5 novembre 2020
Cour d'appel d'Orléans
RG n° 19/03822

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'ORLÉANS


CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE






GROSSES + EXPÉDITIONS : le 05/11/2020
la SCP VALERIE DESPLANQUES
la SELARL ACTHEMIS
ARRÊT du : 05 NOVEMBRE 2020


No : 212 - 20
No RG 19/03822
No Portalis DBVN-V-B7D-GCHY


DÉCISION ENTREPRISE : Ordonnance de référé du Président du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 05 Décembre 2019


PARTIES EN CAUSE


APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No:1265247581494375
La SAS CITOYENS DU MONDE
Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [...]
[...]




Ayant pour avocat postulant Me Valérie DESPLANQUES, membre de la SCP VALERIE DESPLANQUES, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Mathieu BOURGEOIS, avocat au barreau de PARIS






D'UNE PART


INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No:1265245226644775
La SAS MUTUAL LOGISTICS ENF
Prise en la personne de son repréentant légal domicilé en cette qualité audit siège
[...]
[...]
[...]




Ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL, membre de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Xavier ONRAED, membre de la SELARL ACTHEMIS, avocat au barreau de CAEN












D'AUTRE PART


DÉCLARATION D'APPEL en date du : 09 Décembre 2019
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 10 Septembre 2020








COMPOSITION DE LA COUR


Lors des débats à l'audience publique du 17 SEPTEMBRE 2020, à 14 heures, Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, en son rapport, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.


Après délibéré au cours duquel Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :


Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Nathalie MICHEL, Conseiller,




Greffier :


Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,




ARRÊT :


Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le 05 NOVEMBRE 2020 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :


La société Citoyens du Monde exerce une activité de commerce de gros et achète des produits alimentaires issus de l'agriculture biologique aux producteurs puis a recours à des sociétés spécialisées dans le stockage, la préparation et l'expédition de commandes, avant de revendre les produits finis.


Elle a eu recours, en 2016 et 2017 à la société Mutual logistics qui exerce diverses prestations de transport, logistique et entreposage.


Par courriel du 31 juillet 2017, elle a transmis à la société Mutual Logistics une demande aux fins d'enlèvement de marchandises (commande no 17000871) pour le 4 août 2017 par la société Belgium Fest, portant sur divers produits pour un total de 171.791,18€.


Faisant valoir que cette commande n'avait pas été honorée, qu'elle n'a obtenu aucune réponse de la société Mutual Logistics, et que la société Stef TSE Orléans qui devait procéder à l'enlèvement de la commande le 4 août 2017 n'a pas non plus eu de nouvelle, elle a fait assigner la société Mutual logistics par acte d'huissier du 10 août 2017 dans le cadre d'une procédure de référé d'heure à heure, devant le président du tribunal de commerce d'Orléans pour obtenir principalement sa condamnation sous astreinte à livrer les produits commandés.


Par ordonnance avant dire droit du 17 août 2017, le juge des référés a désigné Maître J..., Huissier de Justice à Orléans « afin de procéder au recollement entre la commande no 1700871 et les marchandises livrées entre le 16 août 2017 et le jour de la mission par la société Mutual logistics Enf à destination des entrepôts de la Société Stef Orléans – [...] et renvoyé l'affaire à l'audience du 31 août 2017.


Maître J... a dressé un procès verbal le 18 août 2017.


Par décision du 7 septembre 2017 rectifiée sur erreur matérielle par ordonnance du 8 septembre suivant et signifiée le 14 septembre 2017, le juge des référés près du tribunal de commerce d'Orléans a :
Condamné la société Mutual Logistics à livrer chez la société Stef les marchandises manquantes sous astreinte de 5000€ par jour de retard à compter du troisième jour après la signification de la présente ordonnance,
Dit qu'il convient pour déterminer les marchandises à livrer, de se référer au tableau comparatif entre les quantités commandées par la société Citoyens du Monde et les quantités indiquées sur les bons de livraison établis par la société Mutual Logistics,
Dit que la société Citoyens du Monde pourra prendre possession des marchandises en faisant appel à un huissier d eson choix éventuellement asssité d'un serrurier et de la force publique, aux frais de la société Mutual logistics,
Dit que le juge des référés du tribunal de commerce d'Orléans demeurera compétent pour liquider l'astreinte,
Condamné la société Mutual Logistics à verser à la société Citoyens du Monde la somme de 5000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.


La société Mutual Logistics a procédé à une livraison le 18 septembre 2017.


Par arrêt du 14 juin 2018 sur appel de la société Mutual logistics, la Cour d'appel d'Orléans a:
Confirmé l'ordonnance du 7 septembre 2017 rectifiée le 8 septembre 2017, sauf en ce qu'elle a fixé une astreinte sans limitation de délai,
Statuant à nouveau de ce seul chef, dit que l'astreinte de 5000€ sera limitée à 7 jours à compter du troisième jour après la signification de la présente ordonnance et que passé ce délai il appartiendra à la société Citoyens du Monde de saisir le juge du fond pour obtenir l'indemnisation de son préjudice dont il lui appartiendra de justifier,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens qu'elle a exposés.


Par assignation du 3 septembre 2019, la société Citoyens du Monde a fait assigner la société Mutual logistics devant le juge des référés du tribunal de commerce d'Orléans afin d'obtenir principalement la somme de 35.000€ au titre de la liquidation de l'astreinte.


Par ordonnance du 5 décembre 2019, le juge des référés près du tribunal de commerce d'Orléans a :
- débouté la société Citoyens du Monde de sa demande de liquidation de l'astreinte provisoire prononcée contre la société Mutual Logistics Enf,
- renvoyé pour le reste les parties à mieux se pourvoir,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens comprenant les frais de greffe à la charge de la société Citoyens du monde.


Le premier juge a retenu que la livraison ordonnée par décision des 7 et 8 septembre 2017 avait bien été effectuée dans la limite des stocks disponibles.


La société Citoyens du Monde a formé appel de la décision par déclaration du 9 décembre 2019 en intimant la société Mutuals Logistics Enf, et en critiquant tous les chefs de l'ordonnance. Dans ses dernières conclusions du 27 août 2020, elle demande à la cour de :
Vu l'ordonnance de référé du 5 décembre 2019 rendue par Monsieur le Président du Tribunal
de Commerce d'Orléans ;
Vu la déclaration d'appel no19/02830 en date du 9 décembre 2019 ;
Vu les articles L.131-1 et suivants du Code des Procédures Civiles d'Exécution,
Vu l'article 491 du Code de Procédure Civile,
Vu l'ordonnance de référé des 7 et 8 septembre 2017 rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Commerce d'Orléans, signifiée le 14 septembre 2017 suivant exploit de Me Carole
J..., Huissier de Justice,
Vu l'arrêt de la Cour d'Appel d'Orléans en date du 14 juin 2018 ;
Vu les considérations de fait et de droit précédemment exposées,
Vu l'ensemble des pièces versées au débat,
Dire et juger la société Citoyens du Monde recevable et bien fondée en son appel de l'ordonnance de référé du 5 décembre 2019 rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Commerce d'Orléans ;
Infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé du 5 décembre 2019 rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Commerce d'Orléans,
Et statuant à nouveau,
Liquider l'astreinte provisoire prononcée contre la société Mutual Logistics Enf. à la somme de 35.000,00 euros ;
En conséquence,
Condamner la société Mutual Logistics Enf. à payer cette somme de 35.000,00 euros à la société Citoyens du Monde ;
Condamner la société Mutual Logistics Enf. à verser à la société Citoyens du Monde une somme de 4.000 euros, en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Condamner la société Mutual Logistics Enf. aux entiers dépens, seront recouvrés par Maître Valérie Desplanques, en application des dispositions prévues à l'article 699 du Code de Procédure Civile ;
Dire et juger que l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article 32 de la loi no 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution, resteront à la charge de la société Mutual Logistics Enf. en cas d'inexécution spontanée de la décision à intervenir, conformément aux dispositions prévues à l'article 1342-7 du Code Civil.


Elle soutient en premier lieu que les produits listés dans l'ordonnance des 7 et 8 septembre 2017 n'ont pas été livrés en totalité lors de l'unique livraison intervenue le 18 septembre 2017, ce que la société Mutuel logistics a fini par reconnaître dans sa note en délibéré du 13 novembre 2019 et ce qui ressort aussi des déclarations de son huissier instrumentaire. Elle ajoute qu'il appartient à l'intimée de rapporter la preuve qu'elle a exécuté son obligation assortie d'une astreinte, ce qu'elle ne fait pas et que contrairement à ce qu'elle soutient, les bons de livraison contiennent des réserves, l'article 133 du Code de commerce ne régissant en outre que les actions nées du contrat de transport proprement dit, c'est à dire les rapports entre le voiturier et le destinataire et non ceux entre le fournisseur et le destinataire et ne pouvant être opposé que dans le cadre de l'inexécution d'un contrat de transport et non d'une décision de justice.


Elle fait en second lieu valoir que la société Mutual logistics ne peut se dédouaner du caractère incomplet de la livraison en invoquant l'insuffisance de ses stocks et l'impossibilité subséquente de livrer des produits dont elle ne dispose pas car elle démontre que tant lors de sa commande du 31 juillet 2017 qu'au moment de chacune des opérations de livraison effectuées, la société Mutual logistics disposait bien dans ses entrepôts, de chacune des marchandises en quantité suffisante pour honorer la commande litigieuse et respecter l'ordonnance des 7 et 8 septembre 2017. Elle indique que d'ailleurs, la société Mutual logistics a établi un état de stock le 2 novembre 2019 de l'ensemble des marchandises de Citoyens du monde restant entreposées dans ses locaux et qu'y figurent la totalité des marchandises absentes lors de la dernière livaison.


La société Mutual Logistics Enf. demande à la cour, par dernières conclusions du 31 août 2020 de :
Confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le Président du Tribunal de commerce d'Orléans le 5 décembre 2019 ayant débouté la Société Citoyens du Monde de sa demande de liquidation d'astreinte ;
À titre subsidiaire, vu l'article L. 131-4 al 1 er du Code des procédures civiles d'exécution,
Réduire à la somme de 1 € le montant de la liquidation d'astreinte provisoire prononcée les 7 et 8 septembre 2017,
Condamner la Société Citoyens du Monde à verser à la Société Mutual Logistics Enf. une somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
La condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Laval-Firkowski, avocats au Barreau d'Orléans.


Elle explique que les relations entre les parties étaient dégradées depuis plusieurs mois, que la société Citoyens du monde avait décidé de changer de prestataire pour les activités de logistique et stockage, pour les confier à la société Stef, et qu'elle a ainsi adressé une commande pour un très grand nombre de produits, soit disant au profit d'une société dont le nom (Fest) n'est autre que l'acronyme du véritable destinataire, la société Stef.


Elle soutient que c'est la raison pour laquelle elle n'a pas immédiatement exécuté la commande mais qu'elle l'a ensuite livrée entre le 16 et le 18 août 2017, puis le 18 septembre 2017 en exécution de l'ordonnance de référé. Elle fait valoir qu'elle a bien exécuté cette décision de justice car aucune réserve n'a été mentionnée sur les bons de transport lors de la réception des marchandises livrée le 18 septembre 2017 en présence des huissiers de justice mandatés par chaque parties, alors que Maître J... aurait relevé dans son constat l'existence d'écarts entre les quantités de produits commandés et livrés, s'il y en avait eu. Elle indique qu'en application de l'article 133 du Code de commerce, la société Citoyens du Monde ne peut plus opposer de réserves ni par suite, demander la liquidation de l'astreinte. Elle précise que ce texte est applicable car elle a bien effectué une prestation de transport en livrant les produits à la société Citoyens du Monde qui a la qualité de destinataire.


Elle ajoute que ses pièces 20 et 21 décrivent les opérations de livraison des 17 août et 18 septembre 2017, avec mention des écarts correspondant au manque de marchandises entre les quantités commandées et les quantités livrées, et que ces écarts proviennent soit d'une quantité de marchandises insuffisante pour répondre à la commande, soit d'un écart de stock constaté lors d'un inventaire, notamment lié à des marchandises déclassées. Elle demande subsidiairement que le quantum de l'astreinte liquidée soit restreint à l'euro symbolique.


L'affaire a été fixée à l'audience du 17 septembre 2020 en application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile.


Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.


La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 10 septembre 2020.




MOTIFS DE LA DÉCISION :


Il est constant que la commande du 31 juillet 2017 a donné lieu à une livraison partielle effectuée les 16 et/ou 17 août 2017, après l'assignation du 10 août 2017 et avant l'ordonnance du 7 septembre 2017 rectifiée le 8 septembre suivant, et que cette ordonnance a ensuite donné lieu à une livraison, le 18 septembre 2017 effectuée en présence de Maître J... et de Maître P... huissiers de justice mandatés respectivement par les sociétés Citoyens du monde et Mutual Logistics. Le présent litige concerne uniquement cette dernière livraison.


Au terme de l'article L131-4 du code des procédures civiles d'exécution :
"Le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.
Le taux de l'astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation.
L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère".


S'agissant d'une obligation de faire, il appartient au débiteur de l'obligation assortie d'une astreinte d'apporter la preuve de son exécution.


Il appartient donc en l'espèce à la société Mutual Logistics d'établir qu'elle a livré dans les délais impartis l'ensemble des produits visés dans la commande du 31 juillet 2017 qui n'ont pas déjà été livrés et sont listés dans l'ordonnance du 7 septembre 2017 (rectifiée) et, le cas échéant de rapporter la preuve d'une cause étrangère de nature à justifier la suppresion de tout ou partie de l'astreinte.


L'intimée prétend qu'à la suite de la livraison effectuée le 18 septembre 2017 en exécution de l'ordonnance susvisée, la société Citoyens du monde n'a effectué aucune réserve dans le délai de trois jours prévu par l'article L133-3 du Code de commerce et ne peut plus opposer de réserves ni demander la liquidation de l'astreinte.


Au terme de ces dispositions :
« La réception des objets transportés éteint toute action contre le voiturier pour avarie ou perte partielle si dans les trois jours, non compris les jours fériés, qui suivent celui de cette réception, le destinataire n'a pas notifié au voiturier, par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée, sa protestation motivée. (...)"


La cour observe que Maître J..., huissier de justice mandaté par la société Citoyens du monde a mentionné certaines réserves dans son procès verbal du 18 septembre 2017 concernant les dates limites d'utilisation optimales de certains produits livrés ne correspondant pas aux dates mentionnées dans le bon de livraison. En outre, selon le courriel du 31 juillet 2017, la société Mutual Logistics était seulement chargée du stockage des marchandises et c'est dans le seul cadre de l'exécution de l'ordonnance de référé qu'elle a été amenée à les transporter.










Surtout, l'article L133-3 du Code de commerce s'applique en cas d'avarie ou perte, non de retard ou d'absence de livraison comme en l'espèce. Enfin, la livraison du 18 septembre 2017 n'a pas été effectuée en exécution d'un contrat de transport classique conclu entre les parties mais d'une décision de justice, sous contrôle d'huissiers de justice ainsi que cette décision en a ouvert la possibilité. Le moyen tiré de l'article L133-3 du Code de commerce n'est donc pas opérant.


Selon l'ordonnance du 7 septembre 2017 rectifiée, il convient pour déterminer les produits à livrer, de se référer au tableau comparatif entre les quantités commandées par la société Citoyens du monde et celles indiquées sur les bons de livraison établis par la société Mutual Logistics.


Il ressort clairement du bon de livraison no 341197 de Mutual Logistics, qui est joint au constat d'huissier de Maître J... du 18 septembre 2017 et qui pour 22 types de produits, comporte une colonne "document commande" et une colonne "document livraison", avec dans chacune le nombre de quantités commandées et livrées pour chaque produit et la référence des palettes, que sur un total de 5433 quantités commandées, seules 1400 ont été livrées le 18 septembre 2017, soit un écart de 4033 produits (pièce 15 produite par l'appelante). Ces chiffres concordent avec ceux résultant du "tableau des opérations de livraison constatées au 18 septembre 2017", établi le 8 novembre 2019 par la société Mutual Logistics pour 15 produits (sa pièce 21). Il ressort en outre de l'ordonnance des 7 et 8 septembre 2017 (pages 11 et 12) que les quantités commandées figurant sur ces deux pièces 15 et 21, sont bien celles qui étaient notées comme "manquantes" au jour de l'ordonnance et n'ont donc pas été précédemment livrées, en août 2017.


Il est donc établi que l'ordonnance du 7 septembre 2017 (rectifiée) n'a pas été exécutée dans sa totalité.


La société Mutual Logistics ne conteste d'ailleurs pas l'existence d'écarts entre les produits commandés et ceux livrés, mais prétend qu'ils ne sont pas de son fait et résultent de ce que la société Citoyens du monde ne lui a pas livrées les marchandises au préalable et qu'elle ne les avait donc pas en stock.


Il lui appartient d'en rapporter la preuve.


Or il ressort d'une part, du tableau des opérations de livraison au 18 septembre 2017 établi par l'intimé (sa pièce 21), qui mentionne pour les 15 produits pris en compte, l'historique des stocks du 1er septembre 2017 (avant la livraison du 18 septembre 2017) au 12 novembre 2019, d'autre part du tableau établi par l'appelante (sa pièce 30) qui récapitule les données en stock au 10 septembre 2017 et la quantité livrée selon les bons de livraison de Mutual Logistics, que cette explication est exacte mais ne vaut que pour une partie des marchandises non livrées le 18 septembre 2017.


A titre d'exemple, il ressort du bon de livraison joint au constat de Maître J... (pièce 15 produite par l'appelante) et du tableau établi par l'intimée (sa pièce 21) que sur 118 produits "beurre de cacahuète" commandés et restant manquants au jour de l'ordonnance du 7 septembre 2020, aucun n'a été livré. Or, il est indiqué dans cette même pièce 21 que le stock était de 104 "avant" le 15 septembre 2017, ce qui résulte aussi de la pièce 30 produite par l'appelante, au 10 septembre 2017. Certes, cette même pièce 21 mentionne au 15 septembre 2017 un stock négatif à hauteur de "-104". Toutefois, l'intimée n'établit pas pourquoi le stock, positif au 10 septembre 2017, devient négatif cinq jours plus tard. Il doit dès lors être considéré que l'intimée avait en stock au moins le 10 septembre 2017, 104 quantités de ce produit et qu'en l'absence de justificatif quant à la disparition des ces 104 marchandises, son explication tenant à l'absence de stock disponible n'est établie que pour 14 quantités de ce produit, sur un total de 118.


Plus largement, pour les 15 produits listés dans la pièce 21 de la société Mutual logistics, il n'est mentionné un stock disponible inférieur à la quantité commandée que pour 6 produits, et là encore, le stock indiqué permettait en principe de livrer une partie de la quantité commandée, même s'il est mentionné en négatif le 15 septembre 2017, sans motif connu. En outre, cette insuffisance de stock ne peut être quantifiée de manière précise, les quantités de stock mentionnées dans la pièce 21 produite par l'intimée étant pour partie différentes de celles indiquées dans l'état des stocks produit en pièce 30 par l'appelante.


Par ailleurs, les exemples que donne dans ses conclusions (pages 7 et 8) la société Mutual Logistics au sujet de quatre produits ne sont pas probants car ils établissent une comparaison entre le stock au 31 juillet 2017 et le bon de réception établi par la société Stef le 16 août 2017 alors que le litige soumis à la cour ne porte pas sur la livraison du 16 août, mais sur celle du 18 septembre 2017 effectuée en exécution de l'ordonnances du 7 septembre 2017 rectifiée.


Il est ainsi établi d'une part que la société Mutual Logistics n'a pas exécuté en totalité cette décision de justice, ce dans des proportions importantes puisqu'elle n'a livré que 1400 produits sur un total de 5433 qui restaient manquants au jour de cette ordonnance, soit un écart de 74% (4033 produits manquants), d'autre part que l'explication qu'elle invoque tenant à l'absence de produits en stock n'est démontrée que pour une part seulement des produits manquants.


C'est donc à tort que le premier juge a retenu que la livraison ordonnée par les ordonnances des 7 et 8 septembre 2017 avait été effectuée dans la limite des stocks disponibles. Il convient dès lors de faire droit à la demande de liquidation de l'astreinte qui, au vu du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter, sera liquidée à hauteur de la somme de 25.000€.


La société Citoyens du monde obtenant en partie gain de cause, la société Mutual logistics sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel, outre le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Desplanques avocat.


Il n'y a pas lieu de dire que les droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article 32 de la loi no 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution, resteront à la charge de la société Mutual Logistics Enf. en cas d'inexécution spontanée de la décision à intervenir. En effet, le droit proportionnel pouvant être alloué aux huissiers lorsqu'ils recouvrent ou encaissent des sommes après avoir reçu mandat ou pouvoir à cet effet (prévu par le tableau 3-1 no 129 créé par l'article A 444-32 du Code de commerce issu de l'arrêté du 26 février 2016), reste à la charge du créancier conformément à l'article R444-55 du même code issu du décret no 2016-230 du 26 février 2016, aucune dérogation n'étant prévue.


La société Mutual Logistics devra en outre verser à l'appelante d'une indemnité de 2500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
























PAR CES MOTIFS


La Cour,


- Infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;


Statuant à nouveau et y ajoutant,


- Condamne la société Mutual Logistics Enf. à payer à la société Citoyens du monde une somme de 25000€ au titre de la liquidation de l'astreinte mise à sa charge par l'ordonnance du 7 septembre 2017 rectifiée le 8 septembre 2017 et l'arrêt du 14 juin 2018 ;


- Condamne la société Mutual Logistics Enf. à verser à la société Citoyens du monde une indemnité de 2500€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;


- Condamne la société Mutual Logistics Enf. aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;


- Rejette le surplus des demandes.


Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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