27 avril 2012
Cour d'appel de Fort-de-France
RG n° 10/00619

Texte de la décision

ARRET No

R. G : 10/ 00619



LA SARL BEAUTY ISLAND

X...




C/


Y...


COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 27 AVRIL 2012

Décision déférée à la cour : Ordonnance du Tribunal Mixte de Commerce de Fort-de-France en date du 10 Août 2010, enregistrée sous le no 10/ 00034.



APPELANTES :

LA SARL BEAUTY ISLAND, représentée par sa gérante Melle X... Gwladys
38 Rue Schoelcher
97230 SAINTE-MARIE

représentée par Me Lucien ALEXANDRINE, avocat au barreau de MARTINIQUE



Mademoiselle Gwladys X...


...


...

97220 LA TRINITE

représentée par Me Lucien ALEXANDRINE, avocat au barreau de MARTINIQUE



INTIMEE :

Madame Elisabeth Y...


...

97230 SAINTE-MARIE

représentée par Me Malika NEGRE-JEAN-CHARLES, avocat au barreau de MARTINIQUE



COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Février 2012, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme BELLOUARD-ZAND, conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de



Monsieur EXPERT, Premier Président
Mme DERYCKERE, Conseillère
Mme BELLOUARD-ZAND, Conseillère

Les parties ont été avisées de la date du prononcé de l'arrêt fixée au
27 AVRIL 2012.

GREFFIER : lors des débats : Mme SOUNDOROM,



ARRET : contradictoire
prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

EXPOSE DU LITIGE

Vu l'assignation délivrée le 10 février 2010 par Mme Elisabeth Y... exploitant sous l'enseigne Best Of Nature un fonds de commerce de détail de produits cosmétiques, à Mme Glwadys X... et à Mme Z... aux fins de les voir condamner à cesser l'activité exercée au... à Sainte-Marie, à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de les condamner à cesser le détournement de clientèle, de parasitisme et le dénigrement sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, leur faire défense d'utiliser les notices de produits, fichiers fournisseurs et fichiers clients de Best Of Nature sous astreinte de 500 euros par infraction constatée, de les condamner solidairement à lui payer à titre provisionnel les sommes de 15 000 euros au titre de la concurrence déloyale et 10 000 euros au titre de son préjudice moral.

Vu l'assignation délivrée par Mme Elisabeth Y... à la société Beauty Island aux fins d'ordonnance commune.

Vu l'ordonnance en date du 10 août 2010 condamnant la société Beauty Island et Mme Glwadys X... à cesser le détournement de clientèle, le dénigrement, la confusion et le parasitisme huit jours après la signification sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à payer à titre provisionnel la somme de 4 000 euros à Mme Mme Elisabeth Y... en réparation de son préjudice moral et ordonnant la publication de la décision au... à Sainte-Marie et dans le journal France Antilles aux frais de la société Beauty Island dans la limite de 800 euros.

Vu l'appel de la décision interjeté le 23 septembre 2010 par la société Beauty Island et Mme Glwadys X....



Vu les conclusions de la société Beauty Island et Mme Glwadys X.... en date du 17 mai 2011, faisant valoir que la preuve des faits reprochés n'est pas rapportée et que le préjudice résultant d'une prétendue concurrence déloyale ne l'est pas davantage, demandant à la cour d'infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions.

Vu les conclusions de Mme Elisabeth Y... en date du 27 octobre 2011, estimant que le premier juge a justement apprécié les faits caractérisant un détournement de clientèle, un dénigrement, et un parasitisme, faisant état d'un préjudice financier s'élevant à la somme de 100. 376 euros, demandant à la cour de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a condamnée la société Beauty Island et Mme Glwadys X... à cesser le détournement de clientèle sous astreinte, à payer la somme de 4. 000 euros à valoir sur le préjudice moral de Mme Elisabeth Y..., en ce qu'elle a ordonné la publication du dispositif de la décision, de l'infirmer en ce qu'elle a rejeté la demande au titre du préjudice financier et de condamner solidairement la société beauty Island et Mme Glwadys X... à lui payer la somme de 100. 376 euros

Vu l'ordonnance de clôture en date du 8 décembre 2011

MOTIFS DE LA DÉCISION

Mme Elisabeth Y... fait état d'un détournement de
clientèle, de dénigrement et de parasitisme.

Se plaignant de concurrence déloyale, elle a saisi le juge des référés d'une demande tendant à faire cesser les agissements dénoncés et d'une demande d'allocation d'une provision à valoir sur son préjudice moral et sur son préjudice financier.

Aux termes de l'article 873 du code de procédure civile le Président du tribunal peut même en présence d'une contestation sérieuse prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Par ailleurs, l'alinéa 2 de l'article 873 du code de procédure civile prévoit que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Que ce soit en première instance ou devant le juge d'appel, l'imminence d'un dommage qu'il convenait de prévenir n'a jamais été invoquée par Mme Elisabeth Y... qui se plaint de troubles d'ores et déjà réalisés.

En matière de concurrence déloyale, la compétence du juge des référés pour faire cesser un trouble manifestement illicite trouve application lorsqu'avec une évidence et une incontestabilité suffisantes est commise une faute tenant au dénigrement, à l'appropriation de clientèle, à l'embauchage de salarié etc.

En l'espèce, il résulte des pièces produites que l'ouverture du magasin de la société Beauty Island a été précédée d'une campagne publicitaire et suivie de la pose d'une enseigne au nom de la société dès la fin du mois de janvier 2009, même s'il n'est pas contesté que le magasin a pu fonctionner quelques jours, voir quelques semaines, sans enseigne.

Cependant l'identification de l'établissement qui figure sur les tickets de caisse écarte toute possibilité de confusion, ce que confirme d'ailleurs les attestations produites, puisque seule l'une d'entre elles fait état d'une possible confusion avec l'entreprise de Mme Elisabeth Y....

Par ailleurs, il n'est pas établi que les appelantes soient à l'origine des informations malveillantes rapportées par certaines attestations de sorte que le dénigrement qui leur est reproché n'est ni évident ni incontestable.

Le parasitisme tenant au comportement d'un agent économique qui s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit de ses efforts et de son savoir faire, sans rien dépenser, mentionné sans autre précision, ne résulte pas du seul constat de la similitude d'activité, de clientèle et de fournisseurs s'agissant particulièrement de produits de vente courante, conformément au principe de la liberté de concurrence, ni de la création de l'entreprise concurrente par un ancien salarié ou de l'embauche d'une ancienne salariée de Mme Elisabeth Y....

En effet, il est admis que l'embauche par un employeur d'un salarié ayant appartenu récemment à une entreprise exerçant une activité dans le même secteur ou la création d'une entreprise concurrente par un ancien salarié de celle-ci, et même le fait que l'intéressé ait avisé la clientèle de la création d'une nouvelle société ne suffisent pas à caractériser une faute, encore moins une faute d'une évidence et d'une incontestabilité suffisante pour donner compétence au juge des référés.

Au regard de ces éléments, l'obligation de la société Beauty Island et de Mme Glwadys X... à réparer le préjudice moral et financier allégué par Mme Elisabeth Y... apparaît sérieusement contestable, de sorte que l'allocation d'une provision ne peut être ordonnée.

Dans ces conditions, il convient d'infirmer l'ordonnance et de dire qu'il n'y a lieu à référé.

L'équité commande d'allouer à la société Beauty Island et à Mme Glwadys X... la somme de 2. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise ;

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de Mme Elisabeth Y... ;

Condamne Mme Elisabeth Y... à payer à la société Beauty Island et à Mme Glwadys X... la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

La condamne aux dépens de première instance et d'appel ;

Autorise Maître Lucien Alexandrine qui en a fait la demande à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



Signé par M. EXPERT, Premier Président et Mme SOUNDOROM, greffier, lors du prononcé auquel la minute a été remise.

LE GREFFIER, LE PREMIER PRESIDENT,

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