8 mars 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-87.283

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:CR00383

Texte de la décision

N° H 21-87.283 F-D

N° 00383


RB5
8 MARS 2022


ANNULATION


M. SOULARD président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 MARS 2022



M. [Y] [U] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 6 octobre 2021, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 15 septembre 2021, n° 21-83.853), dans l'information suivie contre lui des chefs de tentative de meurtre en bande organisée et violences, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Dary, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [Y] [U], et les conclusions de M. Lesclous, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 mars 2022 où étaient présents M. Soulard, président, M. Dary, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [Y] [U] a été mis en examen des chefs susvisés le 28 janvier 2021 et placé en détention provisoire, sous mandat de dépôt criminel.

3. Le 23 avril 2021, il a formé une demande de mise en liberté qui a été rejetée par ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 30 avril 2021 dont il a relevé appel.

4. Cette décision a été confirmée par un arrêt de la chambre de l'instruction, en date du 10 mai 2021, qui a fait l'objet d'un pourvoi.

5. L'avocat de M. [U] a, la veille de l'audience devant la chambre de l'instruction, saisie sur renvoi de cassation, fait parvenir au greffe un mémoire par messagerie e-barreau.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable le mémoire transmis par voie de communication électronique le 27 septembre 2021 et a confirmé l'ordonnance entreprise du 30 avril 2021 ayant rejeté sa demande de mise en liberté, alors :

« 1°/ que l'article 6.3 de la convention concernant la communication électronique en matière pénale conclue le 5 février 2021 en application des articles D. 591 et D. 592 du code de procédure pénale permet à l'avocat de transmettre un mémoire au greffe de la chambre de l'instruction par la voie du réseau privé virtuel des avocats (RPVA) ; que l'identification de l'avocat réalisée lors de cette transmission par le RPVA vaut signature du mémoire par cet avocat ; que le conseil de M. [U] a transmis un mémoire au greffe de la chambre de l'instruction le 27 septembre 2021 par le RPVA, conformément aux textes et à la convention précités ; qu'en déclarant néanmoins ce mémoire irrecevable, aux motifs qu'il ne comportait aucune signature du conseil et n'était accompagné d'aucun courrier comportant cette signature, cependant que l'identification de l'avocat réalisée lors de la transmission du mémoire par le RPVA valait signature de cet avocat, la chambre de l'instruction a violé les articles 198, D. 591 et D. 592 du code de procédure pénale ;

2°/ que, subsidiairement, les juridictions qui appliquent les règles de procédure doivent éviter tout excès de formalisme qui porterait atteinte à l'équité de la procédure et notamment au droit au juge ; que constitue un formalisme excessif le fait de juger irrecevable, faute de signature, un mémoire transmis, conformément aux articles D. 591 et D. 592 du code de procédure pénale et à la convention concernant la communication électronique en matière pénale conclue le 5 février 2021, par la voie du RPVA, une telle transmission par le RPVA suffisant pourtant à garantir l'identification de l'auteur du mémoire transmis et l'authenticité de ce mémoire ; qu'en déclarant irrecevable le mémoire transmis par RPVA le 27 septembre 2021, aux motifs qu'il ne comportait aucune signature du conseil et n'était accompagné d'aucun courrier comportant cette signature, et que la convention précitée ne dispensait pas de cette formalité essentielle à l'authentification des actes concernés, la chambre de l'instruction a fait preuve d'un formalisme excessif et a ainsi méconnu l'article 6, § 1er, de la Convention européenne des droits de l'homme. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 198, D. 591 et D. 592 du code de procédure pénale :

7. Il résulte de ces textes que les mémoires produits devant la chambre de l'instruction peuvent être transmis par un moyen de télécommunication sécurisé à l'adresse électronique de ladite chambre. Il ne peut être considéré qu'un doute existe sur l'authenticité d'un mémoire non signé manuscritement, dès lors qu'il est transmis à la chambre de l'instruction selon les conditions prévues par ces textes, qui garantissent l'identité de l'auteur des documents transmis (Crim., 23 février 2022, pourvoi n° 21-86.762, publié au Bulletin).

8. Pour déclarer irrecevable le mémoire transmis par l'avocat de M. [U], par voie électronique, l'arrêt attaqué énonce que, si ce mode de transmission est autorisé, en l'espèce, le mémoire, d'une part, ne comporte aucune signature de l'avocat, d'autre part, n'est accompagné d'aucun courrier comportant cette signature.

9. Les juges en concluent que la transmission par la voie électronique telle que prévue, tant par les textes précités que par la convention de communication électronique en matière pénale ne dispense pas de cette formalité qui demeure essentielle à l'authentification des écrits concernés.

10. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés.

11. L'annulation est par conséquent encourue.




PAR CES MOTIFS, la Cour :

ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 6 octobre 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Amiens, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit mars deux mille vingt-deux.

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