31 mars 2005
Cour d'appel de Versailles
RG n° 04/01628

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 96B 0A 1ère chambre 1ère section ARRET No CONTRADICTOIRE DU 31 MARS 2005 R. G. No 04/ 01628

AFFAIRE : Louis X...... C/ Cie GENERALE DES EAUX... Décision déférée à la cour : Jugement rendu (e) le 25 Novembre 2003 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES No Chambre : No Section : No RG : Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : Me SEBA SCP LISSARRAGUE SCP JULLIEN SCP TUSET

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE TRENTE ET UN MARS DEUX MILLE CINQ, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur Louis X... né le 30 Mai 1943 à LIMOGES (87) ...-78440 ISSOU représenté par Me Farid SEBA Avoué Rep/ assistant : Me Philippe BATAILLE (avocat au barreau de VERSAILLES) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2003/ 012687 du 14/ 01/ 2004 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES) Madame Violette Y... épouse X... née le 10 Avril 1946 à VESOUL (70) ...-78440 ISSOU représentée par Me Farid SEBA Avoué Rep/ assistant : Me Philippe BATAILLE (avocat au barreau de VERSAILLES) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2003/ 012687 du 14/ 01/ 2004 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES) APPELANTS

COMPAGNIE GENERALE DES EAUX Société en commandite par actions inscrite au RCS de PARIS sous le numéro 572 025 526 ayant son siège 52 rue d'Anjou-75008 PARIS CEDEX 08 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD-N du dossier 0439718- Avoués Rep/ assistant : Me Jean-Philippe PIN (avocat au barreau de PARIS) EDF GDF AGENCE CLIENTELE CERGY VEXIN établissement public élisant domicile en son agence clientèle CERGY VEXIN-16 rue lavoisier-95304 CERGY PONTOISE CEDEX prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL Avoués Rep/ assistant : Me LE HEZEY substitué par Me EKICI (avocat au barreau du VAL D'OISE) COMMUNE D'ISSOU représentée par son Maire en exercice élisant domicile en cette qualité Hôtel de Ville Place Famy-78440 ISSOU représentée par la SCP TUSET-CHOUTEAU-N du dossier 20040533 Avoués Rep/ assistant : Me Nicole BIRFET de la SCP SILLARD (avocat au barreau de VERSAILLES) INTIMES

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Février 2005 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Francine BARDY, Président en présence de Madame Françoise SIMONNOT, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Francine BARDY, Président, Madame Lysiane LIAUZUN, Conseiller, Madame Françoise SIMONNOT, Conseiller, Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT,

En 1995, monsieur et madame X..., membres de la communauté des gens du voyage et désireux de se sédentariser, ont fait l'acquisition de parcelles de terre à Issou (Yvelines).

En 2003, ils ont demandé à la Compagnie Générale des Eaux (CGE) et à EDF de procéder à des branchements pour raccorder leur propriété aux réseaux de distribution d'eau et d'électricité.

Après avoir donné leur accord, la CGE et EDF sont revenues sur leur position en l'état de l'opposition de la commune d'Issou.

C'est dans ce contexte que, par actes des 19 et 22 septembre 2003, les époux X... ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Versailles la commune d'Issou, la CGE et EDF-Gdf aux fins de voir juger que l'opposition de la commune est constitutive d'une voie de fait et d'ordonner la réalisation des branchements.

Par jugement contradictoire du 25 novembre 2003, le tribunal a mis hors de cause GDF, constaté l'absence de voie de fait, s'est déclaré incompétent pour apprécier la décision prise par la commune d'Issou, a débouté les époux X... de leurs demandes à l'encontre d'EDF et de la Compagnie Générale des Eaux, débouté les parties de leurs autres demandes et condamné les époux X... aux dépens.

Appelants de ce jugement, les époux X..., aux termes de leurs écritures signifiées les 4 juin et 21 décembre 2004 auxquelles il est renvoyé pour exposé de leurs moyens, concluent à sa réformation et demandent à la Cour de :

- dire que l'opposition de la commune d'Issou au branchement de leur propriété au réseau d'eau et d'électricité est constitutive d'une voie de fait,

- ordonner en conséquence à la CGE et à EDF de procéder aux branchements et raccordements par eux réclamés,

- dire que si ces branchements ne sont pas effectués dans les huit jours de la signification de l'arrêt, la CGE et EDF devront l'une et l'autre régler une astreinte de 160 € par jour de retard,

- leur allouer 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Ils soutiennent que l'opposition de la commune à la réalisation de branchement est constitutive d'une voie de fait.

Ils considèrent que, du fait de l'annulation de l'arrêté municipal du 9 mai 1996 leur interdisant de stationner sur leur terrain par jugement du tribunal administratif de Versailles du 20 octobre 1998, leur occupation du terrain est légale.

Ils allèguent que la CGE et EDF ne peuvent se retrancher derrière leur contrat d'affermage ou cahier des charges pour se refuser à assurer l'approvisionnement de leur propriété en eau et électricité, soulignant que le contrat d'affermage ne vise qu'un problème d'autorisation de voirie non invoqué dans l'opposition du maire.

Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 18 janvier 2005 auxquelles il convient de se reporter pour exposé de ses moyens, la commune d'Issou conclut à la confirmation du jugement, à l'incompétence du tribunal de grande instance de Versailles au profit du tribunal administratif de Versailles et, subsidiairement, au mal-fondé des demandes des époux X... Elle sollicite leur condamnation in solidum à lui payer 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle expose que son refus d'autorisation de raccordement s'inscrit dans le cadre des dispositions de l'article L 111-6 du code de l'urbanisme. Elle en déduit que sa décision étant prise dans le cadre de ses pouvoirs en matière de police de l'urbanisme, elle ne peut constituer une voie de fait.

Subsidiairement, au fond, elle conteste le caractère légal de l'occupation du terrain par les époux X... et fait valoir qu'elle doit faire respecter les dispositions du plan local d'urbanisme classant les parcelles en cause en zone naturelle et y prohibant le stationnement des caravanes.

Aux termes de leurs écritures signifiées les 26 octobre et 23 décembre 2004 auxquelles il est renvoyé pour exposé de leurs moyens, EDF-GDF concluent à la confirmation du jugement en ce qu'il a mis hors de cause GDF ; EDF demande acte de ce qu'elle est prête à effectuer les travaux de raccordement au réseau, de ce qu'elle n'a pas réalisé lesdits travaux en raison de l'arrêté du maire du 27 juin 2003 et de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur le mérite de la demande des époux X... et se conformera à l'arrêt à intervenir. EDF s'oppose au prononcé d'une astreinte.

EDF et GDF précisent être deux personnes morales distinctes et font valoir que le problème en cause portant uniquement sur l'énergie électrique, le jugement a, à juste titre, prononcé la mise hors de cause de GDF.

Ils déclarent qu'EDF a renoncé à exécuter les travaux de branchement au vu d'un arrêté du maire du 7 juillet 2003 sur la légalité duquel EDF n'a pas à se prononcer.

Ils soutiennent qu'EDF en sa qualité de concessionnaire doit respecter la décision prise par la commune, autorité concédante. Ils ajoutent qu'EDF se conformera à la décision à intervenir de la Cour. Aux termes de ses écritures signifiées le 6 janvier 2005 auxquelles il convient de se reporter pour exposé de ses moyens, la CGE conclut à la confirmation du jugement et, subsidiairement, au cas où la Cour ordonnerait l'établissement du branchement, demande :

- qu'il soit ordonné aux époux X... de souscrire un contrat d'abonnement aux conditions habituelles et de payer les frais d'établissement du branchement,

- acte de ce qu'un délai d'un mois et demi au minimum est à prévoir entre l'encaissement de l'acompte et le début des travaux en raison de l'attente des autorisations administratives et des réponses des concessionnaires,

- qu'il soit ordonné aux époux X... de mettre leur installation intérieure en conformité aux dispositions du règlement du service de distribution d'eau potable et à la réglementation en matière d'hygiène publique et notamment en ce qui concerne l'évacuation des eaux usées,

- qu'elle soit autorisée à ne pas exécuter les travaux ou à suspendre la mise en service du branchement dans l'hypothèse ou les époux X... ne respecteraient pas la réglementation en matière d'hygiène publique.

Elle sollicite le rejet des demandes d'astreinte et d'indemnité fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile et réclame une somme de 2. 000 € à ce titre.

Elle expose qu'en application du cahier des charges, elle ne peut procéder à un raccordement qu'à la condition d'avoir obtenu l'autorisation de la mairie.

Elle précise que, par lettre du 8 avril 2003, la mairie d'Issou a refusé cette autorisation et allègue qu'elle n'a pas à discuter la légitimité du refus de la commune.

L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 20 janvier 2005.

SUR CE

Que le litige porte uniquement sur l'alimentation en eau et en électricité des parcelles appartenant aux époux X... ;

Que le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a mis hors de cause GDF, personne morale distincte d'EDF ;

Qu'un acte administratif portant atteinte au droit de propriété ou à une liberté fondamentale ne peut être constitutif d'une voie de fait que si cet acte est manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'administration ;

Que, par lettre du 8 avril 2003, le maire d'Issou a fait défense à la CGE de procéder au raccordement de la propriété des époux X... au réseau d'alimentation en eau potable ;

Que, par arrêté du 27 juin 2003, il a interdit à EDF de procéder au branchement électrique ;

Que les raccordements que sollicitent les époux X... sans limitation de durée doivent s'entendre comme étant définitifs ;

Qu'il s'ensuit qu'ils ne peuvent utilement invoquer, au soutien de leurs prétentions, des décisions autorisant des branchements provisoires ;

Qu'il résulte de l'article L 111-6 du code de l'urbanisme que les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L 111. 1, L 421. 1 ou L 510. 1 ne peuvent être raccordés définitivement aux réseaux d'électricité et d'eau si leur construction ou leur transformation n'a pas été autorisée ou agréée ;

Que, sans qu'il soit nécessaire de déterminer si le stationnement des caravanes est licite ou non, et à supposer même que l'opposition de la municipalité au raccordement des parcelles des époux X... au réseau public de distribution d'eau et d'électricité soit illégale, il n'en demeure pas moins que le refus de raccordement n'est pas étranger au pouvoir du maire en matière de police de l'urbanisme, car il se rattache aux pouvoirs qui lui sont donnés par l'article L 111-6 du code de l'urbanisme ;

Que c'est donc à juste titre que le tribunal, écartant toute voie de fait, s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes formées à l'encontre de la commune d'Issou ;

Que c'est également à bon escient qu'il a débouté les époux X... de leurs demandes dirigées contre la CGE et EDF qui ne pouvaient procéder aux raccordements en l'état du refus de la municipalité ;

Qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris ;

ET Y AJOUTANT,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

CONDAMNE les époux X... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP TUSET-CHOUTEAU, la SCP JULLIEN-LECHARNY-ROL et la SCP LISSARRAGUE-DUPUIS-BOCCON-GIBOD, sociétés titulaires d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Arrêt prononcé par Madame Francine BARDY, Président, et signé par Madame Francine BARDY, Président et par Madame Sylvie RENOULT, Greffier présent lors du prononcé

Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,

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