23 mars 2001
Cour d'appel de Versailles
RG n° 1999-6216

Texte de la décision

FAITS ET PROCEDURE, Les époux André X... sont propriétaires d'un immeuble sis à NOISY SUR OISE (95), 6 rue Paul Bert et voisins de l'immeuble dont sont propriétaires les époux Y.... Un litige est né entre les époux X... et leurs voisins les époux René Y..., lorsque le mur séparant leurs deux propriétés s'est effondré, en janvier 1998, dans le jardin des premiers. Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 13 janvier 1998, Monsieur X... a mis en demeure Monsieur Y... de faire le nécessaire pour la remise en état de son terrain, à savoir le retrait de gravas tombés et la reconstruction du mur. Cette mise en demeure étant restée infructueuse, les époux X... ont fait assigner, par acte d'huissier en date du 22 février 1999, les époux Y..., devant le tribunal d'instance d'Ecouen afin de les voir condamner, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à déblayer des terres et gravas et reconstruire un mur, sous astreinte de 1.000 francs par jour de retard ; et à leur payer une somme de 1.000 francs au titre des frais irrépétibles. Les époux X... ont soutenu que la preuve du droit de propriété des défendeurs était établie par les règles de l'usucapion trentenaire. Par jugement contradictoire en date du 25 juin 1999, le tribunal d'instance d'ECOUEN a rendu la décision suivante : - déboute Monsieur et Madame X... de leurs demandes, - déboute Monsieur et Madame Y... de leur demande fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamne Monsieur et Madame X... aux dépens. Par déclaration en date du 19 juillet 1999, les époux X... ont relevé appel de cette décision. Ils soutiennent que le mur litigieux serait un mur de soutènement et non pas un mur de clôture et qu'il appartenait donc à celui dont il soutient les terres et qui en profite, en vertu de l'article 653 du Code civil ; que, selon eux, le mur litigieux répond à ces critères et est donc présumé appartenir aux époux Y... ; que le titre de propriété des époux Y...




n'est pas suffisant pour faire tomber la présomption; que les indications du cadastre ne sont pas non plus éclairantes ; que les réfections antérieures du mur effectuées par l'ancien propriétaire de leur immeuble n'est pas une preuve suffisante de leur propriété à l'égard du mur litigieux ; qu'en outre, les terres des époux Y... sont adossées depuis plus de trente ans à ce mur et que la prescription trentenaire (article 2229 du code civil) faisant acquérir la propriété est donc applicable à l'égard des intimés ; que ces derniers sont donc responsables des dommages causés par le mur litigieux et de leur préjudice subi de ce fait. Par conséquent, ils prient la Cour de : - dire et juger Monsieur et Madame X... recevables et bien fondés en leur appel, En conséquence, Vu l'article 2229 du code civil : Vu l'article 2262 du code civil : Vu l'article 653 du code civil : - dire que la preuve du droit de propriété des époux Y... sur le mur de soutènement est établie par les règles de l'usucapion trentenaire, - dire que cette prescription confirme la présomption de propriété de ce mur de soutènement, En conséquence, - condamner les époux Y... à procéder à la remise en état des lieux à savoir le déblaiement des terres et gravats effondrés dans le jardin des époux X... et à la reconstruction du mur afin d'assurer le soutien des terres et éviter un nouvel effondrement et ce, sous astreinte ferme et définitive de 1.000 francs par jour de retard à compter de la décision à intervenir, - condamner Monsieur et Madame Y... à payer aux époux X... une somme de 10.000 francs en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner Monsieur et Madame Y... aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SCP LAMBERT DEBRAY CHEMIN, avoués à la cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. Les époux Y... font valoir que le titre de propriété dont ils disposent renverse la



présomption simple de l'article 653 du Code civil ; qu'il est expressément indiqué dans cet acte qu'ils ne sont pas propriétaires de ce mur, qui appartenait à l'ancien propriétaire de l'immeuble des époux X... et donc maintenant à ces derniers; que cette indication est corroborée par le comportement de l'ancien propriétaire susvisé et par l'extrait cadastral; que les époux X... n'apportent pas la preuve du contraire par leur titre de propriété ; que la prescription acquisitive de propriété alléguée par les appelants n'est pas non plus valable, celle-ci se fondant sur un comportement du possesseur en tant que propriétaire exclusif, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'ils ne peuvent être considérés comme propriétaires de ce mur litigieux et donc responsables des dommages qu'il a causés. Par conséquent, ils prient la Cour de : - dire et juger les consorts X... mal fondés en leur appel, En conséquence, - confirmer le jugement en toutes ses dispositions, En conséquence, - débouter les consorts X... en toutes leurs demandes, fins et conclusions, - condamner les consorts X... aux dépens dont distraction est requise au profit de Maître ROBERT, avoué aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. L'ordonnance de clôture a été signée le 11 janvier 2001 et l'affaire appelée à l'audience du 16 février 2001 où les parties ont fait déposer leur dossiers. SUR CE, LA COUR, Considérant qu'aux termes de l'article 653 du code civil : "Dans les villes et les campagnes, tout mur servant de séparation entre bâtiments, jusqu'à l'héberge, ou entre cours et jardins, et même entre enclos dans les champs, s'il n'y a titre ou marque du contraire" ; Considérant que les époux X... invoquent expressément l'application de cet article, devant la Cour, comme ils l'avaient déjà fait dans leur assignation devant le tribunal d'instance et tout au long de leurs écritures devant le premier juge ; que la



présomption légale de mitoyenneté doit donc jouer, sauf si les appelants font la preuve contraire qui leur incombe ; Considérant, sur ce point, qu'il est d'abord souligné que les époux X... n'invoquent pas l'article 654 du code civil et qu'ils ne font état de l'existence sur ce mur d'aucune des marques de non-mitoyenneté limitativement énoncées par cet article ; Considérant qu'ils prétendent essentiellement que le mur litigieux serait, selon eux, un mur de soutènement au seul profit des époux Y..., mais qu'ils ne rapportent pas la preuve de cette affirmation ; qu'ils n'ont, en effet, jamais réclamé sur ce point une expertise judiciaire, notamment par voie de référé, et qu'ils n'ont fait établir contradictoirement aucun procès-verbal de constat d'huissier ; qu'ils se bornent à citer la simple mention de l'expert d'assurances qui, dans son rapport succinct du 8 juillet 1998, énonce, sans autres précisions ni explications, que ce mur était un mur de soutènement ;que cet avis, à lui seul, ne permet pas de faire la preuve d'une non-mitoyenneté du mur dont s'agit ;que de plus, le titre de propriété des époux Y... exactement analysé par le premier juge et les mentions concordantes du registre cadastral ne contiennent aucun élément contraire permettant de juger que ce mur serait la seule propriété des intimés ; Considérant par ailleurs que les appelants invoquent à l'égard des époux Y... une prétendue prescription acquisitive (article 2229 du code civil) par ceux-ci, alors qu'en droit et en application de l'article 2223 dudit code, seuls les époux Y..., en cette prétendue qualité de possesseurs de ce mur, pouvaient opposer une prescription ; que ce moyen ne peut être utilisé contre eux par les époux X..., alors que de plus, et en tout état de cause, il n'est pas démontré que cette possession invoquée contre eux correspondrait à celle exigée par l'article 1119 du code civil ; qu'en outre, le premier juge a exactement retenu que



le seul fait d'avoir pu adosser des terres contre ce mur, réputé mitoyen, ne peut permettre de prouver qu'il y aurait eu de la part des époux Y... une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaires ; Considérant que le jugement déféré est, par conséquent, confirmé sur tous ces points ; Considérant qu'en raison de cette présomption de mitoyenneté (article 653) qui n'est pas écartée et qui doit donc s'appliquer, les époux Y... devaient agir, le cas échéant, même subsidiairement -ce qu'ils n'ont pas fait- sur le fondement de l'article 655 ; qu'ils n'invoquent pas ce texte et qu'ils se contentent de parler des "responsabilités" des époux Y..., mais sans préciser davantage quelles fautes seraient, selon eux, imputables à ceux-ci, et sans citer les dispositions de l'article 1386 du code civil, alors pourtant que les causes exactes de cet effondrement du mur ne sont toujours pas déterminées et que l'expert d'assurances s'est borné à parler d'un "vieillissement" de ce mur ; Considérant que les époux X... sont donc déboutés de leurs demandes tendant à obtenir une remise en état des lieux et la reconstruction de ce mur, à la charge des époux Y..., et que le jugement déféré est entièrement confirmé ; Considérant que, compte tenu de l'équité, il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et que toutes les parties sont donc déboutées de leurs demandes respectives en paiement fondées sur ce texte ; PAR CES MOTIFS, LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort : VU les articles 653, 654 et 655 du code civil :

DEBOUTE les époux André X... des fins de leur appel et de toutes les demandes que celui-ci comporte ; CONFIRME en son entier le jugement déféré ; DEBOUTE les parties de leurs demandes respectives en paiement, fondées sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; CONDAMNE les époux X... à tous

les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre eux par Maître Jean-Yves ROBERT, avoué, sous la suppléance de la SCP d'avoués KEIME ET GUTTIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le faisant fonction de greffier

Le Président, qui a assisté au prononcé, Sophie LANGLOIS

Alban CHAIX

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