9 février 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-22.246

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:CO10122

Texte de la décision

COMM.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 février 2022




Rejet non spécialement motivé


M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10122 F

Pourvoi n° U 20-22.246




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 FÉVRIER 2022

M. [C] [M], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° U 20-22.246 contre l'arrêt rendu le 6 octobre 2020 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [B] [S], domicilié [Adresse 4], pris en qualité de liquidateur de la société Pequignet,

2°/ à M. [D] [O], domicilié [Adresse 2],

3°/ à la société Diversita, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1] (Luxembourg),

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [M], de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. [O] et de la société Diversita, et l'avis de Mme Gueguen, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller, Mme Gueguen, premier avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.


1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [M] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [M] et le condamne à payer à M. [O] et à la société Diversita la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé en l'audience publique du neuf février deux mille vingt-deux, et signé par M. Ponsot, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de M. Guérin, empêché. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. [M].

M. [M] FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué de L'AVOIR débouté de sa demande que soit dit que la société Diversita et M. [D] [O] ont commis un abus de majorité et ont violé le pacte d'actionnaires du 18 juillet 2012 en procédant à une réduction puis une augmentation de capital et de L'AVOIR débouté de sa demande que la société Diversita et M. [D] [O] soient condamnés in solidum à l'indemniser des préjudices qu'il a subis à hauteur de 600 000 euros au titre du préjudice patrimonial et 300 000 euros au titre du préjudice extrapatrimonial ;

1°) ALORS QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'il est de jurisprudence constante que la réduction de capital suivie d'une augmentation dont les nouvelles actions ne peuvent être souscrites que par un actionnaire majoritaire ayant pour effet d'exclure un actionnaire minoritaire ne constitue pas un abus de majorité dès lors qu'elle est nécessaire à la survie de la société ; que par un mémoire distinct, il est demandé à la Cour de cassation de transmettre au Conseil constitutionnel la question suivante : " L'interprétation constante de l'article 1382, devenu 1240, du code civil par la Cour de cassation selon laquelle un actionnaire majoritaire peut valablement décider, au cours d'une même assemblée générale extraordinaire, une réduction du capital à zéro et une libération de nouveaux titres de capitaux qui lui sont réservés, dès lors qu'un tel "coup d'accordéon" est nécessaire à la survie de la société, est-elle conforme à l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen lorsqu'il en résulte qu'un actionnaire minoritaire est privé de sa propriété sans recevoir une juste et préalable indemnité ? " ; que l'inconstitutionnalité de l'article 1382, devenu 1240, du code civil tel qu'il est interprété par la Cour de cassation en matière de coup d'accordéon entraînera l'annulation de l'arrêt pour perte de fondement juridique ;

2°) ALORS QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en constatant que la " société Péquignet faisait incontestablement face à un problème de trésorerie lié à une exploitation déficitaire " (p. 11 de l'arrêt) et " que l'augmentation de capital a été arrêtée à 8 500 000 euros par l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2013 et il résulte des développements qui précèdent que la libération des titres nouveaux qui en a résulté a pu valablement prendre la forme d'une compensation avec la créance détenue par la société Diversité sur la société Pequignet de son compte courant d'associé " (Ibid.), c'est-à-dire en constatant que la réduction puis l'augmentation de capital ayant eu pour effet d'exclure M. [M] n'avait pas permis d'aider la société Pequignet à faire face à son problème de trésorerie, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

3°) ALORS QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en ne recherchant pas, comme cela lui était demandé dans les conclusions d'appel de M. [M] (p. 30-31), si l'acquisition des actions de Mme [H] par la société Diversita, 47 jours avant l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2013, n'était pas de nature à démontrer que l'opération de réduction et d'augmentation de capital visait à exclure M. [M] sans l'indemniser et alors que ce dernier ne souhaitait pas quitter l'actionnariat de la société, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

4°) ALORS QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en constatant que, dans le pacte d'actionnaires du 18 juillet 2012, la société Diversita " s'est engagée en outre à ne pas transformer ce compte courant d'associé [les 5 000 000 d'euros injectés pour permettre la continuation de l'entreprise] en capital " (p. 10 de l'arrêt), sans pour autant en déduire que la société Diversita, en souscrivant des actions par compensation de son compte courant d'associés, avait commis un abus de majorité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134, ensemble l'article 1147, du code civil dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

5°) ALORS QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; que la cour d'appel a constaté que l'article 7 du pacte d'actionnaires autorisait l'acquisition d'actions par compensation à la condition que la société ait à " faire face à un défaut de trésorerie lié à une exploitation déficitaire " (p. 10 de l'arrêt) ; que pour juger que " la libération des titres nouveaux a pu valablement prendre la forme d'une compensation avec la créance détenue par la société Diversita sur la société Péquignet, née de son compte courant d'associé " (p. 11 de l'arrêt), la cour d'appel s'est contentée de relever que " la société faisait incontestablement face à un problème de trésorerie lié à une exploitation déficitaire ; que le résultat d'exploitation net de l'exercice clos au 31 décembre 2011 était de - 4 626 972 euros " (Ibid.), c'est-à-dire que la cour d'appel a uniquement constaté l'exploitation déficitaire de la société Péquignet sans pour autant que le défaut de trésorerie ne soit attesté, une exploitation déficitaire pouvant parfaitement n'entraîner aucun problème de trésorerie dès lors qu'une société dispose des fonds nécessaires pour apurer ses dettes, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

6°) ALORS, subsidiairement, QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en ne recherchant pas, comme cela lui était demandé dans les conclusions d'appel de M. [M] (p. 12), si M. [X], actionnaire et dirigeant de la société Diversita qui investissait dans la société Samep, devenue plus tard société Péquignet SA, avait pu prendre connaissance avec son équipe de tous les documents demandés, quand l'actionnaire majoritaire qui a pu prendre connaissance de tous les documents d'une société qui se prévaut d'une situation comptable et financière compromise pour voter une augmentation puis une réduction de capital ayant pour effet d'exclure un actionnaire minoritaire se rend coupable d'un abus de majorité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

7°) ALORS, très subsidiairement, QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en jugeant " qu'il ne peut être fait le reproche au commissaire aux comptes d'avoir finalement provisionné une somme de 1 238 000 euros " (p. 7 de l'arrêt), tout en constatant que les sommes finalement dues au titre de ces litiges étaient de 5 169,66 euros à la charge de la société Samep pour Mme [V] en paiement de prestations d'attachée de presse et d'une condamnation à titre provisionnel de la somme de 66 796,56 euros à la société Plastiglas pour en déduire que la réduction et l'augmentation de capital ayant eu pour effet d'exclure M. [M] de la société étaient justifiées au regard de la situation comptable de l'entreprise, quand les provisions sur litiges doivent être passées en se prenant en compte la probabilité de voir la société définitivement condamnée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article R. 123-179 du code de commerce ainsi que les articles 121-1, 121-3, 322-1 et 322-2 du plan comptable général ;

8°) ALORS, très subsidiairement, QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en jugeant que " l'avis de l'avocat sur la probabilité d'aboutissement des litiges qu'il est chargé de suivre ne relève que de l'appréciation indicative, est nécessairement aléatoire et ne dispense pas la société concernée d'apprécier l'opportunité sur le plan comptable de provisionner ceux-ci ne serait-ce que partiellement ou de porter à tout le moins une mention en annexe des comptes annuels " (p. 7 de l'arrêt), quand la provision pour litiges ne peut être effectuée raisonnablement qu'au regard d'une appréciation objective du risque de condamnations établi par un avocat ayant une expérience contentieuse, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article R. 123-179 du code de commerce ainsi que les articles 121-1, 121-3, 322-1 et 322-2 du plan comptable général ;

9°) ALORS, très subsidiairement, QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en jugeant qu'il était justifié de passer une provision à hauteur de 2 000 000 d'euros sur le bilan de 2011 pour dépréciation du fonds de commerce (p. 8 de l'arrêt), sans rechercher, comme cela lui était demandé dans les conclusions d'appel de M. [M] (p. 17), si cette écriture comptable ne présentait aucune espèce d'intérêt pour le plan de continuation, ce qui était de nature à démontrer qu'elle n'avait aucune utilité autrement que de permettre à la société Diversita d'organiser la réduction et l'augmentation de capital ayant pour effet d'exclure M. [M] de la société Pequignet, quand la dépréciation de fonds de commerce est une opération comptable délicate en ce qu'elle nécessite de comparer la valeur comptable du fonds avec sa valeur vénale, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article R. 123-179 du code de commerce ainsi que les articles 121-1, 121-3, 322-1 et 322-2 du plan comptable général ;

10°) ALORS, très subsidiairement, QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en jugeant qu'il était justifié de passer une provision à hauteur de 2 000 000 d'euros sur le bilan de 2011 pour dépréciation du fonds de commerce (p. 8 de l'arrêt), sans répondre au moyen opérant de M. [M] selon lequel le consortium Moméqa avait investi 18 000 000 d'euros afin de permettre de commercialiser le " Calibre Royal " lequel appartient au fonds de commerce Pequignet (p. 17 de ses conclusions d'appel), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

11°) ALORS, très subsidiairement, QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en jugeant que la provision de 1 400 000 euros sur les stocks en 2012 était économiquement pertinente (p. 8-9 de l'arrêt) sans répondre au moyen opérant de M. [M] selon lequel la provision sur matières premières, produits intermédiaires et finis est passé de 11% en 2010, 2011 à 42% en 2012 sans aucune raison (p. 18 de ses conclusions d'appel), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

12°) ALORS, très subsidiairement, QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en jugeant que la provision de 1 400 000 euros sur les stocks en 2012 était économiquement pertinente (p. 8-9 de l'arrêt), sans répondre au moyen opérant de M. [M] selon lequel les stocks provisionnés concernaient la ligne " Moorea " de la marque Pequignet, ligne iconique qui constituait la majorité des ventes à cette date, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

13°) ALORS, très subsidiairement, QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en jugeant que la provision de 1 400 000 euros sur les stocks en 2012 était économiquement pertinente (p. 8-9 de l'arrêt), sans rechercher, comme cela lui était demandé par M. [M] dans ses conclusions d'appel (p. 19), si l'administration fiscale n'avait pas rejeté la totalité de la provision des stocks, ce qui était de nature à démontrer que les provisions illicites sur stocks avaient été passées dans le but de permettre la réduction et l'augmentation de capital qui a eu pour effet d'exclure M. [M] de la société, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article R. 123-179 du code de commerce ainsi que les articles 121-1, 121-3, 322-1 et 322-2 du plan comptable général

14°) ALORS, très subsidiairement, QUE la résolution d'une assemblée d'associés prise contrairement à l'intérêt social, dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, constitue un abus de majorité ; qu'en jugeant qu'il a été nécessaire de céder la filiale Pequignet Japon pour un euro et qu'il fallait provision et porter en créances irrécouvrables certains avantages octroyés à cette filiale (p. 9-10 de l'arrêt), sans pour autant rechercher, comme cela lui était demandé dans les conclusions d'appel de M. [M] (p. 26-27), si le courriel de M. [K] du 13 septembre 2013 n'était pas de nature à démontrer que la filiale Pequignet Japon avait été clôturée volontairement et que la commercialisation de la marque avait été confiée à une autre société dirigée par M. [K] appelée Calibre 21, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article R. 123-179 du code de commerce ainsi que les articles 121-1, 121-3, 322-1 et 322-2 du plan comptable général.

15°) ALORS, en tout état de cause, QU'en jugeant que M. [M] a été privé de sa propriété sur les actions qu'il détenait dans la société Pequignet sans aucune contrepartie, c'est-à-dire en constatant une privation du droit de propriété de M. [M] sans pour autant ménager un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général de la communauté justifiant l'atteinte à son droit de propriété et les impératifs de la sauvegarde de ses droits fondamentaux, la cour d'appel a violé l'article 1er du protocole n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

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