2 mars 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-21.712

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:CO00137

Titres et sommaires

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (LOI DU 26 JUILLET 2005) - Liquidation judiciaire - Vérification et admission des créances - Procédure - Instance introduite devant la juridiction compétente par une partie sur invitation du juge-commissaire - Saisine du liquidateur - Recevabilité

Il résulte des articles L. 624-2 et R. 624-5 du code de commerce que l'instance introduite devant la juridiction compétente pour trancher, sur l'invitation du juge-commissaire, une contestation sérieuse dont une créance déclarée est l'objet s'inscrit dans la procédure de vérification du passif à laquelle le débiteur lui-même est personnellement partie, au titre d'un droit propre, de sorte qu'il peut être désigné pour saisir la juridiction compétente. Toutefois, toute autre partie à cette procédure, tel le liquidateur en sa qualité de représentant de l'intérêt collectif des créanciers, est recevable à saisir cette juridiction et c'est seulement en l'absence de saisine de celle-ci par l'une des parties à l'instance en contestation de créance que la forclusion prévue par le second texte précité peut être encourue par la partie désignée

Texte de la décision

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 2 mars 2022




Cassation partielle


M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 137 F-B

Pourvoi n° P 20-21.712




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 2 MARS 2022

La société Caisse de crédit mutuel de Duclair, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 20-21.712 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2020 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la proximité), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société des Deux rives, exploitation agricole à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à Mme [B] [Z], épouse [K], domiciliée [Adresse 4],

3°/ à M. [T] [K], domicilié [Adresse 1],

4°/ à M. [M] [R], domicilié [Adresse 3], pris en qualité de mandataire liquidateur à la procédure de liquidation judiciaire de la société des Deux rives,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société Caisse de crédit mutuel de Duclair, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société des Deux rives, de M. et Mme [K] et de M. [R], ès qualités, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 janvier 2022 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 10 septembre 2020), la société des Deux rives a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 14 avril 2016 et 5 octobre 2017, M. [R] ayant été désigné en qualité de mandataire judiciaire puis de liquidateur.

2. Le 30 mai 2016, la Caisse de crédit mutuel de Duclair (la banque) a déclaré, au titre de prêts, quatre créances, tant en capital restant dû qu'en intérêts calculés selon un taux effectif global (TEG), qui a été contesté. Le juge-commissaire, par une ordonnance du 18 décembre 2017, a admis les créances pour leur montant en capital restant dû et, pour le surplus, dit que la société des Deux rives soulève une contestation sérieuse et invité cette société à saisir le tribunal territorialement compétent de ses demandes formées contre la banque, et ce dans le délai d'un mois suivant réception de la notification de l'ordonnance, à peine de forclusion.

3. Le 19 janvier 2018, le liquidateur de la société des Deux rives a assigné la banque en déchéance du droit aux intérêts contractuels et en responsabilité pour inexécution de son obligation de mise en garde.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande du liquidateur, alors « que le débiteur est titulaire, en matière de vérification du passif et s'agissant notamment de l'instance devant la juridiction compétente pour statuer sur une contestation jugée sérieuse par le juge-commissaire, d'un droit propre qui n'est pas atteint par le dessaisissement ; qu'en retenant, pour déclarer recevable l'action introduite par M. [R], ès qualités, qu'il pouvait seul saisir le tribunal de grande instance territorialement compétent pour statuer sur la contestation de l'EARL des Deux rives contre la banque, nonobstant les termes de l'ordonnance du juge-commissaire du 18 décembre 2017 ayant exclusivement désigné l'EARL des Deux rives pour y procéder, dès lors que l'action ne concernait pas un droit propre de cette dernière qui était dessaisie de l'administration et de la disposition de tous ses droits par l'effet du jugement du 5 octobre 2017 ayant prononcé sa liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé les articles L. 624-2 et R. 624-5 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

5. S'il résulte des articles L. 624-2 et R. 624-5 du code de commerce que l'instance introduite devant la juridiction compétente pour trancher, sur l'invitation du juge-commissaire, une contestation sérieuse dont une créance déclarée est l'objet s'inscrit dans la procédure de vérification du passif à laquelle le débiteur lui-même est personnellement partie, au titre d'un droit propre, de sorte qu'il peut être désigné pour saisir la juridiction compétente, toute autre partie à cette procédure, tel le liquidateur en sa qualité de représentant de l'intérêt collectif des créanciers, est toutefois recevable à saisir cette juridiction et que c'est seulement en l'absence de saisine de celle-ci par l'une des parties à l'instance en contestation de créance que la forclusion prévue par le second texte précité peut être encourue par la partie désignée.

6. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er et 1015 du code de procédure civile, la décision attaquée se trouve légalement justifiée.

7. Le moyen ne peut donc être accueilli.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

8. La banque fait grief à l'arrêt de prononcer la déchéance de son droit aux intérêts pour le prêt de 44 000 euros et de lui enjoindre, au titre de ce prêt, de produire un décompte incluant les versements effectués par la société des Deux rives, de recalculer les échéances réglées avec intérêts au taux légal, et de déduire les intérêts versés depuis le début d'amortissement du prêt sur le capital restant dû, alors « que l'autorité de la chose jugée attachée à une ordonnance irrévocable du juge commissaire admettant une créance, fait obstacle à ce que le montant de cette créance puisse être ultérieurement modifié ; qu'en l'espèce, dans son ordonnance du 18 décembre 2017, le juge commissaire a admis les créances de la banque à hauteur des sommes de 332 949,62 euros à titre privilégié, et de 34 913,62 euros, 9 137,57 euros, 8 781,80 euros et 12 907,21 euros à titre chirographaire, au titre du capital restant dû relativement aux différents crédits consentis à l'EARL des Deux rives dont les prêts d'un montant de 356 000 euros et 44 000 euros ; qu'en enjoignant à la banque, au titre des prêts de 356 000 euros et de 44 000 euros dont la déchéance du droit aux intérêts était prononcée, de produire un décompte incluant les versements effectués par l'Earl des Deux rives, de recalculer les échéances réglées avec intérêts au taux légal, de déduire les intérêts versés depuis le début de l'amortissement du prêt sur le capital restant dû, la cour d'appel, qui est revenue sur le montant des créances admises au titre du principal par le juge commissaire, a violé les articles 1355, anciennement 1351, du code civil et 480 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 624-2 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

9. L'ordonnance du juge-commissaire du 18 décembre 2017 s'étant bornée à admettre la créance résultant du prêt de 44 000 euros, objet du moyen, au seul titre du capital restant dû sur celui-ci, pour la somme de 34 913,62 euros, la cour d'appel, en exigeant qu'il soit procédé au calcul des intérêts au taux légal au lieu du taux contractuel atteint par la déchéance qu'elle prononçait et que l'excédent d'intérêts payés à ce dernier taux soit imputé sur le capital restant dû, n'a pas remis en cause le montant admis de celui-ci ni, par conséquent, méconnu la chose jugée par l'ordonnance du 18 décembre 2017.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

11. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande formée par le liquidateur de la société des Deux rives en paiement de dommages-intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde au titre du prêt de 356 000 euros, et de la condamner à lui payer la somme de 250 000 euros au titre de la perte de chance résultant d'un manquement à son devoir de mise en garde, alors « que tout jugement doit être motivé ; qu'un défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, en se bornant à indiquer, pour déclarer recevable la demande formée par M. [R], ès qualités, et par les époux [K], tendant à voir reconnaître au profit de l'EARL des Deux rives une créance de dommages-intérêts au titre d'un prétendu manquement de la banque à son devoir de mise en garde relativement au prêt de 356 000 euros, qu'il ne s'agissait pas d'une demande nouvelle en cause d'appel, sans répondre aux conclusions de la banque faisant valoir que la demande était irrecevable dès lors qu'il ne s'agissait pas d'une contestation qui avait au préalable été soumise au juge-commissaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

12. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Un défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

13. L'arrêt, après avoir déclaré l'appel du liquidateur recevable, a retenu la responsabilité de la banque pour non respect de son obligation de mise en garde.

14. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la banque qui faisait valoir que la seule contestation sérieuse soulevée devant le juge-commissaire et qui avait justifié la décision de celui-ci de renvoyer les parties à mieux se pourvoir portait sur le calcul du TEG, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs , la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la Caisse de crédit mutuel de Duclair à payer à M. [R] en qualité de liquidateur judiciaire de l'Earl des Deux rives, la somme de 250 000 euros « au titre de la perte de chance pour manquement à l'obligation de mise en garde », l'arrêt rendu le 10 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne la Caisse de crédit mutuel de Duclair aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;



Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille vingt-deux signé par lui et Mme Vaissette, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de Mme Vallansan, conseiller rapporteur, empêché.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SARL Le Prado - Gilbert, avocat aux Conseils, pour la société Caisse de crédit mutuel de Duclair.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La Caisse de crédit mutuel de Duclair fait grief à l'arrêt D'AVOIR déclaré recevable la demande formée par Me [R], ès qualité de liquidateur judiciaire de l'EARL des Deux rives, D'AVOIR prononcé la déchéance de son droit aux intérêts pour le prêt de 44 0000 euros, de lui AVOIR enjoint de produire un décompte incluant les versements effectués par l'EARL des Deux rives, de recalculer les échéances réglées avec intérêts au taux légal, de déduire les intérêts versés depuis le début d'amortissement du prêt sur le capital restant dû, D'AVOIR prononcé la déchéance de son droit aux intérêts pour le prêt de 356 000 euros, de lui AVOIR enjoint de produire au titre de ce prêt, un décompte incluant les versements effectués par l'EARL des Deux rives, de recalculer les échéances réglées avec intérêts au taux légal, de déduire les intérêts versés depuis le début de l'amortissement du prêt sur le capital restant dû et de l'AVOIR condamnée à payer à Me [R], ès qualités, la somme de 250 000 euros au titre de la perte de chance pour manquement à l'obligation de mise en garde ;

ALORS QUE le débiteur est titulaire, en matière de vérification du passif et s'agissant notamment de l'instance devant la juridiction compétente pour statuer sur une contestation jugée sérieuse par le juge-commissaire, d'un droit propre qui n'est pas atteint par le dessaisissement ; qu'en retenant, pour déclarer recevable l'action introduite par Me [R], ès qualités, qu'il pouvait seul saisir le tribunal de grande instance territorialement compétent pour statuer sur la contestation de l'EARL des Deux rives contre la Caisse de crédit mutuel de Duclair, nonobstant les termes de l'ordonnance du juge-commissaire du 18 décembre 2017 ayant exclusivement désigné l'EARL des Deux rives pour y procéder, dès lors que l'action ne concernait pas un droit propre de cette dernière qui était dessaisie de l'administration et de la disposition de tous ses droits par l'effet du jugement du 5 octobre 2017 ayant prononcé sa liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé les articles L. 624-2 et R. 624-5 du code de commerce.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

La Caisse de crédit mutuel de Duclair fait grief à l'arrêt D'AVOIR prononcé la déchéance de son droit aux intérêts pour le prêt de 356 000 euros et de lui AVOIR enjoint, au titre de ce prêt, de produire un décompte incluant les versements effectués par l'Earl des Deux rives, de recalculer les échéances réglées avec intérêts au taux légal, de déduire les intérêts versés depuis le début de l'amortissement du prêt sur le capital restant dû, D'AVOIR prononcé la déchéance de son droit aux intérêts pour le prêt de 44 000 euros et de lui AVOIR de même enjoint, au titre de ce prêt, de produire un décompte incluant les versements effectués par l'Earl des Deux rives, de recalculer les échéances réglées avec intérêts au taux légal, de déduire les intérêts versés depuis le début d'amortissement du prêt sur le capital restant dû ;

ALORS QUE l'autorité de la chose jugée attachée à une ordonnance irrévocable du juge commissaire admettant une créance, fait obstacle à ce que le montant de cette créance puisse être ultérieurement modifié ; qu'en l'espèce, dans son ordonnance du 18 décembre 2017, le juge commissaire a admis les créances du Crédit mutuel de Duclair à hauteur des sommes de 332 949,62 euros à titre privilégié, et de 34 913,62 euros, 9 137,57 euros, 8 781,80 euros et 12 907,21 euros à titre chirographaire, au titre du capital restant dû relativement aux différents crédits consentis à l'EARL des Deux rives dont les prêts d'un montant de 356 000 euros et 44 000 euros ; qu'en enjoignant à la Caisse de crédit mutuel de Duclair, au titre des prêts de 356 000 euros et de 44 000 euros dont la déchéance du droit aux intérêts était prononcée, de produire un décompte incluant les versements effectués par l'Earl des Deux rives, de recalculer les échéances réglées avec intérêts au taux légal, de déduire les intérêts versés depuis le début de l'amortissement du prêt sur le capital restant dû, la cour d'appel, qui est revenue sur le montant des créances admises au titre du principal par le juge commissaire, a violé les articles 1355, anciennement 1351, du code civil et 480 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 624-2 du code de commerce.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

La Caisse de crédit mutuel de Duclair fait grief à l'arrêt D'AVOIR déclaré recevable la demande formée par Me [R], ès qualité de liquidateur judiciaire de l'EARL des Deux rives, en paiement de dommages et intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde au titre du prêt de 356 000 euros, et de l'AVOIR condamnée à payer à Me [R], ès qualités, la somme de 250 000 euros au titre de la perte de chance pour un tel manquement à son devoir de mise en garde ;

ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; qu'un défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, en se bornant à indiquer, pour déclarer recevable la demande formée par Me [R], ès qualités, et par les époux [K], tendant à voir reconnaître au profit de l'EARL des Deux rives une créance de dommages et intérêts au titre d'un prétendu manquement de la Caisse de crédit mutuel de Duclair à son devoir de mise en garde relativement au prêt de 356 000 euros, qu'il ne s'agissait pas d'une demande nouvelle en cause d'appel, sans répondre aux conclusions de la Caisse de crédit mutuel de Duclair faisant valoir que la demande était irrecevable dès lors qu'il ne s'agissait pas d'une contestation qui avait au préalable été soumise au juge-commissaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

La Caisse de crédit mutuel de Duclair fait grief à l'arrêt de l'AVOIR condamnée à payer à Me [R], ès qualités, la somme de 250 000 euros au titre de la perte de chance pour manquement à son obligation de mise en garde ;

1) ALORS QUE le devoir de mise en garde du banquier ne s'exerce à l'égard de l'emprunteur non-averti que si le prêt expose ce dernier, à raison de ses capacités financières au jour de la souscription, à un risque d'endettement excessif ; qu'en énonçant, pour retenir que la Caisse de crédit mutuel de Duclair était tenue de mettre en garde l'EARL des Deux rives au titre du prêt de 356 000 euros souscrit le 26 juillet 2013, que l'excédent brut d'exploitation de cette dernière était alors insuffisant pour rembourser les échéances de ses prêts antérieurs, les échéances de ce nouveau prêt et enfin les échéances des emprunts souscrits à titre personnel par les époux [K] pour le rachat des parts, la cour d'appel, qui a ainsi pris en considération des charges qui n'étaient pas propres à l'EARL des Deux rives mais se rapportaient aux seuls époux [K], a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;

2) ALORS QUE le devoir de mise en garde du banquier ne s'exerce à l'égard de l'emprunteur non-averti que si le prêt expose ce dernier, à raison de ses capacités financières au jour de la souscription, à un risque d'endettement excessif ; qu'en énonçant, pour retenir que la Caisse de crédit mutuel de Duclair était tenue de mettre en garde l'EARL des Deux rives au titre du prêt de 356 000 euros souscrit le 26 juillet 2013, que l'excédent brut d'exploitation de cette dernière était alors insuffisant pour rembourser les échéances de ses prêts antérieurs, les échéances de ce nouveau prêt et enfin les échéances des emprunts souscrits à titre personnel par les époux [K] pour le rachat des parts, sans rechercher, comme elle y était invitée par la Caisse de crédit mutuel de Duclair, si l'EARL des Deux rives ne bénéficiait pas, à la date de la souscription de ce prêt, d'un capital entièrement libéré de 500 000 euros, de sorte que le prêt ne présentait pas à son égard un risque excessif d'endettement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;

3) ALORS QU' un manquement de l'établissement de crédit à son devoir de mise en garde n'est caractérisé qu'en cas d'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur au jour de sa souscription, l'exposant à un risque d'endettement excessif ; qu'en énonçant encore, pour retenir un manquement de la Caisse de crédit mutuel de Duclair à son devoir de mise en garde à l'égard de l'EARL des Deux rives au titre du prêt de 356 000 euros consenti le 26 juillet 2013, qu'elle ne s'était pas assurée de l'obtention par l'EARL des Deux rives du permis de construire conditionnant la réalisation du projet financé par ce prêt, consistant dans la construction d'un bâtiment agricole, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;

4) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le préjudice né d'un manquement de l'établissement de crédit à son devoir de mise en garde consiste en une perte de chance de ne pas contracter ; qu'en se déterminant au regard d'une perte de chance pour l'EARL des Deux rives de ne pas engager la construction d'un bâtiment qui ne pourrait pas être achevé faute de financement complémentaire possible et de devoir continuer à rembourser un emprunt à perte, pour évaluer à la somme de 250 000 euros le préjudice ayant résulté du manquement retenu contre la Caisse de crédit mutuel de Duclair relativement à son devoir de mise en garde au titre du prêt de 356 000 euros souscrit le 26 juillet 2013, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;

5) ALORS, A TOUT LE MOINS, QUE le préjudice né d'un manquement de l'établissement de crédit à son devoir de mise en garde consiste en une perte d'une chance d'éviter le risque qui s'est réalisé, ce risque étant que l'emprunteur ne soit pas en mesure de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt ; qu'en se déterminant au regard d'une perte de chance pour l'EARL des Deux rives de ne pas engager la construction d'un bâtiment qui ne pourrait pas être achevé faute de financement complémentaire possible et de devoir continuer à rembourser un emprunt à perte, pour évaluer à la somme de 250 000 euros le préjudice ayant résulté du manquement retenu contre la Caisse de crédit mutuel de Duclair relativement à son devoir de mise en garde au titre du prêt de 356 000 euros souscrit le 26 juillet 2013, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil.

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