19 janvier 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-10.741

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:CO10046

Texte de la décision

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 janvier 2022




Rejet non spécialement motivé


M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10046 F


Pourvois n°
T 19-10.741
V 19-10.743 JONCTION








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 JANVIER 2022

La société LFP, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
a formé le pourvoi n° T 19-10.741 contre un arrêt n° RG 17/08054 rendu le 18 décembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Euthenia capital SL, venant aux droits de la société Clean Sustainable Energy Spain (CSE Spain), dont le siège est [Adresse 3] (Espagne),

2°/ à la société Atradius Credito y Caution SA de Seguros y Reaseguros, dont le siège est [Adresse 1], société de droit étranger,

3°/ à la société Econerphile, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 7],

défenderesses à la cassation.

La société Econerphile, société à responsabilité limitée, a formé le pourvoi n° V 19-10.743 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Euthenia capital SL, venant aux droits de la société Clean Sustainable Energy Spain (CSE Spain),

2°/ à la société Atradius Credito y Caution SA de Seguros y Reaseguros, société de droit étranger,

3°/ à la société LFP, société par actions simplifiée,

défenderesses à la cassation.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de M. Ponsot, conseiller, les observations écrites de Me Brouchot, avocat des sociétés LFP et Econerphile, de la SCP Boulloche, avocat de la société Euthenia capital SL, venant aux droits de la société Clean Sustainable Energy Spain (CSE Spain), de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de la société Atradius Credito y Caution SA de Seguros y Reaseguros, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2021 où étaient présents M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Ponsot, conseiller rapporteur, Mme Graff-Daudret, conseiller, M. Lecaroz, avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.


Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° T 19-10.741 et V 19-10.743 sont joints.

2. Le moyen identique de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

3. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces pourvois.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne les sociétés LFP et Econerphile aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés LFP et Econerphile et les condamne à payer à la société Euthenia capital SL, venant aux droits de la société Clean Sustainable Energy Spain (CSE Spain), la somme globale de 3 000 euros, et à la société Atradius Credito y Caution SA de Seguros y Reaseguros, la somme globale de 1 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé en l'audience publique du dix-neuf janvier deux mille vingt-deux, et signé par Mme Graff-Daudret, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de M. Guérin, empêché. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen identique produit aux pourvois n° T 19-10.741 et V 19-10.743 par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour les sociétés LFP et Econerphile.

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé aux torts des sociétés LFP et Econerphile la résolution du contrat de cession signé le 27 avril 2015 avec la société Clean Sustainable Energy Spain et d'AVOIR ordonné la restitution par la société Econerphile à la société Clean Sustainable Energy Spain de la somme de 715.000 euros correspondant au prix versé avec intérêts au taux légal à compter du 4 août 2015, et capitalisation des intérêts par année échue à compter du 11 janvier 2017, et condamné solidairement les sociétés LFP et Econerphile à payer à la société Clean Sustainable Energy Spain la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS QUE pour voir confirmer le jugement qui a retenu la résolution du contrat de vente du 27 avril 2015 aux torts exclusifs de la société CSE Spain, les sociétés LFP et Econerphile soutiennent avoir obtenu l'accord de la banque BPI pour cette cession se prévalant des termes d'un courriel du 17 avril 2015 dans lequel la banque leur a indiqué « je vous confirme par le présent message que nous ne nous opposons pas à la cession des titres des sociétés-projet Biogas Invest [Localité 6], [Localité 5] et [Localité 4] sous réserve bien sûr que nous puissions achever les diligences entreprises au titre de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme ; que pour imputer à la société CSE Spain la faute à l'origine du refus de la banque BPI de donner son agrément, les sociétés LFP et Econerphile se prévalent, d'une première part, du reproche que la société SRE a adressé à la société CSE Spain dans une lettre du 5 octobre 2015 selon lequel « sur la base des éléments financiers que [la société CSE Spain] a tardé à fournir, la BPI a jugé qu'elle ne pouvait accepter le transfert des prêts… » ; qu'elles se prévalent, de deuxième part, d'une lettre du 4 août 2015 que le directeur de la banque a adressé au député [E] [O] dans laquelle elle lui indiquait « qu'il s'est trouvé que nous n'avons pas les moyens d'avoir une connaissance approfondie du repreneur. En application des dispositions légales et réglementaires, nous n'avons donc pu agréer le repreneur des trois centrales » ; qu'elles opposent, de troisième part, les suspicions qui pesaient sur la personne de M. [W] [V] qui faisait l'objet d'une fiche d'enregistrement sur la liste noire de lutte anti-blanchiment et financement du terrorisme délivrée par les autorités canadiennes le 5 juin 2015, lequel a par ailleurs été président d'une société Bi Scot dont la liquidation a été prononcée le 26 avril 2012 après qu'elle a été condamnée à payer le 23 février 2011 une somme de 90.000 euros à la banque BPI, M. [W] [V] étant enfin désigné par la société SRE dans sa lettre précitée du 4 août 2015 comme l'auteur d'une tentative de détournement de fonds au profit d'une société Euro Power Technologie qu'il détenait par le truchement du capital d'une société Soffimat ; mais que, d'abord, aux termes d'une lettre datée du 29 juin 2015, la société BPI a informé la société LFP qu'en vertu des prêts qu'elle a lui a consentis les 28 février, 1er avril, 1er mai et 27 juin 2013, [son] comité n'a pas souhaité agréer la cession intervenue et maintenir [ses] encours suite à cette opération. Dès lors, [elle entendait] procéder au remboursement par anticipation des concours portés par [l'ensemble des sociétés détenues par la société LFP] conformément à l'article "exigibilité anticipée" des contrats de prêts ; que par ailleurs, aucun lien n'est établi entre les suspicions attachées à la personne de M. [W] [V] et la représentation de la société CSE Spain, cessionnaire ; que le simple courriel de la banque BPI ne peut tenir lieu d'un agrément de la banque ; que le surplus des affirmations des sociétés LFP et Econerphile qui sont postérieures au refus d'agrément de la banque ou qui sont délivrées à des tiers ou par des tiers à l'opération de cession ne sont pas de nature à caractériser un autre motif de refus de la banque que celui tiré de la non soutenabilité des prêts en cours ; qu'ensuite, aux termes du contrat de cession du 27 avril 2015, le transfert des titres est subordonné aux conditions, stipulées au bénéfice de l'acquéreur, au point 2.2 f), de "L'absence de changement significatif défavorable (à savoir tout élément et/ou événement, fait, circonstances ou condition qui, individuellement ou ensemble, ont ou auront un effet défavorable sur l'activité, les actifs, les opérations, les perspectives ou les conditions (financières ou autres) de la société ou sur les marchés financiers", et au point 2.2 g), de "L'absence de toute action en cours ou de menace d'action, procès, procédure ou enquête, devant les juridictions françaises ou étrangères ou toute autre autorité, en vue de limiter, enjoindre, interdire ou obtenir des dommages et intérêts ou une résolution liée à l'opération en tout ou partie, qui pourrait avoir un impact négatif sur les sociétés et/ou ce qui inclut (sans que ce soit limitatif) le droit de propriété de l'acquéreur dans les sociétés ou leurs fonds de commerce, ou d'exercer de telles activités à la suite de la date de réalisation de la même manière qu'avant la date de signature des présentes" ; que dans ces conditions, au lieu de dénoncer immédiatement à la société CSE Spain le refus de la banque de son agrément à la cession qui était de nature à mettre un terme immédiat à la poursuite des activités de production d'énergie biogaz et biométhane portées par la société Econerphile et garantie par la société LFP, ce qui constituait à l'évidence une cause de résiliation ou de résolution du contrat de cession, les sociétés LFP et Econerphile l'ont mise en demeure le 31 juillet 2015 de poursuivre l'exécution du contrat, ce qui constitue une faute de nature à justifier que la résolution du contrat soit prononcée au tort exclusif des cédantes et d'infirmer le jugement de ce chef ; qu'en suite de la gravité de la faute retenue au détriment des cédantes et du préjudice qui a pu résulter notamment du délai qui a séparé la dénonciation du refus de l'agrément de l'opération de cession par la banque de la dénonciation de la résolution de l'opération par la cessionnaire, il convient de condamner les sociétés LFP et Econerphile à verser à la société CSE Spain la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

1) ALORS QUE le courriel adressé le 17 avril 2015 par la société BPI mentionnait qu'en sa qualité de banque dispensatrice de crédit, elle ne s'opposait pas à la cession des titres des sociétés-projet en cause ce qui avait conduit la société Econerphile, forte de cet accord, à signer l'acte de cession de l'intégralité des titres qu'elle détenait au capital de ces sociétés, le 27 avril 2015 ; qu'en affirmant que « le simple courriel de la banque BPI ne pouvait tenir lieu d'un agrément de la banque », pour en déduire que les sociétés LFP et Econerphile ne pouvaient invoquer un accord formel de la part de cette banque, qui aurait été ultérieurement révoqué par lettre du 29 juin 2015, la cour d'appel a dénaturé les termes et l'esprit dudit courriel en violation de l'article 1134, devenu l'article 1103 du code civil ;

2) ALORS QUE la résolution d'un contrat pour non obtention du maintien des prêts en cours est imputable à la partie responsable de la défaillance de la clause de transfert des crédits ; que dans leurs conclusions d'appel, sollicitant de ce chef la confirmation du jugement entrepris, les sociétés LFP et Econerphile avaient clairement fait valoir que la décision de la banque BPI émise dans son courrier du 29 juin 2015 de dénoncer l'accord qu'elle avait donné dans son courriel du 17 avril précédent, de ne pas s'opposer à la cession des titres des sociétés, avait pour cause exclusive les fautes commises par la société CSE Spain dans la non réalisation des conditions contractuelles relatives au transfert des prêts ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche clairement demandée, de nature à voir imputer la résolution du contrat de cession aux torts exclusifs de la société CSE Spain, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision de prononcer cette résolution aux torts des sociétés LFP et Econerphile aux motifs inopérants pris de ce que celles-ci n'auraient pas informé la société CSE Spain de la décision de la société BPI de refuser d'agréer l'opération de cession ainsi que de procéder au remboursement anticipé des prêts, au regard des articles 1134, 1178 et 1183 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016.

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