26 janvier 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-86.230

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:CR00247

Titres et sommaires

INSTRUCTION - Avis de fin d'information - Présentation de réquisitions ou observations complémentaires - Délais applicables - Point de départ - Détermination - Portée

Le délai de dix jours, si une personne mise en examen est détenue, accordé aux parties qui ont indiqué qu'elles souhaitaient exercer ce droit conformément au III de l'article 175 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, pour adresser au juge d'instruction des observations complémentaires, court à compter de la date à laquelle les réquisitions leur ont été communiquées. C'est à bon droit que la chambre de l'instruction a retenu que l'avis de fin d'information ayant été notifié aux parties par courrier recommandé le 5 mai 2021 et le réquisitoire définitif, sous les mêmes formes, le 1er juin 2021, le premier délai d'un mois pour formuler des observations ou faire des demandes s'achevait le 5 juin 2021 et que le second délai pour faire éventuellement des observations complémentaires, en réponse aux réquisitions du procureur de la République, expirait le 11 juin 2021 à minuit

Texte de la décision

N° N 21-86.230 F-B

N° 00247


MAS2
26 JANVIER 2022


REJET


Mme DE LA LANCE conseiller doyen faisant fonction de président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 JANVIER 2022


M. [L] [N], M. [D] [N], M. [W] [N], M. [F] [N] et M. [U] [N], ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Reims, en date du 7 octobre 2021, qui les a renvoyés devant la cour d'assises des mineurs de la Marne, le premier, sous l'accusation d'assassinat, tentative de meurtre, le deuxième, sous l'accusation d'assassinat, complicité de tentative de meurtre, et les trois autres sous l'accusation de complicité d'assassinat et de complicité de tentative de meurtre.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Un mémoire ampliatif, commun aux demandeurs, et un mémoire en défense ont été produits.

Sur le rapport de M. Turcey, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de MM. [L] [N], [D] [N], [W] [N], [F] [N] et [U] [N], les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. [S] [Y], Mme [R] [Y] et tous autres, parties civiles, et les conclusions de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 janvier 2022 où étaient présents Mme de la Lance, conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Turcey, conseiller rapporteur, Mme Planchon, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Une information a été ouverte le 17 juin 2018 des chefs d'assassinat et tentative d'assassinat, à la suite de tirs d'arme à feu dont ont été victimes, le [Date décès 1] 2018, [B] [Y], qui est décédé de ses blessures, et M. [M] [Y].

3. L'avis de fin d'information prévu par l'article 175 du code de procédure pénale a été notifié aux parties le 4 mai 2021.

4. Le réquisitoire définitif du procureur de la République, en date du 31 mai 2021, a été communiqué par lettres recommandées, le 1er juin 2021, aux avocats des personnes mises en examen, ainsi qu'à MM. [L] [N] et [D] [N].

5. Par ordonnance en date du 15 juin 2021, les juges d'instruction ont constaté l'irrecevabilité des observations présentées par les conseils des parties le 14 juin 2021, et ordonné le renvoi devant la cour d'assises de la Marne de MM. [L] [N] et [D] [N], sous l'accusation d'assassinat et de violences aggravées, de M. [W] [N] sous l'accusation de complicité d'assassinat, violences aggravées, de M. [F] [N] sous l'accusation de complicité d'assassinat, ainsi que le renvoi devant la cour d'assises des mineurs de la Marne de M. [U] [N] sous l'accusation de complicité d'assassinat, violences aggravées.

6. MM. [L] [N], [D] [N], [W] [N], [F] [N] et [U] [N] ont interjeté appel de cette décision.





Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté les exceptions de nullité soulevées, alors :

« 1°/ que le délai de dix jours ou d'un mois ouvert au ministère public et aux parties pour présenter des réquisitions et observations complémentaires ne commence à courir qu'à l'issue du premier délai d'un mois ou de trois mois prévu par l'article 175 du code de procédure pénale, lorsque les parties se sont expressément réservées le droit de procéder à de telles observations suite à la notification de l'avis de fin d'information ; qu'il ressort des pièces de la procédure que le 5 mai 2021, un avis de fin d'information a été notifié aux parties, de sorte que celles qui s'étaient expressément réservées le droit de procéder à des observations complémentaires disposaient, pour ce faire, d'un délai de dix jours à compter du 5 juin 2021 ; qu'en rejetant l'exception de nullité qui reprochait au magistrat instructeur de ne pas avoir pris en considération, dans son ordonnance de règlement, les observations complémentaires de MM [U] [N], [W] [N], [F] [N] et [L] [N], les considérant tardives, lorsqu'elle constatait que ces observations avaient été déposées dans le délai évoqué, la chambre de l'instruction a violé les articles préliminaire, 175, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe du contradictoire ;

2°/ qu'en édictant les dispositions de l'article 175 du code de procédure pénale, modifiées par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, le législateur a méconnu sa propre compétence en affectant des droits et libertés que la Constitution garantit, en l'occurrence, les droits de la défense, le principe du contradictoire et de l'égalité des armes, et le principe d'égalité devant la loi et la justice, en ce que ces dispositions ne permettent pas d'établir clairement le point de départ du délai du délai de dix jours ou un mois, prévu au VI, offert à une personne mise en examen pour présenter des observations complémentaires, à l'aune des réquisitions rendues par le procureur de la République, de sorte que ne sont pas prévues de garanties légales suffisantes à assurer le respect de ces principes ; que consécutivement à la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, l'arrêt attaqué se trouvera privé de base légale. »

Réponse de la Cour

Sur le moyen, pris en sa première branche

8. Pour écarter le moyen de nullité de l'ordonnance de mise en accusation, tiré de ce que les observations présentées par les avocats des personnes mises en examen après la notification du réquisitoire définitif du procureur de la République ont été déclarées irrecevables par les magistrats instructeurs, l'arrêt attaqué énonce notamment que l'article 175 du code de procédure pénale, dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er juin 2019, prévoit clairement deux délais qui ne sont plus successifs mais qui peuvent, suivant les diligences plus ou moins grandes des parties et du ministère public, se suivre ou se superposer.

9. Les juges retiennent que si une personne mise en examen est détenue, il est prévu un premier délai d'un mois à compter de la notification de l'avis de fin d'information pour permettre aux parties de formuler des observations générales ou de faire des demandes ou pour permettre au parquet de prendre ses réquisitions, et un second délai de dix jours pour observations ou réquisitions complémentaires, délai partant, pour les parties, de la notification des réquisitions et, pour le procureur, de la communication des observations des parties.

10. Ils ajoutent que dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, le procureur de la République a pris son réquisitoire presqu'à l'expiration du premier délai d'un mois, les parties qui n'avaient pas cru devoir user de ce délai pour formuler des observations se voient néanmoins octroyer un délai supplémentaire de 10 jours à compter de la notification du réquisitoire.

11. Ils relèvent que l'avis de fin d'information ayant été notifié aux parties par courrier recommandé le 5 mai 2021 et le réquisitoire définitif, sous les mêmes formes, le 1er juin 2021, le premier délai d'un mois pour formuler des observations ou faire des demandes s'achevait le 5 juin 2021 et que le second délai pour faire éventuellement des observations complémentaires, en réponse aux réquisitions du procureur de la République, expirait le 11 juin 2021 à minuit.

12. Ils en concluent que c'est à bon droit que les juges d'instruction ont déclaré irrecevables, comme tardives, les observations formulées par les avocats des personnes mises en examen le 14 juin 2021, et que les observations formées les 15 et 16 juin 2021, après qu'ait été rendue l'ordonnance de mise en accusation, doivent être, pour les mêmes raisons, rejetées comme irrecevables.

13. En l'état de ces énonciations, et dès lors que le délai de dix jours, si une personne mise en examen est détenue, accordé aux parties qui ont indiqué qu'elles souhaitaient exercer ce droit conformément au III de l'article 175 du code de procédure pénale, pour adresser au juge d'instruction des observations complémentaires, court à compter de la date à laquelle les réquisitions leur ont été communiquées, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.

14. Ainsi, le moyen n'est pas fondé.
Sur le moyen, pris en sa seconde branche

15. Le moyen est devenu sans objet dès lors que la Cour de cassation a dit, par arrêt de ce jour, n'y avoir lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

16. Par ailleurs, la procédure est régulière et les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés de crime par la loi.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-six janvier deux mille vingt-deux.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.