1 juillet 2005
Cour d'appel de Nancy
RG n° 04/01159

Texte de la décision

ARRET No 1532/05 DU 01 JUILLET 2005 R.G : 04/01159 Tribunal paritaire des baux ruraux de BRIEY 5103000002 01 mars 2004

LA COUR D'APPEL DE NANCY, troisième chambre civile a rendu l'arrêt suivant : APPELANTS : Monsieur Roger X... né le 04 Février 1943 à OLLEY (54) demeurant 6 Route de Neuvron 54800 OLLEY comparant en personne, assisté de Me KROELL, avocat au barreau de NANCY Madame Y...
Z... épouse X... née le 02 Juin 1946 à GIRAUMONT (54) demeurant 6 Route de Neuvron 54800 OLLEY représentée par Me KROELL, avocat au barreau de NANCY INTIMES : Monsieur Marc A...
... par Maître LACROIX, avocat au barreau de BRIEY GAEC JARDINS GERARDOT ayant son siège 3 Route de Neuvron 54800 OLLEY représenté par Maître LACROIX, avocat au barreau de BRIEY COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré, Président de Chambre : Monsieur MEYER, Conseillers : Madame B..., Madame C..., Greffier présent aux débats : Madame OLMEDO, DEBATS : A l'audience publique du 13 Mai 2005 ; L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 01 Juillet 2005; A l'audience du 01 Juillet 2005, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit : Copie exécutoire le Copie le

FAITS ET PROCEDURE :

Par acte notarié du 24 mai 1985,Roger X... et son épouse née Z...
Y... ont acquis, auprès de la SAFER de la Meuse, deux parcelles à usage de pré sises à OLLEY (54) cadastrées section ZH no 7 d'une superficie de 90 a et section ZH no8 d'une contenance de 1 ha 27 a 10 ca.

Aux termes de cet acte, les époux X... s'engageaient solidairement à louer les deux parcelles acquises par eux à Monsieur Marc A..., agriculteur agréé par la SAFER, à l'exception toutefois d'une surface de 40 ares qu'ils se réservaient pour l'installation de ruchers.

Invoquant l'impossibilité dans laquelle ils se sont trouvés de

pouvoir disposer des 40 ares qu'ils se sont réservés, et les agissements du preneur qui auraient compromis la bonne exploitation du fonds, les époux X... ont, par requête déposée le 14 janvier 2003 au greffe du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BRIEY, assigné devant cette juridiction, Monsieur Marc A... et le GAEC JARDINS GERARDOT, auquel les terres louées ont été mises à disposition, afin de voir prononcer par application des articles 1766 du Code Civil et L.411-27, L.411-31 et L.411-53 du Code Rural : - la résiliation du bail rural liant les parties portant sur les parcelles cadastrées section ZH no 7 et 8 sises à OLLEY (54) à compter du jugement à intervenir, - l'expulsion de Monsieur Marc A... et de tous occupants de son chef sous astreinte de 76 ç par jour de retard à compter du jour où le jugement sera devenu définitif, - la fixation d'une indemnité d'occupation d'un montant équivalent au montant du fermage, - et la condamnation solidaire de Monsieur Marc A... et du GAEC JARDINS GERARDOT à leur verser la somme de 31.076 ç à titre de dommages et intérêts au titre de la perte financière résultant de la perte de jouissance liée à la production de miel provenant de l'exploitation de 40 ruches.

Monsieur Marc A... et le GAEC JARDINS GERARDOT se sont opposés aux prétentions des époux X... et ont sollicité une indemnité fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement en date du 1er mars 2004, le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BRIEY a débouté les époux X... de l'ensemble de leurs prétentions et condamné ces derniers à payer à Monsieur A... et au GAEC JARDINS GERARDOT la somme de 650 ç par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens.

Les époux X... ont interjeté appel de cette décision.

Invoquant les mêmes moyens, mais aussi le fait que la mise à disposition des terres louées au GAEC JARDINS GERARDOT serait

irrégulière, ils demandent à la cour : - de prononcer la résiliation du bail liant les parties, - d'ordonner l'expulsion de Monsieur A... et de tout occupant de son chef sous astreinte de 76 ç par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, - de fixer l'indemnité d'occupation au montant du loyer, - et de condamner solidairement et en tout cas, in solidum, Monsieur A... et le GAEC JARDINS GERARDOT à leur payer la somme de 34.732 ç au titre du préjudice financier subi.

Subsidiairement, si la Cour estimait ne pas devoir prononcer la résiliation du bail, ils maintiennent leur demande en dommages et intérêts pour le préjudice financier subi résultant d'une perte de chance de produire du miel par l'intermédiaire de 40 ruches.

Ils sollicitent enfin, et en tout état de cause, la condamnation solidaire, voire in solidum, de Monsieur A... et du GAEC JARDINS GERARDOT à leur verser la somme de 1.500 ç par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens qui comprendront le coût des actes dressés les 12 juillet 1999 et 30 janvier 2001.

Par écritures de leur mandataire, Monsieur A... et le GAEC JARDINS GERARDOT ont conclu à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation solidaire des époux X... à leur verser la somme de 1.500 ç par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens.

SUR CE :

Vu le jugement entrepris rendu le 1er mars 2004 par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BRIEY ;

Vu les conclusions des appelants en date du 11 janvier 2005 ;

Vu les conclusions des intimés en date du 9 mai 2005 ; Sur la demande en résiliation de bail :

Attendu qu'en application des articles L.411-31 et L.411-53, la résiliation du bail rural est encourue lorsque les agissements du preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ;

Attendu que pour justifier les demandes en résiliation de bail, les époux X... font valoir que les parcelles données à bail ont été utilisées entre 1997 et 1999 comme plate-forme à fumier recouvertes par des boues provenant de la station d'épuration, ce qui compromettrait la bonne exploitation des terres ;

Que le preneur a manqué à son obligation d'exploiter en bon père de famille en s'arrogeant des droits sur 40 ares de terres exclues du bail ;

Qu'enfin, le preneur a procédé de manière irrégulière à une mise à dispositions de terres louées au profit du GAEC JARDINS GERARDOT ; 1) Sur les conditions d'exploitation des terres :

Attendu qu'à l'appui de leurs allégations, les époux X... produisent un constat d'huissier dressé le 12 juillet 1999 par Maître MIEUSET qui indique : "la parcelle est utilisée comme plate-forme à fumier provoquant la destruction d'un énorme saule. Il existe des traces de boues, apparemment en provenance de la station d'épuration, recouvertes de fumier" ;

Attendu que Monsieur A... soutient de son côté que s'il lui est arrivé de mettre à titre temporaire pendant 2 ou 3 mois du fumier sur les parcelles louées, il n'a jamais fait de celle-ci une plate-forme à fumier et n'a jamais répandu de boue ;

Attendu, à cet effet, qu'il convient d'observer que Maître MIEUSET loin d'être affirmative, ne relève dans son constat d'huissier que la présence de "traces de boue provenant apparemment d'une station d'épuration" ;

Qu'en outre, le cahier d'épandage de boues établi pour l'année 1999

et produit aux débats par les intimés ne prévoit rien en ce qui concerne les parcelles appartenant aux époux X..., étant précisé que stocker des boues sur une parcelle pour les épandre ensuite sur une autre, n'a pour seul effet que de compliquer inutilement le travail ; Attendu enfin qu'il apparaît pour le moins surprenant que les époux X... qui ont procédé à un constat d'huissier le 12 juillet 1999, n'aient finalement saisi le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux d'une demande en résiliation du bail en application des articles L.411-31 et L.411-53 du Code Rural que le 14 janvier 2003 soit 3 ans et demi plus tard, alors même que la situation doit être appréciée au jour de la demande ;

Attendu qu'il s'ensuit que ce seul constat d'huissier dressé le 12 juillet 1999, ne permet pas d'établir la preuve d'agissements du preneur de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; 2) Sur la surface donnée à bail :

Attendu qu'aucun bail rural écrit n'a été établi entre les époux X... d'une part et Marc A... d'autre part, qu'ainsi la preuve du contenu du bail peut se faire par tous moyens ;

Attendu en l'espèce que si la vente des parcelles cadastrées section ZH no 7 et 8 sises sur la commune D'OLLEY (54), intervenue entre les époux X... et la SAFER de la Meuse est opposable à Monsieur A..., dès lors que cette vente était conditionnée à la mise en location des terres vendues au profit de Monsieur A..., agriculteur agréé par la SAFER, il convient d'observer que celui-ci est un tiers par rapport à la clause particulière, figurant à l'acte notarié dont il n'était pas partie, portant réserve au profit des époux X... d'une superficie de 40 ares destinée à l'installation de ruchers ;

Attendu que les époux X..., titulaires d'un droit d'exploiter des ruches sur une superficie de 40 ares pouvaient parfaitement renoncer

à l'exercice de ce droit ;

Attendu qu'entre mai 1985 et le 14 janvier 2003, date de la saisine du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux, les époux X... ne justifient d'aucune démarche intentée auprès d e Monsieur A... ou du GAEC JARDINS GERARDOT pour exploiter ces 40 ares de terres ;

Attendu par ailleurs qu'il ressort des pièces de la procédure que les fermages afférents à la totalité des terres louées, ont été régulièrement payés aux époux X... ;

Attendu qu'il s'ensuit que les époux X... apparaissent aujourd'hui mal fondés à invoquer le comportement frauduleux du preneur qui se seraient arrogé irrégulièrement des droits sur des terres exclues du bail, pour obtenir une résiliation du bail ; 3) Sur le non respect des obligations de Monsieur A... lors de la mise à disposition des terres louées au GAEC JARDINS GERARDOT :

Attendu qu'en application de l'article L.323-4 du Code Rural, le preneur qui veut faire exploiter le bien loué par un GAEC auquel il a adhéré, doit en aviser le propriétaire par lettre recommandée avec avis de réception ;

Attendu que les époux X... soutiennent, pour la première fois à hauteur d'appel que Monsieur A... n'a pas respecté les dispositions de l'article L.323-14 du Code Rural dès lors que la lettre recommandée avec avis de réception qu'ils ont signée le 17 août 1996, ne précise pas qu'il s'agit d'une mise à disposition pour exploitation et n'indique pas les références cadastrales des parcelles concernées ;

Attendu cependant que la lettre envoyée par Monsieur A... mentionne expressément son intention de mettre à la disposition du GAEC JARDINS GERARDOT les terres louées par application de la Loi du 8 août 1962 (article L.323-14 du Code Rural) ;

Attendu qu'il s'ensuit que les époux X... apparaissent mal fondés à

invoquer une quelconque incertitude quant à l'intention de Monsieur A... de mettre à disposition les terres louées pour exploitation par le GAEC ;

Attendu, par ailleurs, qu'il ressort des pièces de la procédure que l'avis de passage collé par le préposé de la poste sur la lettre a masqué les références cadastrales qui y figuraient ;

Attendu que Monsieur A... ne saurait être tenu pour responsable des agissements du préposé de la poste chargé de distribuer le courrier, alors même que les époux X... pouvaient demander à Monsieur A... une copie de la lettre, ce qu'ils se sont bien gardés de faire, qu'une lecture par transparence du courrier envoyé permet de lire les références cadastrales qui y figurent ;

Attendu qu'il s'ensuit qu'aucune faute ne saurait être retenue à l'encontre de Monsieur A... de ce chef ;

Attendu en tout état de cause que si l'article L.323-14 du Code Rural impose au preneur d'aviser le bailleur de son intention de faire exploiter les terres par un GAEC, cette formalité ne constitue qu'une mesure d'information et n'est assortie d'aucune sanction ; qu'ainsi le preneur qui a négligé de s'y conformer, n'encourt pas la résiliation du bail ;

Attendu, au vu de l'ensemble de ces éléments, qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris qui a débouté les époux X... de leur demande en résiliation du bail et de leur demande subséquente aux fins d'exploitation et de fixation d'une indemnité d'occupation ; Sur la demande en dommages et intérêts pour trouble de jouissance et perte de chance d'une production de miel : Sur la demande en dommages et intérêts pour trouble de jouissance et perte de chance d'une production de miel :

Attendu, ainsi que cela a déjà été rappelé, que les époux X... ne justifient, entre 1985 et le 14 janvier 2003, soit pendant 18 ans,

d'aucune démarche intentée à l'encontre de Monsieur A... ou du GAEC JARDINS GERARDOT, aux fins d'exploiter les 40 ares qu'ils s'étaient réservés aux termes de l'acte notarié signé le 2 mai 1985 ;

Attendu par ailleurs qu'il est établi que les fermages afférents à la totalité des parcelles louées leur ont été régulièrement versés ;

Attendu qu'il s'ensuit que les époux X... ne justifient d'aucun trouble de jouissance et ne peuvent se prévaloir d'aucune perte de chance de produire du miel ;

Qu'il y a lieu en conséquence, de confirmer le jugement entrepris qui les a débouté de leur demande en dommages et intérêts ; Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens :

Attendu que l'équité commande de condamner solidairement les époux X... à verser à Monsieur A... et au GAEC JARDINS GERARDOT la somme de 700 ç par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et de débouter les époux X... de leur demande de ce chef :

Attendu que l'issue du procès justifie la condamnation solidaire des époux X... aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant en audience publique et contradictoirement ;

Déclare recevable l'appel formé par les époux X... contre le jugement rendu le 1er mars 2004 par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BRIEY ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Déboute les époux X... de leur demande d'indemnité fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne solidairement les époux X... à verser à Monsieur Marc A... et au GAEC JARDINS GERARDOT la somme de sept cents euros (700 ç) par

application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Déboute les parties de leurs plus amples ou contraires demandes ;

Condamne solidairement les époux X... aux dépens d'appel ;

L'arrêt a été prononcé à l'audience du premier juillet deux mille cinq par Monsieur MEYER, Président de la troisième chambre civile à la Cour d'Appel de NANCY, conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Madame OLMEDO, greffier.

Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier. Signé : M.C. OLMEDO.- Signé : B. MEYER.- Minute en neuf pages.

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