23 septembre 2021
Cour d'appel d'Orléans
RG n° 20/02350

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'ORLÉANS


CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE






GROSSES + EXPÉDITIONS : le 23/09/2021
la SELARL BERNABEU
la SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC
ARRÊT du : 23 SEPTEMBRE 2021


No : 183 - 21
No RG 20/02350
No Portalis DBVN-V-B7E-GHUV


DÉCISION ENTREPRISE : Ordonnance du juge commissaire du Juge commissaire d'ORLEANS en date du 02 Novembre 2020


PARTIES EN CAUSE


APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265264247947948
S.A.S. SOCIETE D'EXPLOITATION DES CLOTURES MOIZARD
Agissant poursuite et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]


Ayant pour avocat postulant Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Elisabeth BERNABEU, membre de la SELARL BERNABEU, avocat au barreau d'ORLEANS


D'UNE PART


INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265264247947948
Maître [O] [J]
Agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la S.A.S. D'EXPLOITATION DES CLOTURES MOIZARD
[Adresse 1]
[Localité 1]


Ayant pour avocat postulant Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Elisabeth BERNABEU, membre de la SELARL BERNABEU, avocat au barreau d'ORLEANS




Timbre fiscal dématérialisé No: 1265262147180051
S.C.I. DE L'ENVIRONNEMENT
[Adresse 3]
[Localité 3]


Ayant pour avocat postulant Me Nadjia BOUAMRIRENE, membre de la SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Laurent ARBOIX, avocat au barreau de STRASBOURG




Timbre fiscal dématérialisé No: 1265264247947948
S.E.L.A.R.L. VILLA FLOREK
Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
Mission conduite par Maître [F] [N],
Agissant en qualité de mandataire judiciaire de la SAS SOCIETE D'EXPLOITATION DES CLOTURES MOIZARD
[Adresse 2]
[Localité 1]


Ayant pour avocat postulant Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Elisabeth BERNABEU, membre de la SELARL BERNABEU, avocat au barreau d'ORLEANS




D'AUTRE PART


DÉCLARATION D'APPEL en date du : 17 Novembre 2020
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 22 Avril 2021




COMPOSITION DE LA COUR


Lors des débats à l'audience publique du jeudi 10 JUIN 2021, à 14 heures, Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, en charge du rapport, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.


Après délibéré au cours duquel Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :


Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Ferreole DELONS, Conseiller,




Greffier :


Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,




ARRÊT :


Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le jeudi 23 SEPTEMBRE 2021 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.






EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :


Par acte sous seing privé du 29 juin 2001, la société SCI De l'Environnement a donné à bail commercial des locaux à la société d'Exploitation des clôtures Moizard (société Moizard).


Par acte d'huissier du 24 juillet 2014, la bailleresse a fait délivrer à sa locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire aux fins d'avoir à payer la somme de 271.253,97 euros au titre d'arriérés de loyers arrêtés au 30 juin 2014.


La société d'Exploitation des clôtures Moizard a fait assigner la SCI de l'Environnement par acte du 18 août 2014 devant le tribunal de grande instance d'Orléans afin de voir constater qu'elle est à jour du paiement de ses loyers, de débouter la bailleresse de ses prétentions et à titre subsidiaire de dire que sa dette ne peut excéder la somme de 160 800 euros au 30 juin 2014. La SCI de l'environnement a demandé reconventionnellement au tribunal de constater la résiliation du bail, d'ordonner l'expulsion de la locataire, de fixer l'indemnité mensuelle d'occupation à compter du 24 août 2014, et de condamner la société débitrice à 271 253,97 euros au titre des arriérés de loyers arrêtés au 30 juin 2014.


Par jugement du 7 novembre 2017, le tribunal de grande instance d'Orléans a constaté la résiliation du bail commercial, ordonné l'expulsion de la société débitrice et condamné cette dernière à payer à la bailleressse la somme de 160 800 euros au titre de l'arriéré de loyers arrêtés au 30 juin 2014.


La société d'Exploitation des clôtures Moizard a interjeté appel du jugement.


Par jugement du 9 janvier 2019, le tribunal de commerce d'Orléans a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la société Moizard.


La SCI de l'Environnement a déclaré sa créance le 14 mars 2019 pour un montant de 416.466,40 euros arrêté à la date du 9 janvier 2019.


En l'absence de connaissance de l'ouverture de la procédure de sauvegarde, la cour d'appel d'Orléans, par arrêt rendu le 21 mars 2019 intervenu après débats tenus le 10 janvier 2019, a confirmé le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société d'exploitation des clôtures Moizard à payer la somme de 160800 euros et l'a condamnée à payer la somme de 142 713,53 euros au titre de l'arriérés de loyers au 30 juin 2014.


La SELARL Villa-Florek a adressé à la SCI de l'Environnement deux courriers, en indiquant contester sa créance, le premier en date du 4 juillet 2019, faisant suite à une contestation du débiteur reçue le 26 juin 2019, le second en date du 10 juin 2019, faisant suite à une contestation du débiteur du même jour.


La SCI de l'Environnement, la société Moizard et les organes de la procédure collective ont été convoquées à l'audience du juge-commissaire du 23 janvier 2020 et l'affaire a ensuite été renvoyée à plusieurs reprises pour être retenue à l'audience du 8 septembre 2020.


Par ordonnance du 2 novembre 2020, le juge commissaire du tribunal de commerce d'Orléans a prononcé l'admission de la créance de la SCI de l'Environnement pour la somme de 287 439,53 euros et son rejet pour le surplus soit 129 029,87 euros, et dit que les dépens seront portés en frais privilégiés de procédure collective.


Le juge-commissaire a indiqué que la créance déclarée par la SCI de l'Environnement à hauteur de 416.466,40€ a été contestée d'abord à hauteur de 4214,20€ avec pour le surplus, mention d'une instance en cours, par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 juillet 2019 réceptionnée le 11 juillet 2019, puis en totalité par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 nuin 2020 réceptionnée le 15 juin 2020.


Il a retenu :
- que la SCI de l'Environnement n'a pas apporté de réponse dans les 30 jours aux contestations du mandataire judiciaire, ce qui interdit au créancier toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire judici aire, mais n'interdit pas au juge-commissaire de rendre une décision différente de celle proposée par le mandataire au vu des éléments versés aux débats,
- que l'arrêt du 21 mars 2019 a été rendu en méconnaissance des règles de procédure découlant de l'ouverture de la sauvegarde le 9 janvier 2019, avant la clôture des débats devant la cour,
- que pour autant, aucun élément ne vient remettre en cause le raisonnement de la cour d'appel qui a arrêté le montant des loyers à 142.719,53€ au 30 juin 2014, montant qui sera entériné,
- qu'il convient de retenir un loyer de 17.040€ par trimestre de juillet 2014 à décembre 2018 au lieu des 9000€ payés par la locataire sur cette période, soit un reliquat de 144.720€,
- que la créance doit être admise pour 287.439,53€ et rejetée pour le surplus.


La société d'Exploitation des clôtures Moizard a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration du 17 novembre 2020 en intimant la SCI de l'Environnement, la SELARL Villa-Florek ès qualités de mandataire judiciaire à la sauvegarde judiciaire de la société d'Exploitation des clôtures Moizard et Maître [O] [J] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de cette même société, et en critiquant tous les chefs de l'ordonnance.


Par actes délivrés le 23 décembre 2020, la SCI de l'Environnement a fait assigner la société d'Exploitation des clôtures Moizard aux fins de reprise d'instance, au fond, ainsi que les organes de la procédure appelés en intervention forcée dans ce cadre. Cette procédure est actuellement pendante devant la cour de céans.


Dans leurs dernières conclusions du 15 avril 2021, la société d'Exploitation des clôtures Moizard, la SELARL Villa-Florek ès qualités et Maître [O] [J] ès qualités demandent à la cour de :
Déclarer recevable et bien fondée la société d'Exploitation des Clôtures Moizard en son appel,
Déclarer Me [J] et la SELARL Villa-Florek ès qualités recevables et bien fondés en leur appel incident
Vu les pièces versées au débat
Vu les articles 369 et 372 du code de procédure civile
Vu les articles L 622 22 et R 622-20 du code de commerce et L 622 27 du code de commerce,
Principalement :
Infirmer l'ordonnance du juge commissaire en date du 2 novembre 2020 en ce qu'elle a prononcé l'admission de la créance de la SCI de l'Environnement pour la somme de 287 439,53 €.
Statuant à nouveau :
Prononcer le rejet de la créance déclarée de la société SCI de l'Environnement en date du 14 mars 2019, reçue le 18 mars 2019 pour la somme totale de 416 466, 40 €.
Déclarer la société SCI de l'Environnement irrecevable en tous cas mal fondée en ses demandes tant principales que subsidiaires et l'en débouter, ainsi que de son appel incident
Subsidiairement :
Constater que la créance privilégiée de la société SCI de l'Environnement à inscrire au passif de la société d'Exploitation des clôtures Moizard ne saurait dépasser la somme de 287 439,53 € décomposée comme suit :
- 142 719,53 € d'impayés au 5 juin 2014
- l44 720 € de loyers de juillet 2014 à décembre 2018
Débouter la société SCI de l'Environnement de ses demandes principales ou subsidiaires, plus amples ou contraires aux présentes
En tout état de cause :
Confirmer l'ordonnance du Juge commissaire en date du 2 novembre 2020 en ce qu'elle a rejeté la demande de la SCI de l'Environnement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la société SCI de l'Environnement à régler à la procédure collective de la société d'Exploitation des clôtures Moizard la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamner la société SCI de l'Environnement aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Estelle Garnier en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.


Elle fait valoir :
- qu'il ne peut être tiré de conclusions du fait que la société Moizard a porté la créance privilégiée de la SCI sur la liste prévue à l'article L622-6 du Code de commerce pour la somme de 393.745,40€ car la SCI a in fine déclaré elle-même sa créance et le mandataire judiciaire l'a ensuite contestée, par courrier du 26 juin 2019 reçu le 11 juillet 2019, en sollicitant le rejet de la créance pour partie et son admission pour partie, seulement sous réserve de l'instance en cours devant la cour d'appel d'Orléans, et il appartenait au créancier de répondre à ce courrier dans le délai de 30 jours ce qu'il n'a pas fait,
- que rien n'interdit au mandataire judiciaire de procéder à des contestations successives et complémentaire de la même créance tant que le juge-commissaire n'a pas statué, de sorte que Me [N] a pu adresser valablement le 10 juin 2020, une contestation de créance complémentaire au motif que l'arrêt du 21 mars 2019 est non avenu, et que la créance déclarée à hauteur de 416.466,40€ doit être rejetée, ce d'autant que lors de cette seconde contestation, le juge-commissaire ne s'était pas encore prononcé sur l'admission ou le rejet de la créance
- que la SCI de l'Environnement n'a pas répondu dans le délai imparti par les articles L622-27 et R 624-1 du Code de commerce, qu'il s'agisse de la contestation du 26 juin 2019 ou de celle du 20 juin 2020 ce qui lui interdit toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire,
- que la créance déclarée pour 416.466,40€ doit dès lors être rejetée en totalité.


La SCI de l'Environnement demande à la cour, par dernières conclusions du 20 avril 2021, de :
Sur l'appel principal :
Déclarer la société d'Exploitation des clôtures Moizard mal fondée en son appel,
Déclarer la SELARL Villa-Florek ès qualités et Maître [O] [J] ès qualités mal fondées en leurs appels incidents,
En conséquence,
Les en débouter ainsi que de l'intégralité de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, et notamment de leurs demandes reconventionnelles,
En conséquence,
Confirmer l'ordonnance entreprise sous réserve de l'appel incident,
Fixer au passif de la société d'Exploitation des clôtures Moizard en procédure de sauvegarde judiciaire la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Juger que les frais dépens seront à la charge de la société d'Exploitation des clôtures Moizard.
Sur l'appel incident :
Déclarer la société SCI de l'Environnement recevable et bien fondée en son appel incident,
En conséquence,
Infirmer partiellement l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a limité à la somme de
287 439,53 euros l'admission de la créance de la SCI de l'Environnement et décidé son rejet pour le surplus soit 129 026,87 euros,
Et statuant à nouveau,
Dire et juger que la société SCI de l'Environnement détient à l'encontre de la société d'Exploitation des clôtures Moizard une créance privilégiée à titre de privilège du bailleur, d'un montant de 412 252,20 euros à titre d'arriérés de loyers.
Admettre la créance privilégiée de la société SCI de l'Environnement au passif de la société d'Exploitation des clôtures Moizard en procédure de sauvegarde judiciaire, au montant de 412.252,20 euros et à titre de privilège du bailleur.
Fixer au passif de la société d'Exploitation des clôtures Moizard en procédure de sauvegarde judiciaire la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Juger que les frais dépens seront à la charge de la société d'Exploitation des clôtures Moizard.
Dire que la décision sera portée sur l'état des créances.
Subsidiairement,
Constater, dire et juger que la société SCI de l'Environnement détient à l'encontre de la société d'Exploitation des clôtures Moizard une créance privilégiée à titre de privilège du bailleur, d'un montant de 305 520 euros à titre d'arriérés de loyers.
Admettre la créance privilégiée de la société SCI de l'Environnement au passif de la société d'Exploitation des clôtures Moizard en procédure de sauvegarde judiciaire, au montant de 305 520 euros et à titre de privilège du bailleur.
Fixer au passif de la société d'Exploitation des clôtures Moizard en procédure de sauvegarde judiciaire la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Juger que les frais dépens seront à la charge de la société d'Exploitation des clôtures Moizard.
Dire que la décision sera portée sur l'état des créances.
Très subsidiairement,
Constater, dire et juger que la société SCI de l'Environnement détient à l'encontre de la société d'Exploitation des clôtures Moizard une créance privilégiée à titre de privilège du bailleur, d'un montant de 287 439,53 euros à titre d'arriérés de loyers.
Admettre la créance privilégiée de la société SCI de l'Environnement au passif de la société d'Exploitation des clôtures Moizard en procédure de sauvegarde judiciaire, au montant de 287 439,53 euros et à titre de privilège du bailleur.
Fixer au passif de la société d'Exploitation des clôtures Moizard en procédure de sauvegarde judiciaire la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Juger que les frais dépens seront à la charge de la société d'Exploitation des clôtures Moizard.
Dire que la décision sera portée sur l'état des créances.


Elle fait valoir :
- que le juge-commissaire a été saisi en janvier 2020 de la contestation de créance effectuée par le mandataire le 4 juillet 2019 qui proposait uniquement le rejet de la créance pour la somme de 4214,20€ et son admission pour le surplus soit 412.252,20€, avec la simple mention "sous réserve de l'instance en cours devant la cour d'appel d'Orléans",
- que c'est seulement après cette saisine que le mandataire a adressé un second courrier le 11 juin 2020 dans lequel il prétend contester la créance pour sa globalité ; que ce courrier est toutefois nul et de nul effet compte tenu de l'instance en cours devant le juge-commissaire déjà saisi de la contestation de cette même créance car il appartenait au mandataire de faire valoir ses observations par voie de conclusions devant le juge-commissaire et le courrier du 11 juin 2020 ne peut avoir fait courir un nouveau délai de 30 jours pour la même créance, la SCI n'étant pas tenue d'y répondre et ne pouvant dès lors être exclue des débats,
- que sa créance doit inclure les arriérés de loyers arrêtés au 30 juin 2014 dont était saisi le tribunal de grande instance puis la cour d'appel d'Orléans mais aussi les arriérés de loyers pour la période courant du 1er juillet 2014 au 9 janvier 2019, étant rappelé que le débiteur a lui-même porté en connaissance de cause la créance privilégiée de la SCI sur la liste prévue à l'article L622-6 du Code de commerce pour la somme de 393.745,40€ ; que la société Moizard a ainsi tacitement confirmé l'arrêt du 21 mars 2019 puisqu'elle paie le loyer contractuellement convenu ainsi que lui impose l'arrêt.


L'affaire a été fixée à l'audience du 10 juin 2021 en application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile.


Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.


La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 22 avril 2021.


La cour, lors des débats à l'audience du 10 juin 2021 et par message transmis par voie électronique le même jour, a autorisé les parties à adresser par note en délibéré avant le 1er juillet 2021, leurs observations concernant l'incidence éventuelle sur la présente instance en vérification de créance, de l'instance engagée au fond par acte du 18 août 2014, au cours de laquelle la société Exploitation des clôtures Moizard a été placée sous sauvegarde le 9 janvier 2019, la veille des débats tenus devant la cour d'appel, instance reprise sur assignation du 23 décembre 2020.


Par note en délibéré transmise par voie électronique le 14 juin 2021, la société Moizard et les organes de la procédure collective (la SELARL Villa-Florek ès qualités de liquidateur et Maître [J] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan) demandent à titre principal le maintien de leur demande d'irrecevabilité de la contestation de créance par la SCI de l'Environnement devant le juge-commissaire, à défaut de réponse de celle-ci aux deux contestations de créance de Maître [N], et précisent que le juge-commissaire est compétent pour se prononcer et trancher cette question. A titre subsidiaire, ils s'en rapportent à justice sur l'incidence éventuelle de l'instance au fond sur la présente instance.


Par note en délibéré transmise le 29 juin 2021, la SCI de l'Environnement indique à titre premier qu'elle ne peut être exclue des débats devant le juge-commissaire portant sur le rejet total de la créance déclarée par elle, alors que cette proposition de rejet n'a été faite par le liquidateur que dans un second temps par courrier du 11 juin 2020, date à laquelle le juge-commissaire était déjà saisi de la première contestation formée le 26 juin 2019, sollicitant le rejet de la créance à hauteur de 4214,20€ et son admission pour 412.252,20€. Subsidiairement, elle s'en rapporte à justice sur l'incidence éventuelle de l'instance au fond sur la présente instance.




MOTIFS DE LA DÉCISION :


En application de l'article 369 du code de procédure civile :
"L'instance est interrompue par (...)
- l'effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte l'assistance ou dessaisissement du débiteur".


En vertu des articles 371 et 372 du code de procédure civile, l'instance n'est pas interrompue si l'évènement survient ou est notifié après l'ouverture des débats et le jugement même passé en force de chose jugée obtenu après l'interruption de l'instance est réputé non avenu à moins qu'il ne soit expressément ou tacitement confirmé par la partie au profit de laquelle l'interruption est prévue.


Les articles 373 et 376 du code de procédure civile précisent que l'instance peut être volontairement reprise dans les formes prévues pour présentation des moyens de défense ou par citation et que l'interruption de l'instance ne dessaisit pas le juge.


Selon l'article L. 622-21, I, 1o du code de commerce, applicable en matière de sauvegarde, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part des créanciers dont la créance n'est pas mentionnée à l'article L. 622-17, étranger au présent litige, et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.


Selon l'article L. 622-22 du même code, sous réserve des dispositions de l'article L. 625-3 étrangères à la cause, les instances sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.


En vertu de l'article L624-1 du même code, dans le délai fixé par le tribunal, le mandataire judiciaire établit, après avoir sollicité les observations du débiteur, la liste des créances déclarées avec propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridication compétente, transmet cette liste au juge-commissaire et les observations du débiteur sont faites dans un délai fixé par décret (30 jours), le débiteur qui ne formule pas d'observations dans ce délai ne pouvant émettre aucune contestation ultérieure sur la proposition du mandataire judiciaire.


Enfin l'article L624-2 du même code énonce qu'au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge-commissaire décide de l'admission ou du rejet des créances ou constate, soit qu'une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence.


En l'espèce, la locataire, la société Moizard, a initié une instance au fond par acte d'huissier du 18 août 2014, afin de voir constater principalement qu'elle est à jour du paiement de ses loyers et débouter la bailleresse de ses prétentions, celle-ci sollicitant pour sa part à titre reconventionnel la constatation de la résiliation du bail à la suite de la délivrance le 24 juillet 2014 d'un commandement de payer visant la clause résolutoire, pour un montant de 271 253,97 euros au titre d'arriérés de loyers arrêtés au 30 juin 2014, non réglé dans le délai d'un mois, outre l'expulsion de la locataire et la fixation d'une indemnité mensuelle d'occupation.


Cette instance au fond tend au paiement ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une créance antérieure au sens de l'article L. 622-21, I du code de commerce précité.


Une procédure de sauvegarde a été ouverte à l'égard de la société Moizard par jugement du 9 janvier 2019 avec désignation de Maître [O] [J] en qualité d'administrateur judiciaire ayant une mission d'assistance du débiteur et de la SELARL Villa en la personne de Maître [F] [N] en qualité de mandataire judiciaire.


La déclaration de créance adressée le 14 mars 2019 par la SCI de l'environnement porte sur le montant des loyers, charges et taxes impayées dus par la société Moizard au titre du bail commercial liant les parties et porte donc sur la créance objet de l'instance au fond engagée par assignation du 18 août 2014.


En outre, l'ouverture de la procédure de sauvegarde est antérieure aux débats qui se sont tenus devant la cour d'appel d'Orléans le 10 janvier 2019 et qui ont conduit à l'arrêt du 21 mars 2019.


La SCI de l'Environnement prétend que la société Moizard a acquiescé à l'arrêt du 21 mars 2019 au motif qu'elle règle le loyer prévu au bail, revendiqué par la bailleresse et validé par cet arrêt, depuis février 2019, que le débiteur a lui-même porté en connaissance de cause la créance privilégiée de la SCI sur la liste prévue à l'article L622-6 du Code de commerce pour la somme de 393.745,40€, et que dans la contestation de créance établie le 4 juillet 2019, ils contestent la créance à hauteur de 4214,20€ seulement et l'acceptent pour le surplus soit 412.252,20€.


Sur le premier point, le règlement du loyer stipulé au bail en février 2019 dont fait état la SCI est antérieur à l'arrêt du 21 mars 2019 et ne vaut donc pas acquiescement à cet arrêt. Le fait que ce règlement se soit poursuivi après l'arrêt du 21 mars 2019 est insuffisant à lui seul pour valoir acquiescement à cette décision.


Sur le second point, la liste prévue à l'article L622-6 du Code de commerce n'est pas produite, la pièce 14 à laquelle la SCI se réfère en page 22 de ses écritures étant un courrier de Maître [N] auquel est jointe une contestation partielle de créance effectuée par la société Moizard.


Sur le troisième point, dans son courrier du 4 juillet 2019, Maître [N] ès qualités de mandataire judiciaire indique proposer, sauf avis contraire de la SCI, le rejet de sa créance pour la somme de 4214,20€ et son admission pour le surplus soit 412.252,20€, "sous réserve de l'instance en cours" devant la cour d'appel d'Orléans. Dans ce même courrier, il se prévaut du caractère non avenu de l'arrêt du 21 mars 2019, et par la mention "sous réserve de l'instance en cours" réserve expressément la future décision qui sera rendue au fond. La société Moizard s'est aussi prévalue du caractère non avenu de l'arrêt susvisé par courrier du 10 juin 2020. Il ne peut donc être considéré dans la présente instance que la société Moizard a expressément ou tacitement acquiescé à l'arrêt du 21 mars 2019. La cour constate au surplus que la SCI de l'Environnement ne conteste pas le fait que l'instance au fond est toujours interrompue puisqu'elle a demandé sa reprise par assignation des 23 et 24 décembre 2020.


En conséquence, en application des articles 369, 371 et 372 du code de procédure civile et L 622-21, I du Code de commerce précités, l'intance au fond engagée en août 2014 a été interrompue dès le 9 janvier 2019, l'arrêt du 21 mars 2019 est non avenu et l'instance est toujours interrompue à ce jour, le juge du fond n'étant pas dessaisi et l'instance ayant été reprise par assignations des 23 et 24 décembre 2020 délivrées par la SCI de l'Environnement mais n'ayant pas encore donné lieu à une décision sur le fond à ce jour.


Par application de l'article L.624-2 du code de commerce, l'instance en cours devant le juge du fond au jour du jugement d'ouverture, ici la cour d'appel d'Orléans, enlève au juge-commissaire le pouvoir de décider de l'admission ou du rejet de celle ci. Le juge-commissaire ne pouvait donc pas, ainsi qu'il l'a fait, prononcer l'admission de la créance même partiellement.


Dans leur note en délibéré transmise le 14 juin 2021 à la demande de la cour, la société Moizard et les organes de la procédure collective demandent à titre principal le maintien de leur demande d'irrecevabilité de la contestation de créance par la SCI de l'environnement devant le juge-commissaire, à défaut de réponse de celle-ci aux deux contestations de créance de Maître [N], et précisent que le juge-commissaire est compétent pour se prononcer et trancher cette question.


La cour constate que dans le dispositif de leurs écritures, auquel seul, elle doit répondre en application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, il ne lui demandent pas de déclarer irrecevable la contestation de créance dormée par la SCI de l'environnement devant le juge-commissaire mais seulement de rejeter la créance, le défaut de réponse aux deux contestations formées par la société Moizard et son liquidateur étant soulevé uniquement à titre de moyen au soutien de leur demande de rejet.


En tout état de cause, le fait que la SCI de l'Environnement n'a pas répondu dans les délais impartis des articles L622-27 et R 624-1 du Code de commerce, à la contestation du 4 juillet 2019 puis à celle du 20 juin 2020 interdit, en vertu de ces textes, toute contestation de la proposition du mandataire judiciaire par le créancier mais n'emporte pas ipso facto le rejet de sa créance.


Surtout, cette circonstance est sans effet sur le fait qu'en application de l'article L624-2 du Code de commerce, le juge-commissaire ne peut statuer sur l'admission ou le rejet de la créance, une instance étant en cours.


Le juge-commissaire a été saisi dès janvier 2020, soit avant même la seconde contestation de créance adressée par le mandataire judiciaire le 10 juin 2020. Il devait donc dès cette date et toujours lors de sa décision prise le 2 novembre 2020, constater l'existence d'une instance en cours, le juge du fond étant toujours saisi.


L'ordonnance doit en conséquence être infirmée en ce qu'elle a statué sur la créance et il convient de constater l'existence d'une instance en cours, ce qui vide la saisine du juge-commissaire.


Les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective. L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.


PAR CES MOTIFSLa Cour,


- Infirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a prononcé l'admission de la créance de la SCI de l'Environnement pour la somme de 287.439,53 euros et son rejet pour le surplus soit 129.029,87 euros ;


Statuant à nouveau sur le seul chef infirmé,


- Constate l'existence d'une instance en cours relative à la créance déclarée par la SCI de L'Environnement le 14 mars 2019 à hauteur de la somme de 416.466,40€ et dit n'y avoir lieu à statuer sur la créance ;


- Confirme l'ordonnance déférée en ses autres dispositions critiquées ;


Y ajoutant,


- Rejette les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile et toutes les autres demandes ;


- Dit que les dépens d'appel seront passés en frais privilégiés de procédure collective.


Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

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