23 mars 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-15.475

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:CO00210

Titres et sommaires

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Dommage - Réparation - Partage de responsabilité - Co-contractants ayant commis des fautes - Fixation de la part de responsabilité de chacun - Proportion - Détermination

Lorsque chacune des parties contractantes est jugée responsable pour moitié de la résiliation du contrat, chaque partie doit réparer le préjudice subi par l'autre du fait de sa résiliation fautive en tenant compte de cette proportion, soit seulement à concurrence de 50 % de ce préjudice, la compensation ne devant s'opérer qu'après application au préjudice de chaque partie de ce coefficient

CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Résiliation - Dommages intérêts - Résiliation aux torts réciproques des parties - Fixation de la part de responsabilité de chacun

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Dommage - Réparation - Partage de responsabilité - Compensation

Texte de la décision

COMM.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 23 mars 2022




Cassation partielle


M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 210 F-B

Pourvoi n° J 20-15.475




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 MARS 2022

La société X-Gil Full System, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 4], anciennement dénommée Gil restauration et multi-activités, a formé le pourvoi n° J 20-15.475 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société [U] partners, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de M. [S] [U], prise en qualité d'administrateur judiciaire de la société Seafrance,

2°/ à la société BTSG, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [L] [G], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Seafrance,

3°/ à la société FHB, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], en la personne de M. [E] [O], prise en qualité d'administrateur judiciaire de la société Seafrance,

4°/ à la société Filhet Allard et cie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6],

5°/ à la société Chubb european groupe SE, dont le siège est [Adresse 7], anciennement Chubb insurance company,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SARL Corlay, avocat de la société X-Gil Full System, de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la société Chubb european groupe SE, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er février 2022 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société X-Gil Full System du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Filhet Allard et cie.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2019), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 19 septembre 2018, pourvoi n° P 17-15.191), la société Seafrance ayant pour activité le transport maritime trans-manche, a conclu en 2007 un "contrat cadre" confiant à la société Spiral restauration et multi-activités (la société RMA devenue ensuite X-Gil Full System) la conception et l'installation d'un progiciel de gestion des ventes à bord de ses navires. Le désaccord survenu entre les parties a conduit la société Seafrance à assigner en résiliation du contrat sa cocontractante, laquelle a appelé en garantie son assureur en responsabilité civile, la société Chubb european groupe SE (la société Chubb). Par jugement du 16 novembre 2011 du tribunal de commerce de Paris, la société Seafrance a été mise en liquidation judiciaire, la SCP [U] et la Selarl FHB étant désignées en qualité d'administrateurs et la société BTSG en celle de liquidateur. Après résiliation du contrat aux torts partagés à parts égales entre les parties, le montant du préjudice subi par chacune d'elles a été fixé, puis a fait l'objet d'une compensation.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé


3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La société X-Gil Full System fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il la condamne à payer à la société Seafrance la somme de 63 446,82 euros à titre de dommages-intérêts et de la condamner à payer aux organes de la procédure collective de la société Seafrance, une certaine somme, alors que :

« 1°/ en cas de partage de responsabilité, le juge doit rechercher le préjudice causé à chaque partie et leurs parts respectives de responsabilité avant d'en décider la compensation partielle ou totale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que chacune des sociétés avait contribué à la mauvaise exécution du contrat, étant définitivement acquis que chacune avait contribué au dommage à hauteur de 50 % ; qu'il en résultait que chacune d'elles devait participer, à hauteur de sa propre faute, à la réparation de l'ensemble des préjudices ; en considérant que chacune devait réparation du dommage de l'autre sans tenir compte de la part contributive de chacune, définitivement retenue à hauteur de 50 %, la cour d'appel a violé les articles 1147 et 1184 dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ que la cour d'appel ne pouvait accorder à la société Seafrance l'ensemble des indemnités liées au retard dans l'exécution de la prestation alors qu'elle avait constaté que "les difficultés liées à la recette de l'application nécessitant la présence de salariés de la société Seafrance à Lyon sont dues à l'attitude de la maîtrise d'ouvrage ainsi qu'il a été préalablement rappelé" ; qu'en accordant cependant à la société Seafrance sa demande sur les indemnités liées au retard, la cour d'appel a violé l'article 1147 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016,

5. Il résulte de ce texte que, sauf cause étrangère, le débiteur d'une obligation contractuelle est tenu de réparer, le cas échéant par le paiement de dommages-intérêts, le préjudice causé à son cocontractant en raison de l'inexécution fautive, ou réputée fautive, de cette obligation.

6. Pour condamner la société X-Gil Full System à payer une certaine somme aux organes de la procédure collective de la société Seafrance, l'arrêt, après avoir évalué les préjudices respectivement causés aux parties, a ordonné la compensation entre les créances de chacune.

7. En statuant ainsi, alors que, chacune des parties contractantes étant jugée responsable pour moitié de la résiliation du contrat, elle devait réparer le préjudice subi par l'autre du fait de cette résiliation en tenant compte de cette proportion, soit seulement à concurrence de 50 % de ce préjudice, la compensation ne devant s'opérer qu'après application au préjudice de chaque partie de ce coefficient, la cour d'appel qui, en ordonnant la compensation sans tenir compte de cette proportion, a condamné chaque partie à indemniser intégralement le préjudice de l'autre, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, infirmant le jugement entrepris en ce qu'il condamne la société Spiral restauration et multi-activités devenue la société X-Gil Full System à payer à la société Seafrance la somme de 63 446,82 euros à titre de dommages-intérêts, il condamne la société X-Gil Full System à payer à la société [U] partners, prise en la personne de M. [S] [U], la société BTSG, prise en la personne de M. [L] [G] et la société FHB, prise en la personne de M. [O], ès qualités, la somme de 171 334,37 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2014, dit que les intérêts dus pour une année entière pourront être capitalisés aux conditions de l'article 1343-2 du code civil, condamne la société X-Gil Full System aux dépens et à payer à la société [U] partners, prise en la personne de M. [S] [U], la société BTSG, prise en la personne de M. [L] [G] et la société FHB, pris en la personne de M. [O], ès qualités, la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 13 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne les sociétés [U] partners, BTSG et FHB, ès qualités, aux dépens, à l'exception de ceux exposés par la société Chubb european group SE, qui seront supportés par la société X-Gil Full System ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SARL Corlay, avocat aux Conseils, pour la société X-Gil Full System.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Spiral Restauration & Multi activités devenue la société X-Gil Full System à payer à la société Seafrance la somme de 63.446,82 € à titre de dommages et intérêts et d'avoir condamné la société X-Gil Full System (anciennement Spiral Restauration & Multi activités) à payer à la SCP [U] partners, prise en la personne de Me [S] [U], la Scp Btsg prise en la personne de Me [L] [G] et la Selarl Fhb, pris en la personne de Me [O], ès qualités, la somme de 171.334,37 €, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2014, Dit que les intérêts dus pour une année entière pourront être capitalisés aux conditions de l'article 1343-2 du code civil, outre frais irrépétibles et dépens ;

AUX MOTIFS QUE : « (…) Les parties étant chacune responsable de la résiliation du contrat, elles doivent supporter le dommage direct et certain que leur propre faute a causé à l'autre. Ainsi que l'a relevé le tribunal, le projet n'ayant pas réussi et le contrat cadre ayant été résilié, les dépenses et le temps passé sur le projet par les parties ont été perdus. Le préjudice de la société Seafrance en lien causal avec les manquements précédemment relevés de la société X-Gil résulte du défaut de recette de l'application Seavab prévue au plus tard le 19 décembre 2008. Le préjudice de la société X-Gil en lien causal avec les manquements de la société Seafrance est constitué par l'impossibilité pour le prestataire de mener le contrat à son terme. - Sur la demande de remboursement de sommes indues Les organes de la procédure collective de la société Seafrance réclament le paiement de 260.202,27 € TTC (238.987,32 € HT) au titre de sommes qu'elle a versées à la société XGil et qu'ils estiment indues en raison du défaut de recette de l'application. Le préjudice de la société Seafrance n'est nullement constitué, contrairement à ce que soutient la société X-Gil, d'une perte de chance d'obtenir un logiciel opérationnel, cette dernière s'étant engagée en application du contrat cadre puis du protocole d'engagement du 30 avril 2008, à mettre en service le logiciel sur un navire pilote au plus tard le 19 décembre 2008. Les sommes précitées ont été payées à la société X-Gil entre le 29 mars 2007 et le 21 novembre 2008 par la société Seafrance ainsi qu'en témoignent les factures fournies au débat, la société X-Gil ne contestant pas les avoir perçues. Ces factures qui concernent principalement des licences, des acomptes ou des prestations de formation ont donc été exposées en pure perte par la société Seafrance en raison du défaut de recette du logiciel dans les délais contractuellement prévus. Le paiement de ces sommes constitue donc un dommage subi par la société Seafrance en lien direct avec les fautes commises par la société X-Gil, ce quand bien même le contrat cadre du 11 juin 2007 n'a pas été résolu mais résilié par jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 31 décembre 2014. Il ressort de ce qui précède que la société X-Gil n'oppose pas utilement les dispositions de l'article 18 du contrat cadre selon lesquelles "le prestataire ne prendra en aucun cas la charge de l'indemnisation des dommages indirects telles que préjudice d'exploitation, pertes de bénéfice pour lesquels le client doit souscrire ses propres polices d'assurances". La société X-Gil est en conséquence condamnée à payer à la procédure collective de la société Seafrance la somme de 238.987,32 €, hors TVA, la TVA sur les factures ayant déjà été collectée et reversée à l'administration fiscale. - Sur les pénalités de retard les organes de la procédure collective réclament également le versement des pénalités prévues à l'article 5 du protocole d'engagement en date du 30 avril 2008 pour un montant de 85.296,83 € HT soit 102.355,95 € TTC. Selon l'article 5 du protocole précité, "une pénalité forfaitaire d'un montant de 50.000 € HT sera à la charge du prestataire si ce dernier ne respectait pas l'échéance inscrite au planning au titre de la recette de la solution globale pour le navire pilote. Pour chaque semaine de retard constatée au-delà de la date prévue au titre de la recette de la solution, le prestataire consent à verser un montant de 1.500 € HT par semaine, cette pénalité venant s'incrémenter de 10 % par semaine complémentaire à partir de la 7eme semaine jusqu'à prononciation de la recette de la solution globale pour le navire pilote..." A supposer que le protocole précité qui "vise à déterminer l'ensemble des droits et devoirs liant le prestataire et le client en vue de garantir à ce dernier la livraison d'une solution logicielle sur le périmètre de son activité ventes à bord, dans les nouveaux délais convenus par les deux parties" forme avec le contrat cadre du 11 juin 2007 un ensemble contractuel indivisible de sorte que la résiliation de l'un entraîne la résiliation de l'autre, celle-ci n'est pas de nature à faire obstacle à l'application des pénalités contractuellement prévues par les parties en cas de non-respect des délais prévus pour la recette de l'application en cause antérieurement à la résiliation du contrat, qui constitue une réparation du dommage subi par la société Seafrance en raison du défaut de recette du logiciel par le prestataire, aucune disposition du protocole ne soumettant la mise en oeuvre de ces pénalités au paiement des lots 10, 11 et 12 par la société Seafrance, contrairement à ce que soutient la société X-Gil. Il sera en conséquence alloué à la procédure collective de la société Seafrance la somme de 102.355,95 € TTC réclamée par cette dernière, celle-ci détaillant clairement le calcul de ces pénalités à la date du 16 avril 2009 dans ses écritures, calcul qui n'est pas utilement contesté par la société X-Gil, les parties ayant en outre convenu d'assujettir ces pénalités à la TVA en exprimant les montants hors taxe. - Sur les surcoûts et frais Les organes de la procédure collective de la société Seafrance sollicitent l'allocation de la somme de 354.485,81 € au titre des surcoûts et frais par elle exposés en pure perte en raison des manquements de la société X-Gil, soit la mise à disposition de deux personnes pour assurer la maîtrise d'ouvrage, réclamant à ce titre les salaires qu'elle a versés durant cette mise à disposition soit un coût de 118.110,20 €, la mise à disposition d'une équipe informatique de trois personnes qui a accompagné et piloté le projet pendant 20 mois pour un coût total de 145.000 € ainsi que les coûts liés au détachement de ses salariés pendant deux mois pour procéder au processus de recettage soit 10.375,61 € de frais de déplacement Néanmoins, les salaires des personnels affectés au projet en cause auraient en tout état de cause dus être supportés par la société Seafrance qui n'établit donc pas de préjudice à ce titre en lien causal avec la faute de la société X-Gil, les appelants ne démontrant ni n'alléguant que la société Seafrance a subi un dommage en raison de l'indisponibilité de ces salariés pour accomplir d'autres tâches. S'agissant des frais de déplacement des préposés de la société Seafrance pour participer au recettage des progiciels, outre que les difficultés liées à la recette de l'application nécessitant la présence de salariés de la société Seafrance à [Localité 5] sont dues à l'attitude de la maîtrise d'ouvrage ainsi qu'il a été préalablement rappelé, seuls des documents internes à la société Seafrance, non visés par un professionnel du chiffre, sont fournis au débat pour établir ces frais qui sont contestés par la société X-Gil. Les appelants demandent également le paiement de surcoût de matériels d'un montant de 21.000 €. Néanmoins, il n'est pas démontré de lien entre l'acquisition de ce matériel et la mise en place du logiciel que devait fournir la société X-Gil. Enfin, il est sollicité la somme de 50.000 € en réparation du préjudice de la société Seafrance au titre de la désorganisation et de la perte de temps subies. Toutefois, les appelants se contentent de procéder par affirmations et les nombreuses démarches que la société Seafrance dit avoir entreprises pour mettre en place un nouveau projet avec un nouveau prestataire ne sont démontrées par aucune pièce. Les demandes au titre des surcoûts et des frais ne seront pas accueillies et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté les organes de la procédure collective de la société Seafrance de celles-ci. En conséquence, le préjudice de la société Seafrance est évalué à la somme totale de 341.343, 27 € (238.987,32 € + 102.355,95 €). - Sur les demandes de la société X-Gil - Sur les factures impayées La société X-Gil réclame le paiement de factures émises le 31 décembre 2008 pour un montant total de 142.147,88 € HT soit 170.008,90 € TTC. Ces factures correspondent à des prestations de développements spécifiques concernant les lots 10, 11 et 12 commandées par la société Seafrance et partiellement livrées au jour de la résiliation du contrat cadre par la société Seafrance. Le non-paiement de ces prestations réalisées notamment de consulting constitue un préjudice de la société X-Gil en lien avec la faute de la société Seafrance, le défaut de recette étant, ainsi qu'il a été précédemment rappelé, notamment dû à l'attitude de la maîtrise d'ouvrage. Aussi, la société Seafrance ne peut utilement opposer à la société X-Gil les dispositions de l'article 4.4 du protocole d'engagement selon lesquelles "les développements spécifiques feront l'objet de facturation déclenchée à la prononciation des recettes des lots 10, 11 et 12 identifiées au sein du planning", ni une exception d'inexécution, la société X-Gil n'ayant pu mener à son terme le projet en raison également du comportement de la société Seafrance. La demande de la société X-Gil de fixation de sa créance au passif de la procédure collective de la société Seafrance pour un montant de 170.008,90 € TTC sera accueillie, la TVA n'ayant pas été collectée en raison du non-règlement des factures par la société Seafrance. - Sur les demandes de dommages et intérêts au titre de la résiliation abusive des relations contractuelles La société X-Gil sollicite l'allocation de la somme de 401.806,62 € de dommages et intérêts au titre de la perte d'exploitation résultant de la rupture abusive des relations contractuelles par la société Seafrance par refus de recettage. Néanmoins, si le défaut de recette du logiciel est notamment dû à l'attitude de la société Seafrance, il a également pour cause le nombre d'anomalies trop élevé sur les différents lots livrés, celles-ci portant à plus de 50 % sur les fonctionnalités du progiciel standard, anomalies qui sont imputables à la société X-Gil. Cette dernière n'est donc pas fondée à invoquer une résiliation abusive du contrat par la société Seafrance. Le jugement entrepris sera confirmé en qu'il l'a déboutée de sa demande de ce chef. En conséquence le préjudice de la société X-Gil est évalué à la somme de 170.008,90 €. - Sur la compensation Il sera alloué à la procédure collective de la société Seafrance la somme de 171.334,37 € (341.343, 27 € - 170.008,90 €) après compensation entre les créances de chacune des parties, celles-ci étant responsables à part égale de l'échec du projet. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2014, date de résiliation du contrat, et la capitalisation des intérêts sera ordonnée en application de l'article 1343-2 du code civil. Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé sauf sur le montant alloué à titre de dommages et intérêts à la société Seafrance.»

ALORS QUE 1°) en cas de partage de responsabilité, le juge doit rechercher le préjudice causé à chaque partie et leurs parts respectives de responsabilité avant d'en décider la compensation partielle ou totale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que chacune des sociétés avait contribué à la mauvaise exécution du contrat, étant définitivement acquis que chacune avait contribué au dommage à hauteur de 50 % ; qu'il en résultait que chacune d'elles devait participer, à hauteur de sa propre faute, à la réparation de l'ensemble des préjudices ; en considérant que chacune devait réparation du dommage de l'autre sans tenir compte de la part contributive de chacune, définitivement retenue à hauteur de 50 %, la cour d'appel a violé les articles 1147 et 1184 dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

ALORS QUE 2°) la cour d'appel ne pouvait accorder à la Société Seafrance l'ensemble des indemnités liées au retard dans l'exécution de la prestation alors qu'elle avait constaté que « les difficultés liées à la recette de l'application nécessitant la présence de salariés de la société Seafrance à Lyon sont dues à l'attitude de la maîtrise d'ouvrage ainsi qu'il a été préalablement rappelé » ; qu'en accordant cependant à la société Seafrance sa demande sur les indemnités liées au retard, la cour d'appel a violé l'article 1147 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes formées contre la société Chubb european group (anciennement Chubb insurance company) ;

AUX MOTIFS QUE : « (…) La société Atig SA aux droits de laquelle intervient la société X-Gil a souscrit une police d'assurance RC 0070210563 auprès de la société Chubb à compter du 1er octobre 2006. Cette police d'assurance couvre la responsabilité civile professionnelle de la société X-Gil et prévoit l'application d'une franchise de 30.000 €. L'article 2 de ce contrat énumère les exclusions de garantie. Sont exclues des garanties du présent contrat notamment, les pénalités contractuelles et les pénalités de retards supportées par l'assuré à l'exception de la responsabilité civile qui aurait incombé à l'assuré en l'absence de telles stipulations contractuelles (article 2.15), les réclamations liées au retard dans l'exécution des prestations à l'exception des retards qui résultent d'un événement accidentel pour l'assuré provenant de l'un des événements suivants : décès ou incapacité totale de l'ingénieur chargé du projet, accident atteignant mes biens de l'assuré l'empêchant de poursuivre la prestation à laquelle il s'est engagé contractuellement (article 2.16), les dommages subis par les biens livrés ou par les travaux exécutés par l'assuré, et d'une façon générale tous les coûts de réparation ou de remboursement des produits, prestations ou travaux ainsi que les frais nécessaires au retrait ou la dépose-repose des produits (article 2.20), les réclamations relatives aux frais et honoraires de l'assuré (article 2.21), les dommages résultant des défectuosités connues de l'assuré ou de l'acquéreur à la livraison ou à l'achèvement des travaux (article 2.22) et les dommages causés du fait de l'inobservation par l'assuré de ses obligations contractuelles lorsque cette inobservation est due à un manque de moyens financiers de l'assuré ou à une insuffisance de personnel (article 2.28). Selon les dispositions de l'article L. 112-6 du code des assurances, "l'assureur peut opposer au porteur de la police et aux tiers qui en invoque le bénéfice, les exceptions opposables au souscripteur originaire". L'article L. 113-1 du même code prévoit que "Les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police". La société Chubb oppose à la procédure collective de la société Seafrance qui sollicite sa condamnation solidaire avec la société X-Gil ainsi qu'à la société X-Gil les dispositions des articles 2.15, 2.16, 2.20, 2.21, 2.22 et 2.26 précitées. Il résulte de ce qui précède que la société X-Gil a été condamnée à réparer le dommage subi par la société Seafrance en raison du défaut de mise à disposition de l'application dans les délais contractuels, en payant les pénalités prévues au protocole d'accord et en remboursant les sommes exposées en pure perte par la société Seafrance. L'article 2.15 exclut les pénalités contractuelles. L'article 2.20 qui constitue une clause formelle et limitée qui laisse dans le champ de la garantie le dommage causé aux tiers et exclut seulement les coûts afférents aux dommages subis par les produits livrés et les travaux exécutés ainsi que les coûts de réparation ou de remboursement des produits, prestations ou travaux effectués à l'origine par l'assuré, ne vide pas la garantie de son objet. Aussi, la société Chubb est-elle fondée à opposer les exclusions de garanties prévues au contrat et notamment aux articles 2.15 et 2.20 de la police d'assurance. Le jugement entrepris est en conséquence infirmé en ce qu'il a condamné la société Chubb à garantir la société X-Gil des condamnations prononcées contre elle. La demande de condamnation solidaire de l'assureur et de la société X-Gil par les organes de la procédure collective de la société Seafrance sera également rejetée »

ALORS QUE 1°) la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de l'arrêt cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'ainsi, en l'espèce, la cassation à intervenir sur le premier moyen en ce que la cour d'appel a condamné l'exposante à payer des dommages et intérêts en application d'une pénalité contractuelle, entraînera nécessairement la cassation de l'arrêt sur la demande en garantie de l'exposante en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

ALORS QUE 2°) la clause d'exclusion de garantie qui exclut « les dommages subis par les biens livrés ou par les travaux exécutés par l'assuré, et d'une façon générale tous les coûts de réparation de remboursement des produits, prestations travaux ainsi que les frais nécessaires au retrait ou à la dépose-repose des produits» est sujette à interprétation, ce qui exclut qu'elle soit formelle et limitée ; qu'en affirmant que cette clause est « formelle et limitée qui laisse dans le champ de la garantie le dommage causé aux tiers », la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du code des assurances.

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