21 juin 2011
Cour d'appel de Paris
RG n° 10/13806

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 21 JUIN 2011

(no 225, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 13806

Décision déférée à la Cour :
jugement du 9 juin 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 09/ 04937



APPELANT

Monsieur Jacques X...


...


...

97480 SAINT JOSEPH LA REUNION
représenté par la SCP SCP MONIN D AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour
assisté de Me Romain BATTAJON, avocat au barreau de PARIS, toque : P 094
SCP DELHOMME BREGOU & ASSOCIES



INTIMEE

S. E. L. A. R. L. A...
B...
C..., prise en la personne de ses représentants légaux

...

97451 SAINT PIERRE CEDEX
représentée par Me Dominique OLIVIER, avoué à la Cour
assistée de Maître Catherine EGRET, avocat au barreau de PARIS, toque : G 450
substituant Maître Marcel PORCHER, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 mai 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Dominique GUEGUEN, conseiller chargé du rapport, en présence de Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur François GRANDPIERRE, Président
Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller
Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller



Greffier, lors des débats : Madame Noëlle KLEIN



ARRET :

- contradictoire
-rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, président de chambre
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire. **********

M. X..., exerçant en nom propre dans un fonds de commerce de criblage de produits concassés apporté à la Sarl Crib dont il était l'associé unique, a cédé le 8 juillet 2000 ses parts à MM. Jean-François et Eric D..., avec signature concomitante d'un acte de garantie du passif susceptible de se révéler faisant obligation à M. X... de séquestrer la somme de 500 000 frs : découvrant un passif fiscal de la société Crib pour un montant de 62 439, 04 €, lié à un redressement au titre de redevances domaniales pour les années 1996 à 1999 à la suite d'un avis de mise en recouvrement émis le 15 octobre 2001, les consorts D... ont demandé la mise en oeuvre de la garantie de passif et par acte du 11 novembre 2000 M. X... a consenti un prêt à la société Crib de 76 224, 50 €, remboursable en trois termes annuels de 30 651 €, avec intérêts compris au taux de 10 % l'an : en garantie du remboursement du prêt, les consorts D... se sont portés cautions solidaires et indivisibles avec renonciation à leur bénéfice de division et de discussion, étant précisé que M. X... était alors conseillé pour la rédaction de ces divers actes par M. David A..., avocat.

La société Crib n'ayant pas remboursé le prêt malgré un commandement de payer en date du 3 décembre 2002, M. X... a mandaté pour recouvrer sa créance M. Y...
A..., avocat associé de la Selarl Georges A... et Z...
B...- C..., du barreau de Saint-Pierre de la Réunion, spécialisé en droit des sociétés, droit commercial et droit économique, lequel a engagé dans l'intérêt de M. X... une première instance à l'encontre de la société Crib, débiteur principal et des consorts D..., cautions, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Saint-Pierre, donnant lieu à une ordonnance de ce magistrat en date du 8 avril 2003 constatant l'existence d'une contestation sérieuse, puis les 18 et 20 août 2003, a assigné la société Crib et les consorts D... pour obtenir leur condamnation solidaire à lui rembourser le prêt devant le tribunal de grande instance de Saint-Pierre.

Entre-temps, par acte du 22 juillet 2003, par un acte rédigé par M. David A..., MM. D... ont cédé la totalité des parts de la société Crib à la société Prefabloc Agrégats, dirigée par M. Maximin G..., au prix de 267 523, 11 € outre le rachat des comptes courants d'associé pour 72 806, 24 €.

Par jugement du 18 mai 2004, la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Saint-Pierre a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la Sarl Prefabloc Agregats, anciennement Crib, laquelle, par la suite, bénéficiera aux termes d'un jugement du 11 janvier 2005 d'un plan de continuation.

Après un jugement statuant pour partie avant dire droit en date du 2 mars 2004, suivi d'un arrêt du 5 septembre 2005 de la cour d'appel de Saint-Denis, le tribunal de grande instance de Saint-Pierre, par un jugement du 3 juillet 2007, a débouté M. X... de ses demandes, pour absence de déclaration de sa créance au passif de la débitrice principale placée en redressement judiciaire le 18 mai 2004, lequel jugement sera confirmé par un arrêt en date du 8 septembre 2008 de la cour d'appel de Saint-Denis.

M. X... a reproché à M. A..., avocat en charge de ses intérêts d'avoir commis une faute dans l'exercice de sa mission en s'abstenant de déclarer en temps utile cette créance, alors qu'il avait été informé de la situation financière préoccupante de la société Préfabloc Agregats, omission dont il estime qu'elle lui a fait perdre sa créance puisque le tribunal susvisé de Saint-Pierre a, en d'autres termes, constaté l'extinction de sa créance tant à l'égard de Crib qu'à l'égard des cautions, les consorts D..., alors qu'il soutient que la société débitrice n'était pas totalement obérée puisque le plan de continuation homologué par le jugement susvisé du 11 janvier 2005 a acté l'acceptation de 11 créanciers pour un échelonnement de paiement sur 5 ans de leurs créances qui représentaient au total une somme de 1 510 733, 40 € : c'est dans ces conditions que M. X... a recherché devant le tribunal de grande instance de Paris, au visa des dispositions des articles 1134 et 1147 du code civil, la responsabilité civile professionnelle contractuelle de la Selarl d'avocats Y...
A...- Z...
B...- C... et invoquant sa perte de chance, a demandé sa condamnation à lui payer la somme de 76224, 50 € augmentée des intérêts au taux conventionnel de 10 % à compter du 3 décembre 2002 ainsi qu'une indemnité de procédure de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 6 juin 2010, le tribunal a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité soulevée par la défenderesse, a débouté M. X... de ses demandes, a rejeté la demande de la Selarl fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, condamné M. X... aux dépens.

CELA ETANT EXPOSE, la COUR :

Vu l'appel interjeté le 5 juillet 2010 par M. Jacques X...,

Vu les conclusions déposées le 5 novembre 2010 par l'appelant qui demande la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu des fautes professionnelles à l'encontre de M. Y...
A..., son infirmation en ce qu'il l'a débouté de ses demandes au motif qu'il ne rapportait pas la preuve de son préjudice matériel, statuant de nouveau, la condamnation de la Selarl Y...
A...- Z...
B...- C... à lui payer, au titre de son préjudice financier, la somme de 76 224, 50 €, augmentée du taux conventionnel de 10 % l'an à compter du 3 décembre 2002, au titre de son préjudice moral la somme de 15000 €, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 5000 €, ainsi qu'à payer les entiers frais et dépens,

Vu les conclusions déposées le 5 avril 2011 par la Selarl d'avocats A...- B...- C... qui forme appel incident, demande l'infirmation du jugement, statuant à nouveau, l'irrecevabilité de la demande de M. X... à son encontre, subsidiairement le débouté de M. X... de toutes ses demandes au constat de l'absence de faute commise par la concluante, plus subsidiairement, au motif qu'il n'existe aucun lien de causalité entre la prétendue faute de la concluante et le prétendu préjudice de M. X..., très subsidiairement, dire que la perte de chance ne saurait être évaluée à une somme supérieure à 1 €, dire la demande au titre d'un préjudice moral irrecevable en vertu de l'article 564 du code de procédure civile comme nouvelle et subsidiairement mal fondée, en tout état de cause, la condamnation de M. X... à lui payer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les entiers dépens.

SUR CE :

Sur la recevabilité de la demande de M. X... :

Considérant que la Selarl intimée, au motif qu'elle est une personne juridique différente de M. Y...
A..., lequel est seul avocat, tandis que la Selarl ne l'est pas, fait valoir que l'action dirigée contre elle doit être déclarée irrecevable en l'absence de lien de droit avec M. X... qui ne l'a pas mandaté personnellement, seul l'avocat représentant la partie conformément à l'article 4 de la loi du 31 décembre 1971 ;

Considérant toutefois que chaque associé d'une Selarl répond des actes professionnels qu'il accomplit et que la Selarl est solidairement responsable avec lui des conséquences dommageables de ces actes ; qu'il en résulte que l'action en responsabilité peut être indifféremment engagée contre la Selarl ou l'associé ou encore contre les deux ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont estimé la demande formée par M. X... recevable, le jugement étant confirmé de ce chef ;

Sur le fond :

Sur la faute :

Considérant que l'appelant, au titre du devoir d'information et de conseil auquel son avocat était tenu à son égard, ainsi que de l'obligation lui incombant d'effectuer tous les actes nécessaires à la défense de ses intérêts, fait valoir que la faute commise par M. A..., clairement mandaté pour recouvrer la créance de son client tant à l'égard de la société Crib, devenue Prefabloc qu'à l'égard des cautions consiste dans le fait de ne pas avoir, dans un cas de redressement judiciaire, procédé à la déclaration de créance au passif de la société Préfabloc ; qu'il souligne que M. A... ne pouvait se méprendre sur l'étendue de sa mission dès lors qu'il s'était par ailleurs préoccupé de préserver ses droits au travers d'une saisie conservatoire des parts sociales détenues par les consorts D... au sein d'une Sci dénommée " Les Camphriers ", qu'il était par ailleurs parfaitement informé de l'existence du redressement judiciaire ce qu'il a admis dans un courrier du 21avril 2008 ; que son conseil a prétendu avoir reçu une instruction contraire de son client, se refusant à agir contre M. Maximin G... dirigeant la société Prefabloc avec lequel il était par ailleurs en négociation pour la résiliation d'un bail emphytéotique, et souhaitant en conséquence ne pas déclarer la créance au passif, mais sans établir la preuve d'une telle affirmation que l'appelant conteste avec force, n'ayant au surplus jamais été informé par son avocat de la nécessité de procéder à la déclaration de sa créance ; qu'en outre, il reproche à son conseil de n'avoir pas, de lui-même et sans qu'il soit besoin d'instructions reçues du client, pris de garanties sur les biens de la société pour obtenir l'exécution du jugement mixte du 2 mars 2004 condamnant avec exécution provisoire la débitrice principale ;

Considérant que l'intimé, rappelant n'être tenu seulement qu'à une obligation de moyens en raison de l'aléa inhérent à son activité et au fait que l'issue d'une instance n'est jamais certaine, estime être en mesure de démontrer par les circonstances procédurales qu'il n'a nullement failli dans la défense des intérêts de son client ; qu'il rappelle d'abord que seul M. David A... était le conseil et le rédacteur d'acte de M. X... pour la cession des parts sociales et pour le prêt, que les termes du jugement avant dire droit du 2 mars 2004 du tribunal de grande instance de Saint-Pierre sont édifiants, qu'il s'agissait alors avant tout pour M. X... de poursuivre les cautions, soit M. Jean-François D... organisant son insolvabilité, lequel avait fait appel ce qui a nécessité d'attendre le résultat de l'instance en appel sur la validité de cette caution c'est à dire l'arrêt confirmatif sur ce point de la cour d'appel du 5 septembre 2005 ; qu'il fait valoir qu'il était au surplus nécessaire de vider le contentieux de la compensation éventuelle soulevé par le tribunal entre le blocage du prix de vente par M. X... et le paiement de la dette fiscale par M. D... et qu'il rencontrait des difficultés pour obtenir de son client les documents sollicités par la juridiction ; que par ailleurs, du fait que les consorts D... avaient cédé leurs parts à la Sarl Prefabloc, dirigée par M. G..., ami de M. X..., ce dernier ne souhaitait pas agir contre la société Prefabloc, dont il connaissait la situation financière, ce qui ressort d'ailleurs des écritures établies dans l'intérêt de la société Prefabloc dans les différentes instances ce d'autant que M. X... négociait par ailleurs avec M. G... la résiliation d'un bail emphytéotique à son profit ; qu'ainsi le client n'avait pas intérêt à déclarer sa créance car si cette résiliation avait été portée à la connaissance des organes du redressement judiciaire, elle aurait été remise en cause dès lors qu'elle préjudiciait aux droits des créanciers voyant ainsi diminuer l'actif de la société Prefabloc ; que cette situation explique amplement l'absence de déclaration de créance ; qu'ensuite seulement est intervenu le jugement du 3 juillet 2007 qui a constaté l'extinction de la créance de M. X... ; que s'agissant des garanties à prendre pour préserver la créance de M. X..., il ne peut davantage lui être reproché de ne pas avoir pu exécuter un jugement alors frappé d'appel, le redressement judiciaire de la société Prefabloc intervenant aux droits de la société Crib étant survenu entre temps ;

Considérant que l'intervention de M. David A..., à diverses reprises, en qualité de rédacteur d'acte est entièrement distincte de celle de M. Y...
A..., mandaté pour le recouvrement d'une créance et ne saurait avoir influence sur l'appréciation de la responsabilité civile professionnelle propre que l'intimé a été susceptible d'engager en particulier pour défaut de déclaration de créance ;

Considérant que par des motifs pertinents que la cour approuve les premiers juges ont retenu la faute commise en l'espèce par M. Y...
A..., dès lors que, quels que soient les développements de procédure sus-rappelés dont l'intimé se prévaut longuement, il est constant qu'il était en charge d'une procédure visant à la fois la société Prefabloc et les cautions et qu'il lui fallait prendre toutes mesures garantissant le succès des poursuites, peu important que M. X... souhaite ou non in fine faire exécuter la décision ; qu'il ne conteste pas, ce qu'il a écrit dans un courrier du 21 avril 2008, avoir été informé, par son client d'ailleurs qui lui en a lui-même remis à son cabinet les documents, de la situation de redressement judiciaire de la Sarl Prefabloc Agregats, qu'il n'est pas en mesure de démontrer, ne le revendiquant d'ailleurs même pas, qu'il ait informé son client de la nécessité d'effectuer la déclaration de créance, ce qui relevait pourtant de son obligation de conseil et de son devoir d'efficacité ; qu'il devait produire au passif, même sans instruction particulière de son client, qu'il s'agit de démarches relevant de l'initiative d'un avocat normalement diligent ; qu'il fallait d'autant plus le faire contre la débitrice principale pour ne pas perdre les droits à l'encontre des cautions, tenues d'une obligation accessoire à l'obligation principale ;

Considérant que l'appelant est fondé à reprocher à son conseil une autre faute en ce que le jugement mixte du 2 mars 2004 du tribunal de grande instance de Saint-Pierre avait condamné, avec exécution provisoire, la société Prefabloc au remboursement du prêt consenti et que M. A... n'a fait aucune diligence pour obtenir l'exécution de ce jugement, ni prendre une quelconque garantie ;

Considérant, sur l'existence d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice tel qu'invoqué par l'appelant, que ce dernier invoque qu'il a perdu une chance de voir ses prétentions aboutir favorablement, dès lors que le tribunal de grande instance de Saint-Pierre, pour le débouter de sa demande, s'est exclusivement fondé sur l'absence de déclaration au passif ; qu'il produit, à l'appui de la réalité de son préjudice, un document dont il ne pouvait disposer en première instance, soit le jugement du 17 août 2010 du tribunal de grande instance de Saint-Pierre constatant, à la requête du commissaire à l'exécution du plan de redressement, ladite exécution, la Sarl Prefablocs Agregats ayant rempli entièrement ses obligations financières ; qu'il en déduit qu'il aurait eu toutes les chances, si M. A... avait fait le nécessaire, d'être entièrement payé par cette société, même de manière échelonnée sur 5 ans et que sa perte de chance est de 100 % du montant de la créance, faisant valoir en outre un préjudice moral causé tant par les négligences de son avocat que par ses dénégations de responsabilité ultérieures ;

Considérant que l'intimé conteste l'existence d'un lien de causalité en faisant valoir que compte tenu de la garantie de passif, rien ne permet d'affirmer que M. X... aurait pu recouvrer le montant du prêt dès lors qu'une compensation lui était opposée, sur laquelle le jugement du 2 mars 2004 a été amené à surseoir à statuer sur la condamnation des cautions, demandant à M. X... de démontrer la réalité du blocage du prix de vente des parts sociales cédées aux consorts D... permettant de faire face au passif ; qu'il souligne à ce propos que contrairement à ce qui était initialement convenu, la somme de 500 000 frs n'a jamais été séquestrée par M. X..., étant, en raison d'un montage absurde dont il n'est pas responsable, transformée en un prêt consenti au cessionnaire ; qu'ainsi, en cas de déclaration de créance, le tribunal aurait examiné les autres moyens, que M. X... n'aurait pu démontrer devant le tribunal de grande instance de Saint-Pierre le respect de ses engagements et la réalité du blocage du prix de vente des parts sociales et qu'il n'est pas démontré que le tribunal aurait accueilli favorablement l'argumentation de M. X..., son action étant, selon l'intimé, vouée à l'échec ; qu'il fait encore valoir que M. X... se prévaut désormais du jugement du 17 août 2010 pour prétendre que sa créance aurait été réglée mais qu'outre la compensation opposée, rien ne permet d'affirmer que la société Prefabloc Agregats, à supposer qu'elle vienne aux droits de la société Crib, aurait pu régler ladite créance prétendue, dès lors que la société Prefabloc, acquéreur des parts des consorts D... selon acte du 22 juillet 2003 a relevé que le passif résultant de la dette n'était pas indiqué ; qu'il n'est pas justifié que la dette de la société Crib, dont la disparition de la personne morale n'est pas davantage justifiée, ait été cédée à la société Prefabloc, peu important le redressement judiciaire et l'absence de déclaration de créance ; qu'enfin, la proposition du plan de continuation montre un passif fiscal délibérément dissimulé puisque connu au jour de la cession, certaines dettes étant par ailleurs réglées par les avances en comptes courants et certains passifs décalés, tous points sur lesquels M. X... n'apporte aucune précision ; que subsidiairement, l'intimé fait valoir que la perte de chance ne saurait être équivalente à la totalité du préjudice, qu'à supposer que M. X... ait pu obtenir une décision conforme à ses voeux, il ne démontre pas que l'exécution de cette décision aurait été fructueuse ;

Considérant sur le lien de causalité entre la faute et le préjudice, que si la conséquence de l'absence de déclaration de créance a conduit le tribunal de grande instance de Saint-Pierre dans son jugement du 3 juillet 2007 à ne plus avoir à se prononcer sur l'argumentaire au fond des défendeurs, c'est à dire la Sarl Crib et les consorts D..., il demeure un élément important d'appréciation, comme noté par les premiers juges, selon lequel le jugement pour partie avant dire droit du 2 mars 2004 a statué sur l'argumentation des cautions invoquant une compensation de la dette et une créance détenue par eux-mêmes sur M. X... du fait de la garantie de passif et du passif fiscal mais sans la retenir en l'état, ordonnant toutefois une large réouverture des débats concernant aussi M. X..., tenu de justifier de ses dires et que la cour ajoute à la remarque des premiers juges pour la compléter que l'arrêt du 5 septembre 2005 de la cour d'appel de Saint Denis a noté dans ses motifs, s'agissant de la dette de la Sarl Crib envers M. X..., que les cautions, alors appelants, ne la contestaient pas, confirmant donc le jugement à ce titre ; que le lien de causalité est ainsi démontré et ne saurait être sérieusement contesté par l'intimé ; qu'en revanche, rien ne permet à l'appelant d'affirmer qu'il aurait nécessairement été réglé de sa créance au seul et unique motif que la société Prefabloc Agregats en aurait eu les moyens financiers dès lors qu'elle a été en mesure de respecter tout le plan de continuation, une créance déclarée devant encore être admise, point sur lequel l'appelant ne fournit aucun éclaircissement, ce qui laisse subsister, au regard des circonstances particulières sus-évoquées, un aléa très important, également relatif à la prise éventuelle de garanties ; que s'agissant en conséquence d'une perte de chance, la réparation à laquelle M. X... peut prétendre au titre de son préjudice matériel peut être évaluée, au regard des éléments dont dispose la cour, à la somme de 6000 €, et au titre de son préjudice moral, demande recevable en appel au regard des dispositions de l'article 566 du code de procédure civile, à celle de 4000 €, lesdites sommes allouées à titre de dommages et intérêts ; que le jugement sera en conséquence infirmé sur le débouté de M. X... et sur sa condamnation aux dépens ;

Considérant que l'intimé succombant en ses prétentions supportera les dépens de première instance et d'appel et sera débouté de sa demande formée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; que l'équité commande de faire application au profit de l'appelant de ces mêmes dispositions et de lui allouer sur ce fondement pour ses frais irrépétibles la somme de 4000 € ;

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes et l'a condamné aux dépens,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Dit que la Selarl Y...
A...- Z...
B...- C... a commis des fautes engageant sa responsabilité civile professionnelle à l'égard de M. X...,

Condamne la Selarl Y...
A...- Z...
B...- C... à payer à M. X... en réparation de sa perte de chance la somme de 6000 € au titre de son préjudice matériel et la somme de 4000 € au titre de son préjudice moral,

Y ajoutant,

Condamne la Selarl Y...
A...- Z...
B...- C... à payer à M. X... la somme de 4000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne la Selarl Y...
A...- Z...
B...- C... aux dépens de première instance et d'appel, dont ceux d'appel recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.