



Me [Z] [K]

....







Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 04 Novembre 2021 par le Juge de la mise en état du TJ de NANTERRE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 20/05497



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Martine DUPUIS



Me Thomas LEMARIÉ



Juge de la mise en état du TJ de NANTERRE



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :



Maître [P] [L] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SELARL CABINET [S] AVOCATS

[Adresse 3] CS 60013

[Localité 7]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 2167560



APPELANT



****************





Maître [Z] [K] ès qualités d'administrateur provisoire de la SELARL CABINET [S] AVOCATS

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 2167560



S.A.R.L. BSM EXPERTISE représentée par son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentant : Me Thomas LEMARIÉ de l'ASSOCIATION L & P ASSOCIATION D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R241 - N° du dossier D11032



INTIMES



****************





Composition de la cour :



L'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 Mars 2022, Madame Marie-Andrée BAUMANN, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :



Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,



qui en ont délibéré,



Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN



La Société BSM expertise, société d'expertise comptable, a régularisé avec la société Cabinet [S] avocats, dirigée par maître Jacques-Georges Bitoun, avocat au barreau de Paris, une lettre de mission en date du 29 novembre 2010.



Maître [S] étant décédé le [Date décès 1] 2016, un administrateur provisoire a été désigné par le bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris qui a nommé en dernier lieu, par décision du 26 octobre 2017, maître Ismay Marçais.



Par jugement du 12 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a converti la procédure de redressement judiciaire, ouverte par jugement du 10 janvier 2019 à l'égard de la société Cabinet [S] avocats, en liquidation judiciaire et désigné maître [L] en qualité de liquidateur judiciaire.



Par lettre recommandée en date du 11 septembre 2019, le mandataire judiciaire a informé la société BSM expertise que sa créance, mentionnée dans la liste des créanciers à hauteur de 41 040 euros, était discutée en totalité.

Par lettre en date du 8 octobre 2019, la société BSM expertise a maintenu sa demande d'admission au passif à hauteur de 41 040 euros correspondant à ses honoraires pour des diligences effectuées de 2016 à 2019, après déduction d'un règlement de 3 600 euros.



Par ordonnance du 30 juin 2020, le juge-commissaire désigné dans la procédure collective, a constaté, s'agissant de la créance de la société BSM expertise, l'existence d'une contestation ne relevant pas de son pouvoir juridictionnel et invité la société Cabinet [S] avocats à saisir la juridiction compétente dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision et à en justifier auprès du greffe, à peine de forclusion.




Par acte d'huissier du 3 août 2020, maître [L], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Cabinet [S] avocats, a fait assigner la société BSM expertise devant le tribunal judiciaire de Nanterre.



Saisi dans le cadre d'un incident, le juge de la mise en état, par ordonnance contradictoire assortie de l'exécution provisoire du 4 novembre 2021, a :

- donné acte à maître [K] de son intervention volontaire en qualité d'administrateur provisoire de la Selarl Cabinet Bitoun avocats ;

- dit maître [L] irrecevable en ses demandes ;

- débouté la Société BSM expertise de sa demande de dommages et intérêts ;

- condamné maître [L] à verser à la Société BSM expertise une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné maître [L] aux dépens.



Par déclaration du 2 décembre 2021, maître [L], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Cabinet [S] avocats, a interjeté appel de l'ordonnance.



Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 14 février 2022, il demande à la cour de :

- déclarer recevable et fondé son appel ;



Y faisant droit

- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle :

* l'a dit irrecevable en ses demandes ;

* l'a condamné à verser à la société BSM expertise une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

* l'a condamné aux dépens ;

- confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a débouté la société BSM expertise de sa demande de dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

- dire que les demandes de la Société BSM expertise formées devant le juge de la mise en état ne constituaient pas des prétentions et dire la société BSM expertise irrecevable en ses demandes ;

- en conséquence, débouter la société BSM expertise de l'ensemble de ses demandes ;

En tout état de cause,

- rejeter l'ensemble des prétentions de l'intimée et appelante incidente contenues dans le dispositif de ses conclusions n°1 en cause d'appel et d'appel incident du 10 décembre 2021 en ce qu'elle sont formulées au moyen de « dire et juger » et qu'ainsi elles ne constituent pas des prétentions valables au sens de l'article 4 du code de procédure civile, formulées dans le respect des articles 954 et 908 du code de procédure civile, la cour n'étant dès lors pas valablement saisie ;

- rejeter d'office la prétention formulée pour la première fois en cause d'appel de la société BSM expertise pour le 'dire et juger irrecevable comme forclos en ses demandes', cette dernière étant irrecevable ;

- le déclarer recevable en ses demandes et renvoyer le dossier devant le tribunal judiciaire de Nanterre pour conclusions au fond de la société BSM expertise ;

- condamner la société BSM expertise à lui régler la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société BSM expertise aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Selarl Lexavoué Paris-Versailles, agissant par maître Martine Dupuis, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.



Maître [K], ès qualités, dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 14 février 2022, qui demande à la cour de déclarer recevable et fondé l'appel formé par maître [L], ès qualités, et le déclarer recevable et fondé en son appel incident, formule exactement les mêmes demandes que maître [L], ès qualités.



La Société BSM expertise, dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 13 janvier 2022, demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a :

* donné acte à maître [K] de son intervention volontaire en qualité d'administrateur provisoire de la Selarl Cabinet Bitoun avocats ;

* dit maître [L] irrecevable en ses demandes ;

* condamné maître [L] à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

* condamné maître [L] aux dépens ;

A titre incident,

- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;

Et statuant à nouveau, en tout état de cause,

A titre principal,

- dire et juger maître [L], ès qualités, irrecevable comme forclos en ses demandes ;

Subsidiairement,

- dire et juger maître [L], ès qualités, irrecevable en ses demandes, en ce qu'elles sont contraires à l'admission partielle au passif de la société Cabinet [S] avocats, d'une somme de 10 620 euros ;

- débouter maître [L], ès qualités, de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles ;

- condamner maître [L], ès qualités, à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement des articles 32-1 et 559 du code de procédure civile ;

- condamner maître [L], ès qualités, à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner maître [L], ès qualités, aux entiers dépens de l'instance.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 février 2022.



Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.




SUR CE,



Aucun moyen n'étant soulevé ou susceptible d'être relevé d'office, il convient de déclarer l'appel de maître [L], ès qualités, et l'appel incident de maître [K], agissant en qualité d'administrateur provisoire de la société Cabinet [S] avocats, recevables conformément aux dispositions de l'article 795 du code de procédure civile, s'agissant de l'appel d'une ordonnance du juge de la mise en état statuant sur une fin de non-recevoir dans une instance introduite postérieurement au 1er janvier 2020.



Sur la recevabilité des demandes de la société BSM :



Maître [L], ès qualités, fait valoir que les 'demandes de dire et juger ne sont pas considérées comme étant des prétentions' au sens de l'article 4 du code de procédure civile de sorte que le juge de la mise en état ne pouvait pas statuer sur 'les demandes' de la société BSM et que la cour doit de même rejeter l'ensemble des prétentions de l'intimée formulées au moyen de 'dire et juger'.

Il demande ensuite à la cour de rejeter 'd'office' la prétention de la société BSM, formulée pour la première fois en cause d'appel, tendant à le juger 'irrecevable comme forclos', soulignant que l'intimée n'a pas sollicité la forclusion de son action en première instance de sorte qu'elle est irrecevable en cette demande au regard des articles 564 à 567 du code de procédure civile.



Le mandataire ad hoc de la société débitrice s'associe, dans les mêmes termes, aux demandes du liquidateur judiciaire.



La société BSM expertise, après avoir exposé que la prétention, sans la confondre avec la notion de moyen, doit s'entendre au sens large, soutient qu'il importe, pour les prétentions dont la formulation débute par 'dire et juger', de vérifier si elles se bornent à rappeler un moyen invoqué à l'appui d'une prétention ou s'il s'agit véritablement d'une prétention ; elle prétend qu'il est évident qu'en indiquant, à titre principal et subsidiaire dans ses conclusions de première instance, 'dire et juger maître [L], ès qualités, irrecevable en ses demandes', elle a entendu non pas rappeler un moyen mais élever deux prétentions qui sont des fins de non-recevoir.



Elle ajoute qu'il importe peu qu'elle ait ajouté en appel la forclusion à sa demande d'irrecevabilité dans la mesure où il s'agit de la même prétention, à savoir déclarer le liquidateur judiciaire irrecevable car il n'a pas mis dans la cause le débiteur dans le délai d'un mois à peine de forclusion.

Si la société BSM expertise, tant devant le juge de la mise en état qu'en appel, a introduit les phrases du dispositif de ses conclusions par la locution 'dire et juger', la cour ne doit pas s'attacher uniquement à cette formulation mais au contenu de ce dispositif dont il ressort, sans ambiguïté, qu'elle a saisi la cour non pas d'un moyen mais de prétentions, soutenues à titre principal et subsidiaire, tendant à l'irrecevabilité de maître [L], ès qualités, en ses demandes.



Le fait que la société BSM expertise, qui en première instance a demandé au juge de la mise en état de 'dire et juger maître [L], ès qualités, irrecevable en ses demandes' à titre principal et à titre subsidiaire, ait ajouté dans son dispositif la notion de forclusion en demandant à la cour de déclarer ce dernier 'irrecevable comme forclos', ne constitue pas une demande nouvelle mais simplement l'ajout dans le dispositif du moyen développé à l'appui de cette prétention, étant observé que devant le premier juge, le débat portait déjà sur l'application de l'article R.624-5 du code de commerce et du délai d'un mois qui y est fixé à peine de forclusion.



Par conséquent, la fin de non recevoir soutenue par le liquidateur judiciaire et l'administrateur provisoire de la société débitrice sera écartée.



Sur la recevabilité des demandes de maître [L], ès qualités :



Sur la fin de non-recevoir opposée à titre principal :



Maître [L], ès qualités, après avoir rappelé les dispositions de l'article R.624-5 du code de commerce, soutient que le juge de la mise en état les a violées en surajoutant au texte une condition de délai de procédure qui n'existe pas dans la mesure où ce texte n'impose pas de mettre le débiteur dans la cause dans le délai d'un mois. Il soutient qu'il ne peut pas être considéré comme étant 'irrecevable en ses demandes' dès lors qu'il est par principe une partie essentielle de la procédure collective en application des articles L.622-22 et R.622-20 du code de commerce que le juge de la mise en état a violés. Il fait valoir qu'il a engagé l'action en tant que partie à la procédure, qu'il a assigné la société BSM expertise dans le délai prévu à l'article R.624-5 et que l'administrateur provisoire étant ensuite intervenu, par conclusions du 15 septembre 2021, les parties en cause étaient représentées devant le tribunal, ce qui n'était pas le cas dans l'affaire qui a donné lieu à l'arrêt de la Cour de cassation cité par l'intimée (Com. 5 septembre 2018 n° 17-15.978).

Il ajoute enfin que la forclusion est un mécanisme destiné à être opposé au créancier qui doit en principe engager l'action en cas de contestation sérieuse sur sa créance en assignant le liquidateur et le débiteur en raison de l'indivisibilité des actions en la matière et qu'inverser l'esprit de la loi en déclarant irrecevable le liquidateur et en lui imposant de mettre dans la cause le débiteur dans le délai d'un mois est contraire à l'esprit des textes de la procédure collective.



L'administrateur provisoire de la société débitrice conclut en termes identiques.



La société BSM expertise, au visa également de l'article R.624-5 du code de commerce, souligne qu'en l'espèce, alors que le juge-commissaire a invité la société débitrice à saisir la juridiction compétente, c'est le liquidateur judiciaire, seul, qui l'a saisie alors qu'il n'avait pas la qualité à agir et que la société Cabinet [S] n'a jamais saisi la juridiction compétente dans le délai d'un mois visé par ce texte.

Elle expose qu'aux termes de la jurisprudence précitée de la Cour de cassation, l'instance introduite devant la juridiction compétente sur l'invitation du juge-commissaire s'inscrit dans la procédure de vérification des créances qui est indivisible entre le créancier, le débiteur et le mandataire judiciaire ou le liquidateur de sorte que la partie qui saisit le juge compétent doit mettre en cause devant lui les deux autres parties ; elle en déduit que le liquidateur judiciaire, n'ayant pas assigné le débiteur devant le juge du fond et étant forclos à le faire dès lors que le délai d'action, lequel est préfix, est expiré, son action à son encontre est irrecevable , observant que cette fin de non-recevoir n'est pas susceptible d'être régularisée par l'intervention volontaire de l'administrateur provisoire, le délai de forclusion étant largement dépassé.

Elle ajoute que contrairement à ce que soutient l'appelant, la présente instance n'est pas en faveur du créancier mais au contraire introduite dans l'intérêt du débiteur et du liquidateur puisqu'elle vise à empêcher la fixation de sa créance au passif, que la forclusion est applicable à toutes les parties en cause sans que le liquidateur soit dispensé des règles impératives du droit des procédures collectives et que la société Cabinet [S] avocats, représentée par son administrateur provisoire, disposant d'un droit propre, aurait dû être attraite à la procédure par le liquidateur judiciaire ou prendre elle-même l'initiative d'assigner les deux autres parties.

Elle observe enfin qu'il est inexact de soutenir comme le fait le liquidateur judiciaire que toutes les parties en cause étaient représentées devant le tribunal dans la mesure où la société Cabinet [S] avocats, débitrice, n'est pas la même partie que maître [K], administrateur provisoire qui la représente légalement.



Conformément à l'article R.624-5 du code de commerce, lorsque le juge-commissaire se déclare incompétent ou constate l'existence d'une contestation sérieuse, il renvoie, par ordonnance spécialement motivée, les parties à mieux se pourvoir et invite, selon le cas, le créancier, le débiteur ou le mandataire judiciaire à saisir la juridiction compétente dans un délai d'un mois à compter de la notification ou de la réception de l'avis délivré à cette fin, à peine de forclusion.



Le juge-commissaire, dans son ordonnance du 16 juin 2020 statuant sur la contestation dont il était saisi à propos de la créance de la société BSM expertise, a constaté que celle-ci ne relevait pas de son pouvoir juridictionnel et a invité la société Cabinet [S] avocats à saisir la juridiction compétente dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision et à en justifier auprès du greffe, à peine de forclusion.



S'il est constant que l'assignation devant le tribunal, saisi pour statuer au fond sur la créance de la société BSM expertise, n'a pas été délivrée à l'initiative de la société Cabinet [S] avocats, représentée par son administrateur provisoire, mais par son liquidateur judiciaire, la qualité de ce dernier à agir dans l'intérêt de la société débitrice ne saurait être sérieusement discutée, de surcroît par le créancier de la société Cabinet [S] avocats, le liquidateur judiciaire représentant au premier chef le débiteur en liquidation judiciaire tout en assurant la protection des intérêts collectifs des créanciers.

De plus le débiteur étant dessaisi de ses droits patrimoniaux en raison de sa mise en liquidation judiciaire, conformément aux dispositions de l'article L.641-9 du code de commerce, le liquidateur judiciaire avait qualité pour introduire, devant le juge du droit commun, l'action en justice destinée à apprécier l'existence et le quantum de la créance de la société BSM expertise, quand bien même





le débiteur peut exercer seul, en vertu des droits propres dont il dispose, les voies de recours contre les décisions relatives à la procédure collective.



L'instance concernant la vérification des créances est indivisible entre le débiteur, son créancier et le liquidateur. Par conséquent, dès lors que l'assignation délivrée au créancier, la société BSM expertise, a bien été introduite dans le délai d'un mois prévu à peine de forclusion, le tribunal est valablement saisi, peu important que l'administrateur provisoire représentant la société débitrice soit intervenu postérieurement, après l'expiration de ce délai, dès lors qu'il était présent et représenté à la procédure lors des débats devant le juge de la mise en état puis en appel. Aucune forclusion ne peut donc être opposée au liquidateur.

Le représentant légal de la société Cabinet [S] avocats étant décédé, maître [K], désigné en qualité d'administrateur provisoire, a seul qualité pour agir au nom de cette société de sorte que son intervention en cette qualité permet de considérer que la société Cabinet [S] avocats est désormais régulièrement partie à la procédure.



Par conséquent cette fin de non-recevoir ne peut être accueillie, contrairement à ce qu'a jugé le juge de la mise en état.



Sur la fin de non-recevoir opposée à titre subsidiaire :



Maître [L], ès qualités, qui indique que le créance déclarée à titre chirographaire par la société BSM expertise à hauteur de la somme de 41 040 euros au titre de prétendues factures impayées a été contestée en totalité ne formule pas d'autres observations sur la fin de non-recevoir soutenue à titre subsidiaire par la société créancière. Il en est de même de l'administrateur provisoire de la société débitrice.



La société BSM expertise, au visa de l'article 408 du code de procédure civile et en invoquant le principe de l'estoppel consacré par la Cour de cassation, fait valoir que dans son ordonnance le juge-commissaire a constaté que tant la débitrice que le liquidateur ont demandé l'admission partielle de sa créance à hauteur de 10 620 euros de sorte que le liquidateur a non seulement reconnu le bien-fondé partiel de cette créance mais qu'en outre il ne peut pas, sauf à faire preuve d'une particulière déloyauté processuelle, se contredire au détriment du créancier. Elle demande par conséquent à la cour, si elle ne devait pas confirmer l'ordonnance, de dire que le liquidateur judiciaire est irrecevable à contester la créance à hauteur de 10 620 euros.



S'il est exact que lors de l'audience devant le juge-commissaire, la société Cabinet [S] avocats, agissant en la personne de son administrateur provisoire, a sollicité l'admission de la créance de la société BSM expertise pour un montant limité de 10 620 euros, le juge-commissaire, constatant l'existence d'une contestation sérieuse, a sursis à statuer sur la totalité de la créance en invitant la société débitrice à saisir le juge du fond.



Dans ces conditions, le liquidateur judiciaire, au nom de la société débitrice, avait qualité à agir pour saisir le juge du fond pour qu'il soit statué sur l'intégralité de la créance de la société BSM expertise, de sorte qu'il ne peut lui être opposé aucune déloyauté et que la fin de non-recevoir alléguée de ce chef sera également écartée.







Par conséquent, il convient, infirmant la décision du juge de la mise en état, de déclarer maître [L], ès qualités, recevable en ses demandes devant le tribunal judiciaire de Nanterre devant lequel le dossier sera renvoyé pour poursuite de la procédure.



Sur la demande en dommages et intérêts :



Maître [L] et maître [K], chacun ès qualités, demandent à la cour de confirmer la décision du juge de la mise en état qui n'a pas retenu le caractère abusif de la procédure en observant que l'intimée ne justifie pas plus en appel de sa demande de ce chef.



La société BSM expertise, sur le fondement des articles 32-1 et 559 du code de procédure civile, soutient qu'en l'espèce la mauvaise foi de maître [L], ès qualités, est patente quant à son refus de fixer, a minima, la fraction de la créance qu'il avait admise devant le juge-commissaire et que celle-ci confine d'ailleurs à l'intention dolosive, affirmant que ce recours a été régularisé avec malice dès lors que le seul but poursuivi est de gagner du temps, ce qui risque de permettre à d'autres créanciers chirographaires d'être réglés en priorité.

Elle demande à la cour d'infirmer l'ordonnance du premier juge dès lors que le caractère abusif de la présente instance, si la cour ne devait retenir aucune malice, résulte de la mauvaise foi, de l'erreur grossière équipollente au dol ou encore de la légèreté blâmable avec laquelle elle a été introduite par maître [L] qui, en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation des entreprises, est nécessairement rompu aux règles de ces procédures et en particulier de celles relatives à la vérification des créances.



La solution apportée au litige justifie de confirmer la décision du juge de la mise en état qui a débouté la société BSM expertise de cette demande.



PAR CES MOTIFS



Statuant par arrêt contradictoire,



Déclare maître [P] [L] et maître [Z] [K], chacun ès qualités, respectivement recevables en leur appel principal et incident ;



Infirme l'ordonnance du 4 novembre 2021 sauf en ce que le juge de la mise en état a donné acte à maître [Z] [K] de son intervention volontaire en qualité d'administrateur provisoire de la société Cabinet [S] avocats et débouté la société BSM expertise de sa demande de dommages et intérêts ;



Statuant à nouveau,



Déclare maître [P] [L] recevable en toutes ses demandes ;



Y ajoutant,



Déclare la société BSM expertise recevable en ses demandes ;







Renvoie le dossier devant le tribunal judiciaire de Nanterre pour poursuite de la procédure et conclusions au fond de la société BCM expertise ;



Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



Condamne la société BCM expertise aux dépens de l'incident devant le juge de la mise en état et de la procédure d'appel sur incident qui pourront être recouvrés, pour ceux dont elle a fait l'avance, par la Selarl Lexavoué Paris-Versailles agissant par maître Martine Dupuis, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





Le greffier,La présidente,

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