20 avril 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-25.162

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:C100344

Titres et sommaires

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures d'exécution forcée - Saisie des rémunérations - Créances à exécution successive - Redressement ou liquidation judiciaire du débiteur - Effets

Selon l'article L. 622-21, II, du code de commerce, le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête ou interdit toute procédure d'exécution de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17, tant sur les meubles que sur les immeubles, ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture. Viole ce texte la cour d'appel qui autorise la saisie des rémunérations d'une partie, sans constater l'arrêt de cette procédure d'exécution, alors qu'une procédure de redressement judiciaire a été ouverte postérieurement à son égard

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Redressement et liquidation judiciaires - Effets - Saisie des rémunérations - Créances à exécution successives

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Redressement et liquidation judiciaires - Créanciers du débiteur - Action individuelle - Suspension - Portée - Saisie des rémunérations - Créances à exécution successive

Texte de la décision

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 20 avril 2022




Cassation partielle


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 344 F-B

Pourvoi n° T 19-25.162










R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 AVRIL 2022

La Caisse régionale de Crédit agricole mutuel d'Aquitaine, société coopérative à capital variable, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-25.162 contre l'arrêt rendu le 17 octobre 2019 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [Y] [T], domicilié [Adresse 4],

2°/ à la société [F], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 3], représentée par M. [O] [F], pris en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de M. [Y] [T],

3°/ à la société Montravers [W], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], représentée par M. [S] [W], pris en qualité de mandataire judiciaire au plan de redressement de M. [Y] [T],

défendeurs à la cassation.

M. [T] et les sociétés [F] et Montravers [W], ès qualités, ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Vitse, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor,Périer, avocat de la Caisse régionale de Crédit agricolemutuel d'Aquitaine, de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de M. [T], des sociétés [F] et Montravers [W], ès qualités et après débats en l'audience publique du 8 mars 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Vitse, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneau, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 octobre 2019) et les productions, suivant acte notarié du 18 octobre 2006, revêtu de la formule exécutoire, la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel d'Aquitaine (la banque) a consenti à M. [T] (l'emprunteur) un prêt immobilier d'un montant de 340 643 euros.

2. Ce prêt a été scindé en deux prêts distincts, le premier d'un montant de 270 113 euros, le second d'un montant de 70 350 euros.

3. Après avoir prononcé la déchéance du terme de ces prêts, la banque a demandé judiciairement l'autorisation de procéder à la saisie des rémunérations de l'emprunteur.

4. Postérieurement au jugement qui a accueilli cette demande, l'emprunteur a été placé en redressement judiciaire, la SCP [F] étant désignée administrateur judiciaire et la SELARL Montravers [W] mandataire judiciaire.

Examen des moyens

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. La banque fait grief à l'arrêt de prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels de la banque au titre du second contrat de prêt distinct, alors « que ce n'est qu'en cas de renégociation d'un contrat de prêt, donnant lieu à une modification de ses caractéristiques par voie d'avenant, que le nouveau contrat doit comporter, en application de l'article L. 312-14-1 du code la consommation, applicable en l'espèce, « d'une part, un échéancier des amortissements détaillant pour chaque échéance le capital restant dû en cas de remboursement anticipé et, d'autre part, le taux effectif global ainsi que le coût du crédit, calculés sur la base des seuls échéances et frais à venir » ; qu'en l'espèce, pour statuer comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui a constaté que l'acte de prêt du 18 octobre 2006 mentionnait, s'agissant du crédit immobilier de 340 643 euros, un taux effectif global de 4,7808 %, a retenu que ce prêt avait été scindé « en deux prêts immobiliers distincts », l'un de 270 113 euros débloqué le 22 septembre 2006, l'autre de 70 350 euros débloqué en juillet 2010 ; qu'elle a ensuite relevé, d'une part, que le premier prêt n'avait pas fait l'objet d'une modification expresse de son montant, constatée seulement par le biais d'un nouveau tableau d'amortissement, ce qui invaliderait les mentions initiales du taux effectif global calculé sur un emprunt de 340 643 euros et d'autre part, que le taux effectif global n'était pas mentionné dans l'offre de prêt afférente au « second prêt » ; qu'en statuant de la sorte, sans constater, ce que contestait l'exposante qui faisait valoir que les deux « prêts » de 270 113 euros et 70 350 euros correspondaient en réalité au déblocage en deux lignes de financement des fonds objet du prêt du 18 octobre 2006, sans que les caractéristiques de ce crédit, notamment s'agissant du taux d'intérêts conventionnels ou du taux effectif global, n'aient été modifiées, que les deux prêts issus de la scission du prêt du 18 octobre 2006 comportaient des caractéristiques différentes du prêt initial, la cour d'appel a violé l'article 1134 (devenu 1104) du code civil, ensemble les articles L. 312-8, L. 312-14-1, L. 313-1, et R. 313-1 du code de la consommation. »

Réponse de la Cour

6. Après avoir relevé que le prêt initial avait été scindé en deux prêts distincts, la cour d'appel a retenu que la déchéance du droit aux intérêts conventionnels était encourue au titre du second contrat de prêt distinct qui ne mentionne aucun taux effectif global.

7. Il s'ensuit que la cour d'appel, qui a considéré que le taux effectif global devait figurer dans le second contrat de prêt distinct, non pas en tant qu'avenant au premier contrat de prêt, mais en tant que contrat de prêt distinct, n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations et énonciations rendaient inopérantes.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident

Enoncé du moyen

9. L'emprunteur fait grief à l'arrêt d'accueillir la requête en saisie des rémunérations de la banque au titre du second contrat de prêt distinct, alors « que, dans ses conclusions, il soutenait qu'aucun avenant signé de la main de l'emprunteur n'était versé aux débats, établissant son accord au nouveau prêt conclu en 2010 ; qu'aucune pièce visée dans les conclusions de la banque ou mentionnée dans le bordereau de communication de pièces annexé auxdites conclusions ne faisait mention d'un avenant signé de la main de l'emprunteur ; qu'en retenant pourtant que « la banque a communiqué en cours de procédure l'exemplaire en sa possession de l'avenant signé au prêt notarié correspondant à la somme de 70 350 euros débloquée en juillet 2010 », quand il résultait des écritures des parties qu'à supposer même que ladite pièce ait été communiquée aux juges, elle l'avait nécessairement été en contravention au principe de contradiction, l'exposant n'en ayant pas eu connaissance, et n'ayant pas été en mesure de la discuter, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

10. Il résulte des productions qu'un bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions d'appel de la banque fait mention d'une pièce n° 19 intitulée « Avenant à l'offre de prêt signé par M. [T] le 21 juillet 2010 ».

11. Le moyen, qui soutient l'absence d'une telle mention, manque donc en fait.

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

12. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels de la banque au titre du second contrat de prêt distinct, alors « qu'en application des articles L. 312-8, 3°, du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en l'espèce, de l'article L. 313-1 du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, de l'article L. 312-33 de ce code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000, et de son article R. 313-1, dans sa rédaction issue du décret n°2002-927 du 10 juin 2002, l'offre de prêt immobilier doit mentionner le taux effectif global, qui est un taux annuel, proportionnel au taux de période, lequel, ainsi que la durée de la période, doivent être expressément communiqués à l'emprunteur ; que toutefois, le défaut de communication du taux ou de la durée de la période ou la communication d'un taux de période erroné ne sont sanctionnés par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels que lorsque l'écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est supérieur à la décimale prescrite par l'article R. 313-1 du code de la consommation ; qu'en se bornant à retenir, pour prononcer la déchéance totale du droit de la banque aux intérêts conventionnels, que l'acte authentique de prêt du 18 octobre 2006 « ne mentionnait pas ce taux de période » et que « le second prêt litigieux » mentionnait un taux de période erroné de 0,3333 %, sans constater que le taux effectif global mentionné dans l'acte authentique du 18 octobre 2006 (soit 4,7808 %) était erroné, de surcroît de plus d'une décimale, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

13. L'emprunteur conteste la recevabilité du moyen, en raison de sa nouveauté.

14. Cependant, le moyen, qui est de pur droit, est recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article L. 312-8, 3°, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996, l'article L. 313-1 du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, l'article L. 312-33 de ce code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000, et son article R. 313-1, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 :

15. En application de ces textes, l'offre de prêt immobilier doit mentionner le taux effectif global, qui est un taux annuel, proportionnel au taux de période, lequel, ainsi que la durée de la période, doivent être expressément communiqués à l'emprunteur. Le défaut de communication du taux et de la durée de la période est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts.

16. Une telle sanction ne saurait cependant être appliquée lorsque l'écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l'article R. 313 -1 susvisé.

17. Pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du premier contrat de prêt distinct, l'arrêt retient que celui-ci mentionne un taux effectif global erroné.

18. En statuant ainsi, sans constater que l'écart entre le taux effectif global mentionné dans le contrat précité et le taux réel était supérieur à une décimale, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Sur le premier moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

19. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il autorise la saisie de ses rémunérations, alors « que le jugement d'ouverture d'une procédure de résolution judiciaire arrête ou interdit toute procédure d'exécution de la part des créanciers antérieurs tant sur les meubles que sur les immeubles ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté qu'après avoir interjeté appel, le 30 janvier 2018, du jugement ayant autorisé la saisie de ses rémunérations, l'emprunteur avait fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte par jugement du tribunal de commerce de Paris le 17 avril 2018 ; qu'il en résultait nécessairement l'arrêt de la procédure de saisie des rémunérations diligentées par la banque, créancier antérieur, avant le jugement d'ouverture ; qu'en confirmant pourtant le chef du jugement ayant autorisé la saisie des rémunérations de l'emprunteur, la cour d'appel a violé l'article L. 622-21 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 622-21, II, du code de commerce :

20. Selon ce texte, le jugement d'ouverture arrête ou interdit toute procédure d'exécution de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17, tant sur les meubles que sur les immeubles, ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture.

21. Après avoir relevé qu'un jugement du 17 avril 2018 avait prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de l'emprunteur, l'arrêt confirme le jugement du 2 décembre 2017 en ce qu'il autorise la saisie des rémunérations de l'emprunteur.

22. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui aurait dû constater l'arrêt de la procédure de saisie des rémunérations à compter du jugement d'ouverture du redressement judiciaire, a violé le texte susvisé.

Et sur le second moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi incident

Enoncé du moyen

23. L'emprunteur fait grief à l'arrêt d'autoriser la saisie des rémunérations de l'emprunteur au titre du second contrat de prêt distinct, alors « qu'en tout état de cause, seul le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après vaine tentative de conciliation, procéder à la saisie des sommes dues à titre de rémunération par un employeur à son débiteur ; que constituent des actes exécutoires les actes notariés revêtus de la formule exécutoire, mais non les simples actes sous seing privés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que, par avenant prétendument signé de l'emprunteur, les parties avait scindé « en deux prêts distincts » le prêt initial constaté par acte authentique du 18 octobre 2006 ; qu'il en résultait nécessairement que le prêt constaté par avenant de 2010 procédait d'un contrat différent de celui ayant fait l'objet de l'acte authentique de 2006 ; qu'en conséquence « l'avenant signé au prêt notarié correspondant à la somme de 70 350 euros débloquée en juillet 2010 » mentionné par l'arrêt, simple acte sous seing privé constatant un contrat distinct de celui relaté par acte authentique, n'était pas un titre exécutoire ; qu'en retenant pourtant que « M. [T] ne saurait donc prétendre à inexistence du titre exécutoire, correspondant à la seconde tranche du prêt authentique à l'euro près », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article R. 3252-1 du code du travail, ensemble l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution et R. 3252-1 du code du travail :

24. Il résulte de la combinaison de ces textes qu'un acte sous seing privé, qui ne constitue pas un titre exécutoire, ne peut servir de fondement à la saisie des rémunérations.

25. Pour autoriser la saisie des rémunérations de l'emprunteur au titre du second prêt distinct, après avoir relevé que l'acte notarié du prêt initial avait été scindé en deux contrats distincts, dont le second avait pris la forme d'un avenant à l'acte notarié et correspond au second prêt distinct, l'arrêt retient que l'emprunteur ne peut opposer l'inexistence d'un titre exécutoire s'agissant de ce dernier prêt.

26. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que seul le premier prêt distinct avait été reçu par acte notarié et revêtu de la formule exécutoire, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il autorise la saisie des rémunérations de M. [T] auprès de son employeur la société KDI Export, prononce la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat de prêt n° 36443501002, dit que seront substitués aux intérêts conventionnels de ce contrat ceux au taux légal, ordonne la restitution des intérêts indûment perçus au titre du contrat de prêt n° 36443501002 et fixe au passif du redressement judiciaire de M. [T] la somme due au titre de ce contrat, l'arrêt rendu le 17 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille vingt-deux.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel d'Aquitaine, demanderesse au pourvoi principal.

Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le capital restant dû au titre des deux prêts n°36443501002 et n° 00072822445 était respectivement de 195.801,09 € et de 50.590,06 €, dont devraient être déduits les deux acomptes récemment payés par Monsieur [Y] [T] et auxquels s'ajouterait le montant des frais de procédure tels que visés par le jugement, d'AVOIR prononcé pour chacun des prêts n°36443501002 et n°00072822445, la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels du prêteur et dit que seraient substitués aux intérêts échus et à venir, les intérêts au taux légal, d'AVOIR ordonné la restitution par la SA CRCAM D'AQUITAINE des intérêts indûment perçus après compensation avec les intérêts légaux échus sur le capital restant dû des deux prêts, à charge pour la SA CRCAM D'AQUITAINE de produire un nouveau décompte de sa créance prenant en considération la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et l'imputation de l'excédent de ces intérêts par rapport aux intérêts légaux sur le capital restant dû, sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de l'arrêt, d'AVOIR débouté la CRCAM D'AQUITAINE du surplus de ses demandes, et d'AVOIR fixé la condamnation prononcée à l'encontre de Monsieur [Y] [T] au passif du redressement judiciaire de ce dernier, intérêts au taux légal inclus ;

AUX MOTIFS QUE « Sur les irrégularités affectant le taux effectif global et le calcul du coût total du crédit : L'indication du caractère mensuel des échéances du prêt suffit à tenir lieu d'indication de la durée de la période, qui ne peut dans ce cas être que d'un mois. S'agissant du taux de la période, dont la mention est exigée par l'article R. 313-1 du code de la consommation sur le taux effectif global applicable à la date de leur conclusion au premier prêt authentique le18 octobre 2006 et à ses avenants le scindant en deux prêts immobiliers distincts, la cour retient, après examen des contrats, que le prêt initial de 2006 ne mentionnait pas ce taux de période, tandis que le second prêt litigieux apparaît porter ce taux, élément du taux effectif global calculé selon la méthode proportionnelle applicable aux prêts immobiliers, à 0,3333%, soit au douzième du taux conventionnel indiqué. Or le taux effectif global réel ne peut être assimilé au taux d'intérêts conventionnel, puisqu'il englobe, conformément à l'article L. 314-1 du code de la consommation, tous les frais supportés par l'emprunteur au sens de ce texte ainsi rédigé : « pour la détermination du taux effectif global du prêt, (…), sont ajoutés aux intérêts les frais, les taxes, les commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, supportés par l'emprunteur et connus du prêteur à la date d'émission de l'offre de crédit ou de l'avenant au contrat de crédit, ou dont le montant peut être déterminé à ces mêmes dates, et qui constituent une condition pour obtenir le crédit… ». Quant au TEG lui-même, alors qu'il était stipulé dans le prêt initial de 340.643 € à 4,7808 % comprenant outre le montant des intérêts du prêt (165.700,15 €), le coût de l'assurance décès-invalidité obligatoire (28.612,80 €), l'évaluation des frais d'actes notarié (5.447,14 €) ce qui menait à un coût total du crédit de 199.760,09 €, il n'était pas rappelé dans la seconde offre de prêt datée et signée par M. [T] le 21 juillet 2010. Le TEG doit être réputé absent de ce contrat de prêt. Il y a lieu d'ajouter que le montant du premier prêt n° 36443501002, n'apparaît pas avoir fait l'objet d'une modification expresse de son montant, constatée seulement par le biais d'un nouveau tableau d'amortissement du premier prêt, ce qui invalide les mentions initiales du taux effectif global calculé sur un emprunt de 340.643 € l'emprunteur n'étant pas informé du taux effectif global du premier prêt après réduction de son montant ; Les deux TEG des prêts litigieux apparaissent donc l'un erroné, l'autre absent. Sans qu'il y ait lieu de se pencher sur la prise en considération ou non dans le TEG des frais de garantie, la cour dispose en conséquence des éléments suffisants pour prononcer la déchéance totale des intérêts conventionnels aux deux offres de prêt concernées Il n'apparaît pas à l'examen des relevés de ses règlements depuis le début des prêts que M. [T] ait, ainsi qu'il l'affirme, réglé une somme plus importante que celle due au titre du capital des prêts : il est ainsi démontré que l'emprunteur a réglé depuis le début du prêt n° 3644351002 une somme de 80.117,36 € en principal sur un montant dû à ce jour en capital de 195.801,09 € au 11 octobre 2014, et a payé au titre du prêt n° 00072822445 une somme de 19.759,94 € en principal, le montant restant dû en capital étant de 50.590,06 €. Sur les prétentions de la banque aux intérêts de retard supplémentaires et à une indemnité de recouvrement : Les frais de procédure ont été exposés par la banque d'abord au titre des capitaux restant dus sur les deux prêts : la condamnation prononcée par le jugement entrepris à hauteur d'une somme de 1.185,22 € est confirmée. Compte tenu de la déchéance des intérêts prononcée, et de l'irrégularité des offres de prêt, les demandes relatives aux intérêts de retard contractuels et à I' indemnité de recouvrement ne peuvent qu'être rejetées » ;

1°) ALORS QUE'en application des articles L. 312-8, 3°, du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en l'espèce, de l'article L. 313-1 du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, de l'article L. 312-33 de ce code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000, et de son article R. 313-1, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002, l'offre de prêt immobilier doit mentionner le taux effectif global, qui est un taux annuel, proportionnel au taux de période, lequel, ainsi que la durée de la période, doivent être expressément communiqués à l'emprunteur ; que toutefois, le défaut de communication du taux ou de la durée de la période ou la communication d'un taux de période erroné ne sont sanctionnés par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels que lorsque l'écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est supérieur à la décimale prescrite par l'article R. 313-1 du code de la consommation ; qu'en se bornant à retenir, pour prononcer la déchéance totale du droit de la CRCAM D'AQUITAINE aux intérêts conventionnels, que l'acte authentique de prêt du 18 octobre 2006 « ne mentionnait pas ce taux de période » (p. 9, 1er §) et que « le second prêt litigieux » mentionnait un taux de période erroné de 0,3333% (Ibid.), sans constater que le taux effectif global mentionné dans l'acte authentique du 18 octobre 2006 (soit 4,7808 %, arrêt, p. 9, 3ème §) était erroné, de surcroît de plus d'une décimale, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;

2°) ALORS, EN OUTRE, QUE ce n'est qu'en cas de renégociation d'un contrat de prêt, donnant lieu à une modification de ses caractéristiques par voie d'avenant, que le nouveau contrat doit comporter, en application de l'article L. 312-14-1 du code la consommation, applicable en l'espèce, « d'une part, un échéancier des amortissements détaillant pour chaque échéance le capital restant dû en cas de remboursement anticipé et, d'autre part, le taux effectif global ainsi que le coût du crédit, calculés sur la base des seuls échéances et frais à venir » ; qu'en l'espèce, pour statuer comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui a constaté (arrêt, p. 9, 3ème §) que l'acte de prêt du 18 octobre 2006 mentionnait, s'agissant du crédit immobilier de 340.643 €, un taux effectif global de 4,7808%, a retenu que ce prêt avait été scindé « en deux prêts immobiliers distincts » (p. 9, 1er §), l'un de 270.113 € débloqué le 22 septembre 2006, l'autre de 70.350 € débloqué en juillet 2010 (p. 7, deux derniers §) ; qu'elle a ensuite relevé, d'une part, que le premier prêt n'avait pas fait l'objet d'une modification expresse de son montant, constatée seulement par le biais d'un nouveau tableau d'amortissement, ce qui invaliderait les mentions initiales du taux effectif global calculé sur un emprunt de 340.643 € (p. 9, 4ème §) et d'autre part, que le taux effectif global n'était pas mentionné dans l'offre de prêt afférente au « second prêt » (p. 9, 3ème §) ; qu'en statuant de la sorte, sans constater, ce que contestait l'exposante qui faisait valoir que les deux « prêts » de 270.113 € et 70.350 € correspondaient en réalité au déblocage en deux lignes de financement des fonds objet du prêt du 18 octobre 2006, sans que les caractéristiques de ce crédit, notamment s'agissant du taux d'intérêts conventionnels ou du taux effectif global, n'aient été modifiées (ses conclusions d'appel, p. 3 ; p. 8 à 11), que les deux prêts issus de la scission du prêt du 18 octobre 2006 comportaient des caractéristiques différentes du prêt initial, la cour d'appel a violé l'article 1134 (devenu 1104) du code civil, ensemble les articles L. 312-8, L. 312-14-1, L. 313-1, et R. 313-1 du code de la consommation. Moyen produit par la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. [T] et les sociétés [F] et Montravers [W], ès qualités, demandeurs au pourvoi incident.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement attaqué en ce qu'il avait autorisé la saisie des rémunérations de M. [Y] [T] auprès de son employeur, la société KDI Export, au profit de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel pour les sommes correspondant au capital restant dû au titre des deux prêts n° 36443501002 et n° 00072822445, respectivement de 195 801,09 € et de 50 590,06 €, dont devront être déduits les deux acomptes récemment payés par M. [Y] [T], et auxquels s'ajoutera le montant des frais de procédure, soit 1 185,22 € ;

AUX MOTIFS QUE : « le 30 janvier 2018, M. [T] a interjeté appel de la décision ; que le 17 avril 2018, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de M. [Y] [T] exerçant alors l'activité de loueur en meublé professionnel à la suite d'une inscription au RCS remontant au 5 juin 2017 […] ; qu'à titre préliminaire, il est précisé que le présent arrêt sera déclaré commun et opposable, à Me [O] [F], en sa qualité d'administrateur judiciaire, et à Me [S] [W] en qualité de mandataire judiciaire de M. [T] » ;

ALORS QUE le jugement d'ouverture d'une procédure de résolution judiciaire arrête ou interdit toute procédure d'exécution de la part des créanciers antérieurs tant sur les meubles que sur les immeubles ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté qu'après avoir interjeté appel, le 30 janvier 2018, du jugement ayant autorisé la saisie de ses rémunérations, M. [T] avait fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte par jugement du tribunal de commerce de Paris le 17 avril 2018 (arrêt, p. 2, dernier alinéa, et p. 3, alinéa 1er) ; qu'il en résultait nécessairement l'arrêt de la procédure de saisie des rémunérations diligentées par la CRCAM, créancier antérieur, avant le jugement d'ouverture ; qu'en confirmant pourtant le chef du jugement ayant autorisé la saisie des rémunérations de M. [T], la cour d'appel a violé l'article L. 622-21 du code de commerce.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le capital restant dû au titre du prêt n° 00072822445 est de 50 590,06 €, dont devra être déduit l'acompte récemment payé par M. [Y] [T] et auquel s'ajoutera le montant des frais de procédure de 1 185,22 €, d'avoir débouté M. [T] de sa demande tendant à ce que le Crédit Agricole soit débouté de l'intégralité de ses demandes relatives à la mesure de saisie, et d'avoir fixé la condamnation prononcée à l'encontre de M. [T] au passif du redressement judiciaire de ce dernier, intérêts au taux légal compris ;

AUX MOTIFS QUE : « sur l'existence d'un titre exécutoire au titre du prêt de 70.350 : que l'offre de prêt qui a fait l'objet de l'acte notarié du 18 octobre 2016 comprenait deux prêts : un prêt relais in fine de 77.056 € (n° 4435011001) qui a été intégralement remboursé et qui est donc écarté des débats, et un prêt n° 443501002 de 340.643 € ; que M. [T] critique l'admission par le premier juge d'une scission, postérieure à l'acte authentique, du prêt de 340.643 € en deux contrats distincts, au motif que la date de déblocage d'une partie des fonds correspondant au prêt de 2006 a été repoussée à concurrence de 70.350 € au 5 juillet 2010, les fonds n'ayant été libérés sur le prêt de 2006 qu'à hauteur de 270.113 € le 22 septembre 2006, du fait d'un dépassement d'un délai de déblocage des fonds dus au retard pris par la construction la construction en VEFA de la maison de Pont de l'Arn ; que le commandement aux fins de saisie-vente délivré le 29 juillet 2016 fait état au 27 juillet 2016 d'un capital restant dû de 196.823,21 € au titre du premier prêt, et 56.225,30 € au titre du second prêt ; que l'avenant au contrat de prêt authentique afférent à la tranche de prêt débloquée en 2010, et les deux tableaux d'amortissement correspondant au prêt de 340.643 et à la tranche de 70.350 € libérée en juillet 2010, ont bien été établis au nom de M. [T] lui ont été notifiés et ont été signés par lui ; que l'emprunteur ne conteste pas l'appel de mensualités réduites à proportion du premier déblocage de fonds pour le premier prêt ; que pour le second prêt, la SA CRCAM d'Aquitaine a communiqué en cours de procédure l'exemplaire en sa possession de l'avenant signé au prêt notarié correspondant à la somme de 70.350 € débloquée en juillet 2010 ; que M. [T] ne saurait donc prétendre à l'inexistence du titre exécutoire, correspondant à la seconde tranche du prêt authentique à l'euro près » ;

1/ ALORS QUE M. [T], dans ses conclusions, soutenait qu'aucun avenant signé de la main de l'emprunteur n'était versé aux débats, établissant son accord au nouveau prêt conclu en 2010 (conclusions, p. 7) ; qu'aucune pièce visée dans les conclusions de la banque ou mentionnée dans le bordereau de communication de pièces annexé auxdites conclusions ne faisait mention d'un avenant signé de la main de M. [T] ; qu'en retenant pourtant que « la SA CRCRAM d'Aquitaine a communiqué en cours de procédure l'exemplaire en sa possession de l'avenant signé au prêt notarié correspondant à la somme de 70 350 € débloquée en juillet 2010 » (arrêt, p. 7, dernier alinéa), quand il résultait des écritures des parties qu'à supposer même que ladite pièce ait été communiquée aux juges, elle l'avait nécessairement été en contravention au principe de contradiction, l'exposant n'en ayant pas eu connaissance, et n'ayant pas été en mesure de la discuter, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2/ ALORS ET EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE seul le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après vaine tentative de conciliation, procéder à la saisie des sommes dues à titre de rémunération par un employeur à son débiteur ; que constituent des actes exécutoires les actes notariés revêtus de la formule exécutoire, mais non les simples actes sous seing privés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que, par avenant prétendument signé de M. [T], les parties avait scindé « en deux prêts distincts » le prêt initial constaté par acte authentique du 18 octobre 2006 (arrêt, p. 9, alinéa 1er) ; qu'il en résultait nécessairement que le prêt constaté par avenant de 2010 procédait d'un contrat différent de celui ayant fait l'objet de l'acte authentique de 2006 ; qu'en conséquence « l'avenant signé au prêt notarié correspondant à la somme de 70 350 € débloquée en juillet 2010 » (arrêt, p. 7, dernier alinéa) mentionné par l'arrêt, simple acte sous seing privé constatant un contrat distinct de celui relaté par acte authentique, n'était pas un titre exécutoire ; qu'en retenant pourtant que « M. [T] ne saurait donc prétendre à inexistence du titre exécutoire, correspondant à la seconde tranche du prêt authentique à l'euro près » (arrêt, p. 8, alinéa 1er), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article R. 3252-1 du code du travail, ensemble l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution.

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