6 novembre 2012
Cour d'appel d'Angers
RG n° 11/01962

Texte de la décision

COUR D'APPEL
D'ANGERS
Chambre Sociale


ARRÊT N
CLM/ FB


Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 01962.


Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LA MAYENNE, décision attaquée en date du 17 Juin 2011, enregistrée sous le no 469




ARRÊT DU 06 Novembre 2012


Assurée Jennifer X...



APPELANTE :


SOCIETE RANDSTAD
276 Avenue du Président Wilson
93211 LA PLAINE SAINT DENIS CEDEX


représentée par Maître Olivier PFLIGERSDORFFER substituant Maître Philippe PAPIN (SCP), avocat au barreau d'ANGERS


INTIMEE :


CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA MAYENNE
37, boulevard Montmorency
53084 LAVAL CEDEX 9


représentée par Madame Cécile Y..., muni d'un pouvoir




COMPOSITION DE LA COUR :


En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Septembre 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :


Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président
Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller
Madame Anne DUFAU, conseiller


Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier


ARRÊT :
prononcé le 06 Novembre 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


*******




FAITS ET PROCÉDURE :


Le 2 mars 2007, la société VEDIOR BIS, aux droits et obligations de laquelle se trouve aujourd'hui la société RANDSTAD, a souscrit auprès de la caisse primaire d'assurance maladie de la Mayenne une déclaration d'accident du travail, sans réserves, concernant Mme Jennifer X..., alors mise à la disposition de la Corderie Henri Lancelin en qualité d'ouvrière non qualifiée.
Cette déclaration était relative à un accident survenu le 1er mars 2007 à 11h55 dont les circonstances étaient relatées en ces termes : " En préparant une bobine, Mme X... a oublié d'ôter son pouce avant de lancer la machine et elle s'est blessée ".


Cet accident a donné lieu à l'établissement, le 1er mars 2007, d'un certificat médical initial, par un médecin du centre hospitalier de Mayenne constatant deux fractures au niveau du pouce droit et prescrivant un arrêt de travail jusqu'au 16 mars 2007, ainsi que des soins jusqu'au 13 avril suivant.


Par courrier du 7 mars 2007, la caisse a notifié à la salariée sa décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident survenu le 1er mars précédent.


Le 12 novembre 2009, la société RANDSTAD a saisi la commission de recours amiable d'une demande tendant à lui voir déclarer inopposable la décision de prise en charge du 7 mars 2007. Ce recours a été rejeté par décision du 6 avril 2010, notifiée le 19 avril suivant.
Par lettre recommandée postée le 27 janvier 2010, la société RANDSTAD a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Laval d'un recours à l'encontre de cette décision de la commission de recours amiable.


Par jugement du 17 juin 2011auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le tribunal a reçu la société RANDSTAD en son recours mais l'en a déboutée, et lui a déclaré opposable la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident dont Mme Jennifer X... a été victime le 1er mars 2007.


Les deux parties ont reçu notification de ce jugement le 7 juillet 2011. La société RANDSTAD en a régulièrement relevé appel par lettre recommandée postée le 29 juillet 2011.




PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :


Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 2 février 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société RANDSTAD demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de lui déclarer inopposable la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident dont Mme Jennifer X... a été victime le 1er mars 2007.


Elle indique que sa demande n'est pas fondée sur les dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale et elle fait valoir que, dès lors qu'en application de l'article R. 441-13 du même code, elle a, par lettre du 2 mars 2007, sollicité de la caisse, avant qu'elle ne prenne sa décision, la




communication du dossier visé par ce texte, comportant, notamment, le certificat médical initial qui est une pièce susceptible de faire grief à l'employeur, l'organisme social avait l'obligation de procéder à cette communication ; qu'il est indifférent à cet égard que l'accident de Mme X...ait donné lieu à une décision de prise en charge d'emblée ; que, faute pour la CPAM de la Mayenne d'avoir répondu à sa demande de communication du dossier de Mme X..., notamment de transmission du certificat médical initial, alors que cette demande lui avait été présentée avant qu'elle ne prenne sa décision, elle a failli à son obligation d'information et de respect du contradictoire, ce qui justifie la décision d'inopposabilité sollicitée.




Elle estime que l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale instaure un droit pour l'employeur d'obtenir la communication du dossier visé par ce texte même si la caisse ne met pas de mesure d'instruction en oeuvre et prend sa décision d'emblée ; que cette communication est impérative dès lors que l'employeur en formule la demande avant que la caisse ait pris sa décision, ce qu'elle soutient avoir fait, en l'occurrence, par lettre du 2 mars 2007.


Elle ajoute qu'en vertu de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, la caisse est tenue d'assurer l'information de l'employeur relativement aux éléments susceptibles de lui faire grief ; qu'il s'ensuit qu'elle doit porter à sa connaissance tous les éléments de nature à lui faire grief sur lesquels elle fonde sa décision et qui n'étaient pas connus de lui. Elle considère qu'il en est ainsi en l'espèce du certificat médical initial dont elle n'avait pas connaissance et qui a nécessairement participé à fonder la décision de la caisse.




Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 10 septembre 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la caisse primaire d'assurance maladie de la Mayenne demande à la cour de débouter la société RANDSTAD de son appel, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de condamner l'appelante à lui payer la somme de 800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.




Elle oppose que :


- la caisse est dispensée de respecter le principe du contradictoire lorsqu'en l'absence de réserves de l'employeur, elle ne procède à aucune mesure d'instruction avant la décision ;


- l'absence de communication du certificat médical initial dans ce type d'hypothèse ne peut pas être sanctionnée par l'inopposabilité de la décision de prise en charge à l'employeur ;


- les dispositions de l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale sont indissociables de celles de l'article R. 441-11 du même code qui traitent de la procédure d'instruction ;


- outre que la société RANDSTAD ne justifie pas de la réalité de l'envoi du courrier du 2 mars 2007 par lequel elle prétend avoir sollicité la communication des pièces du dossier de Mme X..., le défaut de réponse à




ce courrier est, en tout état de cause, sans incidence sur la solution du présent litige.


La caisse conteste donc avoir failli à son obligation d'information et de respect du contradictoire.




MOTIFS DE LA DÉCISION :


Attendu que les premiers juges ont, à juste titre, déclaré recevable le recours diligenté par la société RANDSTAD contre la décision de la CRA du 6 avril 2010, notifiée par lettre du 19 avril suivant, en ce qu'il l'a été dans les formes et le délai de deux mois requis par l'article R 142-18 du code de la sécurité sociale ;


****


Attendu que l'article R 441-11 du Code de la Sécurité Sociale, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que : « Hors les cas de reconnaissance implicite, et en l'absence de réserves de l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayants droits et de l'employeur, préalablement à sa décision, sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief.
En cas de réserves de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse, hors le cas d'enquête prévue à l'article L. 442-1, envoie, avant décision, à l'employeur et à la victime, un questionnaire portant sur les circonstances où la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès.
La victime adresse à la caisse la déclaration de maladie professionnelle dont un double est envoyé par la caisse à l'employeur. » ;


Et attendu que l'article R 441-13 du Code de la Sécurité Sociale énonce que : « Le dossier constitué par la caisse doit comprendre :
1o la déclaration d'accident du travail et l'attestation de salaire ;
2o les divers certificats médicaux ;
3o les constats faits par la caisse primaire ;
4o les informations parvenues à la caisse de chacune des parties ;
5o les éléments communiqués par la caisse régionale ;
6o éventuellement, le rapport de l'expert technique.
Il peut, à leur demande, être communiqué à l'assuré, ses ayants droit et à l'employeur, ou à leurs mandataires. Ce dossier ne peut être communiquer à un tiers que sur la demande de l'autorité judiciaire. » ;


Attendu que ces deux textes s'inscrivent dans le cadre de l'obligation d'information qui pèse sur la caisse d'assurance maladie lorsqu'elle met en oeuvre une mesure d'instruction, soit en raison de réserves émises par l'employeur, soit d'office ;


Attendu que l'article R. 441-11 prévoit que, dans un tel cas, la caisse doit, avant de prendre sa décision sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie, assurer l'information, notamment de l'employeur, sur la procédure d'instruction qu'elle a menée et sur les points susceptibles de lui faire grief ;
Que l'article R. 441-13 indique quant à lui que le dossier constitué par la caisse doit comporter divers éléments, parmi lesquels, les certificats médicaux ;


Mais attendu qu'en cas de prise en charge d'emblée d'un accident déclaré sans réserves par l'employeur, la caisse, qui n'a pas diligenté de mesure
d'instruction, n'est pas tenue d'assurer, préalablement à sa décision sur le caractère professionnel de l'accident, l'information de l'employeur et n'a pas davantage l'obligation de tenir le dossier constitué conformément aux dispositions de l'article R 441-13 du code de la sécurité sociale ; qu'a fortiori, elle n'est pas tenue d'en envoyer une copie à l'employeur, notamment une copie du certificat médical initial ;


Attendu qu'en l'espèce, la CPAM de la Mayenne, qui a pris sa décision de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident litigieux, sur le seul fondement de la déclaration d'accident du travail souscrite sans réserves par l'employeur le 2 mars 2007 et du certificat médical initial du 1er mars 2007 descriptif des lésions de Mme Jennifer X..., n'était pas tenue à l'égard de la société RANDSTAD, d'une obligation d'information préalable à sa décision, ni, dès lors, à supposer établie la réalité de l'envoi de la lettre du 2 mars 2007 par laquelle l'employeur prétend avoir réclamé à la caisse les pièces du dossier visé à l'article R. 441-13 du code de la sécurité sociale, de lui adresser les éléments réclamés ;


Attendu que la société RANDSTAD est en conséquence mal fondée à soutenir que la CPAM de la Mayenne aurait failli à son obligation d'information et de respect du contradictoire, et en sa demande tendant à ce que la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident survenu à Mme Jennifer X... le 1er mars 2007 lui soit déclarée inopposable ; que le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;


Attendu qu'il paraîtrait inéquitable de laisser à la CPAM de la Mayenne la charge de l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a pu exposer dans le cadre de la présente instance d'appel ; que la société RANDSTAD sera condamnée à lui payer de ce chef une indemnité de 800 € ;


PAR CES MOTIFS :


La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire,


Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;


Y ajoutant,


Condamne la société RANDSTAD à payer à la CPAM de Maine et Loire la somme de 800 € (huit cents euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;


Fixe le droit d'appel prévu par l'article R. 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelante qui succombe au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale et condamne la société RANDSTAD au paiement de ce droit ainsi fixé.




LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,








Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL

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